La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures.
La parole est à M. Ivan Renar, pour un rappel au règlement. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce rappel au règlement se fonde sur les articles 48 et suivants du règlement du Sénat, et même sur l'ensemble de ce dernier, car il a, je le reconnais, un caractère général.
Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.
Si, je suis au regret d'avoir à le dire ! Qu'une assemblée comme la nôtre ajoute au discrédit du politique me paraît vraiment étonnant. Nous sommes quelques-uns, ici, à vouloir redonner ses lettres de noblesse à la politique. Or, brusquement, parce que le terme « politique » est utilisé lors d'une intervention, on sort le principe de laïcité, etc. On se croirait revenu à la situation de l'armée française avant les années soixante, ou, pis, à l'époque où Joseph Staline était au pouvoir dans le pays que vous connaissez bien !
Faut-il rappeler ici que, étymologiquement, « politique » vient du grec « polis », la cité ; la politique est la gestion des affaires de la cité.
Et l'on voudrait interdire aux jeunes, en particulier aux lycéens, de pouvoir débattre des questions qui les concernent !
Tout à l'heure, un tollé s'est élevé pour dire qu'il ne devait pas y avoir de politique dans les lycées. Mais il ne s'agit pas de politique au sens politicien : il s'agit non pas de faire de la propagande, mais de débattre des questions qui concernent les citoyens.
Si, c'est un rappel au règlement dans une assemblée politique où l'on jette le discrédit sur la politique !
La politique, c'est assumer son destin, mon cher Alain Gournac, et non pas le subir !
(Exclamations sur les travées de l'UMP), car je ne me le permettrais pas, mes chers collègues - vise à vous faire réfléchir. Il n'est pas bon d'avoir l'air de se méfier des jeunes gens. C'est dangereux pour l'avenir de la démocratie.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur Renar, je vous acte de votre rappel au règlement.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l'examen des amendements, précédemment réservés, tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 1er.
L'amendement n° 593, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 121-7 du code de l'éducation, est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - L'établissement de la carte scolaire relève de la mission de l'État et est appliqué au niveau de chaque académie sous l'autorité du recteur. »
La parole est à M. Ivan Renar.
Récemment, à l'occasion de la convention de l'UMP consacrée à l'éducation, ...
... le ministre de l'intérieur - il a le droit de faire de la politique, lui ! - a donné une longue interview au journal Le Figaro, dans laquelle il propose d'en finir avec le principe de la carte scolaire et prône le « libre choix » de l'établissement scolaire par les familles, dans le cadre d'une politique d'autonomie renforcée pour ces établissements.
Au cours de cette même réunion, M. de Robien, ministre de l'éducation nationale, a déclaré, pour s'en féliciter : « s'agissant de la possibilité pour les meilleurs élèves de rejoindre le lycée de leur choix, cette mesure est une première dérogation à la carte scolaire ».
Ainsi, monsieur le ministre, d'un côté, vous prétendez, avec ce projet de loi, rétablir l'égalité entre les jeunes et, de l'autre, avec l'une de ces mesures démagogiques, populistes et profondément inégalitaires dont il a le secret, le ministre de l'éducation nationale aggrave les inégalités déjà existantes entre jeunes devant l'institution scolaire !
C'est une mesure démagogique, d'abord : sous prétexte de répondre à l'angoisse des parents pour leurs enfants devant les conséquences de la crise qui frappe aujourd'hui le système éducatif dans ses fondements mêmes, c'est en réalité au renforcement d'un des éléments de cette crise que s'attelle M. de Robien.
En effet, en renforçant le caractère ségrégatif d'un système où chaque établissement définit son « caractère propre », comme l'on dit dans l'enseignement privé - c'est-à-dire, en fait, une part de plus en plus importante de son programme d'enseignement -, il remet purement et simplement en cause l'égalité de traitement de tous les jeunes devant l'institution scolaire, quel que soit l'endroit du territoire.
Ainsi, c'est le principe même de service public qui serait mis à mal, au bénéfice d'une école ségrégative, où chaque établissement définirait « librement » - quelle perversion dans le vocabulaire ! - les moyens d'écarter de sa « clientèle » les éléments jugés « indésirables », et ceux qui seraient propres à lui attirer le public « ciblé » qu'il aura choisi de privilégier, que ce soit par des procédés liés à la pédagogie ou par d'autres. Ce ne sera plus de l'esprit éducatif, ce sera du marketing !
C'est une mesure populiste, ensuite : le gouvernement auquel vous appartenez continue, avec une telle orientation sur les questions éducatives, à surfer sur les sentiments les plus rétrogrades et dangereux pour la cohésion même de notre société, tout en feignant de répondre aux aspirations des familles d'origine modeste. Celles-ci voient avec angoisse des établissements de plus en plus « ghettoïsés » mis dans l'incapacité de répondre à leurs besoins éducatifs.
Ce sentiment est aggravé depuis que le ministre, en accord avec son collègue de l'intérieur - décidément ! - a clairement décidé d'en finir avec la stratégie des ZEP, lesquelles avaient au moins comme mérite de maintenir à flot certains établissements situés dans des quartiers particulièrement défavorisés et de permettre à nombre de jeunes en difficulté d'acquérir des diplômes et qualifications.
Continuez de la sorte, monsieur le ministre, et - je vous le dis avec gravité - les événements auxquels nous avons assisté en novembre dernier, dans certains de nos quartiers, risquent de se reproduire de façon encore plus dramatique !
Je vous mets en garde tout particulièrement, monsieur le ministre, sur le risque d'un développement de l'exclusion et du communautarisme, qu'implique une telle politique
En effet, il s'agit là d'une politique profondément inégalitaire, dont l'objet est de favoriser davantage encore les enfants des familles aisées. Ces dernières, qui craignent un nivellement par le bas du niveau des connaissances exigées dans certains établissements, refusent la mixité sociale qu'implique le système de la carte scolaire fondée sur le lieu d'habitation et non sur l'origine sociale ou les choix d'ordre moral et idéologique des familles, et s'évertuent déjà, depuis des années, à en contourner les règles, essentiellement par le recours au privé, promu ainsi comme le modèle à suivre.
Je ne suis pas en train de dire, monsieur le ministre, que le maintien du principe de la carte scolaire et son application plus stricte résoudraient, comme par un coup de baguette magique, les problèmes de l'école, notamment ceux des établissements situés dans des quartiers accueillant des populations particulièrement défavorisées.
Tout le monde sait qu'un des aspects essentiels du problème réside dans le recul de la mixité sociale dans l'habitat et dans l'appauvrissement de pans entiers de la population, durement frappés par le chômage et par l'insécurité sociale qui l'accompagne et de plus en plus confinés dans certains quartiers où le logement est plus abordable que dans d'autres.
C'est précisément pour cette raison que nous tenons à une politique de discrimination positive, essentiellement fondée sur une aide aux établissements, à charge pour eux d'utiliser au mieux ces moyens supplémentaires en fonction des réalités auxquelles ils ont à faire face, et non à une politique fondée sur l'aide aux individus « les plus méritants », comme vous le préconisez. Mais là, vous voulez soigner le mal par le mal et promouvoir l'inégalité comme remède, en la parant de toutes les vertus !
Monsieur le ministre, il va falloir vous résoudre à changer le titre de votre projet de loi si mal nommé ! C'est une série de mesures pour « l'inégalité des chances » que le Gouvernement et vous-même êtes en train de nous imposer ! Il vous faudra bien avoir le courage de l'admettre !
M. Ivan Renar. Pour conclure, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux, une fois encore, vous mettre en garde.
Exclamations sur plusieurs travées de l'UMP.
Vous le savez, en France - et c'est l'une de nos particularités -, l'école structure l'État autant que l'État structure l'école.
Oh là là ! sur les mêmes travées.
L'école est une institution consubstantielle de la République, comme la justice, et c'est prendre de bien grands risques que de s'atteler à une telle entreprise de démolition.
Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.
M. Ivan Renar. Vous avez la possibilité, mes chers collègues, de signifier aujourd'hui clairement cette inquiétude que, j'en suis sûr, beaucoup d'entre vous partagent, en votant cet amendement n° 593.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
M. Alain Gournac, rapporteur. Je ne sais pas si la lecture de papiers de ce type grandit l'image du Sénat à l'extérieur !
Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 593. La préparation de la carte scolaire du premier degré est une compétence partagée entre l'État et les communes ; mais peut-être ne vous l'a-t-on pas dit, monsieur Renar !
L'école est une institution. Elle fait partie du service public mais, en tant qu'institution, elle n'est pas un service comme un autre. Je crois que tout le monde s'accorde sur ce point.
La carte scolaire est arrêtée par les maires pour l'école élémentaire, par le conseil général pour les collèges, par l'État pour les lycées, et rien ne s'oppose - certains maires et présidents de conseils généraux se sont d'ailleurs engagés depuis longtemps dans cette démarche, j'en parle d'expérience - à introduire le principe de mixité quand la carte scolaire est construite.
Cet amendement irait à l'encontre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Mais, je le répète, rien n'empêche de bâtir en introduisant ce principe. Voilà pourquoi ce projet de loi est bien relatif à l'égalité des chances, mais l'égalité doit être assumée par chacun des niveaux de responsabilité, notamment en ce qui concerne la carte scolaire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
S'il est un sujet sur lequel nous devons travailler avec doigté et attention, c'est bien la carte scolaire.
Toucher à la carte scolaire et à ces principes est en effet un exercice particulièrement périlleux, voire très dangereux.
Le Gouvernement semble dire que les ZEP ont un rôle à jouer, y compris dans l'avenir.
Cela dit, nous ne pouvons pas ne pas nous inquiéter lorsque certains, notamment parmi les plus hauts responsables du parti de la majorité, déclarent qu'il faut non seulement supprimer les ZEP, mais surtout faire éclater la carte scolaire.
Comment les choses se passent-elles, en réalité ? Vous le savez très bien. En raison des démarches de leurs parents, de nombreux enfants réussissent à obtenir des « dérogations » - je mets des guillemets, car je ne veux pas faire de remarques désagréables à l'égard de certains - qui leur permettent de quitter la zone où ils devraient être scolarisés pour aller vers un autre établissement.
La plupart du temps, il faut bien le reconnaître, ces demandes émanent non pas de familles défavorisées, mais de familles ayant plus d'entregent, que ce soit sur la place publique ou dans leurs relations avec ceux que j'appellerai « les notables ». Un tel phénomène renforce souvent, déjà aujourd'hui, la ghettoïsation des ZEP.
Si l'on fait éclater la carte scolaire, que va-t-il se passer ?
J'habite à Melun où se trouvent un vieux lycée avec des classes préparatoires et un vieux collège. À la périphérie, sur le plateau nord, on trouve des collèges situés en ZEP. Si la carte scolaire disparaît, tout le monde se pressera vers le lycée du centre-ville. En conséquence, ce vieux lycée du xixe siècle, qui compte des classes préparatoires n'aura bientôt plus de places, ...
... renforçant ainsi la ségrégation. Et croyez-moi, là encore, je connais les familles qui, au fait des bonnes adresses, se précipiteront, et je connais aussi celles qui ne se manifesteront pas et qui iront à l'endroit où on leur dit d'aller.
En conséquence, il serait très dangereux, me semble-t-il, de toucher à quoi que ce soit, s'agissant de la carte scolaire ; c'est un bien très précieux que nous devons conserver et sur lequel nous devrons continuer à travailler dans les années qui viennent, sous réserve de quelques adaptations locales à mettre en oeuvre au fil du temps.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je partage tout à fait le propos qui vient d'être tenu. Je voudrais pour ma part intervenir sur un autre point, relatif à l'enseignement primaire et maternel.
Ce matin, nous avons déjà évoqué l'existence de la carte scolaire lorsqu'a été abordée la question du financement de l'enseignement privé et des obligations pesant ou non sur les collectivités en matière de suivi des élèves qui, eux, disparaissent de la carte scolaire !
Mes chers collègues, je souhaiterais attirer votre attention sur un élément qui n'a pas été abordé ce matin : il s'agit de la contrainte exercée sur les maires à l'occasion de projets de création de quartiers ou de nouvelles habitations.
Dans de telles situations, il convient de prévoir, en même temps que la conception de l'urbanisme et des quartiers, les services publics à mettre en place, parmi lesquels figure l'école. Or les obligations quantitatives relatives au dimensionnement d'un établissement scolaire dépendent de l'ensemble des logements prévus dans le programme. Mais comment se livrer à une quelconque anticipation si la carte scolaire est supprimée ? Les collectivités seraient alors obligées de financer des équipements pouvant se révéler surdimensionnés au moment des inscriptions.
Je voulais attirer votre attention sur ce point. Il est en effet extrêmement dangereux de toucher au principe même de la carte scolaire si, parallèlement à cela, vous n'apportez pas de modifications s'agissant de l'ensemble des contraintes annexes qui en découlent.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, je suis d'autant plus motivé pour défendre l'amendement de bon sens de Mme David que je suis moi-même le père d'enfants inscrits dans un collège situé en ZEP. Au-delà même du discours politique que nous avons les uns et les autres, nous vivons parfois des situations au quotidien. Lorsque l'on participe à un débat, on y projette nécessairement ce que l'on vit.
J'aurais souhaité que, à l'occasion d'un texte qui porte sur l'égalité des chances, nous parlions également de l'équité des dotations en matière scolaire, tout particulièrement à destination des réseaux d'éducation prioritaires, les REP.
Ce matin, notre collègue Guy Fischer a indiqué comment allait se traduire, sur le secteur lyonnais, la labellisation « ambition réussite » pour un certain nombre de collèges : chez lui, quatre établissements feront l'objet d'une diminution de moyens.
La semaine dernière, lors du conseil d'administration du collège qui me concerne tout particulièrement, la principale nous a indiqué que, à la prochaine rentrée scolaire, alors que nous sommes déjà en sous-dotation de moyens, serait gelé un poste, qui serait attribué à l'un des deux cent cinquante collèges labellisés « ambition réussite ». C'est à croire que les autres ZEP n'ont pas d'ambition de réussite scolaire !
Le problème de la carte scolaire est éclairant, s'agissant des affectations de personnels dans ces collèges. Au lieu de favoriser les dérogations à la carte scolaire, on ferait mieux de donner aux collèges situés en ZEP des moyens en matière de corps professoral, afin que l'on puisse trouver des classes d'excellence en REP !
En effet, l'un des motifs invoqués pour demander des dérogations en vue d'inscrire son enfant dans un autre collège - non situé en REP, bien évidemment - est le soudain intérêt, voire l'amour, que l'on porte à une langue étrangère enseignée, bien sûr, dans le collège de centre-ville, mais non dans celui situé en REP ! On se découvre aussi parfois un amour immodéré pour une classe d'excellence d'art, de musique, de danse, de théâtre, etc. qui, évidemment, faute de moyens, n'existe pas en REP.
Parallèlement, la seule classe d'excellence proposée dans le collège fréquenté par mes enfants est une classe foot ! C'est tout !
Mes chers collègues, l'amendement n° 593 me paraît vraiment fondamental. En effet, aujourd'hui, les seuls arguments qu'invoquent, en dernier ressort, les principaux de collèges situés en REP sont : « je vous assure que vous avez, ici, une équipe administrative et pédagogique qui mouille sa chemise au quotidien » - c'est vrai, ils sont admirables ! -, ou encore : « si nos résultats n'étaient pas aussi bons, croyez-vous que M. Untel ou Mme Unetelle laisseraient leurs enfants dans notre établissement ? » Ils utilisent le nom de certains parents d'élève pour inciter des familles à laisser leurs enfants dans les établissements !
Pour ces raisons, c'est en qualité de parlementaire mais aussi de parent d'élève que je voterai cet amendement frappé au coin du bon sens.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je mets aux voix l'amendement n° 593.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 139 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 595, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 311-7 du code de l'éducation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le redoublement ne peut être qu'une mesure exceptionnelle, accompagnée de dispositifs particuliers. »
La parole est à M. Ivan Renar.
Cet amendement tend à modifier le code de l'éducation en complétant l'article L. 311-7. Il s'agit d'affirmer ici que « le redoublement ne peut être qu'une mesure exceptionnelle, accompagnée de dispositifs particuliers ».
À l'appui de cette proposition, permettez-moi de citer l'étude de l'Institut de recherche sur l'économie de l'éducation, menée précisément sur l'utilité du redoublement. Cette enquête a confirmé tous les travaux scientifiques antérieurs et a abouti à un résultat identique : le redoublement est le plus souvent inefficace et n'apporte en général rien de plus à l'élève qui le subit. La plupart du temps, celui-ci reste confronté aux mêmes problèmes. En effet, le redoublement n'est qu'une mauvaise solution apportée à un réel problème : le décrochage scolaire.
Dans les dix dernières années, avec les difficultés de l'insertion sociale et professionnelle des jeunes non qualifiés ou encore les conditions dans lesquelles s'est effectuée la massification liée à l'allongement de la scolarité obligatoire, les « déscolarisés » sont devenus une nouvelle catégorie sociale aux confins de l'intervention de multiples institutions : école, justice, police, collectivités.
Ces « décrocheurs » sont nombreux, comme les inspections académiques le savent bien. Certains ont proposé de supprimer les allocations familiales, mais une telle mesure ne réglerait évidemment pas le problème.
Or, nous ne cesserons de le dire, le phénomène du « décrochage » peut être restreint, voire éradiqué, si l'on met en place un système d'aide et de soutien cohérent, réactif et efficace. Ce système devrait être instauré dès l'école maternelle, car c'est en dernière année d'école maternelle que sont repérés les enfants qui rencontreront des difficultés. Si le soutien est proposé à ce stade, on peut « sauver » un enfant et lui permettre de réussir en cours préparatoire, ce qui conditionnera toute sa scolarité.
À cet égard, permettez-moi de citer l'exemple significatif des classes relais. Les élèves qui ont redoublé et « décroché » retrouvent, lorsqu'ils intègrent une telle classe, où l'effectif est de cinq ou six, le goût de l'étude, et ont envie de faire quelque chose, sans pour autant devenir forcément des élèves excellents.
Cela signifie donc bien qu'il faut résoudre le problème le plus tôt possible ! Je me refuse à croire qu'il y ait des enfants n'ayant pas envie d'apprendre ; mais il est certaines conditions qui font qu'ils ont plus ou moins envie d'étudier : je pense aux familles qui sont confrontées à des difficultés, en particulier aux familles monoparentales.
Il faut proposer une aide et un suivi particulier de l'enfant. Or le professeur des écoles ne peut assurer ce suivi ; il faudrait des enseignants qui ne s'occupent pratiquement que de ces élèves en difficulté.
C'est avant l'âge de treize ou quatorze ans que ces élèves doivent être orientés vers des classes relais. Dès qu'ils « décrochent », il faut les rassembler par petits groupes de trois ou quatre. Je suis persuadé que l'on arriverait ainsi à « récupérer » de nombreux élèves.
Au lieu de cela, la réforme votée par la majorité a renforcé le redoublement, en confortant l'autorité du conseil de classe, et ce malgré les critiques unanimes des scientifiques, experts et spécialistes qui se sont penchés sur le sujet.
Par cet amendement, nous demandons donc que le redoublement ne puisse être décidé que de façon exceptionnelle, et qu'il soit accompagné de dispositifs particuliers. L'adoption d'une telle mesure permettrait, au contraire des dispositions du projet de loi, d'assurer une plus grande égalité des chances.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Je voudrais souligner que le décret d'août 2005 a prévu les programmes personnalisés de réussite éducative, dispositif qui vise à accompagner l'élève en difficulté et à éviter une simple répétition de l'année scolaire écoulée.
Par conséquent, ce programme répond à la préoccupation des auteurs de l'amendement, sur lequel le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je ne suis bien entendu pas d'accord avec la proposition des auteurs de l'amendement, dont je peine à comprendre les motivations.
Certes, M. Renar s'est expliqué, mais il me semble que, lorsque l'on met en place une certaine organisation du système éducatif, c'est pour permettre à un maximum de jeunes de se former dans les meilleures conditions. Or je ne vois pas comment pourrait progresser un jeune qui n'a pu suivre dans la classe dont il est issu et que l'on fait malgré tout passer dans la classe supérieure !
J'entends bien, monsieur Renar, que vous préconisez la mise en place de mesures particulières pour aider les élèves en difficulté. Cela étant, combien d'entre nous n'ont jamais redoublé au cours de leur scolarité ?
M. Yves Détraigne lève la main.
Rires
Je ne dis pas que c'est une fatalité, mais tout de même !
Quelquefois, un redoublement peut permettre un nouveau départ à un jeune, qui se renforce dans ses matières les plus faibles.
Mes chers collègues, faisons un peu confiance aux parents et aux enseignants. Ces derniers sont les mieux à même de proposer la meilleure solution, qui pourra être, dans certains cas, le redoublement.
À cet instant, je pense pouvoir me faire le porte-parole du groupe de l'UMP : nous suivrons l'avis de M. le rapporteur et de M. le ministre, et voterons contre cet amendement.
Ce que vous nous avez dit sur la manière dont les enfants doivent être accompagnés lorsqu'ils ont des difficultés est exact, et la solution serait, à mon avis, de mettre effectivement en oeuvre le dispositif que vous avez évoqué. En tout état de cause, la conclusion que l'on peut tirer de vos propos, c'est que faire redoubler les élèves en difficulté est une bêtise, que l'on n'est pas obligé de commettre sous prétexte qu'il s'agit là d'une exception française.
En effet, le redoublement impose à un enfant ayant rencontré des difficultés dans un certain nombre de matières ou à une période de l'année, et dont la moyenne est, de ce fait, mauvaise, de repartir de zéro l'année suivante dans l'ensemble des disciplines et de reprendre la totalité du programme ! C'est complètement ridicule, ...
... à tel point que toutes les expériences, toutes les analyses démontrent que le redoublement n'est pas une solution pertinente.
On me permettra d'invoquer, à l'appui de mon propos, mon expérience personnelle de professeur. Je me suis toujours aperçu que, malheureusement, le redoublement ne permettait pas de résoudre les problèmes. Pour cela, il convient de donner une réponse individualisée à l'élève, en matière d'accompagnement psychologique, si besoin est, ou de soutien, pour les seules disciplines dans lesquelles il éprouve des difficultés. Telle est la réponse adéquate.
En d'autres termes, et en un mot comme en cent, le redoublement, c'est idiot !
En vertu de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l'amendement n° 595.
En application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture des explications de vote sur l'amendement n° 595.
Je rappelle qu'en application de l'alinéa 1 de l'article 38 la clôture peut être proposée par le président ou tout membre du Sénat lorsqu'au moins deux orateurs d'avis contraires sont intervenus dans les explications de vote sur un amendement.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 595.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 608, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article L. 213-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Compte tenu du caractère dérogatoire du travail de nuit, l'accord collectif doit, à peine de nullité, avoir été signé par une ou des organisations syndicales de salariés ayant recueilli au moins la moitié des suffrages exprimés lors des dernières élections au comité d'entreprise ou lors de la consultation de représentativité organisé dans la branche dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à M. Guy Fischer.
À défaut de l'interdire, le code du travail énonce que « le recours au travail de nuit doit être exceptionnel ».
La mise en place du travail de nuit est subordonnée à la conclusion préalable d'un accord collectif. Ce n'est qu'au travers de la négociation collective que l'on peut envisager tant l'instauration que l'extension du travail de nuit, ce qui est tout de même la moindre des choses.
Le dernier alinéa de l'article L. 213-1 du code du travail précise en outre que cet accord collectif « doit comporter les justifications du recours au travail de nuit visées au premier alinéa ». Or, au regard des justifications considérées, ce dernier alinéa n'est pas satisfaisant.
En effet, il est prévu que l'accord dérogatoire doit être simplement justifié « par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ». Cela signifie que le travail de nuit peut être autorisé pour toutes les activités, en raison d'impératifs de productivité. L'exception deviendrait ainsi la règle. Nous sommes catégoriquement opposés à une telle évolution, et c'est pourquoi nous revenons maintenant sur la question du travail de nuit.
Notre amendement tend donc à réaffirmer le caractère exceptionnel du recours au travail de nuit et a pour objet d'offrir aux salariés des garanties supplémentaires en matière de conditions de travail.
Nous proposons, en conséquence, d'ajouter une condition à la mise en oeuvre du travail de nuit, à savoir la conclusion d'un accord majoritaire. À l'heure actuelle, l'accord n'est pas présumé majoritaire et, de fait, un accord signé entre une organisation syndicale minoritaire et un employeur ou un groupement d'entreprises peut être validé. C'est à nos yeux inacceptable.
Dans la rédaction actuelle de l'article L. 213-1 du code du travail, rien ne permet de préjuger la nécessité de recueillir la signature des organisations syndicales majoritaires. Vous comprendrez donc aisément, mes chers collègues, pourquoi nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet amendement, qui tend à poser le principe de l'accord majoritaire pour la validation de toute disposition dérogatoire au principe du travail de jour. Nous souhaitons ainsi conforter la démocratie sociale.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. Jean-Pierre Godefroy applaudit également.
Avis défavorable. Nous avons déjà débattu de cette question une nuit entière !
L'avis que j'exprimerai vaudra aussi pour les amendements n° 609, 611 et 610, qui relèvent de la même philosophie, à savoir modifier, et même bouleverser, les règles qui ont été fixées par la loi du 4 mai 2004 en matière de conclusion des accords collectifs. À cet égard, je rappelle que deux possibilités ont été prévues : l'accord majoritaire ou l'absence d'opposition de la majorité des organisations syndicales de salariés représentatives.
Nous sommes naturellement favorables à la négociation collective, mais nous ne pouvons qu'émettre un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Fischer, eu égard au respect des dispositions de la loi du 4 mai 2004, dont l'application sera évaluée, je le rappelle, en 2007.
L'attitude permanente de nos collègues du groupe CRC est d'essayer, à chaque occasion, de remettre en cause l'ensemble du code du travail. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) En l'occurrence, il s'agit ici non pas de le protéger, mais de le modifier.
En ce qui concerne le travail de nuit, nous savons que les dérogations ne pourront être qu'exceptionnelles, notamment - c'est bien évident -s'agissant des jeunes. Il ne faut pas invoquer Zola, car quelques progrès sont tout de même intervenus depuis la fin du XIXe siècle ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC)
Prévoir qu'un accord collectif sera annulé s'il n'a pas été signé par des syndicats représentant au moins la moitié des salariés reviendrait à modifier complètement notre système législatif, et ce au détour de l'adoption d'un amendement tendant à insérer un article additionnel.
Dans ces conditions, vous ne serez pas étonné, monsieur Fischer, que nous nous opposions à votre proposition.
Je signalerai à M. Fourcade que nous sommes en retrait par rapport à la loi de 1874, qui interdisait le travail de nuit pour les jeunes de moins de seize ans et pour les jeunes femmes de moins de vingt-quatre ans dans un certain nombre de professions, notamment dans l'industrie. Telle est la réalité : nous n'allons nullement vers un progrès !
Quant aux dispositions de la loi du 4 mai 2004, nous y étions opposés, pour les raisons que vient de rappeler M. Fischer. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, monsieur le ministre, nous ne sommes pas hostiles par principe aux accords de branche, mais ils ne doivent pas être « arrachés » grâce à l'approbation de syndicats représentant une infime minorité des salariés concernés ; il faut un accord majoritaire.
Dans cet esprit, nous soutenons l'amendement de nos collègues du groupe CRC.
M. Robert Del Picchia. En vertu de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l'amendement n° 608.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
En application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture des explications de vote sur l'amendement n° 608.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 608.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 140 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 609, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 213-3 du code du travail, les mots : « ou accord d'entreprise ou d'établissement, » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article L. 213-3 du code du travail porte sur l'une des questions essentielles posées par la mise en oeuvre du travail de nuit : la durée quotidienne de travail des salariés devant travailler la nuit.
Le premier alinéa de l'article limite naturellement à huit heures la durée maximale du temps de travail quotidien d'un travailleur de nuit.
Il est évident que de telles dispositions s'avèrent indispensables du fait même du caractère exceptionnel du travail de nuit.
Le deuxième alinéa dudit article prévoit qu'un accord collectif de branche ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut conduire à remettre en cause ce principe de limitation à huit heures de la durée quotidienne de travail des salariés travaillant la nuit.
La reconnaissance explicite de dérogation à la durée maximale de huit heures est de nature à remettre en cause le caractère exceptionnel du travail de nuit, lequel est pourtant affirmé, de manière liminaire, par l'article L. 213-1 du code du travail.
Pourtant, on sait que ces dérogations ont ouvert la possibilité aux employeurs, pour les motifs les plus divers, d'augmenter la durée du temps de travail pour les travailleurs de nuit. On peut citer, à titre d'exemple, la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants telle qu'elle a été modifiée par l'avenant du 13 juillet 2004.
L'article 6.1 de l'avenant précité dispose : « Durée maximale journalière : Cuisinier : 11 heures ; Autre personnel : 11 heures 30 minutes ; Veilleur de nuit : 12 heures ; Personnel de réception : 12 heures. »
L'article 6.2, quant à lui, dispose : « Durées maximales hebdomadaires :
« Moyenne sur 12 semaines : 48 heures - 46 heures pour les entreprises à 37 heures.
« Absolue : 52 heures » - 50 heures pour les entreprises à 37 heures. »
Cela démontre que les accords de branche peuvent parfois, sur cette question sensible de la durée du travail de nuit, déroger de manière significative au droit existant.
En outre, la possibilité donnée par le code du travail de déroger à la durée quotidienne de huit heures de travail pour un travailleur de nuit est d'autant plus facilitée qu'il est prévu que des accords dérogatoires puissent être conclus à l'échelle d'une entreprise ou d'un établissement.
Cela n'est pas acceptable de notre point de vue, car la faculté de prévoir de tels accords dérogatoires est susceptible de remettre en cause le droit des salariés.
L'accord dérogatoire peut être signé au niveau d'une branche, mais peut aussi descendre au niveau de l'entreprise ou de l'établissement.
Une telle démarche n'est pas tolérable ! Elle revient, en particulier, à mettre en question la possibilité, pour les salariés, dans des entreprises aux activités similaires, de disposer des mêmes droits et garanties.
Accord d'entreprise ou d'établissement : n'est-ce pas là la meilleure manière de faire en sorte que, dans les entreprises où les organisations syndicales seraient un peu moins combatives qu'ailleurs, voire inexistantes, l'employeur puisse tirer un avantage maximum, en dérogeant largement aux principes fondamentaux qui s'appliquent en matière de travail de nuit, lequel est censé constituer l'exception ?
Nous affirmons que ce type de dispositions permet aujourd'hui à n'importe quel groupe industriel constitué de déménager en province un établissement de production de fortes traditions revendicatives et de faire signer par les nouveaux salariés de cet établissement, issus, par exemple, du monde rural, un accord conventionnel sur l'organisation du temps de travail plus directement favorable, non pas à la « continuité de l'activité économique », selon la formule consacrée par le code, mais bien plutôt à la « rentabilité immédiate », fruit, entre autres, d'une utilisation plus importante des investissements matériels.
Il importe donc, ne serait-ce que pour éviter que la concurrence naturelle entre les entreprises ne soit faussée par ce que l'on peut appeler le « dumping social », que les accords portant sur la place du travail de nuit soient discutés au niveau des branches professionnelles et non, prétendument au plus près du terrain, par le biais d'accords d'entreprise ou d'établissement.
En ne permettant pas que des accords dérogatoires au travail de nuit puissent être conclus à l'échelle d'une entreprise ou d'un établissement, nous souhaitons garantir pleinement le respect des droits des salariés.
Monsieur le président, la nuit dernière a déjà été longue et la prochaine le sera également ; aussi, j'émets un avis défavorable.
Le Gouvernement s'est déjà prononcé contre cet amendement.
La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
Cet amendement dénote une vision très monolithique du monde du travail et de l'entreprise : il est clair qu'une souplesse est nécessaire au niveau des établissements ou des entreprises. Or, dans la mesure où l'on veut conserver au travail de nuit son caractère exceptionnel, l'amendement proposé pourrait avoir un effet inverse à celui que recherchent ses auteurs puisque, faute de pouvoir l'autoriser au niveau d'un établissement, on serait contraint de l'autoriser au niveau d'une branche.
Ce serait là un effet extrêmement pervers, et j'émets donc un avis défavorable.
Je mets aux voix l'amendement n° 609.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 141 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 611, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 213-3 du code du travail est ainsi rédigé :
« La durée hebdomadaire de travail des travailleurs de nuit, calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives, ne peut dépasser quarante heures. Une convention ou un accord de branche étendu peut porter cette limite à quarante-quatre heures lorsqu'il s'agit d'un service d'utilité sociale. Un décret peut fixer la liste des secteurs pour lesquels cette durée est fixée entre quarante et quarante-quatre heures. »
La parole est à Mme Éliane Assassi.
J'ai bien entendu que l'avis de M. le ministre sur l'amendement n° 608 valait aussi pour les amendements n° 609 et 611. Néanmoins, j'irai jusqu'au bout de mon argumentaire et je vous exposerai les raisons pour lesquelles nous avons déposé l'amendement n ° 611, qui vise à réécrire le troisième alinéa de l'article L.213-3 du code du travail en vue de renforcer les garanties des salariés travaillant de nuit.
Comme nous avons déjà pu le souligner, l'un des défauts majeurs de l'article L. 213-3 dans sa rédaction actuelle, comme d'ailleurs de l'ensemble des dispositions du code du travail relatives au travail de nuit, est de rendre possible toute dérogation fondée sur une appréciation liée à l'activité de l'entreprise.
M. Charles Pasqua s'exclame.
La fameuse continuité de l'activité économique n'est que l'illustration d'un étrange principe, que l'on retrouve de plus en plus dans notre code du travail, qui consiste à moduler l'application du travail de nuit selon le mode de fonctionnement de chaque entreprise, au détriment des droits des salariés, bien entendu.
La référence à la continuité de l'activité économique permet de justifier le recours au travail de nuit pour utiliser au maximum la capacité de production et pour prolonger toujours plus la durée du travail.
En fait, la continuité de l'activité économique vise la restauration du taux de profit dans les délais les plus brefs.
Il faut être bien conscient que, lorsque l'on déroge à la durée maximale quotidienne du travail pour les salariés travaillant la nuit, en invoquant des motifs techniques, des contraintes prétendument inhérentes à telle ou telle profession, à tel ou tel secteur d'activité, ce n'est pas autre chose que l'on vise.
Et tant pis, bien sûr, pour la santé des salariés ! Tant pis aussi pour l'emploi, qui fait souvent les frais de cette organisation, pour le moins discutable, des horaires de travail imposés à chaque salarié.
L'existence du travail de nuit, considérée comme incontournable lorsque l'on travaille au moins 270 heures par an aux horaires concernés, impose, de manière tout à fait naturelle, que les règles essentielles - durée, amplitude horaire, application - ne puissent être définies dans le cadre d'accords dont la portée serait limitée à un établissement ou à une entreprise.
C'est pourquoi nous préconisons que ce soit au niveau de l'accord de branche étendu que soient fixées ces caractéristiques essentielles du travail de nuit et que, par conséquent, toute dérogation soit impossible à un niveau inférieur à la branche professionnelle.
Comme nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, ce que recèlent ces possibilités de dérogation, c'est une pulvérisation du code du travail !
La dérogation, c'est aussi le dumping social, le moins-disant devenant un facteur de création de profit au détriment du respect des droits des salariés, et donc un facteur de concurrence déloyale envers les entreprises plus respectueuses d'une certaine éthique.
Nous considérons que le travail de nuit ne devrait être autorisé que pour les métiers pour lesquels il apparaît indispensable compte tenu de raisons d'utilité sociale et de service public, et qu'il devrait alors être accompagné des nécessaires contreparties en termes de repos compensatoires, de compensation salariale, de suivi médical et de réduction d'horaires.
« Trop tirer rompt la corde », dit la sagesse populaire. En matière de droit du travail, il en est souvent ainsi, et c'est bien pourquoi nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet amendement.
Le Gouvernement s'est déjà prononcé contre cet amendement.
La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.
Je voudrais faire une suggestion à nos collègues de gauche. J'appartiens au monde de l'entreprise, et le débat que nous avons m'étonne.
Hier soir ou ce matin, vous nous avez expliqué un certain nombre de choses.
M. Dominique Mortemousque. On a l'impression que les méchants sont d'un côté et les bons, de l'autre.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Nous sommes en 2006. L'Europe est passée par là. Un certain nombre d'éléments, comme la monnaie unique, lient entre eux les pays européens.
Je me rends compte que les patrons discutent, d'un pays européen à l'autre, et essaient de trouver des solutions pour offrir des perspectives aux salariés et, plus globalement, à l'économie.
Je me rends également compte que les syndicats de salariés n'hésitent pas à évoquer la nécessité de brasser leurs points de vue au niveau européen, pour envisager les perspectives possibles.
Il me paraîtrait donc judicieux que vous brassiez vos idées avec vos collègues de gauche, ...
M. Dominique Mortemousque. ... afin de ne pas proférer un certain nombre d'inepties qui me paraissent parfaitement dépassées !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
On ne peut pas laisser tenir de tels propos sans y répondre. Je vais donc ajouter une « ineptie !
M. Mortemousque nous parle de « brasser des idées », mais les idées de ce projet de loi, qui sera probablement adopté à un moment, n'ont pas été brassées avec celles des principaux intéressés.
Avant de nous donner des leçons quant à la manière dont devrait procéder la gauche, vous devriez vous étonner, monsieur Mortemousque, qu'une loi relative à l'égalité des chances n'ait pas été discutée avec les partenaires sociaux.
Ce projet de loi vise à détricoter le code du travail, alors même que la loi de 2004 disposait que l'on ne pouvait modifier le droit du travail sans discussion préalable avec les partenaires sociaux, comme cela se fait d'ailleurs dans toute l'Europe, puisque vous abordez le sujet.
Les partenaires sociaux feront connaître massivement leur opinion le 7 mars, par les seuls moyens dont ils disposent : la grève et la manifestation.
Si vous entendez donner des leçons, donnez donc au Gouvernement le conseil de ne pas s'asseoir sur les principes qu'il a lui-même édictés en 2004 !
Quant à nous, grâce aux « inepties » que nous proférons depuis dix jours, nous avons pu imposer au Sénat un débat qui n'a même pas eu lieu à l'Assemblée nationale.
M. Roland Muzeau. Je réagirai aux propos de M. Mortemousque - brièvement, car ils ne méritent pas davantage
M. Charles Gautier rit
...ainsi qu'à ceux de M. Fourcade.
Monsieur Mortemousque, vous nous parlez de la nécessité d'un brassage. J'aurais tendance à être d'accord avec vous.
Cela étant, il faut avoir la volonté de brasser les idées, et avoir au moins deux idées ! Sinon, on n'a plus rien à brasser ! Vous obéissez au système de la pensée unique : d'idées, vous ne brassez que la vôtre !
M. Roland Muzeau. Or cette idée a bougrement vieilli. Elle a tellement vieilli que nombre de spécialistes du droit économique, de la vie économique ou du droit social, vos propres amis qui plus est, comme M. Bébéar, président du conseil de surveillance d'AXA, ou M. Proglio, publient à l'envi des ouvrages dans lesquels ils crient « Halte aux inepties que l'on est en train de commettre au nom du capitalisme : le capitalisme creuse sa tombe ! ».
Sourires sur les travées de l'UMP.
J'essaie donc de vous rendre service : ne tombez pas dans le trou que vous creusez !
Pour répondre aux propos de M. Fourcade, je suis désolé que cette discussion intervienne à ce moment de l'examen du projet de loi : nous n'en sommes absolument pas responsables !
Peut-être nous situons-nous en dehors du strict sujet de ce dossier ; mais nous en sommes à la fin de la discussion de ce texte, alors que nos amendements, je vous le rappelle, tendaient à insérer des articles additionnels tout au long de ce projet de loi.
La majorité a décidé d'étudier tous ces points après l'adoption de l'article 28. De fait, vous vous êtes « assis » sur les engagements pris par M. le président de la commission et le Gouvernement quant à la réserve des articles additionnels après l'article 15 !
Nous retrouvons maintenant ces articles additionnels : n'escomptez pas une seule seconde que nous nous assiérons sur des arguments qui ont été conçus, dans le cadre d'un brassage d'idées, avec les organisations syndicales ouvrières, étudiantes et lycéennes, avec la société civile, avec le conseil d'administration de la CNAF et avec certains employeurs.
Sourires
N'escomptez pas que nous jetterons tout cela au panier ! Nous estimons utile de prendre en compte ces différents avis. Nous vous les livrons : vous les jetez. Vous appelez l'article 38. Cela vous regarde !
Quant à nous, nous irons jusqu'au bout de ce débat. Nous dirons ce que nous pensons, ...
M. Roland Muzeau. ...nous exprimerons les idées qui sont le fruit de notre travail et dont nous pensons qu'elles sont utiles au débat de société.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.
Permettez-moi de rappeler deux points. Tout d'abord, depuis trente ans que nous débattons dans cette assemblée des problèmes associés au code du travail, le fameux équilibrage entre accords collectifs, accords de branche et accords d'entreprise fait l'objet de discussions.
À chaque fois que nous examinons un texte à vocation sociale, les groupes CRC et socialiste nous demandent de supprimer la possibilité de conclure des accords d'entreprise et réclament que les accords soient des accords de branche ou des accords collectifs.
Cela nous sépare à chaque fois, au sujet de chaque texte !
Je dirai donc à notre jeune collègue M. Assouline, qui ne siège pas depuis très longtemps dans cette assemblée et qui ne sait donc pas comment tout cela fonctionne, qu'il lui faut apprendre !
Rires sur les travées de l'UMP.
Il ne peut pas y avoir d'adaptation à la concurrence internationale, de résistance à la compétition, si l'on ne conclut pas plus d'accords d'entreprise.
Votre combat, que je salue, est donc inutile. Il vous suffirait, me semble-t-il, de défendre quelques amendements de principe : il n'est pas nécessaire de revenir sur chaque phrase du projet de loi, sur chaque dispositif, car tout cela est parfaitement dépassé.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
Je ferai juste remarquer à M. Muzeau que la discussion de ces amendements n'aurait pas plus trouvé sa place après l'examen de l'article 2 qu'elle ne la trouve maintenant, puisque ces amendements ne se rapportent pas à l'article 2. C'est bien pour cela d'ailleurs que le groupe CRC les avait placés après l'article 2 : il fallait leur trouver une place dans le texte.
Ces amendements se trouvent donc à la place qu'ils méritent, c'est le moins que l'on puisse dire, puisqu'ils n'ont aucune relation avec le projet de loi et devraient a priori être jugés irrecevables, non seulement par la commission mais aussi par le Sénat.
Nous pourrions d'ailleurs être amenés à nous pencher un peu plus sur cette question si le débat devait continuer à s'enliser.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, je souhaite, quant à moi, que le débat ne s'enlise pas. En application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l'amendement n° 611.
En application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture des explications de vote sur l'amendement n° 611.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 611.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 142 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 610, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le troisième alinéa de l'article L. 213-3 du code du travail, les mots : « ou un accord d'entreprise ou d'établissement, » sont supprimés.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Le troisième alinéa de l'article L. 213-3 du code du travail fixe à 40 heures au maximum le temps de travail hebdomadaire que peut effectuer un travailleur de nuit.
Une fois de plus, pourtant, nous sommes en présence d'une règle qui souffre plusieurs possibilités de dérogation.
