Je vais ajouter quelques éléments à l’explication que vient de donner Mme Borvo Cohen-Seat sur l'amendement n° 8, auquel cet amendement n° 53 est identique.
Bien que l’amendement de M. Lecerf dont il a été question ait substantiellement modifié la procédure d’appel de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prononçant la mainlevée d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement, plusieurs de nos craintes restent fondées.
Je rappelle que, dans la première mouture du texte, le représentant de l’État et le directeur d’établissement disposaient d’un pouvoir d’appel par voie d’injonction au procureur. Ce mécanisme, historique, traduisait parfaitement la défiance du Gouvernement à l’encontre de ses magistrats, permettant un contrôle indirect des décisions rendues par le juge des libertés et de la détention, et constituait une atteinte au principe ordonnateur de toute démocratie : la séparation des pouvoirs.
Si nous nous réjouissons de la suppression de ce dispositif, nous nous opposons toujours au caractère suspensif de l’appel formulé par le procureur. En effet, dès lors que l’appel est suspensif, le patient est maintenu en hospitalisation complète.
En d’autres termes, alors que le juge des libertés et de la détention aurait prononcé une mainlevée de la mesure de soins sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète, après avoir mené une analyse du dossier et une investigation approfondies, le patient pourrait néanmoins rester enfermé dans un hôpital psychiatrique.
Ces dispositions encourraient un fort risque d’inconstitutionnalité dans la mesure où elles reviendraient à maintenir en hospitalisation complète, pendant une durée allant jusqu’à quatorze jours, une personne dont le juge des libertés et de la détention a estimé qu’elle devait être remise en liberté.
Ce serait, une nouvelle fois, méconnaître la valeur constitutionnelle de la liberté individuelle, ainsi que l’article 66 de la Constitution, qui dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu ». Il faut croire que le Gouvernement et la majorité n’apprennent rien de leurs erreurs !
Le Conseil constitutionnel – nous aurons l’occasion d’y revenir – par deux décisions du 9 juin, respectivement relatives au projet de loi sur l’immigration et à une question prioritaire de constitutionnalité qui concerne le présent projet de loi, vient de censurer plusieurs articles au motif qu’ils violaient l’article 66 de la Constitution.
Or, pour satisfaire leurs préoccupations sécuritaires, que font le Gouvernement et la majorité ? Ils ajoutent un nouveau dispositif qui porte atteinte à l’article 66 de la Constitution…