Intervention de Jean-Paul Emorine

Réunion du 17 juin 2008 à 10h00
Conseil européen des 19 et 20 juin 2008 et présidence française de l'union européenne — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Jean-Paul EmorineJean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’exprimer, au nom de la commission des affaires économiques, ma satisfaction de pouvoir aborder, dans cet hémicycle, les questions européennes et la manière dont la France se prépare à une présidence charnière, ponctuée de grands rendez-vous.

Cette présidence intervient en effet à un moment particulier pour l’Union européenne : le traité de Lisbonne, porteur d’une réforme institutionnelle sans précédent, est en cours de ratification et le calendrier européen sera marqué par le renouvellement, en 2009, des institutions européennes.

Dans ce contexte, le « non » irlandais à la ratification du traité de Lisbonne ne doit pas remettre en cause le tempo imprimé à la construction européenne. Cependant, il relance indéniablement le débat sur l’Europe politique et le sens à donner à l’avenir de l’Union européenne.

Il nous rappelle de façon impérieuse que cette construction ne peut se réduire à des documents paraphés compris des seules élites, mais qu’elle doit s’incarner à travers un projet commun ambitieux dans lequel les citoyens européens se retrouvent et auquel ils peuvent adhérer.

Le résultat irlandais ne doit pas mettre un terme aux réformes institutionnelles qui permettront à l’Union européenne de mieux fonctionner avec vingt-sept membres.

Bien au contraire, il nous appartient, sous présidence française, de redoubler de pédagogie vis-à-vis de l’opinion publique afin de lui rappeler tout ce que la construction européenne nous a apporté en termes de paix, de stabilité et de croissance économique partagée.

Au-delà de la question institutionnelle, il nous faut impérativement définir et mettre en œuvre des politiques européennes visibles dans les secteurs qui intéressent le plus les citoyens européens.

Les 19 et 20 juin prochains se tiendra, à Bruxelles, le dernier Conseil européen de la présidence slovène. Les questions économiques à l’ordre du jour concerneront principalement l’énergie et le climat, ces dossiers constituant également des priorités pour la présidence française.

Le 1er juillet prochain, la France prendra donc la succession de la Slovénie, pour un semestre marquant effectivement son retour en Europe comme une force de proposition et d’entraînement, ainsi que l’avait souhaité le Président de la République. Les priorités que celui-ci et le Premier ministre ont fixées pour le second semestre de 2008 intéressent particulièrement notre commission.

À cet égard, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite aborder plus spécifiquement trois dossiers économiques majeurs figurant à l’ordre du jour de la présidence française.

Le premier concerne le paquet « énergie-climat » et la politique énergétique européenne.

La commission des affaires économiques s’est déjà très largement mobilisée à propos de ce dossier, et ce dès la publication des propositions de la Commission européenne le 23 janvier dernier, puisqu’elle a constitué un groupe de travail sur le paquet « énergie-climat », présidé par nos collègues Marcel Deneux et Daniel Raoul.

L’ambition de la présidence française est de parvenir cette année à un accord politique sur l’ensemble de ce paquet.

Des objectifs élevés ont été fixés dans plusieurs domaines : réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020, révision du système communautaire d’échange de quotas de CO2, recours aux biocarburants, répartition entre les États membres de l’effort pour développer les énergies renouvelables.

Ce paquet est un élément clé de l’exemplarité de l’Europe, devant permettre de conforter son rôle moteur dans les négociations internationales sur le climat, en vue de la conférence de Copenhague qui se tiendra en 2009. L’Union européenne devra donc diminuer sa consommation d’énergie et augmenter la part des énergies renouvelables.

Néanmoins, tout en nous inscrivant résolument dans le cadre de la politique européenne de lutte contre le changement climatique, mes collègues de la commission des affaires économiques et moi-même souhaitons attirer l’attention de la présidence française sur la nécessité de prendre en compte la compétitivité des entreprises européennes et de faire reconnaître à l’échelon européen la spécificité de la composition du bouquet énergétique français, particulièrement sobre en carbone en raison de la production d’électricité d’origine nucléaire.

La commission des affaires économiques sera donc particulièrement attentive aux propositions de la présidence française sur ce point, car elle est convaincue du rôle important que l’énergie d’origine nucléaire peut jouer dans la lutte contre le changement climatique. Cependant, je tiens à le dire ici, la France ne pourra pas rester le « château d’eau nucléaire » de l’Europe sans que ce rôle soit effectivement pris en compte, notamment dans l’allocation des quotas.

Au-delà du paquet « énergie-climat », la présidence française fera des propositions en matière de sécurité énergétique concernant à la fois l’Union européenne elle-même et ses relations avec ses partenaires majeurs, notamment la Russie.

Pour la commission des affaires économiques, il est absolument nécessaire d’assurer une meilleure interconnexion entre les pays européens, de rendre les infrastructures accessibles à différents opérateurs et de faire bénéficier le consommateur de meilleurs prix. Toutefois, la libéralisation ne doit pas aboutir à un affaiblissement de nos opérateurs.

Le troisième paquet « énergie », présenté par la Commission en septembre 2007 et qui a fait l’objet d’une résolution du Sénat le 27 mai dernier, a été largement discuté, s’agissant en particulier de la question de la séparation patrimoniale des réseaux de production et de distribution d’énergie. Je me félicite de ce qu’un accord sur les aspects clés de la libéralisation soit intervenu lors du conseil Énergie du 6 juin dernier. Les ministres sont ainsi parvenus à un compromis sur la « troisième voie », option préconisée par la France et moins radicale que la dissociation patrimoniale, ce qui permettra d’éviter le démantèlement de nos grands groupes énergétiques.

Assurer la sécurité des approvisionnements de l’Union européenne sera également l’un des grands axes de la présidence française.

Je me réjouis que la commission des affaires économiques se soit saisie, avec d’autres commissions, de ce sujet capital dès 2006, en l’évoquant dans le rapport de la mission commune d’information sénatoriale sur la sécurité d’approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver, présidée par notre collègue Bruno Sido.

Le transport durable fera également partie des dossiers prioritaires de la présidence française, l’objectif principal étant de faire avancer les débats sur l’internalisation des coûts externes du secteur. Notre commission suivra avec attention l’important paquet « greening transport », que doit présenter la Commission européenne le 2 juillet prochain et qui vise notamment la modification de la directive « Eurovignette ». La France tentera de parvenir à un texte de conclusions lors du conseil Transports d’octobre, après le conseil informel qui se tiendra les 1er et 2 septembre prochains à La Rochelle.

L’accord sur les émissions de CO2 des automobiles, intervenu le 9 juin dernier entre le Président de la République et la Chancelière allemande, constitue une avancée importante contribuant à la réalisation de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020.

Je me félicite à cet égard de ce que, dans le cadre des réunions interparlementaires prévues sous la présidence française, nous organisions le 10 juillet prochain, avec la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, une réunion sur le thème des transports et du développement durable. L’implication de ce secteur est en effet essentielle, compte tenu des émissions de gaz à effet de serre qu’il génère.

Le deuxième dossier majeur de la présidence française concerne la politique agricole commune, la PAC.

La commission des affaires économiques suit avec attention l’actualité particulière liée au « bilan de santé » de la PAC, depuis la publication des propositions de la Commission européenne le 20 mai dernier. Elle a ainsi décidé de constituer un groupe de travail sur ce thème, convaincue qu’il ne faut pas attendre 2013 pour discuter de la réforme de la PAC, …

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