Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a créé un régime simplifié destiné aux entrepreneurs individuels qui souhaitent exercer, à titre principal ou complémentaire, une activité artisanale, commerciale ou libérale, dit statut de l’auto-entrepreneur.
Ce nouveau dispositif vise un seul objectif : créer de l’activité économique, notamment dans le cadre de mesures allégées en matière administrative, fiscale et sociale.
Il faut reconnaître que cet objectif a été atteint, puisque le nombre de créations d’entreprises a augmenté de plus de 6 % en avril dernier par rapport au mois de mars, une hausse liée, selon l’INSEE, à la prise en compte du nouveau statut de l’auto-entrepreneur.
Depuis le 1er janvier dernier, ce statut permet, en effet, aux salariés, chômeurs, retraités ou étudiants de développer une activité à titre principal ou complémentaire pour augmenter leurs revenus, avec des démarches simplifiées.
Le nombre cumulé de créations d’entreprises au cours des mois de février, mars et avril a marqué une hausse de 62, 5 % par rapport aux mêmes mois de l’année précédente.
Si ce nouveau statut d’auto-entrepreneur rencontre indéniablement un formidable succès, il a parallèlement entraîné un profond mécontentement au sein du secteur de l’artisanat du bâtiment.
Ce succès commence, en effet, à inquiéter très fortement les artisans du secteur du bâtiment qui y voient un risque de concurrence déloyale.
Dans une période économique particulièrement difficile, les artisans du bâtiment immatriculés au répertoire des métiers, qui s’acquittent, par conséquent, de la totalité des charges fiscales et sociales inhérentes à l’exercice de leurs activités, ne peuvent pas admettre que des activités identiques puissent être réalisées au prix d’un simple forfait fiscal et social calculé en fonction du chiffre d’affaires, sans commune mesure avec le niveau des contributions exigé dans le régime de droit commun.
Ils considèrent légitimement que le nouveau statut d’auto-entrepreneur engendre des situations de distorsions de concurrence, dont les conséquences peuvent se révéler dévastatrices pour la pérennité des entreprises artisanales du bâtiment.
Ils s’interrogent également sur l’efficacité du régime micro-social simplifié lié à ce statut, notamment en matière de constitution de droits à la retraite, sauf à développer, à terme, l’ouverture de nouveaux droits gratuits, incompatibles avec les nécessaires équilibres financiers des régimes d’assurance vieillesse.
Par ailleurs, les artisans du bâtiment doutent du contrôle réel qui doit être exercé en matière de qualification professionnelle minimale pour les activités réglementées dans le cadre de l’article 16 de la loi du 5 juillet 1996, dont le secteur du bâtiment fait partie.
Il faut rappeler que le législateur a souhaité soumettre les activités du bâtiment à un dispositif minimum de qualification professionnelle au titre de la sécurité des consommateurs. Il serait donc contraire à ce principe que des personnes puissent s’improviser dans les professions du bâtiment en optant pour ce nouveau statut.
De même, les artisans du bâtiment craignent que les personnes exerçant une activité du bâtiment sous le statut d’auto-entrepreneur ne respectent pas l’obligation de souscrire un contrat d’assurance décennale que le code civil impose à tout professionnel réalisant des travaux de construction d’un bâtiment. L’absence de garantie ferait alors courir de grands risques aux clients en cas de désordres survenant sur l’ouvrage réalisé.
Pour l’ensemble de ces raisons, ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que de profonds aménagements devraient être apportés à ce nouveau statut de l’auto-entrepreneur ? Ne serait-il pas judicieux d’exclure de ce nouveau statut les activités artisanales réglementées en application de la loi du 5 juillet 1996 ?