Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 15 février 2007 à 15h10
Communication du médiateur de la république

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, président de la commission des lois :

Cette situation n'est pas de nature à assurer l'égalité de tous les citoyens devant la justice.

Soucieux de garantir l'effectivité du droit de la consommation, vous proposez, par ailleurs, de revenir sur la jurisprudence de la Cour de cassation, qui refuse au juge la possibilité de soulever d'office un moyen de droit tiré de la violation de ce droit. Cette possibilité permettrait de pallier la méconnaissance du droit de la consommation qu'ont les consommateurs ne recourant pas aux services d'un avocat devant les juridictions d'instance ou de proximité.

J'ai également retenu votre proposition visant à simplifier les règles de représentation devant les juridictions civiles où le ministère d'avocat n'est pas obligatoire.

Afin de répondre aux principes d'accessibilité et de proximité qui caractérisent le fonctionnement de ces juridictions, il y aurait lieu de compléter, comme vous le proposez et comme le suggère également l'Association nationale des juges d'instance, l'article 828 du nouveau code de procédure civile, en ajoutant à la liste des personnes habilitées à représenter une partie les concubins et les partenaires d'un PACS. §En effet, aujourd'hui, seuls les conjoints mariés peuvent le faire. Je note d'ailleurs avec satisfaction que, sur cette proposition de réforme, le ministre de la justice comme le ministre délégué à la réforme de l'État ont donné leur accord.

Enfin, monsieur le Médiateur de la République, je tiens à saluer votre intervention vigilante dans le domaine sensible des fichiers STIC et JUDEX. La commission des lois est toujours très attachée à ce problème. Ces fichiers, qui recensent les infractions constatées respectivement par la police et la gendarmerie, peuvent être consultés dans le cadre d'une enquête préalable à une décision administrative en vue de l'accès à certains emplois, notamment dans les secteurs de la sécurité et de la défense.

Vous indiquez avoir reçu, tout au long de l'année 2006, un nombre important de réclamations contestant la mise à jour de ces fichiers au regard des suites judiciaires. C'est pourquoi vous avez opportunément proposé une amélioration des conditions de transmission des suites judiciaires par les parquets et la mise en place de garanties pour les citoyens susceptibles de faire l'objet d'une enquête administrative donnant lieu à la consultation des fichiers STIC et JUDEX. Je crois savoir que le ministère de l'intérieur envisage une refonte complète de ces fichiers.

Monsieur le Médiateur de la République, ce bilan flatteur de votre action ne saurait nous interdire de réfléchir aux voies et moyens propres à conforter et à pérenniser votre statut.

En qualité de rapporteur du projet de loi organique relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats, je me garderai d'évoquer la divergence actuelle entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur le rôle du Médiateur de la République pour transmettre des réclamations de citoyens portant non pas sur le dysfonctionnement de la justice - cela relève déjà de votre mission - mais sur des faits constituant des fautes disciplinaires.

En tout état de cause, vous le soulignez vous-même dans votre rapport, « ce n'est pas tant l'extension du champ de compétences du Médiateur de la République qui est en cause que l'urgence de rendre l'institution judiciaire plus transparente, plus accessible et plus humaine. C'est le rétablissement entre la justice et les justiciables d'une confiance indispensable à la démocratie française ».

À trop mélanger les fonctions que vous seriez amené à occuper, monsieur le Médiateur de la République, on risque de compromettre l'excellente réputation dont jouit l'institution que vous servez.

Lors du débat sur l'examen des plaintes des justiciables, notre assemblée a eu l'occasion de réaffirmer son attachement à l'ouverture de la saisine du Médiateur de la République à l'ensemble des citoyens, tout en préservant la possibilité d'une saisine par l'intermédiaire d'un parlementaire. Ces deux voies sont, en effet, complémentaires. Je tiens à rappeler que cette proposition figure dans les recommandations formulées au mois de juin 2006 par l'Office parlementaire d'évaluation de la législation - composé à parts égales de députés et de sénateurs -, dans le rapport de M. Patrice Gélard sur les autorités administratives indépendantes.

À court terme, une autre évolution se dessine, que vous avez évoquée : le contrôle extérieur des lieux privatifs de liberté. Comme chacun le sait, la France va prochainement ratifier le protocole à la Convention contre la torture de l'ONU et devra mettre en place, dans un délai de douze mois, un dispositif indépendant de contrôle des lieux d'enfermement. Le Conseil de l'Europe recommande aux États membres de conférer cette prérogative aux ombudsmans ; en France, il serait envisagé de la confier au Médiateur de la République.

Vous le savez, je suis particulièrement attentif à ces questions. J'ai moi-même dénoncé les conditions d'incarcération, à l'occasion des travaux menés avec mon collègue Guy-Pierre Cabanel, en juin 2000, dans le cadre d'une commission d'enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France. Nous devons réfléchir à l'instauration d'un réel contrôle général des prisons, comme nous l'avions préconisé, à l'époque, dans notre rapport.

En conclusion, monsieur le Médiateur de la République, votre mission paraît plus que jamais essentielle dans notre société, qui aspire à un droit accessible et à une administration respectueuse des droits fondamentaux. Votre institution contribue ainsi à renforcer nos services publics, dont chacun reconnaît la qualité et le rôle essentiel pour notre cohésion sociale.

Soyez assuré, monsieur le Médiateur de la République, du soutien et de l'attention que la commission des lois et le Sénat tout entier portent à votre action.

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