Intervention de Marie-Thérèse Hermange

Réunion du 25 janvier 2011 à 22h10
Assistance médicalisée pour mourir — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Marie-Thérèse HermangeMarie-Thérèse Hermange :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes tous venus ici avec notre interrogation face à la dernière heure. Et non sans une certaine impudeur, je monte à cette tribune avec ce que j’ai vécu et ce que je n’ai pas vécu, avec mes convictions et mes certitudes, mais aussi avec mes doutes. Ce sont les unes et les autres que je voudrais partager avec vous en cet instant.

Ma première certitude est que, lorsque l’épreuve arrive, alors la belle assurance se fissure : ma conscience a peine à répondre en raison du refus de porter le fardeau au détriment de mon petit confort personnel.

Mes chers collègues, il m’est impossible aujourd’hui de jurer devant vous que cette demande d’aide active à mourir, je ne la formulerai en aucun cas pour moi-même ou pour un de mes proches lorsqu’une telle difficulté me concernera. §Du reste, pourquoi ne le ferai-je pas si la loi me l’autorise, si le droit-créance ainsi créé fait peser sur tous le devoir de le rendre effectif, déplaçant les interdits anthropologiques qui fondent notre société ?

Je sais également que le coma ou la maladie peuvent me rendre étrangère à moi-même ou me rendre étrangers ceux que j’accompagne à la fin de leur vie. Pour autant, l’enjeu, ici, c’est le rapport d’humanité, et plus encore de fraternité, qui doit subsister, même quand le malade n’est plus que l’ombre de lui-même. Comment puis-je rester le frère, la sœur en humanité de celui qui me dit ne plus être lui-même ou craindre de ne plus l’être ? Et pour qu’il soit présent à lui-même, doit-il aligner son existence sur mes propres critères de dignité ou, au contraire, dois-je réajuster le sens de mon existence pour percevoir ce qui, chez lui ou chez elle, reste fondamentalement humain ?

La dignité n’a-t-elle pas, plutôt, une dimension ontologique accordée à chaque homme dans sa singularité, comme l’a proclamé la Déclaration universelle des droits de l’homme ?

Affirmer le contraire ou juger de l’identité ou de l’humanité de l’autre à l’aune de critères médicaux, n’est-ce pas ouvrir la voie à une discrimination entre les êtres humains, qui toucherait avant tout les plus vulnérables ?

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