Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 14 décembre 2006 à 15h00
Parité pour les mandats électoraux et les fonctions électives — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Le parti de la majorité a préféré payer 4, 26 millions d'euros de pénalités plutôt que de présenter des femmes candidates ! Cela démontre bien tout l'intérêt que la majorité porte au principe de parité.

En 1999, la Grèce était le seul pays de l'Union européenne où la proportion de femmes parlementaires était plus faible qu'en France. Grâce à l'adhésion de nouveaux pays, nous sommes passés au troisième rang dans le peloton de queue.

D'ailleurs, si nous avons un petit peu progressé au Parlement, c'est grâce à l'introduction d'une petite dose de proportionnelle au Sénat. Du coup, la Haute Assemblée devance l'Assemblée nationale, élue au suffrage universel direct. Pourtant, comme je le disais tout à l'heure, nos concitoyens sont très favorables à la parité.

Encore une fois, nous défendons donc à la fois la proportionnelle aux élections législatives et le retour de ce mode de scrutin au Sénat, dans les départements où l'on élit au moins trois sénateurs.

Je ne peux donc que regretter la frilosité du Gouvernement, qui peine à assumer des mesures volontaristes et concrètes en faveur de la parité. Aujourd'hui encore, nous constatons partout que l'on ne s'attaque pas aux bastions masculins, tels que les conseils généraux ou les structures intercommunales, qui sont pourtant les premiers responsables.

Cela dit, et il ne faut pas l'occulter, l'accès aux mandats locaux et aux fonctions électives serait facilité si un véritable statut de l'élu existait. La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a quelque peu fait avancer la situation. Il n'en reste pas moins que les femmes doivent plus que les hommes, aujourd'hui comme par le passé, concilier vie professionnelle, où elles sont rémunérées 27 % de moins que leurs collègues masculins à travail égal, et vie familiale, où elles effectuent 80 % des tâches ménagères. Dans ces conditions, elles hésitent encore à s'investir dans la vie politique.

Prévoir la modernisation des conditions d'exercice des mandats tant locaux que nationaux profiterait non seulement aux femmes, mais également aux hommes. Bien entendu, notre volonté est non pas d'évincer ces derniers de la vie politique, mais bien de garantir un égal accès.

Or nous constatons un déficit en matière de dispositifs de garde d'enfants, de personnes dépendantes, mais également en matière de valorisation des acquis de l'expérience ou encore de garanties indemnitaires auxquelles pourraient avoir droit les élus reprenant une activité professionnelle.

Nous avons pour objectifs de faciliter le retour à la vie professionnelle et de permettre une meilleure prise en charge des contraintes familiales durant le mandat. Nous avons d'ailleurs déposé des amendements en ce sens.

La mise en place d'un statut de l'élu digne de ce nom a forcément un coût à la fois politique et social ; il faudra bien l'assumer. Pourtant, l'amélioration de la situation des élus serait évidemment favorable à une meilleure représentation des femmes en politique. Chacun le sait, elles représentent 53 % du corps électoral. Il est temps de leur donner la place qui est la leur, tout simplement.

La question de l'accès des femmes à la vie politique n'est pas non plus à écarter totalement de celle du cumul des mandats et du non-renouvellement de la classe politique.

Nos concitoyens sont exaspérés par le décalage entre la société et la représentation politique, qu'il s'agisse des femmes, c'est-à-dire la moitié de la population, des jeunes, des Français issus de l'immigration ou des couches populaires. Comme vous pouvez le constater, ils l'expriment de plus en plus vivement.

L'inscription du principe de parité dans notre Constitution, que la majorité sénatoriale a eu bien du mal à admettre, a permis de commencer à modifier un peu les photos en noir et blanc et en « costume-cravate » de nos hémicycles ; je parle des hémicycles territoriaux, car il n'en est rien au Parlement. Il y a beaucoup à faire. Le législateur a le devoir de prendre des mesures efficaces, non des faux-semblants, et concrètes.

Aussi, nous regrettons que la commission des lois ait refusé tous nos amendements, qui étaient pourtant issus de propositions de loi sénatoriales, et repoussé la plupart des recommandations de la délégation aux droits des femmes de notre Haute Assemblée.

Ce matin, Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, affirmait que ce projet de loi lui tenait particulièrement à coeur. Je voudrais donc l'interroger : que ne l'a-t-elle pas déposé plus tôt ? Si ce texte lui tenait tellement à coeur, pourquoi avoir attendu l'extrême limite du quinquennat pour le soumettre au Parlement ? Peut-être une présentation moins tardive de ce projet de loi nous aurait-elle permis d'avoir un débat plus efficace et de vous convaincre qu'il fallait tout de même faire preuve d'un peu plus d'audace.

C'est pourquoi nous voterons évidemment les amendements qui permettraient d'améliorer le présent projet de loi. Sur le texte lui-même, si aucun de ceux que nous avons déposés n'était adopté, nous serions au regret de devoir nous abstenir.

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