La formation professionnelle tout au long de la vie est aujourd’hui un principe consacré.
Dans ce contexte, comment ne pas souligner l’importance de l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, un outil de formation qui dispose d’une expérience assise sur quelque soixante années d’existence au service de la qualification des actifs dans divers métiers, de l’orientation professionnelle, de la formation professionnelle et de l’accompagnement des demandeurs d’emploi ?
Depuis 2004, la formation professionnelle des demandeurs d’emploi fait partie des domaines décentralisés et a été transférée aux régions. Or, ce secteur constitue une part importante de l’activité de l’AFPA. Environ 55 % de ses dépenses relèvent désormais du financement des régions ; pour le reste, l’AFPA est à la fois un opérateur pour le compte de l’État et un prestataire sur financements conquis.
Dans le cadre de la reconduction du « contrat de progrès » liant l’AFPA à l’État, qui s’achève le 31 décembre 2008 – c’est ce qui explique ma question –, il paraît important de préserver cet outil essentiel en matière d’orientation professionnelle, d’accès à la formation, de décentralisation maîtrisée et d’aménagement du territoire.
La question centrale est de savoir si l’AFPA doit continuer à être considérée comme un service d’intérêt général, ce que je souhaite, ou si elle doit être envisagée comme un outil spécifique représentant, à l’instar des universités, une réponse dont la déclinaison est nationale.
Il me semble important d’éviter que l’AFPA ne subisse ce que je qualifierai de « déterminisme social et géographique ». Dans ces conditions, il est essentiel de ne pas l’amputer d’une partie de sa compétence en matière d’orientation professionnelle.
En effet, l’AFPA a vocation, via son service d’orientation professionnelle, à trouver des solutions sur l’ensemble du territoire national, et cela – j’y insiste – quelle que soit l’origine géographique du stagiaire concerné.
Elle doit conserver cette prérogative, mais aussi ses personnels « psy ». Certains décideurs plaident pour que ces derniers soient intégrés au sein du service public de l’emploi, ce qui constituerait à mes yeux une erreur. En effet, cette solution éloignerait ces personnels des réseaux de l’AFPA et les priverait de leur ancrage dans les métiers ; ils se banaliseraient et se transformeraient en généralistes.
Ne serait-il pas plus simple, monsieur le secrétaire d'État, de penser les liens entre le service public de l’emploi et l’AFPA comme des relations prestataires ?
Par ailleurs, le transfert aux régions implique que la formation professionnelle s’inscrive dans une logique de marchés publics.
Or il est à craindre que la mise en concurrence n’ait des effets négatifs sur l’organisation de la formation professionnelle. Elle entraînera la suppression de la multiplicité des ressources financières pour un même stage, et par conséquent la réduction des ouvertures de stages. Elle provoquera également la disparition des secteurs de formation qui nécessitent des investissements importants, par exemple dans le secteur des travaux publics, en l’absence de garantie quant à l’ouverture des stages.
De plus, comme le code des marchés publics ne permet pas aux régions d’acheter des stages pour le compte de tiers, la collectivité n’évaluera que ses propres besoins.
Il est important que l’intervention de l’État soit maintenue dans un souci d’égalité d’accès et de péréquation. Par le biais des plans régionaux de développement de la formation professionnelle, les régions déterminent leurs priorités ; par le biais de l’AFPA, j’insiste, les besoins peuvent être mutualisés et la redistribution peut être organisée à l’échelon national.
Par conséquent, ne pourrait-il être envisagé d’exonérer l’AFPA des contraintes du code des marchés publics, en sa qualité de service d’intérêt général ?
Enfin, il convient de souligner le rôle de l’AFPA au sein d’un territoire, où elle est un véritable levier de développement économique. À l’origine, l’AFPA a été pensée comme un outil d’aménagement du territoire, et sa conception – formation et services intégrés – lui a permis d’œuvrer à la dynamisation du territoire sur lequel elle est implantée. Elle intervient comme un acteur essentiel d’aménagement du territoire, notamment dans les territoires fragiles, en contribuant à apporter des réponses à des besoins qui sont réduits aux limites administratives.
Ainsi, la région Limousin n’a pas la taille critique pour disposer des formations répondant aux seuls besoins internes. L’AFPA a pourtant su s’y développer, accompagner les mutations économiques, pratiquer une politique attractive sur des métiers porteurs et participer activement aux politiques de lutte contre le chômage et de création d’entreprises. Elle est largement ouverte au-delà des frontières régionales.
Peut-on espérer, dans le cadre de la reconduction du contrat entre l’État et l’AFPA et de la définition des objectifs visés, que soit pris en compte le rôle de l’AFPA, comme service d’intérêt général, outil d’aménagement du territoire et instrument de lutte contre le chômage ?