La séance est ouverte à neuf heures cinquante.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
L'ordre du jour appelle le dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Huissiers, veuillez faire entrer M. le Premier président de la Cour des comptes.
M. le Premier président de la Cour des comptes est introduit dans l'hémicycle selon le cérémonial d'usage.
Monsieur le Premier président, je suis très heureux de vous accueillir pour la troisième fois dans cet hémicycle, pour la remise solennelle à notre assemblée du rapport annuel de la Cour des comptes.
Vous me permettrez de rappeler l'importance que le Sénat accorde à ses travaux de contrôle, qui sont, en quelque sorte, « sa seconde nature ». Il lui revient en effet d'effectuer, sur pièces et sur place, les contrôles nécessaires relatifs à la consommation des crédits publics.
Conformément aux articles 47 et 47-1 de la Constitution, la Cour des comptes joue un rôle essentiel d'assistance au Parlement et, plus encore ces derniers temps, dans le contrôle de l'application des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Cette mission est attentivement suivie par la commission des finances, par son président, M. Arthuis, et par son rapporteur général, M. Marini.
En cette année de bicentenaire de la Cour, je forme donc le voeu que nos relations puissent se renforcer encore, afin d'améliorer l'information de nos commissions, du Sénat tout entier et, bien sûr, du peuple souverain.
C'est avec une grande attention et une curiosité, chaque année intacte, que notre assemblée va prendre connaissance de votre rapport.
Monsieur le Premier président, je vous souhaite une cordiale bienvenue dans l'hémicycle du Sénat et je vous donne la parole.
Applaudissements
Monsieur le président, en application de l'article L. 136-1 du code des juridictions financières, j'ai l'honneur de vous remettre le rapport public annuel de la Cour des comptes, que j'ai présenté, hier soir, à M. le Président de la République. Je vous adresse des remerciements particuliers pour votre accueil.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exercice, auquel je viens de procéder, est rituel, et pour cause : comme vous l'avez fort opportunément rappelé, monsieur le président, le rapport annuel fête cette année, avec la Cour, ses 200 ans.
Certes, le Parlement ne connut pas ses vingt-cinq premiers millésimes, qui ne profitèrent qu'à Napoléon d'abord, puis à Louis XVIII, à Charles X et à leurs gouvernements ensuite. Mais l'essor du parlementarisme allait très vite changer la donne et, en 1832, les chambres obtinrent la communication de ce travail, qu'elles réclamaient depuis déjà plusieurs années.
Le rapport annuel est ainsi, avec la déclaration générale de conformité, à l'origine même de la mission d'assistance de la Cour au Parlement.
Cette mission, indissociable du nouvel équilibre des pouvoirs réalisé par la Monarchie de Juillet, n'a cessé, depuis lors, d'être réaffirmée, confortée et élargie. Mais elle a surtout changé de dimension voilà cinq ans, avec la mise en place de loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, qui l'a littéralement et radicalement réactivée et revigorée.
La Cour des comptes est donc plus que jamais à votre disposition. Elle est à votre disposition pour assister la commission des finances dans ses travaux d'évaluation et de contrôle et pour assister la commission des affaires sociales dans ses travaux relatifs aux lois de financement de la sécurité sociale. Je viens moi-même régulièrement m'exprimer devant ces instances avec beaucoup de plaisir et répondre aux questions de leurs membres.
Elle est également à votre disposition pour mener toutes les enquêtes que vous souhaitez lui confier, en application du troisième alinéa de l'article 58 de la LOLF et de l'article 14 de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.
Ai-je besoin de rappeler qu'aujourd'hui ce n'est plus seulement un rapport annuel que nous vous remettons ? Ainsi, depuis 2002 et l'introduction des nouvelles dispositions législatives, ce sont 188 référés, 167 rapports particuliers, 5 rapports sur l'exécution budgétaire, 5 rapports sur la sécurité sociale, 4 rapports préliminaires et 44 autres rapports établis à la demande du Parlement, sur la base des deux lois organiques précitées, qui ont été remis aux deux assemblées.
