S'agissant de l'amendement n° 1 et du sous-amendement n° 260, j'exprimerai un certain nombre de considérations qui me semblent importantes sur ce sujet sensible.
Cette nouvelle proposition d'exception s'inscrit dans l'objectif légitime de permettre aux enseignants, aux élèves et aux chercheurs de se saisir des opportunités offertes par les nouvelles technologies. En effet, il est parfaitement naturel que soient utilisées pour les activités pédagogiques et de recherche des oeuvres de création protégées par des droits de propriété littéraire et artistique.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a engagé une négociation avec les titulaires de droits pour autoriser ces utilisations nouvelles et leur donner une sécurité juridique. Comme le Gouvernement s'y était engagé - il n'était pas ici question d'une mesure dilatoire qui serait reportée aux calendes grecques -, le ministère de l'éducation nationale et l'ensemble des titulaires de droits ont signé en mars dernier des accords visant à autoriser de façon large l'utilisation des oeuvres dans l'enseignement, notamment via les réseaux de communication électronique.
La Conférence des présidents d'université a naturellement été associée, je tiens à le rappeler, à cette négociation et a pu faire part de ses observations, chaque fois qu'elle s'est fait représenter. La politique de la chaise vide ne permet évidemment pas de faire entendre sa voix ; mais cela relève de la responsabilité de celles et de ceux qui prennent la décision de siéger ou de ne pas siéger.
Ces accords permettent d'adapter, dans un contexte nouveau, les mécanismes fondés sur la négociation et le contrat qui ont fait la preuve de leur efficacité, qu'il s'agisse tant de la photocopie que des panoramas de presse. Ils ont notamment visé à préciser l'étendue des extraits et à inclure les oeuvres réalisées à des fins pédagogiques.
La loi risque donc de figer une situation, alors même que la logique contractuelle devrait permettre une adaptation permanente à la réalité des besoins ; c'est ce que les accords ont prévu et ce à quoi le Gouvernement est prêt à s'engager.
Une définition trop large et imprécise de l'exception ne serait pas conforme à la directive européenne et à nos engagements internationaux puisque les exceptions doivent tenir compte, comme l'indique le considérant 44 de la directive, « de l'incidence économique accrue que celles-ci sont susceptibles d'avoir dans le cadre du nouvel environnement électronique ».
Je tiens à souligner le fait que l'impossibilité pour la loi d'être aussi précise que les accords placera nombre de secteurs déjà fragiles dans une situation d'insécurité juridique inquiétante, alors que ceux-ci sont essentiels à la diffusion du savoir et que l'enseignement représente pour eux une activité très importante. Je pense notamment aux partitions de musique, aux éditions techniques et de sciences humaines, aux éditions d'oeuvres dramatiques, bref à toutes les éditions fragiles. Notre objectif est de faire en sorte que les auteurs et créateurs puissent trouver des éditeurs susceptibles de publier leurs oeuvres. Nous devons avoir à coeur d'atteindre la masse critique nécessaire aux plus fragiles de nos compatriotes et à leurs créations, car cette diversité pourrait finalement être menacée au détriment de ceux-là mêmes qui doivent profiter de l'exception.
Même si je comprends parfaitement un certain nombre des objectifs que vous poursuivez, monsieur le rapporteur, je ne puis, en l'état actuel des choses, émettre un avis favorable sur cet amendement. Toutefois, si vous acceptez de rectifier votre amendement en intégrant la date référence de 2009, je reverrai ma position.
S'agissant du sous-amendement n° 260, j'y suis défavorable pour des raisons de précision. De même, je suis défavorable au sous-amendement n° 203, aux amendements identiques n° 47 et 198 ainsi qu'à l'amendement n° 121 et au sous-amendement n° 231.
En revanche, l'amendement n° 96 vise à proposer un compromis entre, d'une part, l'affirmation dans la loi d'un droit de reproduction et de représentation reconnu aux établissements d'enseignement et de recherche et, d'autre part, le recours à la démarche contractuelle pour fixer et faire évoluer dans le temps les modalités d'application de ce droit en matière de rémunération. Il permet ainsi de reconnaître les accords conclus entre les représentants des ayants droit et le ministère de l'éducation nationale, tout en en renforçant la portée. Cette disposition entrera en application sans porter atteinte aux droits de reproduction par reprographie et à la rémunération qui en découle, ce qui est indispensable. En effet, dans le cas contraire, ce serait tout l'édifice fondé par la loi de 1995 qui s'écroulerait avec, à la clé, une remise en cause profonde des équilibres économiques de plusieurs secteurs relevant de la presse et de l'édition.
Cet amendement peut donc permettre de concilier l'approche de la Haute Assemblée et celle du Gouvernement afin de répondre à notre objectif commun qui est de favoriser le développement des activités d'enseignement et de recherche, tout en reconnaissant la nécessité de respecter le droit des auteurs et de se placer dans un cadre reconnu et agréé par l'ensemble des acteurs concernés. En conséquence, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.