Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 17 décembre 2010 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2010 — Article additionnel avant l'article 33

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

L’objet de cet amendement est de supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires.

Cette mesure phare du Gouvernement, censée donner une traduction concrète au slogan du Président de la République, « travailler plus pour gagner plus », mais dont chacun constate aujourd’hui le caractère illusoire, est contre-productive, à deux égards au moins.

Tout d’abord, elle est contre-productive en matière d’emploi. En effet, en période de récession économique, subventionner les heures supplémentaires revient à mettre en concurrence le travail et l’emploi, au détriment de ce dernier.

Autrement dit, le recours aux heures supplémentaires, alors que les carnets de commandes sont au plus bas, a servi non pas à faire face à un surplus d’activité, mais à remplacer les salariés intérimaires ou en contrat à durée déterminée, dont les contrats n’ont pas été renouvelés par les entreprises, qui, en agents rationnels, préfèrent bénéficier d’exonérations d’heures supplémentaires plutôt que de recourir à l’intérim ou à des CDD !

De même, si des signes de reprise économique se manifestent, les entreprises préféreront, dans un premier temps, recourir aux heures supplémentaires plutôt que d’embaucher, en pleine période d’incertitude économique et sociale.

C’est, en tout cas, ce que nous révèlent les faits. Alors que la situation de l’emploi se dégrade, le taux de chômage frôlant les 10 % de la population active, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, indique qu’au troisième trimestre de 2010 le nombre d’heures supplémentaires est en hausse de 5, 8 %, après l’avoir été de 5, 2 % au deuxième trimestre et de 0, 5 % au premier trimestre.

La défiscalisation des heures supplémentaires est non seulement nuisible à l’emploi, mais aussi préjudiciable à nos comptes sociaux. En effet, elle a contribué à l’accroissement du déficit de la protection sociale, directement par la baisse des cotisations versées, indirectement par la diminution du nombre d’emplois.

Ainsi, monsieur le ministre, cette mesure prive de 3, 23 milliards d’euros de rentrées fiscales la mission « Travail et emploi », au moment où celle-ci devrait être confortée.

Plutôt que de poursuivre l’application d’une mesure qui coûte plus de 4 milliards d’euros aux comptes publics et s’avère défavorable aux salariés, aux chômeurs, aux personnes handicapées ou encore à la formation professionnelle, il convient de faire le choix qui s’impose, en abrogeant le dispositif. Cela permettrait de dégager des moyens en faveur d’une véritable politique de l’emploi.

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