Intervention de Daniel Soulage

Réunion du 5 décembre 2006 à 15h00
Loi de finances pour 2007 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage :

Troisièmement, j'évoquerai l'assurance récolte, sujet qui me tient particulièrement à coeur.

Je me réjouis que vous ayez confié mission sur ce thème à notre collègue Dominique Mortemousque : je suis sûr que le Sud-Ouest sera bien représenté !

Par ailleurs, je me félicite qu'aujourd'hui 70 000 agriculteurs souscrivent déjà ce type d'assurance, qui leur permet de faire face aux aléas climatiques et de redémarrer plus rapidement leur activité.

Toutefois, cet essor ne me comble pas, car on est encore loin de l'objectif des 200 000 contrats d'assurance que vous avez fixé, monsieur le ministre. Nous devons donc faire preuve de plus de détermination si nous voulons que l'assurance soit plus efficace et se pérennise dans le temps.

À cet égard, deux problèmes se posent : celui du montant alloué à l'assurance, d'une part, celui de la coexistence de cette assurance avec le Fonds national de garantie des calamités agricoles, le FNGCA, d'autre part.

S'agissant du premier point, l'État doit octroyer une enveloppe plus importante que celle qui est affectée aujourd'hui à l'aide à l'assurance. Dans le budget pour 2007, 30 millions d'euros seulement sont prévus. C'est trop peu : cela nous permet uniquement de maintenir l'action précédente, ainsi que l'assurance récolte en viticulture, chère à nos amis viticulteurs. Or il faut impérativement dépasser cet objectif.

Quant au second point, son règlement passe par une évolution de notre système de protection contre les aléas. Si l'on ne souhaite pas conserver le schéma actuel, dans lequel deux systèmes concurrents coexistent, il semble possible de fondre ces derniers en une seule structure à deux étages. Le premier étage serait obligatoire pour tous les agriculteurs - il correspondrait au financement actuel du FNGCA -, le second étage serait, quant à lui, facultatif et complémentaire.

Après des discussions riches et instructives avec de nombreux experts, je considère que cette structure à deux étages peut être mise en place ; il suffit d'en avoir la volonté politique. Quel est votre position sur ce sujet, monsieur le ministre ?

En outre, j'aimerais que vous lanciez une réflexion sur l'assurance pêche. Cette idée n'est pas la mienne : je vous transmets ici le voeu de mon collègue vendéen Jean-Claude Merceron, qui regrette de ne pouvoir intervenir aujourd'hui.

Comme vous le savez, la pêche connaît depuis plusieurs années une situation particulièrement difficile en raison du contexte juridique européen, de l'évolution de la ressource, de la politique des quotas, ainsi que de la hausse des prix du gazole.

Après avoir observé le fonctionnement de l'assurance récolte, les responsables piscicoles sont convaincus que le même schéma assurantiel pourrait être adapté au domaine de la pêche. Cela passe par l'agrément du projet de garantie « couverture investissement » proposé par le Fonds de prévention des aléas pêche. Monsieur le ministre, à la veille de négociations européennes sur les quotas pour 2007, avez-vous des éléments à fournir à l'adresse du monde piscicole ?

Je ne saurais conclure mon propos sur l'assurance récolte sans évoquer une dernière difficulté, celle qui tient à l'incapacité des assureurs à trouver une réassurance privée suffisante. Il s'agit ici non pas de demander une intervention supplémentaire gratuite de l'État, mais de mettre en place une prestation qui serait rémunérée par ces professionnels. Aujourd'hui, les réassureurs français estiment avoir une capacité de couverture d'environ 400 millions d'euros. Cette somme est nettement insuffisante pour répondre aux besoins exprimés lors d'un grand accident climatique.

C'est pourquoi l'inscription d'une réassurance « climatique » permettrait de faire face à la plupart des aléas. Il serait néanmoins nécessaire que cette partie supplémentaire rémunérée par les professionnels se fasse par le biais de la Caisse centrale de réassurance. À cette fin, je présenterai un amendement lors de la discussion des articles rattachés.

Quatrièmement, enfin, je ne peux passer sous silence la question des petites retraites et du FFIPSA, qui me préoccupe particulièrement. La revalorisation des retraites les plus modestes qu'a annoncée le Président de la République est une bonne mesure. Elle concernera près de 300 000 exploitations et son coût s'élèvera à 162 millions d'euros pour 2007. Je salue cette avancée.

Néanmoins, cette mesure me conduit à vous faire part de mes préoccupations concernant le FFIPSA, dont le déficit devrait atteindre 6 milliards d'euros.

Je regrette une fois de plus que les débats concernant la situation du régime social agricole n'interviennent plus lors de l'examen du budget de votre ministère. Ils sont désormais masqués par d'autres débats. Cela me paraît contreproductif, car, lorsqu'ils ne sont pas mis en lumière, les déficits semblent oubliés ; malheureusement, les factures demeurent !

En conclusion, je veux vous mettre en garde, monsieur le ministre. Vous souhaitez anticiper l'avenir et moderniser votre administration. À cette fin, vous conduisez des expériences de regroupement. Cela se traduit aujourd'hui par la fusion des directions départementales de l'agriculture avec d'autres directions. Demain, c'est peut-être de la fusion de tout votre ministère qu'il sera question. Ce serait loin d'être anodin ; ce serait même grave pour la profession agricole et, en fin de compte, pour notre pays.

J'espère donc que la question ne se posera pas. Toutefois, si un rapprochement devait avoir lieu, il faudrait se montrer extrêmement prudent et ne l'envisager qu'après de nombreuses études. Après tout, on pourrait envisager un rapprochement - peut-être vais-je en faire sursauter certains ! - avec le ministère de l'écologie et du développement durable. Il me semble en effet que les agriculteurs et leur ministère sont, en fin de compte, les mieux placés pour s'occuper d'environnement.

L'agriculture de demain devra être exemplaire en termes de respect de l'environnement et il faut que les agriculteurs deviennent des acteurs essentiels du développement durable. Ils ont déjà beaucoup évolué dans ce sens et sont prêts à continuer, à condition que les pouvoirs publics leur tracent un chemin réaliste et viable, et les accompagnent dans cette démarche.

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