Intervention de Renaud Donnedieu de Vabres

Réunion du 4 mai 2006 à 21h45
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information — Article 1er bis suite, amendement 199

Renaud Donnedieu de Vabres, ministre :

Les amendements et les sous-amendements sur lesquels le Gouvernement va maintenant donner son avis illustrent parfaitement le travail de concertation qui a été mené pour élaborer ce texte.

Bien sûr, il y a de l'électricité dans l'air quand sont en présence des intérêts qui peuvent apparaître comme contradictoires. Il est vrai qu'un certain nombre de photographes ont exprimé des craintes. Mesdames, messieurs les sénateurs, pensez-vous que le Gouvernement reste sourd et aveugle face à ceux qui s'expriment dans notre pays ? Sachez que des réunions de concertation ont eu lieu afin de trouver un bon point d'équilibre.

Je le dis aux uns et aux autres, j'attache beaucoup d'importance au photojournalisme, car je considère que c'est une expression d'une intelligence et d'une efficacité remarquables. D'ailleurs, je vous propose que nous nous rendions tous ensemble à Perpignan pour assister au festival « Visa pour l'image ». Cette manifestation a en effet donné lieu à une vraie bagarre pour la conserver sur le territoire national et éviter qu'elle ne se délocalise à Barcelone, du fait de la disparition éventuelle de certains concours financiers. Cette question étant désormais réglée, je n'ouvrirai pas des polémiques inutiles.

Vous avez raison, madame Blandin : il faut défendre ces métiers. Il faut d'autant plus les défendre que le numérique posera un jour des problèmes en termes de véracité, de fiabilité, problèmes qui n'ont évidemment rien à voir avec l'expression artistique. Car les photos « imaginaires » auxquelles vous faisiez allusion peuvent avoir un contenu aussi bien artistique que politique ou informatif. Mais, sur le strict plan de l'information, à l'heure du numérique, l'authentification de l'auteur deviendra une notion absolument essentielle.

En la matière, je pense aussi bien à l'image qu'au son ou à l'écrit. C'est un débat qui devra prochainement nous réunir et, je l'espère, nous rassembler. Après avoir traité la question des droits d'auteur et de l'internet, il nous appartiendra d'ouvrir le dossier de l'information et de l'internet avec tous les défis qui sont à la clef : les révisions déchirantes d'un certain nombre de politiques traditionnelles et les exigences sur le plan des valeurs et de la démocratie. Je n'ouvre pas le débat ce soir, car ce serait prématuré.

J'en viens aux amendements et aux sous-amendements.

S'agissant de l'amendement n° 199, je dirai que, si certaines décisions jurisprudentielles ont reconnu les besoins légitimes d'information et si les auteurs eux-mêmes sont en général favorables à ce que le public puisse être informé sur leurs oeuvres, il n'existe pas de cadre juridique sécurisé qui permette à l'image de tenir sa place dans l'information.

Pour autant, afin de préserver les intérêts essentiels des auteurs, il est nécessaire d'encadrer plus strictement cette exception. Le Gouvernement a donc organisé une concertation entre les représentants des parties concernées, qui ont pu aboutir ensemble à un compromis acceptable par tous. C'est cet équilibre que traduit l'amendement de la commission, auquel le Gouvernement apporte son soutien.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 199.

Je voudrais vous rappeler les termes de l'amendement n° 7 rectifié bis, car le sujet est si important que le texte lui-même permet de comprendre exactement ce que la commission et le Gouvernement ont voulu faire.

Ce texte résulte d'un accord, c'est-à-dire que sa rédaction repose sur une concertation préalable ; c'est la définition même d'un point d'équilibre. Voici :

« La reproduction ou la représentation, intégrale ou partielle, d'une oeuvre d'art graphique, plastique ou architecturale, par voie de presse écrite, audiovisuelle ou en ligne, dans un but exclusif d'information immédiate, et en relation directe avec cette dernière, sous réserve d'indiquer clairement le nom de l'auteur.

« Les reproductions ou représentations qui, notamment par leur nombre ou leur format, ne seraient pas en stricte proportion avec le but exclusif d'information immédiate poursuivi ou qui ne seraient pas en relation directe avec cette dernière donnent lieu à rémunération des auteurs, sur la base des accords ou tarifs en vigueur dans les secteurs professionnels concernés. »

Je vais citer un exemple très précis, que chacun a présent à l'esprit, car il s'agit d'une actualité politique assez récente.

À la suite d'une importante décision du Conseil constitutionnel, on a voulu faire une photo du siège de cette institution. Soit on cherche à montrer les locaux du Conseil constitutionnel, et apparaît probablement sur la photo une partie des colonnes de Buren, soit on veut présenter la création de Daniel Buren, et le cadrage n'est alors évidemment pas le même.

Vous le voyez, c'est affaire d'appréciation. Or l'amendement de la commission permet, me semble-t-il, de bien discerner les deux « points de vue » et de tirer les conséquences de cette différence. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 7 rectifié bis.

En revanche, il est défavorable au sous-amendement n° 202. En effet, les sous-amendements identiques n° 246 et 259, qui visent également à protéger les photojournalistes, présentent une formulation plus équilibrée et reçoivent donc un avis favorable.

Compte tenu des avis et explications que je viens de donner, je suis défavorable à l'amendement n° 120, au sous-amendement n° 230 ainsi qu'aux amendements n° 200, 177 et 140.

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