Par ailleurs, la dynamique s'est radicalement accélérée. En 2002, nous consacrions un quart de notre temps de travail à ces travaux. En 2006, la proportion avait doublé et elle est, selon toute vraisemblance, encore appelée à s'accroître.
Et encore me suis-je abstenu de prendre en compte les rapports publics thématiques et autres travaux, qui ne relèvent pas directement de notre mission d'assistance, mais qui vous sont également communiqués.
En 2006, nous vous aurons ainsi remis 31 référés, 34 rapports particuliers. Nous avons réalisé, à votre demande, plusieurs enquêtes sur la gestion immobilière du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur les commissions placées auprès du Premier ministre, sur l'Agence nationale de valorisation de la recherche, sur les aides à l'emploi, sur l'Association française d'action artistique, sur la réforme de la tarification des établissements de santé et sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage. Vous avez d'ailleurs organisé un débat de contrôle budgétaire particulièrement approfondi - et nous nous en réjouissons -, sur le fondement de ce dernier travail. Nous sommes, bien entendu, très sensibles à cette initiative et très flattés que nos rapports puissent vous aider dans votre propre travail d'évaluation et de contrôle.
Nous nous sommes, par ailleurs et d'ores et déjà, mis en situation d'assumer celles de nos nouvelles compétences qui prennent effet cette année. Nous vous remettrons ainsi au printemps prochain quatre documents. Deux d'entre eux sont déjà connus de vous : le rapport sur les résultats, qui sera enrichi cette année, pour la première fois, des commentaires de la Cour sur les performances obtenues pour une vingtaine de programmes, et le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, qui actualisera et approfondira l'analyse contenue dans le présent rapport annuel. Le troisième document sera l'expression de notre opinion sur les comptes de l'État, rédigé au terme du processus de certification, et qui viendra en lieu et place du rapport sur les comptes réalisé l'an dernier. Nous vous remettrons enfin un quatrième document dans lequel nous exprimerons notre opinion sur les divers comptes du régime général de la sécurité sociale. Pour autant, comme les années passées, nous vous remettrons, à l'automne, le traditionnel rapport sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale.
S'agissant de la certification, je veux encore une fois rappeler en cet instant que nous ne concevons pas nos nouvelles missions comme des armes de censure ou de sanction d'une politique. Nous nous contenterons de nous prononcer sur la conformité et la fidélité des états comptables au référentiel que l'État s'est donné.
De façon plus générale, nous avons bien conscience que les réformes comptable et budgétaire qu'impose la LOLF sont lourdes et très ambitieuses. Les administrations - je leur en donne bien volontiers acte -, ont déjà fourni un effort énorme pour répondre à ces nouvelles exigences. Nous n'avons d'ailleurs pas manqué de souligner les progrès déjà réalisés. Nous travaillons dans une logique de partenariat et d'accompagnement de la réforme plus que de sanction. Les rencontres et les échanges avec les ministères sont plus nombreux et nous veillons à répondre à leurs propres attentes.
Nous avons ainsi nous-mêmes engagé de profondes réformes internes pour nous adapter aux enjeux de la LOLF. Dans l'esprit des préconisations du récent rapport de MM. Lambert et Migaud, nous avons spécialisé nos équipes ; nous distinguons mieux les différents types de contrôle. Ainsi, le domaine juridictionnel, la certification et l'examen de la gestion font l'objet de méthodologies, de contrôles, de rapports et de délibérés distincts.
De la même façon, nous souhaitons vous apporter le soutien que vous jugerez nécessaire pour assumer les nouveaux pouvoirs que vous confère la LOLF et nous voulons que notre contribution à vos travaux soit toujours plus fructueuse.
