Je vous avouerai ma surprise que des sénateurs se plaignent de voir la Haute Assemblée enrichir un texte en adoptant des amendements des commissions, certes, mais aussi de l'opposition : de mémoire, monsieur Repentin, vingt-quatre ! Le travail fourni par les différents groupes, y compris de la majorité, a été extrêmement important. C'est probablement la démonstration, monsieur Repentin, que le Gouvernement n'estime pas être le principal producteur dans ce domaine, domaine de partage, de partenariat, de respect de l'autre. Il n'y a pas un acteur majeur.
Nous avons demandé le retrait d'un certain nombre d'amendements afin que les points soulevés puissent être soumis aux partenaires sociaux du 1 %, à l'Union sociale pour l'habitat, à un certain nombre d'associations. Parfois, la demande de retrait, notamment en matière d'écologie, a été motivée par le fait que des sujets techniques étaient abordés qu'il fallait expertiser et, monsieur Desessard, vous avez accédé à ces demandes : il était donc clair que nous ne refusions pas les amendements concernés. Nous travaillons sur un sujet d'une très grande complexité, et nous devons faire preuve d'une grande passion en même temps que de beaucoup d'humilité et de respect des autres.
Voilà un peu moins d'un an était discuté le plan de cohésion sociale et, il y a deux ans et demi, le plan de rénovation urbaine. Les commentaires étaient déjà les mêmes : aucune remarque sur le fond, en réalité, sauf pour nous demander de faire plus encore ou pour nous faire des procès d'intention. On nous reprochait des effets d'affichage, on soupçonnait que le ministre n'aurait pas les moyens de ses ambitions et que le plan de rénovation urbaine ne marcherait pas parce qu'il faudrait que tout le monde soit d'accord et que ce ne serait jamais le cas...
Dans votre explication de vote, monsieur Repentin, vous n'avez rien contesté au fond, car vous savez bien que l'essentiel des mesures indispensables pour accélérer le développement du logement et notamment du logement social figure dans le projet de loi. Sans doute celui-ci connaîtra-t-il des évolutions, car la vie est faite de changements, et que d'autres textes seront indispensables. Mais, pour l'heure, vous savez tous très bien que tout y est.
Deux grandes lois ont été récemment votées. Le plan de rénovation urbaine a mobilisé pour nos quartiers entre 20 et 30 milliards d'euros, gérés par tout le monde. Le volet « logement » du plan de cohésion sociale a fixé pour objectif le doublement de la construction de logements sociaux en trois ans, le triplement en cinq ans, l'État s'engageant notamment sur les plans budgétaire et fiscal. Nous sommes au rendez-vous, et nous y sommes à l'heure.
Aujourd'hui, parce que la vie est complexe et changeante, un certain nombre de mesures complémentaires vont être votées.
D'abord, un pacte est conclu. L'État va rapidement libérer des terrains, pour 20 000 logements. Les taux d'intérêt du logement social étaient plus chers que ceux du logement privé : était-ce admissible ? Nous les avons réduits. La durée des prêts sur trente-cinq ans et sur quarante ans est portée à cinquante ans, et nous inventons le prêt d'accession foncière sur cinquante ans. Des ordonnances ont été publiées sur les logements insalubres et sur les hôtels meublés dangereux. Nous avons débloqué 50 millions d'euros pour les dépenses immédiates... Bref, un ensemble de mesures rapides et opérationnelles ont été prises, sur le plan réglementaire, en faveur du logement social.
Certains éléments relèvent du domaine législatif. Tout le monde était conscient du problème foncier et regrettait la disparition de l'État : les opérations d'intérêt national et les programmes d'intérêt général sont relancés. Surtout, nous assistons à une révolution sociale à propos de la plus-value réalisée lorsqu'une commune décide d'étendre les terrains constructibles. Certes, on peut se demander pourquoi le partage n'est pas plus favorable aux communes. Mais, jusqu'ici, cela n'existait pas ! C'est la première fois que, dans le droit fiscal français, une plus-value est partagée, même si la rédaction, pour des raisons techniques, a retenu une assiette directement foncière, de 10 % sur les 66 %.
Cette révolution est bien en marche ! La possibilité d'augmenter la taxe sur les terrains constructibles non bâtis était demandée, la possibilité pour les communes de modifier la taxe locale d'équipement était demandée : c'est désormais chose faite. Et si, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez d'autres propositions à formuler en deuxième lecture, le Gouvernement est preneur !
Quant à la question des logements vacants, la taxe était mal appliquée : nous sommes en train d'y remédier, et l'aide à la remise sur le marché des logements vacants passe à deux fois 30 %.
L'incitation Robien à l'investissement dans le secteur locatif social avait produit des effets positifs, mais tout le monde s'accordait à reconnaître qu'il fallait désormais le recentrer sur quelques territoires et, surtout, lancer un nouveau produit visant le logement conventionné sous plafond de ressources. C'est chose faite.
Était également réclamée depuis vingt ans l'amélioration de l'accession sociale à la propriété, dont un outil majeur est l'application dans les zones de rénovation urbaine - la France en compte 600 - de la TVA à 5, 5 %. L'État va faire cet effort massif. Enfin, le volonté d'accélérer la construction est partagée par tous et conduit à l'exonération de TFPB durant vingt-cinq ans, intégralement compensée de quinze à vingt-cinq ans et en accéléré dès la première année pour les cinq ans qui viennent.
L'ensemble de ces trois textes, qu'on le veuille ou non, constitue probablement le dispositif en faveur du logement social le plus puissant budgétairement, administrativement, juridiquement et fiscalement depuis très longtemps, peut-être depuis la loi Loucheur.
Je comprends l'embarras de certains, prisonniers de leurs idées reçues : la droite, ce serait l'économie et la gestion, l'autorité de l'État, la sécurité, mais pas le logement et encore moins le logement social. La vérité de ces trente dernières années doit nous faire conclure à l'inverse, puisque la grande période du logement et du logement social a été le fruit, voilà vingt ans, du plan de relance Chirac. Les commentaires sont un peu gênés, parce que le monopole du coeur est ébréché !
Très sincèrement, mesdames, messieurs les sénateurs de l'UMP, la loi qui a suscité vos inquiétudes a eu des vertus réelles. Il est vrai néanmoins qu'elle a été mise au point dans des conditions de panique parce que la construction de logements sociaux était alors dans un tel état qu'il a fallu trouver un texte médiatiquement fort. J'ai entendu vos demandes dans le sens de taxes plus fortes pour les francs récalcitrants mais, en revanche, d'une plus grande justice pour ceux qui font leur devoir.
Nous sommes parvenus au terme de ce débat. Voilà très longtemps qu'aucun dispositif aussi lourd ni aussi puissant n'avait été adopté et, passé les effets de tribune, il faudra bien demain, quelles que soient les travées sur lesquelles on siège, que l'on se donne la main. Le logement social est vraiment l'affaire de tous les responsables publics, quels que soient leur statut et leur position juridique, et vous savez très bien que, comme pour la rénovation urbaine, les choses ne pourront être bien faites que si nous les faisons tous ensemble. À l'image de l'équipe de France de rugby, qui vient de marquer son deuxième essai contre les Springboks !