Intervention de Robert Badinter

Réunion du 17 juin 2008 à 16h00
Modernisation des institutions de la ve république — Suite de la discussion d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Néanmoins, je crois plutôt, à mesurer le fossé si large entre les proclamations de départ et les dispositions qui nous seront soumises à l’arrivée, que ce qui s’imposera probablement sera l’expression chère au Président Chirac, que l’on connaît bien : ce sera une révision qui aura fait « pschitt » !

En effet, en matière constitutionnelle, mes chers collègues, la portée d’une réforme se mesure non pas au nombre, mais à l’importance des règles adoptées, et il suffit parfois de modifier un article pour changer la nature de nos institutions. Chacun pensera à cet égard à ce qui est advenu quand le général de Gaulle a fait voter la réforme essentielle de 1962.

Le texte que l’on nous propose compte bien des dispositions. Mais il n’est pas porté remède à ce qui constitue aujourd’hui le défaut majeur de nos institutions : l’hyperpuissance du Président de la République.

Depuis 1962, depuis l’instauration de l’élection du Président de la République au suffrage universel, disposition à laquelle les Français sont d’ailleurs si attachés aujourd’hui qu’il paraît démocratiquement impossible d’y porter atteinte, nous vivons sous un régime singulier : ce que j’appellerai l’« omnipouvoir » d’un homme – peut-être demain d’une femme –, élu démocratiquement par le peuple, certes, mais qui jouit pendant son mandat de pouvoirs supérieurs, quasiment sans comparaison avec ceux de tout chef d’État ou de gouvernement d’une autre démocratie occidentale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion