En première lecture, juste avant l’ouverture des états généraux de la restauration, nous avions déjà exprimé notre position sur la possible réduction du taux de la TVA dans ce secteur.
Au-delà du fait que, en temps de crise, cette dépense fiscale, qui va coûter 3 milliards d’euros par an aux finances publiques, ne nous semble pas prioritaire, nous avons réclamé des engagements concrets des employeurs du secteur de la restauration concernant les conditions de travail, de formation et de rémunération des salariés, qu’ils soient permanents ou saisonniers, via une convention collective ou un accord de branche.
Nous n’avons malheureusement pas été entendus et le Gouvernement a préféré donner des avantages immédiats aux organisations professionnelles patronales de la restauration, avant de garantir des avantages réels pour les salariés.
Certes, un contrat d’avenir a été signé le 29 avril dernier entre l’État et neuf organisations professionnelles, lesquelles s’engagent à répercuter la baisse du taux de TVA sur les prix, à créer des emplois, à améliorer la situation des salariés et à moderniser le secteur.
Toutefois, il faut le souligner, ce contrat n’a pas été signé par toutes les organisations professionnelles. Surtout, les syndicats de salariés et les associations de consommateurs, qui, selon vous, monsieur le secrétaire d’État, seront pourtant concernés par la mesure, n’ont pas été invités à prendre part aux négociations.
D’ailleurs, le tract – accompagné d’un bulletin d’adhésion à l’UMP ! – envoyé aux restaurateurs par le parti du Président de la République ne fait qu’accroître le doute sur l’objectif réel visé par le Gouvernement avec cette réduction de la TVA. Les salariés du secteur et le pouvoir d’achat des consommateurs ne semblent pas être les préoccupations prioritaires du Gouvernement ; cette mesure s’apparente de plus en plus à un cadeau fiscal.
Il faut aussi souligner que la conclusion de l’accord de branche, normalement attendue pour la fin de l’année, est mal partie, puisque certaines organisations professionnelles ont interrompu les négociations salariales.
Les engagements pris sont louables : revalorisation de la grille salariale, mise en place d’un régime de prévoyance et de garanties en matière de mutuelle pour frais de santé, création en deux ans de 40 000 emplois de plus qu’initialement envisagé – 20 000 emplois pérennes et 20 000 emplois en contrat en alternance – et contribution à la lutte contre le travail au noir. Mais nous n’y croyons pas, et la majorité des Français non plus, puisque 55 % des personnes interrogées pensent que les restaurateurs vont garder pour eux le différentiel de TVA.
En raison de la conjoncture économique difficile et d’un besoin fort de trésorerie, de nombreux restaurateurs ont déjà déclaré qu’ils ne pourront pas améliorer les conditions de travail. L’État aura déjà bien du mal à contrôler la mise en œuvre des engagements concernant la baisse des prix. Comment compte-t-il alors vérifier que les engagements en termes d’emploi et de conditions de travail seront respectés ? Monsieur le secrétaire d’État, comment comptez-vous imposer le respect de ces engagements au secteur de la restauration, qui, je le rappelle, cumule les salaires les plus bas, les durées de travail les plus longues, la précarité la plus forte, le turnover le plus important, le recours le plus fréquent au travail dissimulé et le taux de syndicalisation le plus bas ? Selon nous, l’application de la mesure devrait être liée à la conclusion d’un accord de branche ; à défaut d’accord, elle devrait être suspendue.
Je rappelle enfin que la conclusion d’un accord sur un statut du travailleur saisonnier est plus qu’urgente au vu notamment des mauvaises conditions d’embauche, de la fréquence du travail au noir et des difficultés de logement. Cette question était sans doute davantage prioritaire que la baisse de la TVA.