Là encore, en effet, des accords d'entreprise ou d'établissement peuvent permettre de porter cette durée jusqu'à 44 heures.
Or nous savons bien que le contournement des négociations collectives au profit des accords d'entreprise ou d'établissement laisse souvent le salarié seul. Ce dernier se trouve dans un rapport inégalitaire, qui tourne souvent en sa défaveur.
Aussi nous opposons-nous fermement à la possibilité de solliciter une dérogation au principe de la limite horaire légale par la voie d'un simple accord d'entreprise, de groupe ou d'établissement.
Nous l'avons dit à plusieurs reprises, une telle démarche, fréquemment pratiquée dans certaines entreprises, n'est motivée que par des considérations de rentabilité à court terme des investissements matériels, en négligeant à l'évidence la santé des salariés et le respect de leur vie familiale, entre autres choses.
Nous devons malheureusement trop souvent le rappeler, le travail de nuit a un caractère exceptionnel, y compris dans des secteurs où il est relativement récurrent.
Les mêmes salariés ne peuvent être continuellement astreints au travail de nuit. Il importe donc de conférer à ce dernier un caractère véritablement exceptionnel et de cesser de multiplier les dérogations qui, souvent, deviennent la règle.
En tout état de cause, le travail de nuit doit être réellement réglementé et contrôlé : ce n'est que grâce à un cadre juridique et réglementaire solide que les salariés seront préservés de la dérive de certaines entreprises vers une flexibilité à tous crins et que nous pourrons véritablement garantir le droit des travailleurs.
Les dérives sont nombreuses ; elles sont malheureusement facilitées par la loi elle-même.
C'est pourquoi nous souhaitons réduire la possibilité de déroger à la durée de travail hebdomadaire maximale imposée aux salariés travaillant la nuit.
Cet amendement est sensiblement identique à l'amendement n° 609. La commission y est défavorable.
Le Gouvernement s'est déjà prononcé contre cet amendement.
La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
Sourires
Le troisième alinéa de l'article L. 213-3 du code du travail énonce qu'une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut porter à 44 heures la durée de travail hebdomadaire des travailleurs de nuit. Il s'agit là d'une énième possibilité de déroger à la règle.
À quoi bon prévoir des règles, si les dérogations sont si nombreuses et si faciles à obtenir ?
Nous avons à maintes reprises dénoncé les accords dérogatoires conclus à l'échelle d'une entreprise ou d'un établissement : ces accords ne sont pas susceptibles de garantir pleinement le droit des salariés.
Plus les accords dérogatoires sont aisés à conclure pour les employeurs, plus les droits des salariés sont en péril.
Avec cette disposition, si les organisations syndicales d'une entreprise ne sont pas assez tenaces, les travailleurs de nuit de cette dernière seront confrontés à un volume horaire étendu, en contradiction avec le caractère exceptionnel du travail de nuit.
Le plus récent exemple en est l'accord que vient de passer l'Union des industries métallurgiques et minières, l'UIMM, avec trois syndicats minoritaires, qui démantèle complètement les 35 heures.
Certains, ici, applaudiront, mais c'est en réalité la remise en cause de notre code du travail. Nous ne l'admettons pas !
M. Jean-René Lecerf. Avec les 35 heures, le risque était déjà important que le travail soit considéré comme une corvée dont il fallait se débarrasser le plus rapidement possible.
Protestations sur les travées du groupe CRC.
Nous avons une conception fondamentalement différente. Nous estimons que le travail devient une denrée rare exigeant une certaine souplesse, dans l'intérêt même de notre population. C'est la raison pour laquelle nous sommes radicalement défavorables à cet amendement.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, en application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l'amendement n° 610.
En application de l'alinéa 1 de l'article 38 du règlement, je suis saisi d'une demande de clôture des explications de vote sur l'amendement n° 610.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 610.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 143 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 614, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 213-4 du code du travail est ainsi rédigé :
« L'accord collectif visé à l'article L. 213-1 doit prévoir une contrepartie sous forme de repos compensateur et de compensation salariale. L'accord collectif prévoit, en outre, des mesures destinées à améliorer les conditions de travail des travailleurs, à faciliter l'articulation de leur activité nocturne avec l'exercice de responsabilités familiales et sociales, notamment en ce qui concerne les moyens de transport, et à assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment par l'accès à la formation. L'accord collectif prévoit également la formation des temps de pause. »
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Nous allons aborder la question sous un angle légèrement différent.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.
Le deuxième alinéa de l'article L. 213-4 du code du travail prévoit que les contreparties attribuées aux travailleurs de nuit doivent de préférence se faire sous la forme de repos compensateur, au détriment de la compensation salariale.
Cet alinéa est dangereux, car il ouvre la voie à la remise en cause de la surrémunération, laquelle se justifie parfaitement, telle qu'elle est définie dans maintes conventions collectives de branche.
En la matière, tout se passe d'ailleurs comme si l'on créait les conditions d'une banalisation des horaires de nuit. Dans de nombreux secteurs, cela permet non pas de favoriser la continuité de l'activité économique, mais bien plutôt de développer l'utilisation la plus rapide des capacités de production.
On sait que le travail de nuit s'est développé de manière importante ces dernières années, touchant des catégories de salariés de plus en plus larges, plus spécifiquement les ouvrières et les employées administratives. Aujourd'hui, le Gouvernement veut élargir encore le travail de nuit aux jeunes âgés de quinze ans. Quelle avancée !
Quelles conclusions peut-on tirer de ces évolutions ? Il apparaît indiscutablement que l'activité nocturne se développe dans certains secteurs d'activités. Aussi, il convient d'assurer aux travailleurs de nuit les contreparties adéquates en termes d'organisation du travail, de compensation salariale, de respect de la vie familiale et d'accès à la formation.
On l'a vu, l'article L. 213-4 du code du travail privilégie le repos compensateur plutôt que la compensation salariale.
Nous considérons, pour notre part, que le recours au travail de nuit implique plusieurs contreparties cumulatives. Il convient de prévoir non seulement un repos compensateur, mais également une compensation salariale, une amélioration des conditions de travail, des mesures pour faciliter l'activité nocturne et pour respecter la vie familiale des salariés, un meilleur accès à la formation.
Bref, un arsenal de mesures doit être pris pour renforcer les garanties des travailleurs de nuit. C'est pourquoi nous vous invitons à voter cet amendement.
Cet amendement remet en cause une loi du 9 mai 2001 ; nous y sommes donc défavorables, de même, d'ailleurs, qu'à l'amendement suivant.
Cet amendement est présenté de façon plus astucieuse que les précédents, mais il contribue tout autant à la remise en cause de décisions législatives adoptées ces dernières années.
Ces amendements n'ont qu'un seul but, celui de retarder les débats... peut-être jusqu'à la journée de mobilisation du 7 mars prochain !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 613, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 213-4 du code du travail est abrogé.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 213-4 du code du travail précise, dans son troisième alinéa : « Pour les activités visées au troisième alinéa de l'article L. 213-1-1, lorsque la durée effective du travail de nuit est inférieure à la durée légale, les contreparties visées aux deux alinéas ci-dessus ne sont pas obligatoirement données sous forme de repos compensateur. »
Cet alinéa vise expressément les activités de production rédactionnelle et industrielle de presse, de radio, de télévision, de production et d'exploitation cinématographiques, de spectacle vivant et de discothèque.
Le fait est que, dans ces secteurs, la durée du travail est fondée sur des règles dérogeant au droit commun, plus favorables aux salariés. Dans la presse, par exemple, les services sont d'une durée de six heures et la durée du travail se détermine à concurrence d'un certain nombre de services.
Ainsi, en ce qui concerne la presse quotidienne régionale, la convention collective, en date du 2 décembre 1970, prévoit : « Dans la limite des horaires ci-dessous, des aménagements pourront être établis pour régler les cas particuliers des entreprises.
« Sauf dérogations prévues aux annexes techniques catégorielles : tous les quotidiens sont exécutés au service ; lorsque la semaine de travail est exécutée en six jours, la durée du service est de six heures ; lorsque la semaine de travail est exécutée en cinq jours, la durée du service est de sept heures ; dans ce cas, il y aura deux jours de repos.
« La question de la brisure est du ressort des annexes techniques. »
Cela fait donc plus de trente ans que les personnels de la presse bénéficient d'un aménagement de leur temps de travail correspondant à la spécificité de leur profession.
Nous considérons que le principe de la double compensation doit être maintenu par la voie à la fois de la rémunération - le secteur de la presse retient naturellement une majoration de 15 % des heures de nuit - et du repos compensateur.
Nous vous proposons donc la suppression pure et simple du troisième alinéa de l'article L. 213-4 du code du travail.
Monsieur le président, je suis contre le blocage de nos travaux, et donc défavorable à l'amendement !
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour des raisons que nous avons déjà évoquées.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 612, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au cinquième alinéa de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, les mots : « et leurs mérites » sont supprimés.
La parole est à M. Ivan Renar.
Le paragraphe que notre amendement tend à modifier précise les modalités de garantie du droit à l'éducation, prévu par le même article. Il est ainsi préconisé une répartition des moyens de l'éducation en tenant compte des disparités économiques et sociales, et l'octroi, sur ces bases, d'aides aux élèves et aux étudiants. En outre, ce droit est désormais conditionné aux résultats individuels obtenus par les élèves.
Le droit à l'éducation serait ainsi garanti par l'octroi de bourses au mérite. Cette disposition de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 24 avril 2005 constitue bien une question de fond.
Auparavant, cette garantie d'accès au droit s'appuyait sur une répartition des moyens, à partir d'une discrimination que nous pourrions qualifier de « positive », tenant compte des disparités de situations, particulièrement dans les domaines économique et social.
Désormais, elle s'appuie sur une aide financière individualisée et pour partie fondée sur le mérite, reléguant ainsi au deuxième plan les moyens mis à la disposition des établissements scolaires situés en zones défavorisées.
Certes, le soutien financier individualisé peut être une mesure de justice sociale. Mais, en réalité, les enfants et les jeunes issus des familles en difficulté ont besoin en premier lieu de moyens pédagogiques renforcés et différenciés, d'enseignants en nombre suffisant, y compris afin de favoriser le travail d'aide et de soutien en petits groupes dans des écoles bien équipées.
Les conditions de vie de bon nombre de familles ne permettent pas à leurs enfants de poursuivre une scolarité ordinaire. Cependant, les bourses que vous proposez ne permettront pas de pallier la faiblesse d'un salaire ou d'une allocation d'aide sociale, ni l'exiguïté d'un logement ou son insalubrité.
L'aide financière individualisée prévue n'est pas la première garantie de l'égalité des chances, comme vous le prétendez. Il faut, au contraire, renforcer le financement des aides prioritaires territorialisées qui accordent plus de moyens à ceux qui en ont le plus besoin sans que cela porte préjudice aux autres.
En tout état de cause, ce n'est pas la voie que vous avez choisie puisque, au contraire, vous inversez les priorités et que l'augmentation des aides individualisées se fera grâce à ce que l'on appelle pudiquement le « redéploiement des moyens » aujourd'hui dévolus à l'éducation prioritaire !
De plus, en individualisant les aides, vous renvoyez l'élève à sa seule responsabilité pour ce qui concerne la réussite ou l'échec de ses études.
L'exception de réussite sera valorisée, mais l'échec sera la règle.
Par ailleurs, je vous le répète, il est difficilement acceptable que ces bourses soient financées en réduisant sur ce point également les financements accordés aux zones prioritaires.
Tel est donc le sens de cet amendement.
La commission est favorable au mérite. Elle est donc défavorable à cet amendement.
J'ai eu l'occasion de rappeler, ce matin, l'effort qui sera conduit dans un certain nombre de zones d'éducation prioritaires, effort que Gilles de Robien annoncera : 1 000 enseignants en plus, 3 000 aides éducateurs, 300 infirmières.
Ces bourses au mérite, qui sont déterminées en fonction du besoin social, passeront de 30 000 à 100 000. Le mérite scolaire est bien un fondement de l'élitisme et du mérite dans les valeurs de la République.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, mais je tenais, en cet instant du débat, à rappeler les principes qui nous animent et qui visent bien à remettre en marche ce que certains appellent l' « ascenseur social ».
Notre ambition est de donner aux jeunes la capacité de s'accomplir et de réussir grâce à l'éducation, à l'école, à la formation professionnelle.
Tel est l'objectif visé au travers de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école. Tel est également l'objectif visé aujourd'hui au travers de ce projet de loi pour l'égalité des chances.
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'un quart d'heure pour réunir la commission des affaires sociales.
Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le président.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures cinquante.
Je suis saisi par M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, d'une motion n° 905, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à l'encontre de plusieurs amendements.
Cette motion est ainsi rédigée :
Constatant que :
- les amendements n° 621, 620, 618, 623, 318, 632 rectifié, 633, 635, 634, 636, 643, 624, 625, 630, 645, 626, 628, 627, 675, 677, 775, 774, 778, 463, 464, 471, 473, 476, 478, 802, 803, 357, 807 et 808 sont dépourvus de tout lien avec l'objet du projet de loi pour l'égalité des chances et qu'ils sont donc en contradiction avec l'article 48, alinéa 3, du règlement du Sénat,
- et que les amendements n° 352 et 779 sont contraires aux dispositions de l'article 3 de la Constitution,
le Sénat les déclare irrecevables en application de l'article 44, alinéa 2, du règlement du Sénat.
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion la commission, un orateur d'opinion contraire pour cinq minutes maximum et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, la commission des affaires sociales, qui vient de se réunir, a décidé, à la majorité de ses membres, de déposer une motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité à l'encontre de trente-six amendements.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
M. Charles Pasqua. On va maintenant pouvoir passer aux explications de vote sur l'ensemble du texte !
Sourires sur les travées de l'UMP.
Ces amendements sont tout à fait éloignés du texte, et il n'y a donc pas lieu de les examiner.
Ce n'est pas parce qu'ils sont éloignés du texte qu'ils sont irrecevables !
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je tiens à préciser que la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité porte sur deux types d'amendements : trente-quatre sont dépourvus de tout lien avec l'objet du texte en discussion ; deux - les amendements n° 352 et 779 - sont contraires à la Constitution.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Précisez que ce sont ceux qui ont trait au droit de vote des étrangers ! Si ce n'est pas de l'égalité, alors qu'est-ce que c'est ?
Nous assistons à une utilisation coercitive de la procédure parlementaire. Une motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, fondée sur l'article 44, alinéa 2, du règlement du Sénat, a déjà été adoptée à l'encontre de vingt-cinq amendements à l'article 1er, ces derniers ayant été considérés comme dépourvus de tout lien avec l'objet du texte en discussion.
Ensuite, quarante et un amendements ont été frappés d'irrecevabilité en vertu de l'article 40 de la Constitution. Nous n'avons pas eu le temps de vérifier si l'article 40 était véritablement applicable, mais nous ne manquerons pas de le faire.
Maintenant, la commission des affaires sociales invoque l'irrecevabilité contre trente-six autres amendements.
Depuis une décision du Conseil constitutionnel du 19 juin 2001 portant sur le statut des magistrats, pour être recevables, les adjonctions ou modifications proposées par un amendement « ne sauraient [...] être dépourvues de tout lien avec l'objet du projet ou de la proposition soumis au vote du Parlement ».
Je citerai un commentaire paru dans Les Cahiers du Conseil constitutionnel à propos de la décision du 19 janvier 2006 sur la loi relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers : « Le droit d'amendement doit pouvoir s'exercer pleinement au cours de la première lecture, par chacune des deux assemblées parlementaires, des projets et des propositions de loi.
« À ce stade de la procédure législative, ce droit ne saurait dès lors être limité que par les règles de recevabilité, les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire et la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du projet ou de la proposition déposé sur le bureau de la première assemblée saisie. »
En règle générale, l'irrecevabilité suppose une absence manifeste de tout lien avec le sujet en discussion.
M. Jean-Pierre Godefroy. ... que nos amendements tendant à insérer des articles additionnels ont autant trait au texte que les dispositions concernant le permis de conduire, les débits de boisson ou que l'article touchant aux salles multiplexes, qui a d'ailleurs été supprimé.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Certains de nos amendements tendant à insérer des articles additionnels traitent de l'école primaire ou de l'école maternelle. Or, comme tout le monde s'accorde à le dire - et nous en avons débattu -, c'est là que commence l'égalité des chances ! C'est bien dès ce moment qu'il faut porter l'effort de lutte en faveur de l'égalité des chances.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'exception d'irrecevabilité en application de l'article 44, alinéa 2, du règlement est à manier avec précaution, s'agissant de ce texte. Un usage abusif risquerait en effet d'être sanctionné par le Conseil constitutionnel.
M. Christian Cambon s'exclame.
Nous tenons à protester. Il était en effet manifestement prévu de poursuivre la discussion. Or vous voulez gagner du temps ! C'est simplement un problème de timing.
M. Jean-Pierre Godefroy. Sur un projet de loi comme celui-là, donner la priorité à la montre plutôt qu'au débat est tout à fait inacceptable !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Protestations sur les travées de l'UMP.
Nous voterons évidemment contre cette motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Nous avons tout de même réussi à débattre un peu de ce texte dans cette assemblée.
Le présent projet de loi prétend aborder, je le rappelle, la question de l'égalité des chances, soit un très vaste sujet.
Or nombre d'articles de ce texte n'ont que peu de rapport avec l'égalité des chances - certains n'en ont même aucun -, et l'Assemblée nationale, dont les membres sont élus au suffrage universel direct, n'en a pas débattu.
Vous avez reporté en fin de débat l'examen de nos amendements tendant à insérer des articles additionnels, alors que ceux-ci avaient un lien direct avec les sujets que nous avons abordés tout au long de la discussion du texte.
La majorité parlementaire nous a contraints à accepter le report de la discussion de ces amendements à la fin. Mais nous ne sommes évidemment pas dupes !
Nous savions que vous chercheriez par tous les moyens à ne pas discuter de ces amendements.
C'est très regrettable ! En effet, la discussion n'a déjà pas eu lieu dans le pays.
Les partenaires sociaux, chacun le sait, n'ont pas été consultés sur nombre d'articles qui les concernent pourtant directement.
Au moins les articles additionnels que nous avions proposés contenaient-ils des dispositions allant dans le sens de l'égalité des chances, si tant est que ce soit bien l'objet de ce texte.
Il est pour le moins mesquin, me semble-t-il, d'invoquer aujourd'hui l'irrecevabilité de nos amendements, alors que nous avons nous-mêmes constaté ici que nombre d'articles du projet de loi n'avaient pas grand-chose à voir avec l'égalité des chances. Certains sont même nettement discriminants. Pour une loi sur l'égalité des chances, c'est très regrettable !
Mais tous ceux qui s'opposent à votre texte, en particulier à sa disposition la plus symbolique, le contrat première embauche, ou CPE, et qui s'apprêtent à vous le manifester apprécieront la manière dont vous traitez la représentation nationale !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. D'une manière plus générale, vos procédés illustrent la façon dont vous considérez tant les représentants de nos concitoyens que nos concitoyens eux-mêmes !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
On ne peut pas laisser dire que nous n'avons pas eu le temps de débattre ! Voilà quatre-vingt-deux heures que je suis là !
Quatre-vingt-deux heures que je suis à cette place ! Quatre-vingt-deux heures que nous vous écoutons et que nous vous répondons !
Mais ce qui n'est pas acceptable, c'est que vous nous lisez des papiers préparés par vos collaborateurs et sans aucun rapport avec le texte !
Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. -Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Madame Borvo Cohen-Seat, je ne vous ai pas interrompue ! Alors, écoutez-moi !
Permettez-moi d'évoquer le Journal du Dimanche, paru aujourd'hui : un article rédigé par une journaliste, que je ne connais d'ailleurs pas, évoque des débats approfondis et le fait que le Sénat a débattu longuement et en toute liberté.
Par conséquent, mes chers collègues, à l'extérieur, la perception n'est pas la même que sur vos travées !
Vous ne pouvez donc pas prétendre que nous souhaitons empêcher l'opposition de s'exprimer !
Le plus grand nombre des amendements qui sont visés par la motion - et, croyez-moi, nous les avons tout de même un peu étudiés ! - sont extrêmement éloignés du texte et, comme l'a dit M. le président de la commission des affaires sociales, deux amendements sont anticonstitutionnels.
Il ne faut donc pas dire que nous n'avons pas débattu. Nous avons débattu pendant quatre-vingt-deux heures ici même !
Vous pouvez tourner les choses comme vous l'entendez, invoquer les quatre-vingt-deux heures de débat, ...Toujours est-il que les choses sont très claires pour tout le monde !
Si vous aviez souhaité un débat approfondi sur un projet de loi que vous considérez comme important, vous n'auriez pas eu recours, à l'Assemblée nationale, à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, après l'examen de l'article 3 bis.
Oui, mais c'est un fait ! Le débat doit avoir lieu tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat !
Vous n'auriez pas déclaré l'urgence sur ce texte, afin qu'il ne fasse l'objet que d'une seule lecture ! Vous n'auriez pas réservé autant d'amendements pour la fin de la discussion et fait « tomber » un nombre incalculable d'entre eux, afin d'achever rapidement l'examen de l'article 3 bis !
Vous n'auriez pas non plus annulé une question orale avec débat sur l'Europe, prévue pour la veille du début de la discussion de ce projet de loi au Sénat, ...
... et reporté sine die l'examen en deuxième lecture d'un projet de loi important, devant être discuté rapidement, puisqu'il vise à permettre l'embauche de volontaires associatifs dès cet été !
Vous avez tout utilisé pour empêcher le débat !
Or quel est votre objectif ? Vous avez les yeux rivés sur le calendrier social et sur celui de la rue.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Vous avez beau dire que ce n'est pas la rue qui fait la loi, votre seul souci est en réalité celui-là !
Vous avez voulu faire adopter rapidement l'article 3 bis, afin de pouvoir communiquer et démobiliser les citoyens en leur disant : « Circulez, il n'y a plus rien à voir ! » Mais cela n'a pas marché !
