Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 25 janvier 2011 à 14h30
Enfants franco-japonais — Adoption de deux propositions de résolution identiques

Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, en prenant l’initiative de déposer deux propositions de résolution relatives aux enfants franco-japonais privés de lien avec leur parent français en cas de divorce ou de séparation, le Sénat se saisit d’une question aux enjeux larges et aux répercussions concrètes.

La mondialisation favorise la circulation des personnes, dont la multiplication des couples binationaux est une conséquence. Le nombre accru de séparations ou de divorces en est malheureusement le corollaire, comme le soulignait Mme Lepage.

Aujourd’hui, certains parents n’hésitent pas à déplacer de manière illicite leur enfant, allant même jusqu’à priver l’autre parent de tout contact avec celui-ci. Parmi les couples franco-japonais séparés, une trentaine de cas, monsieur Yung, ont été portés à la connaissance du Gouvernement, mais peut-être en existe-t-il davantage.

MM. Duvernois et Yung, au nombre des auteurs des deux propositions de résolution, ont parfaitement décrit la situation, ses causes, ses complexités et ses difficultés. Face au désarroi et à la douleur qu’elle engendre chez certains de nos compatriotes, nous devons apporter des réponses concrètes et concertées.

De ce point de vue, nous pouvons nous appuyer sur l’excellence des relations entre la France et le Japon, que soulignait M. del Picchia.

Nous devons travailler en confiance, dans le respect mutuel de nos traditions juridiques, en nous gardant de toute ingérence et de toute appréciation hâtive des choix de nos amis japonais.

Nous sommes décidés à obtenir des résultats concrets dans l’intérêt des enfants et de leur père, souvent français.

Les propositions de résolution s’inscrivent en cohérence avec les initiatives prises par le Gouvernement pour renforcer la coopération entre la France et le Japon dans ce domaine.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je crois que chacun d’entre nous partage le constat : face aux déplacements illicites d’enfants franco-japonais, notre coopération est aujourd’hui dépourvue des instruments juridiques adéquats.

Le Japon n’est pas partie à la convention de La Haye du 25 octobre 1980, comme l’a souligné M. Yung. Il n’est pas non plus lié à la France par un accord bilatéral de coopération judiciaire en matière civile.

En dépit des obstacles juridiques, le Gouvernement s’efforce de trouver des solutions concrètes à la situation de nos compatriotes privés de leur enfant. Il est bien évidemment à leurs côtés.

Le ministère des affaires étrangères et européennes ainsi que le ministère de la justice et des libertés suivent les cas individuels par l’intermédiaire des services diplomatiques et consulaires de la France au Japon. Nous travaillons également en concertation avec les autorités japonaises et en relation étroite avec les associations de défense des intérêts des pères français.

Pour aller au-delà d’un traitement ponctuel de chaque situation, un comité consultatif a été mis en place avec le Japon. À cet égard, je remercie MM. Duvernois et Pignard d’avoir exprimé leur reconnaissance à notre ambassadeur, qui a pris l’initiative de cette création. En effet, monsieur del Picchia, la France a été le premier pays à prendre une telle décision.

Les autorités françaises et japonaises examinent ensemble dans le cadre de cette instance les cas individuels, afin de dégager des solutions concrètes concernant l’exercice du droit de visite consulaire, le rétablissement du lien parent-enfant et la médiation familiale.

Vous l’avez tous souligné, le comité s’est réuni trois fois : aux mois de décembre 2009 à Tokyo, de juin 2010 à Paris et de décembre 2010 à Tokyo. Je tiens à souligner cette régularité. La quatrième réunion doit avoir lieu au mois de juin prochain à Paris.

Le ministère des affaires étrangères et européennes a associé le ministère de la justice et des libertés aux travaux de ce comité, dont nous espérons élargir les moyens d’action, en liaison avec les autorités japonaises.

Mesdames, messieurs les sénateurs, des initiatives ont été prises. Nous avons l’espoir qu’elles porteront rapidement leurs fruits au bénéfice des parents qui se trouvent en situation de détresse.

Aujourd’hui, vous souhaitez aller plus loin.

Pour approfondir la coopération, nous encourageons le gouvernement japonais, ainsi que tous les autres pays non signataires, à adhérer à la convention de La Haye sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants.

Aujourd’hui, le dialogue progresse entre la France et le Japon. Des efforts importants ont été réalisés pour rapprocher nos positions.

M. Duvernois l’a mentionné, des rencontres ont eu lieu entre les ambassadeurs des pays les plus concernés et les autorités japonaises. Mon prédécesseur avait d’ailleurs évoqué cette question lors de sa dernière visite au Japon au mois de mars dernier.

Des rencontres et séminaires ont également permis de sensibiliser les milieux décideurs japonais aux enjeux réels et au mode de fonctionnement de la convention de La Haye.

Certains d’entre vous l’ont indiqué, des signaux positifs sont à relever. Je pense à la position de l’ancien Premier ministre japonais. Le nouveau ministre de la justice du Japon a marqué sa volonté de faire du dossier de l’adhésion de son pays à la convention de La Haye l’une de ses priorités.

Nous sommes donc en phase avec nos amis japonais.

Les présentes propositions de résolution marquent un pas de plus dans le dialogue engagé entre la France et le Japon.

Ces textes font écho, dans leur esprit et dans leur lettre, à la résolution votée au mois de septembre dernier par la chambre des représentants américaine. Notre pays n’est donc pas le premier à prendre une telle initiative.

Ces textes s’inscrivent également dans le prolongement des actions menées et dans la cohérence avec notre volonté commune de convaincre le Japon d’adhérer à la convention de La Haye, madame Laborde.

La question que tout le monde se pose finalement aujourd'hui est la suivante : quelles sont les voies les plus efficaces de ce dialogue ?

M. du Luart, pour sa part, préconise une démarche plus discrète, si je puis dire, à savoir la voie diplomatique.

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