Intervention de Gisèle Gautier

Réunion du 17 juin 2008 à 22h30
Modernisation des institutions de la ve république — Suite de la discussion d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Gisèle GautierGisèle Gautier :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je me réjouis que le projet de loi constitutionnelle aujourd’hui soumis au Sénat nous offre l’occasion de mieux garantir l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions de responsabilité, conformément au souhait exprimé à plusieurs reprises par le Président de la République.

En effet, l’Assemblée nationale, en adoptant un amendement présenté par Mme Marie-Jo Zimmermann, présidente de la délégation de l’Assemblée nationale aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, a introduit dans ce texte la disposition suivante : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. »

Compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, cette modification de la Constitution est aujourd’hui indispensable pour permettre au législateur d’adopter des dispositions en faveur d’une représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les diverses fonctions de responsabilité.

À l’heure actuelle, en France, les femmes ne sont que très faiblement représentées dans les instances de décision des entreprises, du secteur public, des organisations syndicales et des associations.

Je ne citerai que quelques chiffres, qui parlent d’eux-mêmes : 7 % de femmes dans les conseils d’administration et conseils de surveillance des grandes entreprises cotées en bourse, 11 % de femmes au sein des équipes dirigeantes des grandes entreprises publiques, 16 % de femmes occupant des emplois de direction dans la fonction publique de l’État, 24 % de femmes dans les conseils de prud’hommes, 35 % de femmes élues au sein des comités d’entreprise – alors que, souvent, le personnel est très majoritairement féminin dans le tertiaire et, notamment, dans les services –, 31 % de femmes parmi les présidents d’association, alors qu’elles s’investissent énormément dans la vie associative.

Face à cette situation, le Parlement avait adopté, lors de la discussion du projet de loi relatif à l’égalité salariale, en 2005-2006, des dispositions imposant le respect de proportions minimales de représentants de chaque sexe dans diverses instances : au sein des conseils d’administration et de surveillance des sociétés privées et des entreprises du secteur public, au sein des comités d’entreprise parmi les délégués du personnel, dans les listes de candidats aux conseils de prud’hommes et aux organismes paritaires de la fonction publique. Par exemple, pour les conseils d’administration, il était prévu de parvenir, dans un délai de cinq ans, à un minimum de 20 % de femmes.

Cependant, le Conseil constitutionnel, se fondant sur le respect du principe d’égalité de tous devant la loi, avait alors censuré d’office ces dispositions, alors qu’elles n’avaient d’ailleurs pas été contestées par les parlementaires qui l’avaient saisi. Conformément à sa jurisprudence antérieure, il a en effet considéré que la disposition relative à la parité introduite dans la Constitution en 1999 ne s’appliquait qu’aux élections à des mandats et fonctions politiques. Inutile de vous rappeler, mes chères collègues, à quel point nous avions, à l’époque, été déçues !

La révision constitutionnelle de 1999 a rendu possible l’adoption des lois de 2001 et 2007 relatives à la parité en politique, qui ont permis – il faut bien l’avouer – de réelles avancées pour les femmes au sein des assemblées élues et de leurs exécutifs, même s’il reste encore beaucoup à faire, notamment s’agissant de l’intercommunalité.

Le moment est donc maintenant venu de compléter la révision constitutionnelle de 1999, en élargissant la portée de la disposition favorisant l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats politiques et fonctions électives.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je me félicite du dépôt par la commission des lois d’un amendement, sur l’initiative, notamment, de M. Hyest, que je salue, tendant à inscrire à l’article 1er de la Constitution, parmi les grands principes de notre République, un principe général d’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités, tant politiques que professionnelles ou sociales. Pour ma part, je ne partage pas les propos tenus par mon prédécesseur à cette tribune, M. Doligé : je préfère cent fois qu’un tel principe soit inscrit dans le marbre de la Constitution plutôt que dans son préambule.

Le Sénat s’honorerait bien sûr de voter cet amendement qui permettra, s’il est adopté, de franchir une nouvelle étape en faveur d’une égalité qui deviendra réalité entre les femmes et les hommes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion