En effet, sous certains aspects, vous avez quelque peu transposé non pas la directive, mais la réalité du travail que j'essaie d'entreprendre sur cet enjeu difficile.
Cette directive aurait pu être transposée dès 2001 par le Gouvernement, qui a mis pas moins de quatre ans à la négocier, et ce d'autant plus si vous souhaitiez une simple transposition. Il a fallu, depuis, effectuer un travail considérable pour aboutir, dans la concertation, à un texte qui soit en phase avec l'évolution des pratiques et des techniques.
Si je vous ai bien compris, votre seule proposition aurait été ... d'attendre. Mais l'attentisme nous faisait et nous fait courir d'énormes risques. En effet, la technologie galope et permet des évolutions considérables. Il est donc essentiel de donner aux créateurs français, comme à leurs homologues européens, tous les moyens pour les inciter à basculer leurs catalogues et faire en sorte qu'une offre nouvelle puisse véritablement se développer, grâce à des principes de sécurité juridique.
L'attentisme aurait été l'érosion de la création, le désert culturel évoqué par Catherine Tasca. Vous comprendrez que je ne puisse me résoudre à une telle perspective.
S'agissant de la concertation, pour être juste, je veux rappeler le rôle fondamental qu'a joué le Conseil supérieur de la propriété littéraire artistique, mis en place précisément par Catherine Tasca lorsqu'elle était ministre de la culture et de la communication.
Que ce soit en séance plénière ou en sous- commission, ce conseil a tenu un nombre considérable de réunions sur le présent projet de loi, entre 2001, année de l'ouverture du processus de concertation, et la fin de l'année 2005. Tous les acteurs concernés ont contribué à cette concertation.
Lorsque j'ai pris mes fonctions rue de Valois, j'ai constaté, en revanche, qu'aucune réunion de concertation n'avait eu lieu entre les fournisseurs d'accès à Internet et le monde du cinéma et de la télévision ou le monde de la musique et de la radio. Nous les avons multipliées, en créant une véritable atmosphère de rencontre, de décloisonnement, dans l'objectif d'introduire une dynamique positive nouvelle et d'essayer d'éradiquer un certain nombre d'antagonismes.
Vous avez fait allusion à la procédure parlementaire. Ce qui m'intéresse avant tout dans ce débat, c'est le fond du sujet. Je pense d'ailleurs que vous n'hésiterez pas à utiliser votre talent, que j'ai constaté, pour unifier des positions qui ont parfois marqué de vives oppositions entre le groupe socialiste de l'Assemblée nationale et un certain nombre de responsables du parti socialiste.
Vous avez évoqué l'inflation des oeuvres. Sachez qu'il n'y aura jamais trop d'oeuvres à mes yeux : c'est le gage d'une diversité culturelle dynamique.
Mon objectif est non pas de provoquer ou d'attiser des conflits entre les uns et les autres, mais de favoriser les réconciliations nécessaires pour faire émerger l'intérêt général et créer une dynamique positive. Je sais que la Haute Assemblée le partage.
Ce texte donne un avenir à la diversité culturelle, qui est entrée dans le droit international en 2005, je le rappelle, avec l'adoption de la convention de l'UNESCO, à la quasi-unanimité de la communauté internationale. Adoptée en octobre, cette convention a eu des conséquences d'ores et déjà très positives que, reconnaissons-le, tous les gouvernements depuis une vingtaine ou une trentaine d'années et les majorités successives avaient appelées de leurs voeux.
Notre pays vient de remporter une très grande victoire en obtenant la reconnaissance par la Commission européenne de la validité du système français d'aide au cinéma. Nous ne sommes plus les moutons noirs ! Nous sommes désormais à l'avant-garde et nous faisons figure de précurseurs. C'est là une conséquence directe de cette reconnaissance de la diversité culturelle.
Tel est, en particulier, l'objectif que nous devons viser en ce qui concerne Internet.
A cet égard, je comprends certaines interpellations formulées par Jack Ralite tout à l'heure : si l'on ne fait rien, si l'on ne légifère pas, si l'on ne protège pas la création française ou européenne, il ne faudra pas s'étonner de l'uniformisation, de la marchandisation et de l'absence de réalité de la diversité culturelle.
Vous m'avez entendu citer à plusieurs reprises ce chiffre très édifiant : 85 % des places de cinéma vendues dans le monde concernent des productions d'Hollywood. Dès lors, si nous ne favorisons pas l'émergence d'une offre nouvelle, diversifiée et protégée en ligne, Internet sera un facteur non pas de diversité, d'ouverture et de diffusion des oeuvres, mais de concentration encore plus forte.
Sur ce sujet, quelle que soit la vivacité des différentes expressions, nous devons pouvoir nous rassembler.
Certaines actions en cours sont d'ailleurs très positives ; je pense, notamment, au plan de numérisation et de sauvegarde de l'Institut national de l'audiovisuel, l'INA, qui connaît un très grand succès. Je vous encourage, mesdames, messieurs les sénateurs, à consulter le site www.ina.fr