Intervention de Pascal Clément

Réunion du 8 février 2007 à 9h45
Équilibre de la procédure pénale — Articles additionnels après l'article 4

Pascal Clément, garde des sceaux :

Ces deux amendements, présentés par le groupe CRC, ont pour objet de revenir sur la question des délais butoirs fixés par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.

Je tire de mon expérience ministérielle le constat que l'essentiel n'est pas là. Si l'on fixe de manière rigoureuse des délais butoirs, on risque un jour d'être confronté à un drame, celui de la libération inopportune d'un prévenu. Imaginez alors l'émotion du public !

Aussi, la solution que vous proposez n'est pas la bonne. La bonne solution consiste à ce que les parties à une instance et la chambre de l'instruction, après avoir mis complètement à plat l'affaire qui les concernent, s'interrogent sur les raisons qui pourraient conduire au placement en détention provisoire de l'accusé. C'est l'objet du présent texte. Ainsi, aux termes de l'article 4, le président de la chambre de l'instruction peut décider de saisir cette juridiction afin que celle-ci examine l'ensemble de la procédure lorsqu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis le placement en détention provisoire de la personne mise en examen - dans le texte initial présenté par le Gouvernement, ce délai était de six mois.

On découvrira alors, dans un faible nombre de cas, du moins je l'espère, que certaines personnes qui auront passé plusieurs mois en détention provisoire n'avaient aucune raison d'y être placées. Ce dispositif, s'il avait existé au moment de l'affaire d'Outreau, aurait empêché que certains demeurent plus de trois ans en détention provisoire.

Je le répète : le délai butoir n'est pas une bonne idée. Il importe avant tout d'examiner la raison pour laquelle un suspect a été incarcéré et de vérifier régulièrement que son maintien en détention est justifié. C'est ce à quoi vise la possibilité de faire appel devant la chambre de l'instruction, qui vous est proposée ici, par un examen au fond de l'ensemble de la procédure. Cela vaudra bien mieux que le copier-coller des demandes de mise en liberté formulées tous les huit jours par les avocats.

S'agissant de la question de l'audiencement, je veux dire à M. le rapporteur que nous passons des contrats d'objectifs avec les tribunaux. Ce travail avec les chefs de cour et de juridiction est un aspect peu connu des missions de l'inspection générale des services judiciaires, dont le rôle ne consiste pas seulement à inspecter les magistrats. Ainsi, la cour d'assises de Versailles, par exemple, a reçu des moyens nouveaux pour réduire ses délais d'audiencement. Elle y a, d'ailleurs, réussi.

Je ne disconviens pas, monsieur le rapporteur, que les efforts doivent être poursuivis. Mais sachez que la Chancellerie est totalement consciente de la nécessité d'attribuer aux cours d'assises des moyens supplémentaires afin de leur permettre de réduire leurs délais d'audiencement.

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