Dans cette perspective, je m'élèverai contre le détournement du concept de codéveloppement.
Le codéveloppement, madame la ministre, était et reste, de mon point de vue, la participation des migrants au progrès de leur pays d'origine, comme on peut le constater dans la région de Kayes : c'est grâce à l'aide des migrants qu'on a construit des dispensaires, des écoles, et développé l'adduction d'eau. Ce ne sont ni l'État central malien, ni l'aide publique au développement qui ont contribué à la modernisation sociale et au développement économique de cette région, mais les migrants, grâce à leurs transferts financiers et leurs associations.
Dire maintenant, comme vous l'avez fait, madame la ministre, plus ou moins ouvertement, que le codéveloppement consiste à prendre en compte la question migratoire dans les documents-cadres de partenariat et considérer comme de l'aide au développement des projets tels que l'organisation de l'état civil ou le soutien aux forces de sécurité, c'est détourner le concept en fonction de nos propres intérêts. Ces actions servent à faciliter la réadmission des migrants dans leur pays. Elles sont nécessaires, mais seulement du point de vue du ministère de l'intérieur, et ne relèvent pas de la lutte prioritaire contre la pauvreté.
Nous le disons tous, cette migration est une tragédie à la fois pour ceux qui perdent la vie en traversant le Sahara et l'Atlantique et pour les sociétés d'origine qui perdent leur jeunesse. Nul n'empêchera les Africains de vouloir cette migration, parce qu'ils constatent que l'amélioration de leur vie quotidienne résulte plus des apports des migrants que de l'aide publique internationale. Dans ce domaine, et c'est un de mes points de désaccord avec M. le rapporteur spécial, ce sont les ONG qui apportent l'aide technique la plus appropriée.