Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 15 février 2007 à 15h10
Communication du médiateur de la république

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

Monsieur Delevoye, le rapport d'activité que vous venez de remettre à notre assemblée témoigne de la place indispensable que le Médiateur de la République a su prendre, année après année, dans le paysage administratif et juridique français.

Observatoire des plaintes, centre d'information et d'orientation, force de proposition, telles sont les trois facettes complémentaires d'une institution, qui jouit, année après année, - quoi qu'en disent certains médias - d'une notoriété croissante auprès de nos concitoyens.

Tout d'abord, monsieur le Médiateur de la République, les chiffres qui se trouvent dans votre rapport confirment la grande notoriété de votre institution. Celle-ci se mesure à l'augmentation du nombre d'affaires dont vous êtes saisi et au succès de vos médiations. En 2006, le nombre d'affaires transmises au Médiateur de la République, services centraux et délégués, a progressé de 4, 5 % avec près de 63 000 affaires reçues.

Les médiations engagées dans ce cadre, tant par les services centraux que par vos délégués, se révèlent être particulièrement efficaces, puisque 80 % d'entre elles aboutissent à un accord. Je tiens à vous féliciter de ces résultats probants, qui témoignent de votre grande magistrature d'influence.

Cette notoriété, vous la devez, d'abord, aux qualités propres de votre institution. La médiature est un lieu d'écoute, de dialogue et d'échange très apprécié des Français.

J'ai relevé que plus de la moitié des affaires traitées par vos services sont des demandes d'information et d'orientation formulées par des personnes déconcertées par la complexité des textes et de l'organisation administrative. Nous les comprenons, nous le sommes aussi nous-mêmes quelquefois !

Vous constatez d'ailleurs que, bien souvent, l'explication vaut résolution du problème. En effet, les personnes acceptent de moins en moins une décision qui leur paraît arbitraire. Expliquer pourquoi telle administration a pris telle position ou pourquoi la justice a statué de cette façon permet de faire comprendre - à défaut de faire accepter - que la décision est bien conforme à la loi et aux droits des personnes. Ainsi précisez-vous, dans votre rapport, que « nombre de réclamants qui pensaient avoir raison remercient régulièrement les délégués et les services du Médiateur de la République de leur avoir expliqué en quoi ils avaient tort, ce que personne n'avait fait auparavant ». L'administration française doit faire des progrès !

Ce travail pédagogique fondamental, qui pallie bien souvent l'application insuffisante de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, ne pourrait être accompli sans la présence sur tout le territoire des délégués du Médiateur de la République, dont je veux saluer ici le dévouement. Au nombre de 270, ils traitent 90 % des affaires transmises à votre institution et assurent proximité, efficacité et rapidité, notamment au profit des plus vulnérables et des moins bien informés de nos concitoyens. Les délégués du Médiateur sont présents non seulement dans les préfectures, mais également au coeur des quartiers sensibles, dans les structures de proximité et, depuis 2005, auprès des détenus.

Anciens fonctionnaires, cadres d'entreprise à la retraite, jeunes doctorants, les délégués ont tous une solide formation juridique ou une expérience du secteur public.

Instance d'écoute et de dialogue, la médiature est aussi une caisse de résonance des problèmes rencontrés par les Français dans leurs relations avec l'administration. Grâce à une organisation déconcentrée, au plus près des réalités du terrain, votre institution fait office d'observatoire des dysfonctionnements administratifs.

Monsieur le Médiateur de la République, votre rapport mentionne un cas intéressant d'application contestable d'une loi votée par le Parlement. Il s'agit de l'allocation logement, sujet sur lequel je ne m'étendrai pas. Grâce à votre intervention, le Parlement a baissé le seuil à partir duquel cette allocation est versée, le ramenant de vingt-quatre euros à quinze euros. C'est un progrès et cela correspond à l'esprit de la loi. Il arrive que les décrets la contredisent !

Comme vous le mentionnez fort opportunément dans votre rapport annuel, « derrière une réclamation individuelle se profile bien souvent un problème qui appelle une réponse d'ordre collectif ». Les dizaines de milliers de réclamations, comme les demandes d'information et d'orientation, reçues chaque année vous placent à un poste d'observateur des réalités sociales, qui alimente toute réflexion utile en vue d'une amélioration législative.

Aussi agissez-vous comme une force de proposition, comme vous y invite la loi fondatrice du 3 janvier 1973. Vous êtes ainsi animé par le souci de proposer des réformes qui font évoluer les procédures et les pratiques administratives vers plus d'équité et plus de simplicité.

Parmi les propositions formulées, j'en ai relevé plusieurs.

Tout d'abord, monsieur le Médiateur de la République - et vous avez largement développé ce point au cours de votre communication -, vous émettez des réserves quant à la procédure actuellement suivie dans le domaine des infractions au code de la route.

Les amendes visent à dissuader les contrevenants d'exercer un recours en imposant une très forte majoration en cas de non-paiement dans un délai de quarante-cinq jours. Cette procédure restreint les possibilités de contestation devant le juge en énonçant le principe selon lequel le paiement de l'amende éteint l'action publique, mais équivaut aussi à une reconnaissance de l'infraction. Dans les cas les plus graves, la recevabilité de la réclamation est soumise à l'obligation préalable de consigner le montant de l'amende réclamée.

À ces limitations à l'accès au juge prévues par les textes s'ajoute la pratique, suivie par les officiers du ministère public, qui consiste à statuer directement sur le bien-fondé des réclamations qui leur sont adressées, sans les soumettre à la juridiction compétente. C'est pourquoi vous proposez de mieux garantir l'accès au juge en matière d'infractions au code de la route. D'ailleurs, certains praticiens du droit l'ont très bien compris et gagnent à tous les coups !

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