Nous sommes désormais parvenus à la fin des débats. Nous pouvions donc continuer tranquillement, comme en convenait d'ailleurs M. le rapporteur. Selon lui, nous pouvions poursuivre la discussion toute la nuit, et la terminer demain. La conférence des présidents avait même inscrit la suite de la discussion à l'ordre du jour de demain, matin et après-midi.
C'est normal ! Il reste toute de même quatre-vingts amendements à examiner !
Sourires
Or vous voulez absolument communiquer au plus vite, dire que la loi est votée, pour désamorcer cette mobilisation. C'est cela que vous voulez !
Vous savez pourtant que l'article 3 bis et le projet de loi ne constitueront pas une réalité juridique incontournable pour les citoyens. En effet, la commission mixte paritaire ne peut pas être convoquée avant mercredi !
Mardi, nous expliquerons donc à ceux qui voudront manifester et continuer à faire pression pour obtenir le retrait de ce texte que, malgré toutes vos manoeuvres, il est utile qu'ils descendent dans la rue.
Et vous entendrez alors le message que vous ne voulez pas écouter pendant le débat parlementaire !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. -Exclamations sur les travées de l'UMP.
Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Sommes-nous sous un préau d'école, devant une assemblée électorale ou au Sénat de la République ?
L'invocation permanente de la rue me fait quelque chose. Nous sommes des parlementaires !
Il n'y a aucune raison que vous m'interrompiez !
Ce projet de loi comportait initialement vingt-huit articles. M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, qui en est l'auteur principal, est présent.
Comme l'a dit M. le rapporteur, nous avons discuté pendant quatre-vingt-deux heures. On peut difficilement affirmer que, pendant tout ce temps, nous n'avons pas entendu beaucoup d'arguments !
La motion que vient de présenter M. le président de la commission des affaires sociales tend à écarter du débat un certain nombre d'amendements visant à insérer dans le projet de loi des articles additionnels qui n'ont rien à y faire, et ce pour trois raisons.
D'abord, deux de ces amendements sont anticonstitutionnels.
Ensuite, sur chaque article, nous avons examiné, sans aucune règle particulière de procédure, un certain nombre d'amendements se référant au dispositif législatif. Mais nous avons tout de même constaté que chaque amendement faisait l'objet d'une présentation de cinq minutes, puis de l'avis de la commission et du Gouvernement et, enfin, d'une, deux, trois, quatre, voire cinq explications de vote. Comme si l'idée de retarder le débat était absente de l'esprit de nos collègues !
Sourires
Une telle idée me paraît, hélas ! bien ancrée dans l'esprit de nos collègues.
Enfin, nous examinons aujourd'hui les amendements visant à insérer des articles additionnels. De ce seul fait, il est clair qu'ils ne sont pas directement liés au texte. Si tel avait été le cas, nous les aurions examinés dans le cadre des différents articles.
M. Jean-Pierre Fourcade. Telles sont les raisons pour lesquelles nous soutenons la présente motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Je mets aux voix la motion n° 905, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet des trente-six amendements qu'elle vise.
La motion est adoptée.
En conséquence, les amendements n° 621, 620, 618, 623, 318, 632 rectifié, 633, 635, 634, 636, 643, 624, 625, 630, 645, 626, 628, 627, 675, 677, 775, 774, 778, 463, 464, 471, 473, 476, 478, 802, 803, 357, 807, 808, 352 et 779 sont rejetés.
J'en donne lecture :
L'amendement n° 621, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 311-1 du code de l'éducation, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L... . - L'articulation entre la grande section de maternelle et le cours préparatoire est mise en oeuvre par l'équipe éducative en lien avec les parents et les responsables des activités périscolaires afin de donner à chacun les meilleures chances. Elle doit faciliter l'apprentissage de l'écriture et de la lecture et des premiers éléments de mathématiques. »
L'amendement n° 620, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 321-1 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'école maternelle constitue le premier cycle de l'école primaire. Elle a pour fonction de faciliter la socialisation des enfants et leur entrée dans les premiers apprentissages. Les enseignements y sont assurés par des professeurs d'école assistés - pour les besoins corporels notamment - d'agents territoriaux spécialisés. Ces enseignants constituent la base d'une culture commune indispensable à tous. »
L'amendement n° 618, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Les activités pratiquées dans les classes enfantines et la démarche éducative en école maternelle visent à favoriser l'éveil de la personnalité de l'enfant, l'apprentissage de la vie collective, l'accès à l'expression orale, artistique et corporelle. L'école maternelle n'a pas pour objet l'apprentissage de la lecture, de l'écriture ou d'autres disciplines scolaires, mais tend à prévenir les difficultés scolaires, dépister les handicaps et à compenser les inégalités. »
L'amendement n° 623, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Tout titulaire du baccalauréat, dès obtention de ce dernier, doit pouvoir s'inscrire de droit dans l'enseignement supérieur.
L'amendement n° 318, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa du I de l'article L. 322-4-7 et le premier alinéa du I de l'article L. 322-4-12 du code du travail sont complétés par deux phrases ainsi rédigées :
« Les personnes recrutées par les établissements d'enseignement mentionnés au chapitre II du titre 1er et au titre II du livre IV du code de l'éducation, peuvent exercer leurs fonctions dans l'établissement qui les a recrutées, dans un ou plusieurs autres établissements ainsi que, compte tenu des besoins, dans une ou plusieurs écoles. Dans ce dernier cas, les directeurs d'école peuvent participer à la procédure de recrutement. »
L'amendement n° 632 rectifié, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 212-4-3 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les heures complémentaires donnent lieu à une majoration de salaire d'au moins 25 %. »
L'amendement n° 633, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Chaque heure complémentaire donne lieu à une majoration de salaire de 25 %, pour les huit premières heures effectuées au-delà de la durée mensuelle fixée au contrat. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %. »
L'amendement n° 635, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail sont supprimées.
L'amendement n° 634, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'accord collectif de travail précise les conditions dans lesquelles les heures supplémentaires ou les heures choisies visées à l'article L. 212-6-1 du code du travail sont proposées en priorité aux salariés à temps partiel qui souhaitent effectuer un nombre d'heures supérieur à celui mentionné dans leur contrat de travail, ainsi que les conditions dans lesquelles ces heures sont portées à la connaissance des salariés à temps partiel par l'employeur. »
L'amendement n° 636, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du dernier alinéa de l'article L. 212-4-4 du code du travail, les mots : «, ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement » sont supprimés.
L'amendement n° 643, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux derniers alinéas de l'article L. 311-7 du code du travail sont supprimés.
L'amendement n° 624, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 321-1 du code du travail est complété par treize alinéas ainsi rédigés :
« Est interdit le licenciement économique effectué alors que la société ou le groupe a réalisé des profits ou distribué des dividendes au cours du dernier exercice.
« L'examen de la situation de l'entreprise est réalisé alors par une commission constituée :
« de représentants du personnel ;
« de représentants de l'employeur ;
« de l'inspection du travail ;
« du commissaire aux comptes de l'entreprise ;
« d'un magistrat de la juridiction commerciale du ressort ;
« d'un représentant de la Banque de France ;
« d'un membre de la commission décentralisée du contrôle de fonds publics ;
« d'élus locaux »
« Au terme d'un délai de six mois un avis détermine les propositions nécessaires à la préservation de l'emploi.
« Cet avis est transmis à l'employeur, à l'autorité administrative, aux salariés, à leurs représentants ou au comité d'entreprise.
« Sera puni d'une amende de 7 600 euros prononcée autant de fois qu'il y a de salariés concernés par l'infraction, l'employeur qui ne respecte pas cette interdiction ».
L'amendement n° 625, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 321-3 du code du travail il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L... . - À la suite des procédures de consultation prévues aux articles L. 321-3 et L. 432-1, les salariés directement, par l'intermédiaire de leurs représentants, du comité d'entreprise, peuvent saisir l'autorité administrative compétente aux fins de suspension des licenciements pour motif économique et de la fermeture de l'entreprise éventuellement décidée.
« Cette saisine ouvre un délai de six mois pendant lequel toute solution économique et sociale de préservation de l'emploi dans l'entreprise concernée est recherchée.
« À cet effet, une commission est composée de :
« représentants du personnel ;
« représentants de l'employeur ;
« l'inspection du travail ;
« d'un magistrat de la juridiction commerciale du ressort ;
« d'un membre de la commission décentralisée du contrôle de fonds publics ;
« des élus locaux »
« représentant de la Banque de France ;
« commissaire aux comptes de l'entreprise ;
« La commission transmet son avis à l'autorité administrative compétente dans un délai de quatre mois. Copie en est transmise aux représentants du personnel, au comité d'entreprise et à l'employeur.
« L'autorité administrative dispose d'un délai de deux mois pour lever la suspension ou refuser les licenciements économiques et l'éventuelle fermeture du site. Elle peut également demander à l'employeur de présenter de nouvelles mesures sociales. Elle peut présenter elle-même toute proposition en tenant compte de la situation économique de l'entreprise. »
L'amendement n° 630, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 351-3-1 du code du travail est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les actionnaires des entreprises réalisant des bénéfices, cotées ou non en Bourse, qui procèdent à des licenciements font l'objet d'une restitution sociale. Son montant est calculé selon la formule suivante :
« Montant des salaires et des cotisations sociales pour chaque travailleur licencié/nombre d'années restant avant l'âge légal de départ à la retraite.
« Pour payer la restitution sociale, l'entreprise avance la somme et la verse, en une seule fois, un mois au plus après l'annonce des licenciements, à un fonds géré par la caisse des dépôts, dénommé fonds de gestion de la restitution sociale. Pour honorer son paiement, l'entreprise fait appel à ses fonds propres, procéder à une émission obligatoire ou contracter un emprunt bancaire. »
L'amendement n° 645, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 351-17 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Avant toute décision d'extinction du droit au revenu de remplacement, le demandeur d'emploi est entendu et peut être accompagné de la personne de son choix. »
L'amendement n° 626, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'employeur qui procède à un licenciement économique alors que la société ou le groupe a réalisé des profits ou distribué des dividendes au cours du dernier exercice devra rembourser dans un délai de trois mois les fonds publics reçus depuis cinq ans.
L'amendement n° 628, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le second alinéa du 3 de l'article 158 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le crédit d'impôt prévu à l'article 200 septies est supprimé lorsque les dividendes proviennent d'une société ou d'un groupe qui a procédé ou engagé une procédure de licenciement économique dans les deux années alors qu'ils réalisaient des profits ou distribués des dividendes. »
L'amendement n° 627, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 158 du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les dividendes ne sont pas versés durant trois années aux actionnaires lorsque la société ou le groupe bénéficiaires ont procédé ou engagé un licenciement économique dans les deux ans qui précèdent. »
L'amendement n° 675, présenté par Mme Mathon-Poinat, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique est abrogée.
L'amendement n° 677, présenté par Mme Mathon-Poinat, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le gouvernement saisit l'Observatoire de l'emploi public d'une demande d'étude annuelle sur la précarité dans les trois fonctions publiques.
L'amendement n° 775, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 822-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 882 -1 - Le réseau des oeuvres universitaires assure une mission d'aide sociale envers les étudiants et veille à adapter les prestations aux besoins de leurs études, en favorisant notamment leur mobilité. Les décisions concernant l'attribution des logements destinés aux étudiants sont prises par les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires. »
L'amendement n° 774, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 822-2 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 822 -2 - Le conseil d'administration du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires est chargé de définir la politique générale du Centre national et des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires. Les conseils d'administration du Centre national et des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires comprennent des représentants des collectivités territoriales ou de leurs groupements dans des conditions fixées par décret.
« Le conseil d'administration du Centre national est également chargé :
« 1° D'assurer la répartition des crédits budgétaires ordinaires et extraordinaires affectés aux centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires ;
« 2° De recueillir et de répartir tous dons, legs, subventions et aides diverses susceptibles de favoriser l'établissement, le fonctionnement ou le développement de ces oeuvres. »
L'amendement n° 778, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité est abrogée.
II. - L'article 59 de la loi de Finances pour 2004 (loi n°2003-1311 du 30 décembre 2003) est abrogé.
L'amendement n° 463, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
Titre ...
Mesures d'urgence en faveur du logement pour tous.
L'amendement n° 464, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter de la publication de la présente loi, les loyers des logements locatifs soumis aux dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 et des logements locatifs sociaux sont bloqués pendant une année. Trois mois avant l'issue de cette période, le conseil national de l'habitat remet un rapport au gouvernement et au Parlement évaluant l'impact de la hausse des loyers et des charges sur le pouvoir d'achat des différentes catégories de ménages depuis 2002 et faisant des propositions pour diminuer la part des loyers et charges locatives dans le revenu disponible des ménages.
L'amendement n° 471, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 302-6 du code de la construction et de l'habitation est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces inventaires font apparaître les proportions de chaque catégorie de logement locatif social en fonction des plafonds de ressources et de loyers s'y attachant et de leur mode de financement. ».
L'amendement n° 473, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Cet objectif est défini afin de renforcer l'équilibre social de l'habitat sur le territoire de la commune. À cet effet, sur la base des inventaires et des répartitions entre les différentes catégories de logements locatifs sociaux mentionnés au premier alinéa de l'article L. 302-6, cet objectif fixe les parts respectives des logements locatifs sociaux à réaliser en fonction de leur catégorie. Les logements construits au moyen des prêts visés à la sous-section 3 de la section 1 du chapitre unique du titre III du livre III du présent code ne peuvent représenter plus de 33 % de cet objectif.
« Le préfet peut autoriser la commune à déroger aux obligations visées à l'alinéa précédent si la commune a sur son territoire une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. ».
L'amendement n° 476, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deuxième et troisième phrases du premier alinéa du 2° du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts sont supprimées.
L'amendement n° 478, présenté par M. Repentin, Mmes Le Texier et Alquier, MM. Sueur, Assouline, Bel et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Cazeau, Desessard, C. Gautier, Godefroy, Lagauche, Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mmes Khiari, Printz, San Vicente et Schillinger, MM. Ries, Yung, Caffet, Krattinger et Vézinhet, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Le h) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les logements visés aux premier et deuxième alinéas du présent h, acquis ou construits à compter de la date de publication de la présente loi, le bénéfice de la déduction définie au présent h est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l'engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d'habitation principale à une personne autre qu'un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cet engagement prévoit, en outre, que le loyer et les ressources du locataire appréciées à la date de conclusion du bail ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret ».
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 802, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 24, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 111-4 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Les parents d'élèves participent, par leurs représentants, au conseil d'école, au conseil scientifique et pédagogique, au conseil d'administration et au conseil de classe des établissements publics locaux d'enseignement ».
L'amendement n° 803, présenté par Mme David, MM. Voguet, Muzeau, Fischer et Autain et Mme Hoarau, est ainsi libellé :
Avant l'article 24, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 111-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un local de réunion est mis, dans chaque établissement scolaire, à la disposition des représentants élus des parents d'élèves ».
L'amendement n° 357, présenté par M. Cazeau, Mme Alquier, MM. Assouline et Bel, Mme Blandin, M. Bodin, Mmes Boumediene-Thiery, Cerisier-ben Guiga et Demontès, MM. Desessard, C. Gautier et Godefroy, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Le Texier, MM. Madec, Mélenchon et Peyronnet, Mme Printz, MM. Repentin et Ries, Mmes San Vicente et Schillinger, M. Sueur, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 24, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 131-2 du code de l'éducation, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Le niveau départemental est le lieu de coordination des différents acteurs et d'harmonisation des pratiques d'établissement. »
L'amendement n° 807, présenté par Mme Assassi, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 59 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est abrogé.
L'amendement n° 808, présenté par Mme Assassi, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le paragraphe 3 de la section I du chapitre 1er du titre II du livre II du code de procédure pénale et les articles 393 à 397-6 du même code sont abrogés.
L'amendement n° 352, présenté par Mme Khiari et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales est accordé aux étrangers. Ces derniers ne peuvent exercer la fonction de maire ou d'adjoint et participer à la désignation des électeurs sénatoriaux et à l'élection des sénateurs.
L'amendement n° 779, présenté par Mme Assassi, MM. Muzeau et Fischer, Mme Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les étrangers résidant en France depuis au moins 5 ans ont le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, nous souhaitons une suspension de séance pour réorganiser notre travail.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Compte tenu du nombre d'amendements qui ont été déclarés irrecevables, il nous faut réorganiser nos dossiers pour travailler correctement.
M. Charles Pasqua. Pourquoi ne demandez-vous pas que l'on suspende nos travaux jusqu'à mercredi prochain ?
Sourires
Sourires
Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pendant quinze minutes.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures trente.
L'amendement n° 189, présenté par M. Mélenchon, Mme Khiari, M. Godefroy, Mmes Le Texier, Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard, C. Gautier, Lagauche, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 244 quater G du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... En cas de manquement de l'entreprise à ses obligations de formation ou de rémunération d'un ou plusieurs apprentis constaté par une décision judiciaire, l'entreprise ne peut plus bénéficier du crédit d'impôt défini au présent article au titre des autres apprentis qu'elle continuerait d'employer. Elle est également tenue de rembourser la partie du crédit d'impôt perçue au titre du ou des apprentis envers lesquels elle a manqué à ses obligations de formation ou de rémunération. »
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
La situation est totalement cocasse ! Du fait des bouleversements incessants de l'ordre d'examen des dispositions de ce projet de loi, me voici de retour pour intervenir sur l'apprentissage.
L'incohérence de cette discussion ne doit pas nous empêcher d'adopter les mesures que la sagesse nous impose de prendre à la lecture de ce texte inique, hâtif et mal ficelé !
De quoi s'agit-il ?
Votre logique consiste à relancer de manière extrêmement vigoureuse l'apprentissage.
Ce qui est nouveau, en revanche, c'est votre volonté d'étendre l'apprentissage aux jeunes de quatorze et quinze ans, de façon aveugle, sans même reconsidérer les méthodes pédagogiques et les contenus de cette filière. Nous avons déjà discuté de cela fort longuement.
Des précautions doivent pourtant être prises. Vous n'avez pas voulu de celles qui concernent la pédagogie, parce qu'elles vous semblent trop éloignées de l'objet du présent projet de loi.
En revanche, s'agissant de l'aide publique qui sera accordée aux employeurs pour l'embauche d'apprentis - dans des proportions tout à fait nouvelles ! -, il faudra bien admettre l'idée qu'elle devra au minimum être conditionnée au respect par les entreprises des obligations élémentaires résultant du contrat d'apprentissage. Il s'agit, je le rappelle, de l'obligation de désignation, et de présence d'un maître d'apprentissage - ce n'est pas toujours le cas ! -, ainsi que de l'obligation de suivi, de formation et de rémunération de l'apprenti. Ceux qui s'intéressent à l'apprentissage connaissent l'importance de ces obligations.
Quand il sera constaté par une décision de justice - je ne vous propose pas une révolution ! -, le non-respect de ces obligations devra entraîner l'exclusion pour l'entreprise du bénéfice du crédit d'impôt pour les autres apprentis qu'elle emploie ou qu'elle pourrait employer. Il faut en effet que les patrons voyous - je ne vois pas d'autre mot pour les décrire face à ce genre de situation - soient sanctionnés en pareil cas.
On ne peut pas admettre qu'une entreprise qui se comporte mal avec l'un de ses apprentis, dès lors que cela aura été constaté par la justice, puisse continuer à percevoir une aide publique pour les autres apprentis qu'elle emploie et qui risquent naturellement d'être tout aussi mal traités.
De même, il me semble normal - je suis favorable à une sanction exemplaire à cet égard - d'exiger le remboursement du crédit d'impôt au titre du ou des apprentis envers lesquels l'entreprise a manqué à ses obligations.
Si cet amendement est adopté, je vous garantis qu'il aura un effet dissuasif. Il n'y aura pas besoin de l'appliquer, simplement parce que chacun saura ce qu'il en cuit à qui ne respecte pas les dispositions légales minimales à l'égard des apprentis.
Une telle mesure vise à lutter contre les effets d'aubaine et à éviter que des entreprises ne signent de manière artificielle des contrats d'apprentissage dans le seul but de bénéficier de crédits d'impôt. Faites-nous la grâce d'admettre que nous ne pensons qu'à certaines entreprises et non à toutes. Mais avouez tout de même qu'il serait très confortable pour certaines d'entres elles, lorsqu'elles rencontrent des difficultés, de se figurer que, grâce à un crédit d'impôt, elles pourront arranger leurs comptes. Il ne serait pas bon, en revanche, que les jeunes apprentis en fassent les frais !
Le remboursement des aides à l'emploi non suivies d'effets est une bonne piste, encore que ses modalités d'application soient difficiles à définir.
Toutefois, cette pénalité nous paraît excessive par rapport à des manquements qui peuvent être mineurs ou circonstanciels. Elle dissuaderait manifestement les entreprises d'embaucher le moindre apprenti.
Or nous souhaitons tout faire pour aider les jeunes à entrer en apprentissage quand ils le souhaitent.
La commission émet par conséquent un avis défavorable sur cet amendement.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Madame Borvo, permettez-moi de garder ma tendresse pour la fin du débat !
Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Je rappelle tout d'abord que l'objectif du crédit d'impôt en faveur des employeurs d'apprentis - nous avons eu un débat à ce sujet, notamment lors de l'examen de la loi de programmation pour la cohésion sociale - est d'avoir un effet accélérateur et de favoriser l'accueil d'un plus grand nombre d'apprentis.
Un seuil a d'ailleurs été fixé, je le rappelle, pour inciter - voire pour obliger - les entreprises de plus de 250 salariés à accueillir un certain pourcentage de leurs effectifs en formation en alternance.
Les entreprises qui n'accueilleraient pas d'apprenti, ou qui en accueilleraient peu, seront sanctionnées financièrement. La taxe devra alors être pleinement acquittée sans déduction.
