Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 5 mars 2006 à 15h00
Égalité des chances — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

La fameuse continuité de l'activité économique n'est que l'illustration d'un étrange principe, que l'on retrouve de plus en plus dans notre code du travail, qui consiste à moduler l'application du travail de nuit selon le mode de fonctionnement de chaque entreprise, au détriment des droits des salariés, bien entendu.

La référence à la continuité de l'activité économique permet de justifier le recours au travail de nuit pour utiliser au maximum la capacité de production et pour prolonger toujours plus la durée du travail.

En fait, la continuité de l'activité économique vise la restauration du taux de profit dans les délais les plus brefs.

Il faut être bien conscient que, lorsque l'on déroge à la durée maximale quotidienne du travail pour les salariés travaillant la nuit, en invoquant des motifs techniques, des contraintes prétendument inhérentes à telle ou telle profession, à tel ou tel secteur d'activité, ce n'est pas autre chose que l'on vise.

Et tant pis, bien sûr, pour la santé des salariés ! Tant pis aussi pour l'emploi, qui fait souvent les frais de cette organisation, pour le moins discutable, des horaires de travail imposés à chaque salarié.

L'existence du travail de nuit, considérée comme incontournable lorsque l'on travaille au moins 270 heures par an aux horaires concernés, impose, de manière tout à fait naturelle, que les règles essentielles - durée, amplitude horaire, application - ne puissent être définies dans le cadre d'accords dont la portée serait limitée à un établissement ou à une entreprise.

C'est pourquoi nous préconisons que ce soit au niveau de l'accord de branche étendu que soient fixées ces caractéristiques essentielles du travail de nuit et que, par conséquent, toute dérogation soit impossible à un niveau inférieur à la branche professionnelle.

Comme nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, ce que recèlent ces possibilités de dérogation, c'est une pulvérisation du code du travail !

La dérogation, c'est aussi le dumping social, le moins-disant devenant un facteur de création de profit au détriment du respect des droits des salariés, et donc un facteur de concurrence déloyale envers les entreprises plus respectueuses d'une certaine éthique.

Nous considérons que le travail de nuit ne devrait être autorisé que pour les métiers pour lesquels il apparaît indispensable compte tenu de raisons d'utilité sociale et de service public, et qu'il devrait alors être accompagné des nécessaires contreparties en termes de repos compensatoires, de compensation salariale, de suivi médical et de réduction d'horaires.

« Trop tirer rompt la corde », dit la sagesse populaire. En matière de droit du travail, il en est souvent ainsi, et c'est bien pourquoi nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet amendement.

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