Intervention de Guy Fischer

Réunion du 16 juin 2011 à 14h45
Soins psychiatriques — Article 3

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Notre groupe est opposé au fait que l’on puisse imposer des soins sans consentement aussi lourds que ceux dont nous parlons – à savoir l’hospitalisation complète – à des personnes atteintes de troubles mentaux au prétexte qu’elles porteraient atteinte à l’ordre public.

Cette notion d’ordre public peut être sujette à interprétations et nous ne sommes jamais à l’abri d’abus en la matière. En tout cas, la volonté d’affichage du Gouvernement est ici manifeste.

Si cet article 3 est adopté en l’état, le préfet pourra désormais décider, sans avoir reçu la moindre formation médicale préalable, de la forme de la prise en charge d’une personne malade. Je vous renvoie à ce que nous avons dit en première lecture concernant le traitement sécuritaire de la maladie, voire l’assimilation de celle-ci à la dangerosité. Les malades mentaux seraient des criminels ou des délinquants en puissance… Nous ne pouvons que dénoncer cet amalgame !

Nous avons déjà débattu de ces questions, mes chers collègues, mais vous n’avez pas voulu nous entendre. Or un fait nouveau que vous ne pouvez ignorer est intervenu, à savoir la décision du Conseil constitutionnel rendue le 9 juin 2011 – elle est donc toute récente –, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité. Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a considéré que les articles L. 3213-1 et L. 3213-4 du code de la santé publique étaient contraires à la Constitution.

Il s’agit donc maintenant de savoir si la nouvelle rédaction que vous proposez est ou non constitutionnelle. Selon nous, la réponse est non.

En effet, le Conseil constitutionnel considère comme non conforme à la Constitution le fait que l’hospitalisation complète puisse être renouvelée pour des périodes successives de six mois.

À cet égard, le treizième considérant de la décision précitée est clair : « Considérant que la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible ; que les motifs médicaux et les finalités thérapeutiques qui justifient la privation de liberté des personnes atteintes de troubles mentaux hospitalisées sans leur consentement peuvent être pris en compte pour la fixation de ce délai ; que, pour les mêmes motifs que ceux retenus dans la décision du 26 novembre 2010 susvisée, les dispositions de l’article L. 3213-4, qui permettent que l’hospitalisation d’office soit maintenue au delà de quinze jours sans intervention d’une juridiction de l’ordre judiciaire, méconnaissent les exigences de l’article 66 de la Constitution ».

C’est bien, dans l’actuelle version de l’article L. 3213-4, le caractère quasi automatique du renouvellement des périodes de privation de liberté, puisque le juge des libertés et de la détention est complètement « évacué », qui pose problème. Or il continuera de le faire avec la rédaction de l’article 3 que vous proposez : cette nouvelle version risque donc de donner lieu à une nouvelle question prioritaire de constitutionnalité, ce qui nous amènera de nouveau à travailler dans l’urgence et sous la pression.

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