Quant aux employeurs que vous visez, monsieur Mélenchon, c'est-à-dire ceux qui ne rempliraient pas leurs obligations en matière de formation ou de rémunération des apprentis, ils s'exposent à la résiliation des contrats par le juge. En outre, le préfet pourra prendre à leur encontre une mesure d'opposition à l'engagement d'apprentis et bloquer le bénéfice du crédit d'impôt.
Votre préoccupation me paraît donc satisfaite, monsieur le sénateur, d'autant plus que les inspections en matière d'apprentissage relèvent du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. La montée en charge de l'apprentissage nous conduira naturellement à augmenter le nombre d'inspecteurs responsables de ces contrôles.
Oui, je m'y engage !
Notre objectif est d'atteindre, voire de dépasser, le nombre de 500 000 apprentis en 2009, grâce notamment à l'engagement des entreprises de plus de 250 salariés. Mais cela ne peut se faire - je le dis très clairement - au détriment du nécessaire contrôle. Nous avons d'ailleurs déjà eu un débat à ce sujet, sur l'initiative de M. le rapporteur, et je garde le souvenir de quelques intervenants.
Le Gouvernement s'engage à accompagner la montée en charge de l'apprentissage et à faire procéder à des contrôles effectifs sur le terrain, par des femmes et des hommes responsables de cette mission, au nom de l'État.
Nos collègues de gauche, une fois de plus, montrent bien la faible considération qu'ils ont pour les entreprises, et singulièrement pour celles qui font des efforts en faveur de l'apprentissage des jeunes.
Tout au long de cette discussion, vous n'avez eu de cesse, mes chers collègues, de réclamer des sanctions contre les entreprises, notamment les petites et les moyennes d'entre elles, et d'avoir à leur égard les mots les plus durs.
Pour ma part, j'ai eu l'occasion, madame Tasca, et vous le savez, de conduire pendant douze ans la politique d'apprentissage de la région d'Ile-de-France. J'ai ainsi fait progresser de plus de 45 000 le nombre d'apprentis et conduit 220 000 d'entre eux à un véritable emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
J'ai pu constater que l'immense majorité des entreprises sont citoyennes et solidaires de ces jeunes, auxquels elles consacrent un temps infini et à qui elles apprennent avec beaucoup de passion leur métier.
Tout au long de la discussion que nous avons eue avant l'examen de l'article 3 bis, vous nous avez fait part de vos inquiétudes quant à notre souhait de voir l'apprentissage se développer. Vous nous avez dit que nous ne trouverions pas assez de chefs d'entreprise, pas assez de stages. Faut-il envoyer des signes négatifs supplémentaires aux chefs d'entreprise ? Pour notre part, nous ne le pensons pas.
Si certains chefs d'entreprise commettent des irrégularités s'agissant du statut de leurs apprentis, le code du travail permet largement, croyez-moi, de les sanctionner.
Nous sommes donc totalement hostiles à cet amendement.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
L'intervention de M. Cambon nous conforte dans l'idée qu'il faut voter cet amendement.
Puisque vous faites état de votre expérience, monsieur Cambon, permettez-moi de vous rappeler que tout le monde ne l'a pas appréciée de la même façon !
Ensuite, si la majorité des employeurs se conduit bien et applique le code du travail, qui est tout de même sérieusement mis à mal, ce n'est pas le cas de certains autres, comme en témoigne l'expérience de la mise en oeuvre du CNE, le grand frère du CPE.
Certains patrons - nous ne savons pas combien exactement, le CNE étant assez récent - se sont en effet empressés d'embaucher en CNE des salariés qu'ils auraient, sans celui-ci, recrutés en CDI. Ils n'ont donc pas embauché des salariés en plus, ils ont juste profité d'un effet d'aubaine !
À la suite du jugement du conseil des prud'hommes de Longjumeau, l'Union des industries et métiers de la métallurgie, l'UIMM, a demandé aux employeurs de « veiller à l'utilisation loyale du CNE ».
Aussi serait-t-il bon que les patrons qui n'appliqueraient pas loyalement le CPE, même s'il ne s'agit que de quelques-uns, encourent des sanctions, ...
... normales de la part de l'État, qui leur donne de l'argent public, prélevé sur les salaires de nos concitoyens. L'État doit disposer d'une telle arme. Les patrons qui se conduiront mal ne devront plus bénéficier des aides de l'État.
Monsieur le président, en application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture de la discussion de l'amendement n° 189.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38 du règlement, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 189.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 15, présenté par M. Gournac, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L. 116-4 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans le cadre de ces contrôles, il est procédé à l'évaluation de l'application du premier alinéa de l'article L. 122-45 à l'occasion du recrutement des apprentis. »
La parole est à M. le rapporteur.
Il est ressorti des auditions auxquelles j'ai procédé que la sélection des jeunes à l'entrée en apprentissage donnait lieu à des discriminations. C'est bien sûr inacceptable. C'est pourquoi nous proposons cet amendement visant à ce que, dans le cadre des contrôles prévus à l'article L. 116-4 du code du travail, il soit procédé à une évaluation spécifique des manquements au premier alinéa de l'article L. 122-45 du même code, qui interdit les discriminations lors du recrutement ou de l'accès aux stages.
Nous voulons simplement veiller au respect des personnes, en particulier dans les CFA, et à l'absence de toute discrimination non seulement lors du recrutement, mais aussi, messieurs les ministres, lors des stages. Il ne s'agit pas de gêner qui que ce soit. Cependant, les expériences négatives qui m'ont été rapportées avaient eu lieu lors de la sélection à l'entrée en apprentissage. Je suis allé dans un centre de la Seine-Saint-Denis où l'on m'a expliqué comment les choses se passaient. Il en va de même pour les stages : certains jeunes, victimes de discrimination, n'ont aucune possibilité de se former.
La lutte contre la discrimination est l'une des priorités assignées à ce texte. Aussi, nous sommes naturellement favorables à la proposition de la commission.
Cette question a déjà été abordée ce matin, notamment par Mme Khiari. Lors de la discussion générale, Jean-Louis Borloo expliquait bien comment, par la méthode dites « des habiletés », indépendamment du curriculum vitae, indépendamment du patronyme, du faciès, on peut déceler des talents et, s'ils s'engagent, leur donner ainsi une vraie chance. C'est bien de cela qu'il s'agit.
Ce matin, en début de séance, le débat sur le phénotype nous a conduits à des sujets essentiels. Les uns et les autres sommes appelés à faire notre révolution intellectuelle, à prendre conscience du chemin qui est à parcourir en la matière.
S'agissant de l'application de l'article l. 122-45 du code du travail, il nous faudra effectivement veiller à ce que la discrimination disparaisse progressivement mais réellement. C'est l'un des sujets majeurs qui nous attend. Je rappelais ce matin combien, notamment au cours des opérations de promotion de jeunes diplômés de banlieue, nous avons pu mesurer cette discrimination. Elle ne porte pas simplement sur les patronymes, mais aussi sur le quartier d'origine.
M. Roland Muzeau. Je souhaite rappeler M. le rapporteur à la raison. Comment peut-il un seul instant penser que certains employeurs pourraient se rendre coupables de discrimination ?
Sourires
Vous avez rejeté l'amendement précédent, monsieur le rapporteur, au demeurant très proche de l'un de ceux que nous avions présentés à l'article 1er et qui portait sur une problématique identique. Vous avez fait la même réponse qu'alors - au moins, vous avez de la constance -, à savoir qu'il ne peut pas y avoir d'employeur qui dévie de la règle, de la loi, du code du travail et qui ne se conforme pas à une certaine moralité et à une certaine éthique.
C'est d'ailleurs ce que vous nous avez expliqué pendant quatre-vingt-deux heures. Et puis là, tout d'un coup, vous considérez que la discrimination est une réalité et, en jouant les redresseurs de torts, vous déposez un amendement d'affichage, au vrai pas bien méchant.
Je rappelle que ce n'est pas moi qui ai utilisé l'expression « patron voyou », mais le Président de la République, Jacques Chirac ; l'auriez-vous oublié ? Il a d'ailleurs employé d'autres formules au sujet des immigrés, qu'on rappellera peut-être par la suite.
Que voulez-vous que nous disions sur cet amendement n° 15 ? Les intervenants de droite seront sûrement nombreux à s'en emparer pour dénoncer le comportement des employeurs qui pratiquent la discrimination à l'entrée en apprentissage. Après les avoir écoutés, nous nous ferons notre opinion.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
J'approuve totalement l'amendement de la commission.
Il faudrait quand même qu'on accepte de regarder un jour ou l'autre les choses en face.
Dans le secteur de l'apprentissage, la discrimination indirecte fait des ravages. Elle n'est pas nécessairement le fait de patrons voyous, mon cher collègue : elle se situe à tous les niveaux. Ainsi, il arrive aux responsables des centres de formation d'apprentis, qui croient parfois bien faire, de ne pas recommander des jeunes issus des minorités visibles, estimant que les employeurs ne les prendront pas et escomptant ainsi éviter que les autres jeunes ne perdent une possibilité de se faire embaucher.
Bref, on n'embauche pas des personnes issues de minorités visibles pour favoriser a contrario l'embauche d'un Michel et d'une Françoise.
Je parlais de discrimination en chaîne. En effet, lorsqu'on les interroge, les employeurs affirment qu'ils prendraient volontiers des personnes issues des minorités visibles, mais ils mettent en avant le fait que les clients refusent d'être servis par cette population - c'est notamment le cas des restaurateurs. C'est cela la discrimination en chaîne : elle va des responsables de centres de formation aux employeurs, puis au grand public. C'est pourquoi il est absolument nécessaire de procéder à son évaluation, et la proposition de notre collègue y contribue largement. Il est vrai que des instruments de mesure y aideraient, mais je ne relance pas le débat.
Concernant les discriminations à l'entrée en apprentissage, notre collègue a parfaitement raison. Cela nous ramène à l'apprentissage junior, que vous voulez créer. La discrimination a cours précisément dès la formation dans les professions qui ont été autorisées par le décret du 13 janvier 2006 à employer des jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans les jours fériés et des apprentis de moins de dix-huit ans les dimanches et jours fériés.
Il est illusoire de croire que l'apprentissage junior permettra aux jeunes de ces quartiers de trouver un emploi, dans la mesure où, dès la formation, ils seront victimes de la discrimination précisément dans ces professions visées dans le décret précité. Vous avez démontré vous-même, monsieur Lecerf, que cela ne fonctionnera pas ; ce sont ces métiers qui discriminent le plus.
Le débat pourrait encore durer deux ou trois jours. On entend toujours les mêmes arguments. Aussi, monsieur le président, en application de l'article 38, alinéa 1, du règlement, je demande la clôture des explications de vote sur l'amendement n° 15.
Sourires
Il n'a rien dit depuis huit jours et il ne reparaît que pour demander la clôture de la discussion des amendements !
En application de l'alinéa 2 de l'article 38, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 15.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
L'amendement n° 186, présenté par M. Mélenchon, Mme Khiari, M. Godefroy, Mmes Le Texier, Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard, C. Gautier, Lagauche, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 117-4 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« À cet effet, l'employeur doit permettre au maître d'apprentissage de dégager sur son temps de travail les disponibilités nécessaires à l'accompagnement de l'apprenti et aux relations avec le centre de formation d'apprentis.
« Il veille à ce que le maître d'apprentissage bénéficie de formations lui permettant d'exercer correctement sa mission et de suivre l'évolution du contenu des formations dispensées à l'apprenti et des diplômes qui les valident. »
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
Tout à l'heure, je pointais du doigt l'incohérence d'une discussion qui, à divers moments, aborde des sujets dépourvus de tout lien. Aussi, nous apprécierions qu'un effort soit fait pour que les réponses soient un peu plus cohérentes, ne serait-ce que pour qu'il nous soit manifesté un petit peu de respect.
Le ministre et la commission divergent. On peut parfaitement le comprendre. Le ministre dit que des punitions sont de toute façon prévues, mais la commission en écarte l'idée même au motif qu'elles pourraient dissuader l'employeur ! Apparemment, vous avez tous été convaincus en dépit de la contradiction des arguments puisque vous venez de rejeter mon amendement, au motif que je semais le doute sur l'honnêteté des patrons en prévoyant des sanctions contre ceux que le Président de la République a lui-même qualifiés de patrons voyous. À cet égard, monsieur Muzeau, vous avez bien fait de rappeler que cette expression, qui décrit bien certains comportements, était celle du Président de la République.
Il faut lever toute ambiguïté, parce que quelqu'un lira peut-être nos travaux : personne ici ne méprise l'entreprise. Cela n'aurait d'ailleurs pas de sens. Une entreprise, c'est une entité complexe, au sein de laquelle sont réunis plusieurs métiers autour d'activités communes. Quel sens aurait un jugement sur son existence ? Là n'est pas le sujet. Le rôle du législateur consiste à prévoir des sanctions. Diriez-vous que ceux qui votent les articles du code pénal insultent les Français en mettant en doute leur honnêteté ? Ou diriez-vous que le fait qu'il existe un code de la route implique que tous les chauffeurs soient des assassins volontaires ? Bien sûr que non ! Il s'agit simplement de prévoir que seront sanctionnés les manquements graves à la morale, à la déontologie et au respect qu'on doit aux jeunes apprentis. Celui qui mord le trait ne doit pas être autorisé à embaucher d'autres apprentis et bénéficier ainsi d'autres crédits d'impôt. Cela ne veut pas dire que tous ceux qui font de l'apprentissage sont des voyous. Un certain nombre le sont, qui doivent être punis ou dissuadés.
Franchement, vous m'avez reproché - et sans doute me le reprocherez-vous encore - de vouloir trop en faire pour contrôler les cas extrêmes. Mais vous-mêmes ne vous êtes pas gênés pour répéter une troisième fois dans ce projet de loi que l'école devait garantir l'apprentissage de la langue française, alors même que le code de l'éducation en dispose déjà dans deux de ses articles. En revanche, vous refusez d'adopter une mesure de justice tendant à sanctionner des voyous avérés au motif qu'il ne faut pas faire peur aux autres pauvres chéris qui pourraient se sentir visés.
Mon amendement n° 186 est de même nature. Il vise à perfectionner le système. Je me régale à l'idée d'entendre vos objections. Vous pouvez compter sur moi pour les rendre publiques en dehors de ce lieu.
Le travail de suivi et d'accompagnement de l'apprenti est trop souvent théorique ou superficiel, faute pour le maître d'apprentissage, dont le rôle est fondamental, de pouvoir librement dégager le temps nécessaire sur ses horaires de travail - j'assume la responsabilité de ce que je dis. Il n'y a ici que quelques illuminés pour se figurer que, dans une entreprise, on n'a rien d'autre à faire que de former des jeunes travailleurs. Non ! Dans une entreprise, on produit !
La loi doit donc offrir cette garantie aux maîtres d'apprentissage, qui pourront ainsi l'opposer - les courageux - à leurs employeurs quand l'organisation ne leur permettra manifestement pas d'accompagner correctement l'apprenti dans l'entreprise.
Cet amendement donnerait également aux maîtres d'apprentissage l'assurance de pouvoir bénéficier des formations indispensables à l'exercice de leur mission.
Voyez-vous, maîtriser une technique, être un ouvrier d'élite, un contremaître, un ingénieur - dans le cas présent, il s'agit plutôt de contremaîtres ou de techniciens d'élite -, c'est une chose, enseigner à un jeune garçon ou à une jeune fille, c'en est une autre.
Par conséquent, la formation des maîtres d'apprentissage est une question essentielle. Il faut s'en donner les moyens. Malheureusement, je suis obligé de vous dire que tel n'est pas le cas aujourd'hui et j'accepte même que la responsabilité en soit partagée. Mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire.
Faute de coordination avec les formateurs du CFA - cas que vous connaissez aussi bien que moi - et faute d'information sur l'évolution des référentiels de formation, les maîtres d'apprentissage ne peuvent pas suivre efficacement les apprentis et les accompagner dans de bonnes conditions vers le diplôme préparé.
Les branches patronales ne font pas toujours leur travail ni dans les commissions professionnelles consultatives, où l'on met au point le référentiel du contenu du diplôme, ni ensuite dans la formation des maîtres d'apprentis au référentiel. On demande au maître de se débrouiller avec le jeune à qui il doit apprendre le métier. Les garanties que je vous propose d'apporter grâce à l'amendement n° 186 sont de nature à améliorer la qualité du déroulement du contrat d'apprentissage, à prévenir les risques rupture de contrat et à faciliter l'obtention finale du diplôme par l'apprenti.
Monsieur Borloo, si vous voulez ajouter 150 000 apprentis aux 350 000 qui existent déjà, en les prélevant sur une classe d'âge, c'est le moment de vous soucier du fonctionnement de l'apprentissage. C'est précisément l'objet de mon amendement, qui n'a rien d'idéologique. Il s'agit simplement de proposer des solutions à partir de l'examen de la réalité du terrain.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Je suis d'accord avec vous, monsieur Mélenchon. Il est important que le maître d'apprentissage soit en mesure de s'acquitter de sa mission dans de bonnes conditions.
C'est pourquoi la commission émet un avis de sagesse positive sur l'amendement n° 186.
M. Jean-Luc Mélenchon manifeste sa satisfaction.
Vous voyez, mon cher collègue, il ne faut pas aller trop vite. Je vous voyais déjà vous élever contre la position de la commission, vous aviez tort !
Il nous paraît important que les partenaires sociaux puissent déterminer, au-delà de la disponibilité nécessaire à l'accompagnement de l'apprenti, les modalités d'exercice de la mission du maître d'apprentissage.
Je le rappelle, les vingt et un contrats d'objectifs et de moyens qui ont été signés - pour les vingt-deux régions de métropole - en vertu de la loi du 18 janvier 2005 prévoient des dispositions sur la formation des maîtres d'apprentissage.
Par exemple, nous avons signé un contrat d'objectifs et de moyens avec la région Picardie, qui figurait parmi les régions qui avaient le plus besoin de se mobiliser autour de l'apprentissage.
L'un des volets de ce contrat d'objectifs et de moyens concerne la formation des maîtres d'apprentissage. Il s'agit de permettre aux maîtres d'apprentissage d'exercer pleinement leur rôle vis-à-vis de l'insertion du jeune, de maîtriser l'environnement administratif, juridique et financier des contrats en alternance, de comprendre l'importance de la mission de tuteur.
Je voudrais rappeler à cet égard que, à l'occasion de l'examen de l'apprentissage junior, nous avons prévu un renforcement de la mission du tuteur, y compris en direction de l'entreprise. C'est le fruit des débats que nous avons eus ici même.
La mission du tuteur comprend notamment l'accueil du jeune, son intégration dans l'équipe de travail, le transfert des compétences, ainsi que l'évaluation du savoir-faire et du « savoir-être ».
Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement. Mais je rappelle qu'un certain nombre de dispositions existantes visent d'ores et déjà le même objectif. C'est le cas des contrats d'objectifs et de moyens, qui s'appliquent sur le terrain de manière concrète.
L'amendement est adopté à l'unanimité.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Monsieur Mélenchon, vous êtes un homme heureux !
L'amendement n° 185, présenté par M. Mélenchon, Mme Khiari, M. Godefroy, Mmes Le Texier, Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard, C. Gautier, Lagauche, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l'article L 117-5 du code du travail, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Cette déclaration est également caduque dans les cas suivants :
« - lorsqu'un manquement de l'entreprise à ses obligations de formation ou de rémunération d'un ou plusieurs apprentis est constaté par une décision judiciaire
« - quand une proportion excessive des contrats d'apprentissage conclus par l'entreprise sont résiliés à son initiative durant la période des deux premiers mois de contrat prévue par l'article L. 117-17. Un décret définit, en fonction de la taille de l'entreprise, la proportion de résiliations de contrats qui doit être considérée comme excessive.
« Dans les deux cas précités, la déclaration est caduque au terme de l'exécution du dernier contrat signé par l'entreprise avant la constatation du manquement ou de l'excès de ruptures de contrats. »
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Mes chers collègues, vous l'imaginez, c'est avec un enthousiasme sans partage que nous nous réjouissons de l'adoption de cet amendement au terme de ces quatre-vingts heures de discussion...
Sourires
Un amendement qui passe, pour la minorité, c'est toujours un succès, d'autant que ce dispositif, je le crois, sera utile aux jeunes. Quand il y a un petit moment de bonheur, il faut en profiter !
J'espère que, tout à l'heure, mon collègue a bien compris ce que je voulais dire à propos des mesures qui visent à punir ceux qui se comportent mal. Le but n'est pas de soupçonner tout le monde ; il s'agit simplement de pouvoir sanctionner, au cas par cas, les mauvais comportements.
Avant d'entrer dans le vif de mon argumentaire, je voudrais préciser qu'il est très important de prévoir des sanctions. Cela permet au maître d'apprentissage, au syndicat de l'entreprise le cas échéant, ou même au centre de formation des apprentis de mettre en garde l'intéressé, qui est forcément le mouton noir, et de lui dire que la situation ne peut plus continuer. Ce dispositif est dissuasif avant d'être directement répressif.
Mon amendement n° 185 tend également à lutter contre les mauvaises pratiques de certaines entreprises en matière d'apprentissage. Il vise donc à rendre caduque la déclaration permettant à l'entreprise d'employer des apprentis, si celle-ci multiplie les ruptures de contrats ou manque à ses obligations en matière de formation ou de rémunération des apprentis.
Mes chers collègues, vous devez mesurer le fléau que représentent les ruptures de contrat d'apprentissage avant terme. Nombre d'entre vous se disent que la situation du jeune est stabilisée une fois qu'il entre en apprentissage en ayant quitté le cadre scolaire qui le faisait souffrir. J'entends parfaitement cette argumentation, même si je ne suis pas du tout d'accord avec elle.
