Intervention de Adrien Giraud

Réunion du 7 juillet 2009 à 15h00
Nouvelle-calédonie et mayotte — Adoption d'un projet de loi organique et d'un projet de loi

Photo de Adrien GiraudAdrien Giraud :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier M. le Président de la République et le Gouvernement d’avoir organisé une consultation sur la question depuis si longtemps posée par les Mahorais, afin de doter Mayotte d’un statut définitif au sein de la République française.

C’est par un score sans appel, à 95, 2 %, chère collègue Éliane Assassi, que les Mahorais se sont prononcés, le 29 mars dernier, pour que Mayotte devienne en 2011, le cent unième département français d’outre-mer.

Il faut voir là le résultat de notre « longue marche », patiente et parfois douloureuse, vers un statut répondant aux espoirs de plusieurs générations de Mahorais.

Le projet de loi organique proposé aujourd’hui apportera la sanction législative de cette évolution statutaire.

Il s’agit, certes, d’obtenir la départementalisation, mais, surtout, de la réaliser et de la réussir.

Il convient, en premier lieu, d’éviter le risque de « placage institutionnel ». Notre territoire est désireux de se développer rapidement pour répondre aux besoins d’une population qui a subi bien des retards, comme aux espoirs d’une jeunesse nombreuse et ardente.

Il faut redire ici que les Mahorais ne souhaitent pas tomber dans les facilités des sociétés de consommation ou de l’assistanat généralisé. Ils aspirent à développer des activités productives, génératrices d’emplois et de richesses et expriment une volonté de développement endogène, dans le cadre de la solidarité nationale et européenne.

Ainsi, l’organisation départementale de Mayotte devra conjuguer efficacité et simplicité. Nous voulons être un département d’outre-mer qui ne superpose pas les organes et les compétences relevant du département et de la région. Nous souhaitons que la départementalisation de Mayotte constitue un modèle original et novateur.

Dans un premier temps, il faudra compléter rapidement le cadre législatif et réglementaire nécessaire à la réalisation de nos projets afin de mettre en place un plan vigoureux de développement économique et social qui nous assure un véritable rattrapage, sans oublier la protection des plus démunis, notamment des personnes âgées et dépourvues de toutes ressources.

Dans son intervention à Versailles, lors du Congrès du 22 juin dernier, le chef de l’État a reconnu la place de l’outre-mer et la nécessité d’un traitement spécifique de nos problèmes.

Il s’agira donc d’adapter à notre situation particulière ce nouveau cadre institutionnel si l’on veut parer aux dangers d’une assimilation trop théorique et oublieuse de nos spécificités insulaires.

Le droit public français a multiplié depuis longtemps les modalités différenciées d’application de la loi républicaine. C’est le cas pour Paris, pour les départements alsaciens, pour la Corse et, bien entendu, pour les départements d’outre-mer.

Mayotte entend se prévaloir de ses spécificités pour réaliser l’application la plus efficace du système juridique français.

Bien au-delà du « plan de relance » élaboré par le Gouvernement, il sera nécessaire de programmer à moyen et à long terme les opérations de restructuration et de modernisation de l’économie mahoraise. À cet égard, les équipements nécessaires au fonctionnement du deuxième quai du port de Longoni et l’allongement de la piste aérienne sont des opérations prioritaires pour le désenclavement de l’île et le développement de ses échanges.

Il est nécessaire d’en finir avec le sempiternel refrain des « études préalables » – et jamais terminées ! – pour entrer, enfin, dans le domaine des réalisations.

Les états généraux de l’outre-mer ont ouvert la voie. Ils s’inscrivent dans la continuité de la consultation sur la départementalisation. L’intérêt manifesté à Mayotte pour ces états généraux est d’ailleurs croissant. La population veut maintenant participer à l’élaboration du nouveau statut. Il est devenu urgent de concrétiser toutes ces bonnes intentions pour préparer la transformation de Mayotte en département d’outre-mer français à partir de 2011.

En un mot, Mayotte a besoin, pour son économie, d’un véritable plan qui regrouperait la relance des activités agricoles et vivrières, la modernisation de la pêche et un vigoureux programme de formation de la jeunesse. Il est donc essentiel de poursuivre activement l’effort entrepris depuis plusieurs années. L’effectif croissant des enfants scolarisés et l’élévation du niveau de nos étudiants sont, à coup sûr, des indices des plus encourageants.

L’éducation est, en effet, le fondement par excellence du progrès de Mayotte. Il est cependant regrettable que les efforts réalisés par l’éducation nationale soient partiellement compromis par la présence massive d’enfants clandestins que nous avons l’obligation de scolariser.

Il s’agit essentiellement d’assurer une juste application du « contrat de projets de Mayotte 2008-2014 » dans un esprit de solidarité et dans une volonté de responsabilité partagée, qui sont les meilleurs gages de progrès.

Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais qu’une régularisation intervienne au bénéfice de tous les fonctionnaires de l’État et du nouveau département de Mayotte. En effet, aux termes des articles 1er et 2 de la loi n° 50-772 du 30 juin 1950, « les personnels civils et militaires en service dans les territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer » recevront « une indemnité destinée à couvrir les sujétions résultant de l’éloignement ».

Or cette indexation a cessé de s’appliquer à Mayotte en vertu de l’article 9 du décret n° 78-119 du 12 décembre 1978, alors que tous les agents publics des autres territoires et départements d’outre-mer continuent d’en bénéficier.

Les fonctionnaires de Mayotte réclament donc le rétablissement légitime de l’indexation des salaires. Il s’agit, bien sûr, de mettre fin à une discrimination, mais surtout de compenser la cherté de la vie à Mayotte. Ainsi, à la fin décembre 2008, l’indice des prix de la France entière – métropole plus départements d’outre-mer – n’avait augmenté que de 1 % en glissement annuel, contre 5, 1 % à Mayotte.

J’avais déjà signalé cette situation en 2008 à votre prédécesseur, madame la secrétaire d'État, mais je n’ai reçu aucune réponse satisfaisante.

Il est également anormal de constater qu’aujourd’hui, au moment de l’intégration des fonctionnaires de Mayotte dans la fonction publique, l’administration ne veut pas tenir compte de leur ancienneté, alors qu’ils ont servi l’État et la collectivité durant trente ans et parfois beaucoup plus.

Le statut actuel de Mayotte vis-à-vis de l’Union européenne est celui de PTOM, pays et territoires d’outre-mer. Dans ce cadre, elle bénéficie du Fonds européen de développement.

L’un des enjeux de la transformation en 2011 de notre collectivité en département est de la faire accéder au statut de « région ultrapériphérique » et, par conséquent, de lui donner la possibilité de bénéficier des fonds structurels européens. En effet, le traité actuel instituant la Communauté européenne, qui mentionne les « départements français d’outre-mer », doit permettre à Mayotte de devenir une région ultrapériphérique. L’Europe pourrait ainsi contribuer davantage à son développement.

Cela suppose donc, dans le cadre du traité actuel, une ferme volonté politique du Gouvernement, ainsi qu’un accompagnement et un soutien auprès des institutions communautaires.

Nous sommes prêts à toutes les adaptations requises. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut arrêter des mesures spécifiques pour fixer les conditions d’application du traité en tenant compte « des caractéristiques et contraintes particulières de régions ultrapériphériques sans nuire à l’intégrité et à la cohérence de l’ordre juridique communautaire ».

Je demande au Gouvernement que, lors de la prochaine programmation des fonds structurels, notre département puisse en être bénéficiaire.

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens, à cette tribune, à redire ma profonde gratitude et celle de la population que je représente au président Nicolas Sarkozy.

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