Intervention de Paul Raoult

Réunion du 7 juillet 2009 à 21h45
Développement et modernisation des services touristiques — Vote sur l'ensemble

Photo de Paul RaoultPaul Raoult :

Je me demande si on n’a pas fini par oublier que ce texte porte sur le tourisme. La France est la première destination touristique du monde et elle se situe au troisième rang mondial en termes de recettes provenant des touristes. En outre, le tourisme est une activité qui n’est pas délocalisable, ce qui, par les temps qui courent, est un atout non négligeable.

Cependant, la crise touche également le tourisme : mauvais vieillissement de certains équipements touristiques, friches touristiques.

Le texte que nous venons d’examiner ne traduit pas une volonté de développer un tourisme durable, équitable, solidaire et responsable. Même s’il comporte des avancées intéressantes, je l’ai dit au cours de la discussion générale, il nous laisse sur notre faim. Le budget prévu pour le développement du tourisme est très insuffisant eu égard à l’enjeu que représente ce secteur de l’économie dans notre pays.

Deux thèmes nous ont finalement beaucoup occupés : la baisse de la TVA sur la restauration et la procédure de déclaration d’intérêt général.

Si on peut comprendre la baisse de la TVA sur la restauration, je rappelle néanmoins que le contexte financier en fait une proposition inopportune et surtout que les contreparties sociales exigées, qui ne figurent pas dans le texte, sont largement insuffisantes.

Quant à la procédure de déclaration d’intérêt général, j’avoue qu’elle me laisse perplexe. Si j’ai bien compris, ce dont je ne suis pas sûr, elle facilite l’expropriation en vue de la construction d’un équipement privé, lequel peut ensuite bénéficier d’un financement public.

Une telle disposition méritait selon moi une discussion afin de connaître les équipements qui, en France, peuvent bénéficier de cette procédure. On m’a dit – cela est à vérifier – qu’on ne peut pas utiliser cette procédure pour la construction de logements sociaux et qu’il faut dans ce cas passer par une déclaration d’intérêt publique classique. C’est un peu fort de café qu’il soit possible d’avoir recours à la procédure de déclaration d’intérêt général pour la construction d’équipements sportifs, y compris de grands équipements dans de grandes métropoles, mais qu’on ne puisse pas le faire pour la construction de logements sociaux ! Il y a là deux poids, deux mesures.

Une réflexion globale me semble nécessaire sur la manière dont on organise notre société et sur la hiérarchie de nos valeurs. Le sport professionnel de haut niveau qui réunit 100 000 personnes, c’est très bien, mais il y a aussi les clubs sportifs de nos communes et de nos intercommunalités, avec leurs milliers d’amateurs et de bénévoles, qui sont peu soutenus. Aujourd'hui, dans la zone de 80 000 habitants dont je suis l’élu, aucune commune, aucune intercommunalité n’a les moyens de financer une piscine.

D’un côté, on a des centaines de millions d’euros pour construire de grands équipements sportifs et organiser de grands événements internationaux, de l’autre à la base les jeunes « crèvent la dalle » et n’ont pas les équipements sportifs et l’encadrement nécessaires.

Mon cœur va plus vers la base et vers toutes ces associations qui souffrent aujourd'hui d’un manque d’équipements que vers ces grands footballeurs que l’on s’arrache à coup de dizaines de millions d’euros. Et il faudrait en plus leur donner de l’argent public ? Désolé, mais je n’y arrive pas et je n’y arriverai jamais !

On me dit pourtant que de grandes manifestations sportives privées fonctionnent selon la logique du marché, avec des financements privés.

Vous l’avez compris, ma sensibilité est différente de celle de mon collègue qui, en tant que maire, tient énormément à son projet. Il n’en demeure pas moins qu’un certain nombre de valeurs de notre société ne doivent pas être oubliées.

J’évoquais tout à l’heure la civilisation romaine et ses grands amphithéâtres. Je me demande si nous n’assistons pas aujourd'hui au déclin de notre civilisation, qui place au sommet de la hiérarchie de ses valeurs les grands championnats de football, considérés comme le nec plus ultra, alors que notre société compte 30 % d’exclus, qui vivent avec rien, le SMIC ou simplement le RMI, et qu’on laisse de côté.

Combien coûtera une place pour accéder à ces grands équipements privés, sachant que même la puissance publique n’aura aucun moyen de contrainte sur ces équipements, qui ne seront créés que pour faire de l’argent ? Voilà, c’est dit et cela fait du bien !

J’espère que nous aurons demain un véritable débat sur la politique sportive dans notre pays..)

Je m’abstiendrai sur ce texte.

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