Lorsque le jeune part en apprentissage, il est investi d'une sorte de mission par sa famille, dans la mesure où la rémunération partielle qu'il reçoit aide à faire bouillir la marmite. Mais il peut arriver qu'il rompe le contrat, parce qu'il a été mal accueilli, qu'il ne supporte plus l'apprentissage ou, tout simplement, parce qu'il s'est trompé de profession.
Nous devons donc lutter contre le fléau des ruptures de contrats d'apprentissage là où nous le pouvons. Il faut, d'un côté, contrôler la motivation des jeunes, et, de l'autre, lutter contre les abus des entreprises, qui ne font aucun effort pour que les jeunes poursuivent leur apprentissage.
Vous devez tout de même en avoir conscience, un quart des contrats en moyenne sont rompus - c'est énorme ! -, ce qui fait de l'apprentissage la forme d'enseignement professionnel la plus précaire. Des taux de rupture de 50 % ont même été constatés dans certaines entreprises. Franchement, nous ne pouvons qu'être interpellés par ces chiffres !
On pourrait demander aux intéressés de faire un effort pour que les jeunes restent. Un tel phénomène traduit une mauvaise préparation de la période d'apprentissage et montre que certaines entreprises, de leur côté, ne respectent pas les exigences pédagogiques liées à l'accueil d'apprentis. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles vous venez d'adopter l'amendement n° 186, afin d'améliorer le travail des maîtres d'apprentissage.
Il n'est pas normal non plus qu'une entreprise dont les manquements aux obligations résultant du contrat d'apprentissage ont été constatés par la justice puisse continuer à accueillir des apprentis.
Je propose donc - souvenez-vous en, mes chers collègues, c'est ma seule proposition - que la possibilité d'accueillir des apprentis soit retirée aussi bien aux entreprises qui manquent à leurs obligations qu'à celles dont les taux de rupture de contrats sont excessifs.
À mon avis, cette mesure d'assainissement ne devrait pas susciter - sauf raison mystérieuse - trop d'opposition. Elle compléterait utilement notre dispositif de sanctions et de règles dissuasives. Pour cela, je vous suggère d'adopter mon amendement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
La déclaration mentionnée dans cet amendement est celle de l'article L. 117-5 du code du travail, par laquelle l'employeur déclare prendre des mesures nécessaires à l'organisation de l'apprentissage et garantit les conditions techniques et morales de son déroulement. Cette déclaration est nécessaire pour engager un apprenti.
L'article L. 117-5 du code du travail prévoit également que le préfet peut, par décision motivée, s'opposer à l'engagement d'un apprenti par une entreprise lorsqu'il est établi par les autorités chargées du contrôle de l'exécution du contrat d'apprentissage que l'employeur méconnaît les obligations mises à sa charge.
Cette procédure est, sans aucun doute, plus efficace qu'un système automatique de la déclaration. La caducité est prévue actuellement dans le seul cas où l'entreprise n'a pas employé d'apprenti pendant cinq ans.
Ces modalités de mise en oeuvre n'apparaissent pas clairement dans les hypothèses envisagées par l'amendement. Nous estimons donc que les textes existants répondent à votre souhait, monsieur Mélenchon. N'ajoutons pas d'autres dispositifs.
C'est pourquoi la commission souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Nous ne suivrons pas la proposition de l'auteur de l'amendement. Mais je voudrais dire un mot sur les ruptures de contrats.
Monsieur Mélenchon, vous avez beaucoup parlé des ruptures dues à l'entreprise. Mais, vous le savez, le sujet est plus complexe que cela, puisqu'il existe aussi des ruptures du fait des jeunes eux-mêmes.
Un très bon article paru récemment dans Liaisons sociales explique que le sujet essentiel, c'est l'orientation. Il faut accompagner et orienter les jeunes qui connaissent depuis un certain temps des difficultés d'errance scolaire, afin qu'ils ne choisissent plus de rompre leur contrat d'apprentissage.
C'est précisément notre préoccupation concernant l'apprentissage junior. Comme j'ai entendu quelques propos caricaturaux sur ce sujet, je tiens à préciser qu'une orientation précoce, assortie d'un accompagnement par une équipe pédagogique du collège et par un tuteur est l'un des acquis de nos débats. Cet encadrement du jeune et de l'entreprise permettrait d'éviter des taux de rupture de 40 % ou 50 %.
Or, vous le savez, monsieur Mélenchon, ces taux de rupture existant dans un certain nombre de secteurs touchent souvent des jeunes vivant dans des quartiers en difficulté, ceux dont le taux de chômage est deux à trois fois supérieur à la moyenne du taux de chômage des autres jeunes.
La lutte contre ce taux de rupture est bien l'un des buts assignés aux contrats d'objectifs et de moyens. Mais il n'y a pas, d'un côté l'entreprise, et de l'autre le jeune. Il faut prendre en compte la situation du jeune lorsqu'il est accueilli dans l'entreprise en contrat en alternance. C'est à ce moment-là qu'il faut tenter la « greffe » de manière qu'il n'y ait aucun rejet de part et d'autre.
Les jeunes doivent bénéficier d'une bonne orientation et d'une initiation à différents métiers. Je suggère donc, comme cela a déjà été proposé par la commission au cours de ce débat, que le jeune puisse connaître plusieurs entreprises. C'est grâce à un accompagnement pragmatique des jeunes que le taux de rupture de contrats d'apprentissage sera réduit.
J'ai également eu l'occasion d'évoquer le risque de rupture du contrat dans le cadre du contrat première embauche. La phase de consolidation ne concerne pas seulement l'entreprise ; elle est aussi importante pour le jeune.
J'ai annoncé - M. le Premier ministre vient de le redire à l'occasion d'une intervention dans la presse - que nous mettrons en place, parallèlement, l'accompagnement personnalisé dans l'emploi. Un contrat signé entre les deux parties ne sera pas suffisant ; il faudra en outre que le jeune soit accompagné. Tous les jeunes n'en éprouveront pas nécessairement le besoin au cours des premiers mois dans l'entreprise. Mais cette possibilité permettra de mieux maîtriser le taux de rupture de contrats.
À ce stade de nos débats, je tenais à rappeler quelques principes sur le sens profond de la mise en place de l'apprentissage junior et des démarches qui l'accompagnent.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 187, présenté par M. Mélenchon, Mme Khiari, M. Godefroy, Mmes Le Texier, Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard, C. Gautier, Lagauche, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l'article L 117-17 du code du travail est ainsi rédigé :
« Lorsqu'elle est à l'initiative de l'entreprise, la résiliation pendant les deux premiers mois d'apprentissage donne lieu, outre le versement des sommes restant dues au titre des salaires, au versement par l'entreprise d'une indemnité égale à 20 % du montant total de la rémunération brute due à l'apprenti depuis la conclusion du contrat d'apprentissage. Le contrat peut déterminer un taux plus élevé pour cette indemnité.»
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
Il est intéressant que nos échanges retrouvent une cohérence sur le sujet qui nous intéresse.
Nous sommes d'accord pour considérer qu'un problème se pose avec les ruptures de contrats d'apprentissage. C'est un bon point. Nous souhaitons tous trouver une solution, quitte à connaître des divergences sur la façon de faire.
Je vous donne acte du fait que la difficulté ne vient pas seulement de l'entreprise. Il va de soi que d'autres paramètres existent. Mais j'ai voulu intervenir sur celui-là et multiplier les mesures dissuasives.
Certes, la rupture du contrat peut résulter d'une mauvaise orientation. Le jeune peut aussi se rendre compte qu'il s'est trompé sur le métier qu'il pensait exercer. Il existe donc de nombreux paramètres qui peuvent intervenir.
Vous avez pointé un des paramètres cité dans l'enquête de Liaisons sociales : l'instabilité du jeune. Je souhaite que nous ayons à l'esprit que nous parlons de jeunes. Il est normal d'être instable quand on est jeune. Cela fait partie du programme de développement de la personne humaine.
Murmures sur les travées de l'UMP.
Tel qu'est fait l'être humain, à treize, quatorze ou quinze ans, les jeunes adolescents sont programmés pour se mettre en danger, obéissant à des règles héritées à quatre-vingt-dix-neuf pour cent de l'histoire de l'humanité, depuis le chasseur-cueilleur.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat approuve.
Il n'y a rien d'anormal à ces phénomènes que l'éducation et l'expérience leur permettent de maîtriser, et nous nous efforçons, pour notre part, de les y aider.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, une des formes les plus efficaces de la lutte contre les ruptures de contrat consiste à placer le jeune dans un contexte qui lui permettra de changer de voie en cas d'échec dans la première. Telle est la raison pour laquelle nous avions développé l'idée des lycées des métiers, comprenant des centres de formation des apprentis.
Ainsi, le jeune qui ne va pas bien dans l'apprentissage se voit proposer des référents autres que l'entreprise ou le centre de formation des apprentis. S'il déclare : « Je n'en peux plus de faire ceci le matin et cela l'après-midi », son professeur ou le responsable de sa formation dans l'entreprise peuvent le prendre par les épaules et lui dire : « Ecoute, on va faire autre chose ; on va te remettre sous statut scolaire dans la filière de l'enseignement professionnel. »
C'est un vaste sujet qui relève d'une loi globale sur l'apprentissage dans le cadre des différentes voies d'enseignement professionnel dans le pays. En attendant qu'elle voie le jour, commençons déjà par nous focaliser sur le point où la rupture se produit.
Quoi qu'il en soit, pour ma part, je prends acte de l'idée qui est émise selon laquelle l'instabilité du jeune est un problème par rapport à l'apprentissage. Je vous rappelle que vous aviez été très nombreux à dire que c'était leur instabilité qui justifiait leur envoi en apprentissage. Permettez-moi de vous dire qu'un jeune qui n'est pas bien dans sa peau le restera de toute façon et qu'en fait les entreprises ne veulent pas de ceux qui ne sont pas bien dans leur peau !
Avec cet amendement, nous proposons que, lorsqu'il y a rupture de contrat - autrement dit, lorsque la catastrophe est consommée -, l'apprenti ait une garantie et qu'il soit considéré, au fond, comme un travailleur sous statut précaire qui a eu à pâtir de la précarité de sa situation.
Lorsque la rupture est à l'initiative de l'entreprise - je dis bien de l'entreprise et non pas du jeune -, que celle-ci a fait savoir au jeune qu'il ne lui convenait pas et qu'elle a décidé de résilier son contrat pendant les deux premiers mois d'apprentissage, la résiliation donnerait lieu, outre le versement des sommes restant dues au titre des salaires - c'est l'application normale de la loi - au versement par l'entreprise d'une indemnité égale à 20 % du montant de la rémunération brute due à l'apprenti depuis la conclusion du contrat d'apprentissage. Une telle somme, en pourcentage du SMIC, ne serait pas ruineuse pour l'entreprise ...
... et elle apporterait une petite aide au jeune homme ou à la jeune fille pour recommencer une recherche d'entreprise et redémarrer un apprentissage.
Cet amendement est donc au moins conforme au devoir d'humanité.
La commission émet un avis totalement défavorable sur cet amendement, qui va dans une direction tout à fait différente de la nôtre.
La période de deux mois est applicable aux deux parties. Que se passera-t-il en cas de rupture à l'initiative de l'apprenti, s'il déclare qu'il ne se plaît pas dans l'entreprise et veut partir ?
L'article L. 117-17 du code du travail prévoit que le contrat peut être résilié par l'une ou l'autre des parties durant les deux premiers mois de l'apprentissage. C'est une bonne chose parce qu'il peut y avoir maldonne, mauvais positionnement. Cette période d'essai ne peut donc pas être considérée comme étant abusive.
Nous avons déjà répondu au sujet des sanctions à l'occasion d'un amendement précédent.
Par ailleurs, l'expérience des lycées des métiers, ou de cité des métiers, que vous avez évoquée, monsieur Mélenchon, est en train de se développer. Partie de la France, elle a conquis un certain nombre de pays européens et revient en France. Mon ministère favorise cette dimension.
Quelle que soit la dénomination du dispositif, l'important est d'avoir la capacité non seulement d'orientation initiale, mais également d'accompagnement qui doit se poursuivre tout au long de la vie.
Voilà pourquoi le Premier ministre a décidé de nommer un délégué interministériel à l'orientation, pour mettre fin aux trop nombreux cloisonnements et gâchis qui sont devenus une tradition dans notre pays. Des propositions seront faites d'ici au mois de juin par Gilles de Robien et le pôle de cohésion sociale sur ce sujet, qui mérite une vraie réflexion.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 190, présenté par M. Mélenchon, Mme Khiari, M. Godefroy, Mmes Le Texier, Printz, Demontès, Alquier, San Vicente et Schillinger, MM. Cazeau, Madec, Bel, Assouline et Bodin, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, MM. Desessard, C. Gautier, Lagauche, Peyronnet, Repentin, Ries, Sueur et Frimat, Mmes Tasca, Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa de l'article L. 221-3, les mots : « âgés de moins de dix-huit ans » sont supprimés.
2° Dans l'article L. 222-2, après les mots « âgés de moins de dix-huit ans » sont insérés les mots : «, et les apprentis »;
3° Dans le premier alinéa de l'article L. 222-4, les mots : « âgés de moins de dix-huit ans » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir souligné le rayonnement qu'a eu la formule des lycées des métiers, ou en tout cas l'idée d'établissements d'enseignement secondaire incluant la préparation aux diplômes de l'enseignement supérieur, notamment le brevet de technicien supérieur, le BTS, et comportant toutes les voies d'accès à la formation professionnelle, à savoir : formation professionnelle continue, centres de formation des apprentis, validation des acquis de l'expérience et voies d'enseignement sous statut scolaire.
Il serait souhaitable que vous favorisiez le rayonnement d'une deuxième idée, celle de l'élaboration du contenu des diplômes professionnels par nos commissions professionnelles consultatives, de loin préférable à la formule des certificats de compétence, à valeur limitée, que les Anglo-saxons essaient de généraliser dans le monde. De très nombreux pays se sont ralliés au système français, qui leur a paru le plus efficace.
Avec cet amendement, je reviens sur un sujet sur lequel nous avons déjà eu quelques échanges, mais je ne voudrais pas que M. le rapporteur s'en irrite, car il est d'humeur assez grognonne, avons-nous cru remarquer, même quand il veut être agréable comme tout à l'heure, ce qui est tout de même un comble !
Sourires
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous vous apprécions beaucoup, monsieur le rapporteur ! C'est pourquoi nous remarquons vos variations d'humeur !
Nouveaux sourires
Voilà donc une occasion d'agir avec humanité. Je vais me répéter, mais c'est un sujet sur lequel nous allons nous répéter pendant de nombreuses années ! Il figure sur tous les tracts qui sont diffusés en ce moment contre la loi dite pour l'égalité des chances !
Il s'agit de rétablir l'interdiction du travail le dimanche et les jours fériés pour les apprentis quel que soit leur âge.
Un intervenant a dit tout à l'heure : On apprend des choses dans certains métiers le dimanche et les jours fériés. » C'est très possible, mais cela ne peut s'appliquer aux jeunes ! Toutes les sociétés civilisées mettent des limites au travail qui est demandé aux jeunes.
Donnez-moi un exemple d'un métier qui ne se pratique que les dimanches et les jours fériés !
Dans la restauration, le travail est le même pendant les jours ouvrables de la semaine.
Dans la boulangerie, cela dépend de l'entreprise à laquelle vous pensez.
Certes, mais vous ne prendrez pas des apprentis la nuit ni le dimanche, et ce pour une raison simple : un client qui a été servi par un môme de quatorze ou quinze ans ne reviendra pas dans le restaurant. En effet, le jeune qui accomplit pendant dix heures le travail d'un adulte ayant appris le métier difficile de servir, ne le fera pas avec le sourire. Il est donc absurde de le faire travailler dans un restaurant à ces horaires-là.
D'une manière générale, il faut interdire l'utilisation des apprentis pendant les dimanches et les jours fériés quel que soit leur âge. Et vous savez pourquoi ? Tout simplement parce que ce sont des enfants !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Sourires
Monsieur Mélenchon, après quatre-vingt-trois heures de débat, je n'ai pas du tout l'impression de vous répondre vivement ! Le débat se déroule !
Sur nos quatre-vingt-trois heures de débat, nous avons pris pas mal de temps pour évoquer cette question du travail du dimanche et des jours fériés et je ne partage pas votre point de vue en ce qui concerne certains métiers.
Moi-même, cher monsieur Mélenchon, j'ai payé mes études et mes vacances en travaillant le samedi et le dimanche à quinze ans, et heureusement que la loi me permettait de le faire ! En ce qui vous concerne, peut-être quelqu'un vous les a-t-il payées ? Ce n'est pas mon cas !
Moi aussi, j'ai travaillé, mais pas à quinze ans ! Ne racontez pas d'histoires ! C'est du blabla !
M. Alain Gournac, rapporteur. Non, il n'y a pas de blabla ! Mais c'est vrai, j'oubliais, la pauvreté, c'est vous ! La bonté, c'est vous ! Le coeur, c'est vous ! Nous, nous sommes des affreux !
Applaudissementssur les travées de l'UMP.
Le travail de nuit et du dimanche nous a déjà beaucoup occupés et l'ensemble de nos débats à cet égard nous ont permis, me semble-t-il, de clarifier un certain nombre de points.
M. Mélenchon propose une interdiction pour les apprentis de plus de dix-huit ans.
Tout d'abord, l'apprentissage, dont l'âge limite est en règle générale de vingt-six ans, peut déboucher, entre vingt-quatre et vingt-six ans, sur la reprise d'entreprise.
Ensuite, cette limite d'âge peut être repoussée jusqu'à trente ans dans le cas d'un diplômé de l'enseignement supérieur ou d'un travailleur handicapé.
Par conséquent, introduire cette interdiction après l'âge de dix-huit ans n'a pas de sens par rapport aux apprentis qui reprennent des entreprises ou à ceux qui entreprennent une nouvelle orientation professionnelle par le biais de l'alternance, ce qui peut leur donner une chance de développer leurs compétences et leurs qualités au travers de la filière professionnelle.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, car, avant dix-huit ans, les règles sont clairement définies et, après dix-huit ans, il va à contresens de l'insertion dans la filière professionnelle.
Je souhaiterais formuler deux remarques au sujet de ce qui vient d'être dit à propos de l'apprentissage.
D'abord, selon notre collègue Jean-Luc Mélenchon, l'apprentissage est une espèce de repli et n'offre pas forcément le moyen de s'épanouir à celui qui n'est pas bien dans sa peau.
Mon point de vue est diamétralement opposé. J'ai vu beaucoup de jeunes se révéler dans l'apprentissage, qui leur a permis de se découvrir un certain nombre de vertus et de prendre confiance en eux-mêmes.
Chacun le sait, la confiance est la clé de voûte de la vie ! Aujourd'hui, il est nécessaire de la restaurer.
Ensuite, s'agissant des horaires de travail, je ferai remarquer que ce n'est pas par plaisir que les gens sont amenés à travailler le dimanche ou la nuit ; ce n'est pas par plaisir que nous sommes présents, aujourd'hui, ici, dans le cadre de nos fonctions de parlementaires.
Pourtant, chaque métier implique des obligations et il est important que les apprentis découvrent les avantages et les inconvénients de celui dans lequel ils s'engagent, notamment la contrainte du travail de nuit.
Le paysan que je suis est obligé à certains moments de travailler les dimanches, parce que, ce jour-là, le soleil brille et qu'il faut rentrer la récolte ; en revanche, je m'arrête certains jours de la semaine, parce qu'il pleut. Il est inconcevable de dire à l'apprenti qui travaille à nos côtés de ne pas venir le dimanche. Il faut qu'il connaisse le travail : s'il lui plaît, il poursuivra dans cette voie ; sinon, il en changera.
Cette ouverture me paraît nécessaire pour l'avenir, pour nos travailleurs et pour les jeunes ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le rapporteur voudrait nous faire pleurer parce qu'il a payé ses études en travaillant le dimanche et la nuit, mais il n'est certainement pas le seul dans cet hémicycle à l'avoir fait !
Mon cher collègue, nous savons parfaitement que certaines professions impliquent l'obligation de travailler la nuit et le dimanche. Nous parlons ici des apprentis, qui sont en situation d'apprentissage à la fois scolaire et professionnel, en théorie.
On peut imaginer que c'est la seule solution, mais nous sommes en train d'évoquer le cas de jeunes à qui l'apprentissage est proposé. Vous dites qu'ils le choisissent, mais, en réalité, ils sont aiguillés dans cette direction pour leur donner la possibilité de redémarrer dans leurs études scolaires et apprendre un métier.
A l'heure actuelle, nombre d'enseignants en lycée professionnel, y compris en lycée d'enseignement général, déplorent que beaucoup de jeunes dorment en classe ou aient des difficultés à suivre les apprentissages scolaires...
... parce qu'ils travaillent le soir pour payer leurs études ou la nuit chez McDo'.
Si l'on veut leur donner une chance - ce qui semble être votre objectif, mais nous en doutons -, pour redémarrer dans un cycle d'apprentissage général, à la fois scolaire et professionnel, il serait souhaitable qu'on les dispense de travailler la nuit et le dimanche.
Il est surprenant que vous souhaitiez, dans un texte sur l'égalité des chances, introduire le travail le dimanche pour les mineurs. Car, si l'on souhaite que les jeunes aient une vie sociale il faut qu'ils aient la possibilité d'avoir des loisirs communs avec les autres jeunes de leur âge.
Le fait qu'ils travaillent le dimanche, pendant que les autres s'amusent, les marginalise, leur donne le sentiment d'être différents, cela crée une discrimination.
Protestations sur les travées de l'UMP.
M. Fourcade a dit que, si les débats se prolongeaient, c'est parce que nous voulions les faire durer jusqu'à mardi, jour de la manifestation.
Moi, je dirai que, si la droite veut les accélérer - cela fait dix jours que nous débattons de ce projet de loi -, ...
