Intervention de Renaud Donnedieu de Vabres

Réunion du 4 mai 2006 à 21h45
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information — Article 1er bis suite, amendement 63

Renaud Donnedieu de Vabres, ministre :

L'amendement n° 63 répond au souci du Gouvernement et de la commission de préciser et d'encadrer davantage l'exception au droit d'auteur en faveur des bibliothèques, des musées et des archives. Cela paraît tout à fait indispensable pour éviter de porter préjudice à l'exploitation normale des oeuvres.

Néanmoins, plusieurs des éléments de cet amendement sont repris dans l'amendement de la commission des affaires culturelles, notamment la limitation à des actes de reproduction à des fins de conservation et à une consultation dans les locaux des établissements, ainsi que l'absence de visée lucrative.

Il reste donc spécifiquement dans cet amendement la limitation des établissements publics, qui ne paraît pas justifiée au regard des missions que remplissent des services d'archives ou des bibliothèques de statut privé, notamment associatif. Il s'agit, à titre d'exemple, d'établissements de l'enseignement supérieur ou de bibliothèques patrimoniales, comme celle de la Société française de psychanalyse, la bibliothèque Gustav Mahler. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement n° 63.

L'amendement n° 6 proposé par la commission apporte des précisions utiles à l'exception introduite par l'Assemblée nationale en faveur des bibliothèques, des musées et des archives. Il vise deux objectifs principaux : d'une part, assurer l'articulation avec le test en trois étapes afin de ne pas porter atteinte à l'exploitation normale des oeuvres ; d'autre part, respecter les dispositions de la directive européenne relative à l'exception en faveur des bibliothèques, des musées et des archives.

Ces dispositions visent en effet des actes de reproduction de nature spécifique que les États membres ont l'obligation de définir avec clarté. Cette exception doit permettre aux bibliothèques, aux musées et aux archives de continuer de mener à bien l'une des missions essentielles qui leur est confiée, à savoir la conservation de notre patrimoine national. Il est ainsi proposé que ces établissements bénéficient d'un droit de reproduction, c'est-à-dire qu'ils puissent réaliser des copies d'oeuvres protégées afin de pouvoir assurer leur conservation dans les meilleures conditions.

Cet amendement ouvre la possibilité de consulter ces copies dans les locaux des établissements. Dans le cadre du droit de reproduction dans lequel s'inscrit cette exception, la consultation sur place doit être autorisée lorsqu'elle constitue le seul moyen de maintenir l'accès du public aux oeuvres.

En pratique, il s'agirait donc essentiellement de cas d'oeuvres trop détériorées pour continuer d'être communiquées au public et qui, n'étant plus disponibles à la vente, ne peuvent être remplacées, ou encore d'oeuvres dont le format de lecture est devenu obsolète. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.

J'émets également un avis favorable sur le sous-amendement n° 106, qui clarifie de manière très utile le texte de l'exception introduite par l'Assemblée nationale en faveur des bibliothèques, des musées et des archives ; il en harmonise la rédaction.

En revanche, j'émets un avis défavorable sur le sous-amendement n° 68. La limitation du bénéfice de l'exception à des établissements publics ne paraît pas justifiée au regard des missions que remplissent des services d'archives ou des bibliothèques de statut privé, notamment associatif.

J'émets un avis également défavorable sur le sous-amendement n° 244. Le fait de souhaiter mettre en place une rémunération des ayants droit en contrepartie d'une exception au droit d'auteur est dans son principe tout à fait louable. Il convient néanmoins d'examiner attentivement les termes de la directive européenne à ce sujet. En effet, le considérant n°35 de la directive précise bien que le principe d'une compensation équitable au bénéfice des titulaires de droits n'est pas automatique et doit être apprécié en fonction du préjudice potentiel subi par ces derniers.

Il paraîtrait donc paradoxal, nous l'avons vu par ailleurs, de demander que la portée de l'exception en faveur des bibliothèques, des musées et des archives soit clarifiée et encadrée, afin d'éviter toute atteinte réelle aux intérêts des auteurs, et de réclamer dans le même temps que cette exception fasse l'objet d'une contrepartie financière pour tenir compte du préjudice subi par les ayants droit.

Par souci de cohérence, le Gouvernement souhaite donc s'en tenir à une exception suffisamment claire et encadrée pour qu'elle ne nécessite pas de compensation financière. En outre, la mise en place d'une gestion collective paraît dans ce cadre assez disproportionnée étant donné la nature des usages autorisés.

Le sous-amendement n° 245 ne permet pas de préciser la portée de l'exception en faveur des bibliothèques, des musées et des archives, mais il élargit, en revanche, le champ des bénéficiaires de cette exception à toute institution se fixant un but éducatif et culturel. Il est donc incompatible avec la directive. Le Gouvernement y est défavorable.

J'émets également un avis défavorable sur l'amendement n° 119. Celui-ci est légitime dans son principe mais inutile dans sa forme, dans la mesure où les modifications proposées sont comprises intégralement dans l'amendement de la commission.

Enfin, j'émets un avis défavorable sur les amendements n° 166 et 138.

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