M. Jean Desessard. ... c'est parce que M. de Villepin a perdu dix points dans les sondages.
Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Je comprends que vous ayez envie d'arrêter les débats le plus vite possible, parce que, à un point de moins par jour, si cela durait quinze jours, cela ferait quinze points de moins pour M. de Villepin. Il a dû vous faire cette demande pour ne pas en perdre plus.
Protestations sur les travées de l'UMP.
M. Fourcade a reproché au groupe CRC de dire la même chose depuis trente ans. Mais, depuis ce temps, monsieur Fourcade, y a-t-il moins de chômage, moins de précarité ?
Vous auriez peut-être dû les écouter davantage il y a trente ans, et nous n'en serions pas là.
Comme vous ne les écoutez pas plus aujourd'hui, il y aura encore davantage de chômage et de précarité. Nous, nous voulons une société solidaire.
M. Lecerf a dit que l'emploi était une denrée rare et qu'il était contre le partage du travail. Si c'est une denrée rare, il faut être pour le partage du travail ! On ne prend pas assez en considération cette notion.
Il a aussi dit qu'il ne considérait pas le travail comme une corvée. Pour un certain nombre d'emplois de cadres ou d'emplois privilégiés ce n'est pas une corvée, mais aujourd'hui pour les salariés les moins payés, c'est une corvée !
Protestations sur les travées de l'UMP.
Je constate qu'il y a une augmentation de la productivité et qu'il y a des conditions pénibles pour un certain nombre de salariés, mais que, comme par hasard, ce sont ceux qui sont le moins payés qui supportent les conditions pénibles.
Oui ! sur les travées du groupe CRC.
Comme vous avez cité un certain nombre de journaux, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je vais prendre un journal que vous ne trouverez peut-être pas objectif, mais il se veut républicain. « Le scandale des méga-revenus : les profiteurs. Oui, les profits, même élevés sont légitimes. Ils devraient doper la croissance, créer des emplois. Le problème : quelques milliers de personnes se partagent l'essentiel de la richesse créée par des millions de salariés au lieu de l'investir dans le développement et la recherche. »
Il ne s'agit pas de dire que nous sommes contre les entreprises, puisque qui dit entreprises dit salariés et que nous voulons les défendre. Il ne s'agit pas de dire que nous sommes contre les salariés, puisqu'ils font marcher l'entreprise. Il ne s'agit pas de dire que nous sommes contre les patrons. On revient à une analyse du capitalisme, la logique du profit.
À partir du moment où vous voulez vous aligner sur la concurrence internationale, une entreprise, pour être rentable, se doit de diminuer la masse salariale.
Alors, soit le Parlement, les partis politiques, l'État mettent des barrières...
Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.
Laissez-moi parler, je ne suis pas beaucoup intervenu pendant tout ce débat !
Si aucune régulation politique n'empêche cette concurrence, on va inexorablement vers les profits pour quelques-uns - c'est le système du capitalisme, que le patron soit bon ou soit mauvais, il ne s'agit pas de tendresse, c'est un système économique qui a ses règles - et les bas salaires, la précarité, le chômage pour les autres.
Nouvelles marques d'impatience sur les mêmes travées.
Pour finir, vous culpabilisez, vous avez peur d'une révolution sociale. D'un côté, vous accompagnez cette concurrence internationale, ce système économique et, de l'autre, vous mettez quelques petits sparadraps sur les discriminations et les problèmes sociaux.
Donc, si on appauvrit l'ensemble de la société, les gens ne seront pas dignes, pas responsables et il y aura des problèmes.
Votre texte ne prend pas en compte toute l'histoire, toute la culture des minorités visibles ; vous n'en parlez pas. Il n'a donc aucune chance d'aboutir, vous allez vous faire plaisir, mais les problèmes resteront.
Le débat dérape.
Au nom du groupe de l'UMP, je demande, en application de l'article 38 du règlement, la clôture de la discussion.
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
En application de l'alinéa 2 de l'article 38 du règlement, cette demande de clôture n'ouvre droit à aucun débat.
Conformément à l'alinéa 4 du même article, je consulte le Sénat à main levée.
La clôture est prononcée.
Je mets aux voix l'amendement n° 190.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 500, présenté par Mmes Létard, Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois ans après la publication de la présente loi, les organisations professionnelles et syndicales représentatives au niveau national sont invitées à engager une négociation interprofessionnelle sur la définition et les modalités d'exercice de la fonction de tuteur.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
L'objet de cet amendement est de fixer le statut de tuteur d'apprenti. Il prévoit de mettre en place, dans un délai de trois ans, une négociation entre les partenaires sociaux pour unifier les conditions d'exercice de la fonction de tuteur dans toutes les branches d'activité.
Dans certains secteurs où l'apprentissage est un mode d'enseignement habituel, les maîtres de stage sont reconnus en tant que tels. Dans ces secteurs, sont mises en oeuvre les dispositions de l'article 65 de la loi du 20 décembre 1993 instaurant un titre de maître d'apprentissage pour lequel sont exigées les conditions suivantes : une expérience professionnelle d'au moins cinq ans, une expérience d'au moins deux ans en tant que tuteur auprès de jeunes en contrat d'apprentissage.
Toutefois, l'article R. 117-3 du code du travail précise qu'il n'est pas nécessaire de détenir un titre de maître d'apprentissage confirmé pour exercer cette fonction. Il fixe d'ailleurs des conditions minimales : soit être titulaire d'un diplôme relevant du domaine professionnel concerné, soit justifier de cinq ans d'exercice professionnel.
Il est clair qu'exercer la fonction de tuteur demande, outre des qualités professionnelles, des capacités pédagogiques pour être en mesure de transmettre ses connaissances en motivant l'apprenti. Une formation est donc infiniment souhaitable.
Mais toutes les branches professionnelles, nous l'avons indiqué tout à l'heure, n'ont pas investi également dans la formation des maîtres d'apprentissage.
Si l'on veut développer de façon très volontariste l'apprentissage, et je crois que c'est votre volonté, monsieur le ministre, il est impératif que les jeunes puissent être accompagnés et que le rôle du tuteur soit reconnu comme fondateur pour la transmission des savoirs.
Il doit être reconnu et valorisé partout, si l'on veut que toutes les entreprises jouent le jeu. C'est à cette condition essentielle de la qualité de l'accompagnement que la prise en charge des très jeunes apprentis pourra être une vraie réussite.
C'est pourquoi nous proposons que les partenaires sociaux se saisissent par la négociation interprofessionnelle de cette question du tutorat afin que soit conféré à ces intervenants essentiels dans le cadre de l'apprentissage un statut interprofessionnel.
L'idée de lancer une négociation interprofessionnelle sur la définition et les modalités d'exercice de la fonction de tuteur est utile, et vous savez, mes chers collègues, combien la commission des affaires sociales est intéressée par le statut des tuteurs et l'aide qu'ils apportent.
Est-il pour autant souhaitable d'envoyer aux partenaires sociaux des invitations par voie législative ? La commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement sur cette proposition et sur la possibilité de la satisfaire par d'autres moyens.
La commission serait tentée de donner un avis de sagesse, car le tuteur est au centre de la réflexion de la commission des affaires sociales et l'idée d'un statut stable du tuteur est intéressante.
Les partenaires sociaux ont déjà entamé sur ce point une négociation importante à l'occasion de la négociation interprofessionnelle portant réflexion sur les seniors. Cela fait partie, dans l'article 10 de l'accord interprofessionnel, des propositions qui ont été faites et que le Gouvernement reprend dans le plan senior.
Car c'est bien au niveau interprofessionnel, puis au niveau de la branche, qu'il va falloir agir très concrètement.
Cet amendement nous permet de nous poser la question du rôle et de la place du tuteur dans l'entreprise qui accueille des jeunes en apprentissage, mais aussi en contrat de professionnalisation. Voilà pourquoi nous émettons un avis de sagesse favorable.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
L'amendement n° 617, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mme David, M. Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'avant-dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« À défaut, la décision finale revient aux parents ou au représentant légal. »
La parole est à M. Guy Fischer.
Cet amendement a pour objet de donner aux parents le dernier mot en matière de scolarisation de leur enfant handicapé. Le président de la commission ne l'a pas mis dans sa motion d'irrecevabilité, car l'accès à la scolarisation des enfants handicapés est au coeur des préoccupations, notamment après le vote d'une grande loi qui mérite d'être appréciée à sa juste valeur. Il s'agit d'une mesure importante pour la lutte contre les discriminations.
Le premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Les enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant sont scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires [...], si nécessaire au sein de dispositifs adaptés, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves. Les parents sont étroitement associés à la décision d'orientation et peuvent se faire aider par une personne de leur choix. La décision est prise par la commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles, en accord avec les parents ou le représentant légal. [...] Dans tous les cas et lorsque leurs besoins le justifient, les élèves bénéficient des aides et accompagnements complémentaires nécessaires. »
Dans son principe, cet article codifie la liberté pour les parents d'enfants handicapés de pouvoir inscrire là où ils le souhaitent leur enfant, qu'il s'agisse d'un établissement scolaire banal ou d'un établissement spécialisé.
Dans le contexte de ce projet de loi pour l'égalité des chances, nous proposons donc que soit mise en avant l'égalité des droits et affirmée la liberté pleine et entière de décision des parents.
En effet, comme l'indique l'article L. 351-1 du code de l'éducation, l'affectation de l'enfant s'effectue par décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées telle que définie par l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles. Je cite :
« Une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées prend, sur la base de l'évaluation réalisée par l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article L. 146-8, des souhaits exprimés par la personne handicapée ou son représentant légal dans son projet de vie et du plan de compensation proposé dans les conditions prévues aux articles L. 114-1 et L. 146-8, les décisions relatives à l'ensemble des droits de cette personne, notamment en matière d'attribution de prestations et d'orientation, conformément aux dispositions des articles L. 241-5 à L. 241-11. »
Quant aux voies de recours, elles sont formulées devant la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale ou le tribunal administratif tandis qu'une procédure de conciliation existe telle que définie à l'article L. 146-10 du même code de l'action sociale et des familles ; je cite de nouveau :
« Sans préjudice des voies de recours mentionnées à l'article L. 241-9, lorsqu'une personne handicapée, ses parents si elle est mineure ou son représentant légal estiment qu'une décision de la commission mentionnée à l'article L. 146-9 méconnaît ses droits, ils peuvent demander l'intervention d'une personne qualifiée chargée de proposer des mesures de conciliation. La liste des personnes qualifiées est établie par la maison départementale des personnes handicapées.
« L'engagement d'une procédure de conciliation suspend les délais de recours. »
On pourrait estimer que ces possibilités de recours diversifiées constituent un ensemble de garanties importantes pour les parents d'enfants handicapés.
Le problème est que la mise en oeuvre des procédures contentieuses, qu'il s'agisse de procédures de conciliation comme des recours juridiques purs et simples, demande toujours du temps et que le temps, ma foi, c'est ce qui manque le plus souvent, devant l'urgence des situations, pour les parents d'enfants handicapés.
C'est donc tout naturellement que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement leur donnant clairement une responsabilité ultime dans la décision d'affectation scolaire de l'enfant.
Il s'agit d'un amendement technique, ...
... mais il nous a semblé important, dans le cadre de ce projet de loi pour l'égalité des chances, de débattre de l'insertion des enfants handicapés.
Il s'agit d'un cavalier de nature réglementaire. Si nous commençons à introduire de telles dispositions dans la loi, où allons-nous ?
Tout le monde est d'accord ici pour dire qu'il ne faut pas prendre de mesures d'ordre réglementaire et on nous en propose à longueur de temps ! La commission émet un avis tout à fait défavorable.
Par ailleurs, je veux vous lire l'extrait d'un article paru dans la presse et dans lequel s'exprime un jeune homme prénommé Abdel. Il estime que le CPE aura le mérite de permettre aux jeunes de faire leurs premiers pas en entreprise. Il ajoute que tout se passe toujours bien quand on fait des efforts, qu'il faut laisser à la loi le temps de s'installer, que les abus des patrons seront sanctionnés.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Je voudrais brièvement revenir sur l'article L. 351-1 du code de l'éducation.
La loi du 11 février 2005 comporte certains aspects qui ne sont pas que techniques. En effet, lorsque les parents ou le représentant légal de l'enfant ou de l'adolescent handicapé font connaître leurs préférences pour un établissement ou un service, la commission est tenue de faire figurer cet établissement. C'est dire que les préoccupations des parents sont largement prises en compte à la fois par cet article L. 351-1 et par l'article L. 351-2.
Il est parfois nécessaire d'encadrer le pouvoir de décision des parents lorsqu'il ne semble pas compatible avec l'intérêt de l'enfant. Il y a des moments douloureux, des arbitrages difficiles sur un sujet sur lequel on n'est jamais certain de prendre la meilleure décision.
Les questions relatives au pouvoir de décision sont précisées par les compétences de la maison départementale des personnes handicapées et par la commission des droits et de l'autonomie.
Voilà pourquoi, pour des raisons de fond mais aussi d'équilibre, le Gouvernement est défavorable à cette proposition.
Nous pensons être arrivés à un certain équilibre dans la loi du 11 février 2005, équilibre qui est, comme toujours, extrêmement difficile à atteindre et nous aurons à évaluer les conditions d'application de cette loi concernant, notamment, la prise de la décision.
Je crois à la nécessité d'encadrer la décision des parents. Les laisser la prendre seuls serait parfois contraire à l'intérêt de l'enfant. En tant qu'élus, nous avons tous en tête des situations douloureuses sur lesquelles nous avons eu à nous prononcer.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 622, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'articulation entre le cours moyen deuxième année et la classe de sixième est mise en oeuvre par l'équipe éducative en lien avec les parents et les responsables des activités périscolaires afin de lutter contre l'échec scolaire. Elle s'appuie sur un enseignement spécialisé validant la maîtrise de la lecture et de l'écriture, l'apprentissage des langues vivantes et de la pratique des technologies de l'information et de la communication, la connaissance des fondements de notre culture commune.
La parole est à M. Ivan Renar.
La question essentielle du développement de la culture commune des enfants, quelles que soient leur origine, leur classe sociale, leur lieu d'habitation ou tout autre paramètre, se pose avec force dans le cadre de ce projet de loi.
L'égalité des chances, nous l'avons dit et redit, pose un problème de caractère quasi philosophique.
Sans doute conviendrait-il plutôt de faire valoir l'égalité des droits en s'appuyant entre autres sur la capacité de la puissance publique à créer les conditions de l'émergence des potentiels et des compétences, où qu'elles se trouvent sur le territoire de notre pays et quel que soit le milieu social où elles se manifestent.
Nous devons donc clairement en ce sens construire une véritable école de la réussite, et c'est autour de ces principes que je veux développer les motivations de cet amendement.
Pour construire des apprentissages solides et prévenir l'échec, il importe d'organiser la continuité scolaire, donc des apprentissages, selon des étapes bien identifiées, incluant des évaluations régulières et des remèdes engagés sans attendre.
Il convient en priorité d'améliorer l'efficacité pédagogique en lecture et en écriture, sachant que les échecs précoces dans ce domaine ont un caractère pénalisant et durable.
À cette fin, des objectifs opérationnels explicitant les compétences de fin de cycle sont précisés pour caractériser le « savoir lire » et le « savoir écrire ». Ces références constituent ainsi des repères plus concrets pour les équipes pédagogiques et pour l'élaboration des évaluations nationales.
L'élaboration de progressions pédagogiques à l'école maternelle, tout particulièrement pour le langage, et l'insertion dans ces parcours des évaluations diagnostiques, sont très importantes.
Plus tard et dans la continuité des actions pour prévenir l'illettrisme, il est tout à fait déterminant de ne pas laisser les écarts normaux entre les acquisitions du début du cours préparatoire se transformer en handicap irréversible. Des réponses adaptées sans attendre la fin du cycle II et sans préjuger les décisions relatives au parcours scolaire en fin de cycle, des dispositifs temporaires comme le regroupement d'adaptation ou groupe de besoin, sont pris en charge par des maîtres supplémentaires et autres personnels impliqués formés en conséquence.
L'enseignement rénové des sciences demande aussi un soutien important. La maîtrise des fondamentaux en mathématiques, dont les évaluations nationales en CE2 et en sixième montrent l'insuffisance, doit également faire l'objet d'une vigilance renouvelée.
La continuité de l'apprentissage de la lecture en cycle III amène l'élève à la littérature et aux approches transversales de la langue et de ses usages.
En conséquence, la loi doit prendre en compte la nécessité avant toute chose de la continuité scolaire, afin que les moyens de l'exercer soient donnés aux professionnels. Par exemple, pour une bonne continuité scolaire, il faut développer les indispensables relations entre professeurs de l'école primaire et professeurs du collège et les autres charnières entre deux cycles.
Cette exigence vaut en particulier pour les langues vivantes ainsi que pour les sciences et la technologie. Dans ces domaines, il convient de consolider l'enseignement dans toutes les classes de cycle III, et cela doit s'entendre pour l'ensemble des cursus existants.
C'est donc sous le bénéfice de ces observations, convaincu que vous êtes, comme nous, attachés à la réussite scolaire, meilleure garantie pour éviter des difficultés d'insertion professionnelle et sociale, que le groupe communiste républicain et citoyen vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Après la défense de cet amendement, monsieur Renar, je note que la concision est une qualité remarquable. Au demeurant, la commission émet un avis défavorable, car il s'agit d'un cavalier qui est d'ordre réglementaire.
Au-delà de l'aspect réglementaire, qui fera l'objet d'une circulaire, vous abordez deux sujets dans votre amendement : la continuité et la spécialité.
Le ministère de l'éducation nationale renforce cette continuité pour l'éducation prioritaire en créant, dans chaque réseau « ambition réussite », un comité exécutif. Il s'agit d'une équipe de coordination qui sera constituée par le principal, le principal adjoint ainsi que l'ensemble des directeurs des écoles élémentaires et maternelles rattachées, pour renforcer le suivi des élèves de l'école au collège, notamment pour ceux qui ont des difficultés. La circulaire le rappellera dès la rentrée prochaine.
Par ailleurs, je m'interroge sur le principe de spécialité. En effet, au collège, la lecture, l'écriture, la connaissance de la langue, les fondements de notre culture commune nécessitent-ils un enseignement spécialisé ? N'est-ce pas d'abord le métier fondamental des maîtres et des professeurs qui pourront s'appuyer sur des spécialistes à l'intérieur du collègue, que ce soit pour les langues vivantes ou la pratique des technologies de la communication et de l'information ?
Affirmer le principe de spécialité à un moment où il faut consolider le socle commun des connaissances me semble réducteur. Par conséquent, j'avoue ne pas comprendre le sens profond de ce principe de spécialité. J'y suis défavorable sur le fond, car je crains qu'il ne soit de nature, une fois de plus, à segmenter le socle fondamental des connaissances.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je suis un peu étonné que cet amendement ne figure pas dans la liste de ceux qui ont été déclarés irrecevables. Il n'y a donc pas lieu maintenant d'invoquer son caractère de cavalier.
Cela dit, je comprends très bien pourquoi il n'a pas été déclaré irrecevable : nous sommes en effet au coeur du problème. Il est bien évident que l'égalité des chances passe par la lutte contre l'échec scolaire. Or cet amendement prévoit des dispositions supplémentaires pour lutter contre l'échec scolaire.
Il est certain qu'une des causes principales de l'échec scolaire tient au phénomène des ruptures, que ce soit entre l'école élémentaire et le collège, d'une part, ou entre le collège et le lycée, d'autre part. Les élèves peuvent alors entrer dans une période d'inadaptation dont certains ne se remettent jamais.
Cet amendement vise à impliquer davantage les parents et les responsables des activités périscolaires dans le dispositif. Il s'agit de faire en sorte que le passage entre deux types d'établissements et d'enseignement s'effectue d'une manière harmonieuse, en évitant que les ruptures ne conduisent à l'échec. Car nous savons très bien que l'échec scolaire est la porte ouverte à la grande aventure, ce que, malheureusement, vous proposez avec l'apprentissage à quatorze ans, sur lequel je ne reviendrai pas !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 640, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 124-2-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une mission de travail temporaire ne peut avoir pour objet d'assurer un complément d'activité à des personnes titulaires d'un contrat de travail conclu avec une entreprise autre que l'entreprise utilisatrices. »
La parole est à M. Michel Billout.
Cet amendement tend à préciser l'article L. 124-2-1 du code du travail afin de mieux encadrer le recours aux missions de travail temporaire. Il vise à prévoir les cas d'exception à la passation de contrats de travail à titre temporaire. Ces contrats constituent, je le rappelle, et c'est sans doute un des aspects essentiels de la question, une charge déductible de l'impôt sur les sociétés des entreprises utilisatrices et qui ouvre droit à la déductibilité de la TVA.
Considéré comme une prestation de service aux entreprises, le travail temporaire est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 19, 6 % et permet donc à l'entreprise utilisatrice d'ajuster, en tant que de besoin, le montant de la TVA collectée, qu'elle est finalement appelée à verser au Trésor public.
Or nous sommes dans une période où la situation de l'emploi est de plus en plus dégradée et où le contrat de travail de caractère banal tend à devenir l'exception. Ce texte relatif à l'égalité des chances en fournit deux nouvelles illustrations spectaculaires avec le contrat d'apprentissage junior et le contrat première embauche.
Les années passant, les formes anormales de contrat de travail n'ont pas cessé de se développer. A tel point, d'ailleurs, que plus d'un million de personnes privées d'emploi ont aujourd'hui quasiment intégré, contre leur gré le plus souvent, un travail à temps partiel, voire très partiel, et que cette armée de réserves peut être sollicitée par les employeurs sans trop de contraintes.
Il est donc aujourd'hui tout à fait possible, surtout depuis l'instauration du chèque-emploi-service universel, que des personnes exerçant des activités à temps partiel soient amenées à effectuer également des missions d'intérim.
Cette situation d'accumulation de petits boulots, de miettes de travail, mettant en question la dignité même des personnes, ne peut décemment être encouragée. C'est le sens de cet amendement, qui vise à préciser le champ dans lequel se définissent les contrats de missions d'intérim. Je vous invite donc, mes chers collègues, à l'adopter.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Cet amendement revient sur une disposition adoptée par le Sénat lors de la discussion du projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, dans lequel la possibilité est reconnue à une personne travaillant à temps partiel de compléter son revenu en effectuant des missions de travail temporaire dans une autre entreprise.
Cette mesure de bon sens ne doit pas être abandonnée. Ce serait revenir sur ce que nous avons décidé voilà quelque temps. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
J'avoue ne pas très bien comprendre les motivations des auteurs de l'amendement. Il nous semble que des salariés qui travaillent à temps partiel doivent pouvoir, s'ils le souhaitent, compléter leurs revenus en exerçant un autre emploi dans une entreprise, y compris une entreprise de travail temporaire.
Je ne vois aucune raison qui empêcherait ces salariés de bénéficier d'un complément d'activité, donc de revenus. Je sais que d'autres amendements ont été déposés sur ce sujet et nous les discuterons au cours de la soirée.
Par ailleurs, nous aurons l'occasion de revenir sur cette question lors des rencontres que nous aurons avec les partenaires sociaux sur le travail à temps partiel.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 631, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux dernières phrases du premier alinéa de l'article L. 212-4-2 du code du travail sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, les représentants du personnel, ou à défaut les salariés après information de l'inspecteur du travail, disposent d'un droit de veto suspensif sur la mise en place d'horaires à temps partiel. »
La parole est à M. Ivan Renar.
Cet amendement vise à donner aux représentants du personnel le pouvoir de refuser que l'employeur impose des horaires de travail à temps partiel.
Permettez-moi de rappeler qu'en ce qui concerne les écarts de rémunération, la position occupée dans l'entreprise ou les conditions de travail, les disparités de situation entre les femmes et les hommes sont considérables. La mise en place du présent projet de loi ne fera que renforcer cette tendance.
Je tiens également à souligner que les différents rapports et études qui ont été publiés sur cette question font apparaître que l'écart moyen de salaires entre les hommes et les femmes est proche de 20 %. Mais ce pourcentage est annoncé « toutes choses égales par ailleurs », c'est-à-dire à temps de travail, qualifications, compétences et expériences équivalents entre les hommes et les femmes, ce qui, vous le savez, est loin d'être le cas.
Si l'on prend en compte l'ensemble des emplois salariés occupés par les hommes et par les femmes, temps partiel inclus, les femmes salariées gagnent aujourd'hui, dans le secteur privé, en moyenne 40 % de moins que les hommes. J'ajoute que 80 % des salariés à temps partiel sont des femmes.
Aussi, si l'on veut traiter des injustices dans le monde du travail, il faut prendre sérieusement en compte le problème du temps partiel subi qui touche de plein fouet les femmes.
Depuis vingt ans, plusieurs dispositifs législatifs ont tenté de supprimer les inégalités professionnelles, mais faute de dispositions véritablement contraignantes, ils n'y sont pas parvenus.
De plus, la question des temps partiels subis a été peu évoquée et elle ne reçoit pas l'attention qu'elle mérite, bien que le problème qu'elle pose soit aujourd'hui aigu.
Cet amendement est une réponse concrète à l'accroissement du temps partiel subi, qui participe largement à l'appauvrissement des salariés et au creusement des inégalités salariales. C'est pourquoi je vous demande de l'adopter.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
A l'exception des dispositions qu'elle a adoptées sur le cumul d'une mission d'intérim et d'un contrat de travail à temps partiel, la Haute Assemblée n'estime pas souhaitable de légiférer sur le temps partiel avant que les consultations en cours entre le Gouvernement et les partenaires sociaux n'aient permis de préciser la nature des enjeux et des besoins.
Le temps partiel, qu'il soit choisi ou subi - et il y a beaucoup de temps partiel subi - est une question intéressante, mais, pour l'heure, la commission estime préférable d'attendre. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Au cours de nos débats, j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer l'article L. 212-4-2 sur les conditions de la mise en place du temps partiel dans une entreprise, soit sur la base d'un accord collectif, soit après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.
Comme vous l'avez souligné, sur le temps partiel subi, qui touche principalement de nombreuses femmes, voilà maintenant plusieurs mois, Catherine Vautrin et moi avons engagé des réunions avec l'ensemble des fédérations d'employeurs et de salariés.
Deux grands secteurs sont concernés : la grande distribution alimentaire et le nettoyage.
Dans la branche de la grande distribution alimentaire, une négociation s'est ouverte au début du mois de février. En effet, certaines femmes, après avoir choisi un temps partiel pour des raisons personnelles, se trouvent contraintes de le garder alors même que leur situation a évolué. Elles passent alors d'un temps partiel choisi à un temps partiel subi dont elles ne tirent pas avantage dans l'organisation de leur vie personnelle, leurs horaires se répartissant parfois sur divers moments de la journée, ce qui est peu compatible avec leurs responsabilités de mères. J'espère que cette négociation nous permettra de progresser dans ce domaine.
L'autre question tient à l'inégalité salariale qui peut exister entre les hommes et les femmes. Elle fait l'objet des préoccupations de Catherine Vautrin, notamment dans le cadre de ces négociations.
Dans le secteur du nettoyage, des négociations similaires devraient être engagées assez rapidement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 637, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 212-4-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives, ou pendant douze semaines au cours d'une période de quinze semaines, l'horaire moyen effectué par un salarié équivaut ou dépasse un horaire à temps complet, le contrat de travail à temps partiel est requalifié en contrat de travail à temps complet, si le salarié intéressé le demande. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
Cet amendement concerne une fois encore le temps partiel et, en particulier, le recours abusif que les entreprises y font.
M. le ministre vient d'indiquer que des négociations sont soit déjà en cours dans la branche de la grande distribution alimentaire et le Gouvernement appelle de ses voeux l'ouverture d'une négociation analogue dans le secteur du nettoyage.
Il n'en demeure pas moins que la situation est épouvantable pour des millions de citoyens confrontés au temps partiel. Selon les informations dont je dispose, les chambres patronales n'ont nulle envie de voir une modification substantielle de la situation qui est faite au salariat dans leur branche d'activité. En vérité, ce qui compte, c'est le résultat qui ressortira de ces négociations, présentes et à venir.
Dans certains secteurs d'activité, l'usage du temps partiel, pour des raisons de flexibilité de la main d'oeuvre, est dorénavant devenu la règle. Cela s'inscrit dans la précarisation du salariat, que le présent projet de loi veut graver dans le marbre.
Dans la grande distribution, par exemple, 40 % des emplois sont aujourd'hui à temps partiel. C'est aussi le cas de la restauration, des services à la personne, de l'action sociale.
Lorsque l'on sait que 17 % des emplois sont actuellement des emplois à temps partiel, on ne peut plus croire que le temps partiel est un temps « choisi ».
L'amendement que je défends ici vise à corriger l'une des dérives de l'usage du travail à temps partiel par certaines entreprises : je veux parler de l'emploi de salariés à temps partiel, mais avec un recours abusif aux heures complémentaires. Cela nous ramène à la fameuse formule : travailler plus pour gagner plus.
Cela conduit parfois à des situations dans lesquelles, sur plusieurs mois, un salarié, pourtant embauché à temps partiel, effectue au moins l'équivalent d'un temps plein et parfois même bien plus.
Notre proposition est donc la suivante : lorsque, pendant une période d'environ trois mois, l'horaire moyen effectué par un salarié équivaut ou dépasse un horaire à temps complet, ce salarié a la possibilité de voir de plein droit son contrat à temps partiel requalifié en contrat à temps plein.
Dans un contexte de crise grave de l'emploi, de chômage de masse, de réduction massive du montant des allocations et de contraintes toujours plus fortes exercées sur les demandeurs d'emploi, que vous considérez, je le rappelle, comme responsables de leur situation, on ne peut plus parler de choix des salariés à travailler à temps partiel.
C'est particulièrement vrai pour les femmes puisque, toujours selon les statistiques, dans leur grande majorité, elles déclarent vouloir travailler plus : 60, 3 % d'entre elles répondent ne pas avoir le choix.
L'amendement vise à inverser cet état de fait C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de l'adopter.
Le Sénat a refusé de légiférer sur le temps partiel avant que les consultations en cours entre le Gouvernement et les partenaires sociaux n'aient permis de préciser la nature des enjeux et des besoins ; nous attendons leur conclusion pour prendre une position. L'avis de la commission est donc défavorable.
L'article L. 212-4-3 du code du travail prévoit, je le rappelle, la requalification du contrat à temps partiel, après douze semaines consécutives à un horaire supérieur à celui du contrat, ou douze semaines sur une période de quinze semaines. La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt de novembre 1998, a requalifié un contrat à temps partiel, quand, pendant douze semaines, c'était un temps plein qui avait été effectué.
Les préoccupations que vous exprimez sont donc assez largement satisfaites, à la fois, par le code du travail dans son état actuel et par la jurisprudence de la Cour de cassation. Par ailleurs, des négociations sont en cours sur le mode d'organisation du travail, M. le rapporteur y faisait allusion il y a un instant. L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
Vous imaginez bien, monsieur le ministre, que ce que vous venez de nous dire ne m'avait pas échappé. Nous avions d'ailleurs déjà eu l'occasion d'aborder cette question dans ce débat. Cela étant, il ne m'a pas échappé non plus que, depuis un certain temps, la jurisprudence de la Cour de cassation, ou d'autres instances judiciaires, est justement mise à mal par des projets de loi que le Gouvernement dépose devant le Parlement.
Les dispositions législatives que contiennent ces textes visent justement à renverser les principes dégagés par les décisions de ces mêmes tribunaux. Plutôt que d'attendre un nouveau texte dans lequel vous céderez probablement à l'injonction du MEDEF pour revenir sur une jurisprudence favorable aux salariés, je prends les devants en proposant d'inscrire cette jurisprudence dans le code du travail.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 638 rectifié, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Lorsqu'il apparaît, au cours d'un contrôle accompli dans l'entreprise par l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 325-1 du code du travail, que l'employeur a de manière intentionnelle embauché un salarié sans que les formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du même code aient été accomplies, le président du conseil général prend les dispositions nécessaires pour recouvrir auprès de l'employeur l'équivalent du montant des salaires versés au salarié prévus à l'article L. 262-11 du même code. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
L'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles mériterait que notre assemblée s'y intéresse.
Ces dispositions visent, ainsi que peuvent le constater ceux qui les lisent, à contrôler l'effectivité du versement de l'allocation différentielle portant revenu minimum d'insertion et à éviter, autant que faire se peut, les fraudes que l'on pourrait observer lors du versement de ces allocations.
Les débats, notamment budgétaires, les plus récents sur ces questions ont confirmé cependant notre approche de la situation générale des allocataires du revenu minimum d'insertion. La fraude constatée ne représente qu'une part marginale des allocations versées et les fraudeurs ne constituent qu'une infime partie des allocataires.
Pour autant, force est de constater qu'il n'existe pas dans notre législation, et c'est un oubli regrettable, de sanction à l'encontre de ceux, notamment employeurs, qui tirent parfois parti des limites existantes du contrôle des allocataires pour en employer un certain nombre à moindres frais.
Cette situation est d'autant plus regrettable que l'article L. 262-11 du code de l'action sociale et des familles dispose que : « Les rémunérations tirées d'activités professionnelles ou de stages de formation qui ont commencé au cours de la période de versement de l'allocation peuvent, selon des modalités fixées par voie réglementaire, être exclues, en tout ou partie, du montant des ressources servant au calcul de l'allocation. »
Cet article permet donc le cumul entre une activité professionnelle, y compris à temps partiel, et le versement de l'allocation. Il laisse d'ailleurs toute liberté à l'employeur de fixer une rémunération particulièrement faible pour laisser l'allocataire bénéficier éventuellement du versement de celle-ci.
De fait, la situation est encore plus intolérable quand l'allocataire exerce une activité professionnelle sans avoir renoncé à sa qualité d'allocataire. Le travail dissimulé, comme chacun le sait, est le plus souvent le fait des employeurs qui y trouvent l'opportunité de réduire leurs coûts de production.
Il nous semble donc nécessaire de pénaliser clairement ces pratiques, d'ailleurs déloyales au strict plan de la concurrence. Tel est le sens de cet amendement, qui tend à demander aux employeurs fautifs de rembourser aux départements, dont nous rappellerons qu'ils sont les financeurs de l'allocation, un montant forfaitaire représentatif des salaires indûment occultés.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
M. le ministre a indiqué au cours du débat que la lutte contre le travail dissimulé mobilise actuellement fortement l'inspection du travail - nous en sommes tout à fait heureux. Les résultats de cette action seront plus efficaces que la création d'une sanction nouvelle. L'avis de la commission est donc défavorable.
On ne peut pas dire que cet amendement ait un rapport direct avec le projet de loi pour l'égalité des chances. J'ai eu l'occasion de décrire la mobilisation nationale contre le travail illégal. Vous avez évoqué les services de l'inspection du travail, mais elle concerne aussi la gendarmerie, la police, le service des douanes, les services de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACCOSS, et ceux de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, l'URSSAF.
Cette mobilisation a permis de doubler le nombre de procès-verbaux et de rétablir directement dans leurs droits plus de 7 000 salariés.
Nous avons également donné à cette mobilisation une dimension transnationale, car, aujourd'hui, le travail illégal, y compris dans sa dimension d'exploitation des hommes et des femmes, ne doit pas être combattu uniquement au niveau national, mais au niveau international. C'est pourquoi un Office central de lutte contre le travail illégal a été créé l'an passé. Je voulais le rappeler à ce point de nos débats. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 639 rectifié, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 114-15 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 114 -15.- Lorsqu'il apparaît, au cours d'un contrôle accompli dans l'entreprise par l'un des agents de contrôle mentionné à l'article L. 325-1 du code du travail, que l'employeur a, de manière intentionnelle, embauché un salarié sans que les formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du même code aient été accomplies, le président du conseil général prend les dispositions nécessaires pour recouvrer auprès de l'employeur l'équivalent du montant des cotisations imputables au salaire prévues à l'article L. 262-11 du même code. »
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, à vous écouter, je vais finir par éprouver un regret - ce ne sera probablement pas le seul, au cours de nos brefs débats
sourires
Un tel amendement - à l'instar des dispositions que nous avons examinées précédemment sur un sujet lui-même très douloureux, puisqu'il tendait uniquement à pénaliser et stigmatiser les familles pauvres ou en grande difficulté - aurait permis de créer un nouveau dispositif permettant de cogner sur les « patrons voyous », au sens chiraquien, et de satisfaire l'amendement n° 15 de la commission, qui est fait pour amuser la galerie.
J'en viens à mon amendement n° 639 rectifié. L'article L. 114-15 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé : « Lorsqu'il apparaît, au cours d'un contrôle accompli dans l'entreprise par l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 325-1 du code du travail, que le salarié a, de manière intentionnelle, accepté de travailler sans que les formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du même code aient été accomplies par son ou ses employeurs, cette information est portée à la connaissance des organismes chargés d'un régime de protection sociale en vue, notamment, de la mise en oeuvre des procédures et des sanctions prévues aux articles L. 114-16, L. 162-1-14 et L. 323-6 du présent code.
« Cette information est également portée à la connaissance des institutions gestionnaires du régime de l'assurance chômage, afin de mettre en oeuvre les sanctions prévues aux articles L. 351-17 et L. 365-1 du code du travail. »
Cet amendement s'inscrit donc dans la logique qui anime nos précédents amendements sur la question du travail dissimulé. Il s'agit de faire en sorte que les cotisations sociales grevant les salaires dissimulés soient versées, pour l'indemnisation des départements, par les employeurs pris en faute au regard de la législation. Nul doute, mes chers collègues, que vous voterez cet amendement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
J'ajouterai simplement, entendant parler de contrat de responsabilités patronales, que les relations du travail sont régies par le contrat de travail, conclu entre l'employeur et le salarié. Nous n'avons pas une vision manichéenne des relations du travail. C'est sans doute ce qui fait notre grande différence.
Bien sûr, monsieur Pasqua ! L'avis du Gouvernement est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 629, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport du gouvernement sur la nécessité de sécuriser les trajectoires professionnelles des jeunes adultes par la création d'une allocation d'autonomie de formation et d'accès à l'emploi est transmis au Parlement avant le 31 décembre 2006.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Je n'ai pas non plus une vision manichéenne, monsieur le ministre. C'est bien ! Nous commençons à dialoguer. C'est presque une discussion de comptoir !
En revanche, j'ai une notion des relations humaines qui est très différente de la vôtre, et je m'en réjouis ! En effet, vous avez voulu faire sauter toute la partie qui traitait de la pauvreté, de la misère, de l'inégalité, des discriminations ainsi que de nouveaux droits pour une vraie égalité des chances ; je pense au droit de vote des travailleurs étrangers qui sont sur notre territoire - on en parlera peut-être tout à l'heure.
J'en viens à l'amendement n° 629.
Longtemps regardée comme une sorte d'âge d'or, la jeunesse est aujourd'hui considérée par beaucoup de jeunes adultes comme une période difficile.
En effet, la situation des jeunes est moins confortable que par le passé - personne ne le conteste -, car ils trouvent plus tardivement et plus difficilement les moyens de conquérir ce qu'ils considèrent comme les attributs de la vie d'adulte, à savoir l'accès à l'emploi, au logement, à la santé, à la culture et aux loisirs. Ils s'acheminent vers une vie plus difficile que celle de leurs parents. En conséquence, et presque naturellement, ils se tournent vers leurs aînés et vers les pouvoirs publics pour que leur longue marche vers l'autonomie soit facilitée.
Il est aujourd'hui délicat de peindre un tableau uniforme de la situation des jeunes adultes. Néanmoins, un constat peut être fait pour tous : l'insertion dans la vie active, source de l'autonomie financière, est moins précoce que par le passé.
Conséquence de l'effort réalisé par la nation pour que les jeunes soient mieux formés, pour qu'un plus grand nombre d'entre eux aient accès à une formation supérieure, la massification de l'enseignement a une portée incontestable : en moyenne, on entre à l'école à trois ans et on en sort à vingt-deux ans.
La période des études qui ne donne pas lieu à une rémunération est allongée, alors que les besoins de ces jeunes sont, pour beaucoup, des besoins d'adulte : accéder à un logement, réaliser leur vie affective, accéder à des loisirs, à la culture. Et quand je dis « loisirs », je ne parle pas de fainéantise, bien évidemment. Mais l'allongement de la durée des études n'est pas seul en cause pour expliquer leur longue route dans la quête de leur autonomie financière.
À la sortie de leurs études, courtes ou longues, nombreux sont ceux qui éprouvent de réelles difficultés pour s'insérer sur le marché du travail. La précarisation du travail des jeunes est un phénomène constaté et déploré par tous. Les chiffres sont sans appel : le chômage des jeunes est particulièrement élevé en France et constitue, notamment dans les quartiers les plus sensibles du pays, un élément déterminant de l'aggravation de la situation sociale.
Au demeurant, ce projet de loi, qui ajoute encore le CPE à l'arsenal hétéroclite des dispositifs dérogatoires au droit commun, est un outil complémentaire d'exploitation à bon marché et à bon droit pour l'employeur, et participe de cette précarisation institutionnalisée de la jeunesse.
De surcroît, pour ces jeunes, comme pour ceux qui sont titulaires d'un CDI, le niveau de rémunération est faible, plus faible que celui qui était perçu par leurs parents à leur âge.
Au demeurant, quand on examine la question des quartiers sensibles et la nature des incitations proposées aux entreprises, par pur effet d'aubaine, pour embaucher, on peut constater que les jeunes ne sont pas les derniers à ne se voir proposer que des emplois faiblement rémunérés et, en général, sous-qualifiés ou bien dépourvus de qualification reconnue. Situation pour le moins complexe alors que la jeunesse de ce pays est de plus en plus formée et dispose d'un potentiel important !
La précarité et la pauvreté ne sont pas - hélas ! - l'apanage des seuls jeunes sans qualification : des étudiants en sont victimes, ceux dont les familles ne peuvent plus assurer la subsistance et le soutien durant leurs études. Ainsi, 110 000 étudiants doivent recourir à un travail « susceptible de compromettre leurs études » pour s'assurer un minimum vital.
Mais attendez ! Vous me coupez tout le temps la parole !
Les filières d'excellence qui nécessitent un investissement horaire important leur sont, de fait, fermées.
Bien sûr, notre société n'est pas sans réponse face à ces difficultés, parfois même ces détresses. Mais les actions en faveur des jeunes, éclatées en de nombreux dispositifs, ne semblent pas à même de répondre à leurs attentes.
Cette réflexion s'articule autour d'un axe fort : le débat sur l'autonomie des jeunes doit être dépassé pour poser la question de la « structuration de leur avenir », ...
... c'est-à-dire concrètement pour leur ouvrir la possibilité de se trouver dans une situation soit d'emploi, soit de formation.
Je termine, monsieur le président. Laissez-moi finir, sinon je demanderai la parole pour explication de vote.
Tel est le sens de cet amendement, qui invite le Gouvernement à faire une étude sur la mise en place de la sécurisation des parcours de formation et d'emploi des jeunes.
Sans préjuger des résultats, il importe toutefois de se demander si les moyens que nous consacrons aujourd'hui aux différents dispositifs d'incitation à l'emploi ne pourraient pas être plus judicieusement affectés qu'ils ne le sont aujourd'hui.
Monsieur le rapporteur, j'imagine qu'avec ces derniers mots vous avez compris la raison de ma demande !
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Monsieur le rapporteur, je suis obligé de suspendre la séance. Vous donnerez l'avis de la commission à la reprise.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.