C'est pourquoi, comme je l'ai annoncé à l'occasion de la séance solennelle de la Cour, nous tiendrons désormais l'ensemble des parlementaires régulièrement informés de l'état de la liste de nos communications. Par ailleurs, nous assortirons la transmission de nos référés et rapports particuliers de synthèses explicatives.
La Cour entend, en outre, se donner les moyens d'une plus grande réactivité. Nous savons que nous devons nous adapter au rythme de vos travaux. C'est pourquoi nous demanderons la réduction des délais de contradiction avec les organismes contrôlés, délais qui expliquent pour une bonne part un décalage trop fréquent entre le temps de la Cour et le temps du Parlement, et nous nous efforcerons de ramener le délai moyen de réponses à vos demandes d'enquêtes à la durée habituelle des commissions d'enquête parlementaire. Dans certaines circonstances, une note d'information pourra vous être communiquée dans des délais encore plus courts.
Enfin, pour que nous soyons en mesure de répondre totalement à votre attente, il nous reste à trouver la procédure de concertation la plus appropriée pour nous permettre, s'agissant de l'évaluation de la performance, programme par programme, de nous engager sur les travaux dont vous aurez vous-mêmes signalé la priorité. Il serait absurde de procéder autrement : notre vocation est de vous assister. C'est à vous de dire vos besoins et vos choix. Nous saurons adapter nos programmes en conséquence.
Nous voulons vous être utiles, comme nous souhaitons l'être, également, au Gouvernement et aux citoyens.
Le rapport public que nous vous remettons ce jour et que je présenterai tout à l'heure à la presse leur est également adressé.
Il s'ouvre, comme l'an dernier, sur une analyse de la situation des finances publiques. Les chiffres sont encore provisoires, mais mettent en évidence une amélioration sensible. Je n'entre pas dans le détail puisque, comme je vous l'ai dit, nous consacrerons à ce sujet un rapport spécifique au printemps sur des chiffres définitifs.
Je soulignerai simplement que certains des facteurs de cette amélioration sont conjoncturels. C'est dire que l'effort accompli reste à compléter pour améliorer encore la maîtrise de la dépense publique, seule vraie garantie du caractère pérenne des résultats obtenus et à obtenir.
Le rapport annuel 2007 est en tout cas l'occasion d'illustrer par des exemples variés et concrets les voies envisageables pour atteindre cet objectif général et - j'ai cru le comprendre - consensuel.
Le premier tome contient, cette année, vingt analyses de ce type portant sur des secteurs très divers.
Nous avons tout d'abord tenu, dans un contexte européen fort changeant, à consacrer plusieurs de nos contrôles au secteur agricole.
Les quatre exemples que nous donnons montrent la nécessité, mais aussi la difficulté d'une gestion plus efficace des financements publics qui y sont consacrés. Nous soulignons le foisonnement des aides, l'impossibilité de contrôler sérieusement l'éligibilité de leurs destinataires, l'absence d'évaluation sur l'efficacité de ces dépenses et les problèmes de conformité au droit communautaire.
Vous verrez que nous nous intéressons également à la question des aides aux PME et aux PMI, ainsi qu'au crédit d'impôt recherche, qui représente un enjeu financier lourd, mais dont on mesure encore difficilement l'impact sur les dépenses de recherche des entreprises.
Nous avons également examiné comment l'État fait vivre les priorités qu'il affiche en matière de recherche. Nous consacrons ainsi une insertion à la recherche en faveur des sciences et technologies de l'information et nous achevons en ce moment même un contrôle sur la recherche dans le domaine des sciences du vivant, la deuxième priorité affichée en 2000 par le Gouvernement en matière de recherche.
Nous revenons sur le régime d'indemnisation des intermittents du spectacle. La conclusion en est claire : la réforme de 2003 n'a pas réglé le problème. Elle a juste déporté une partie des charges pesant sur l'UNEDIC vers l'État qui continue indirectement à subventionner le secteur audiovisuel. La confusion entre politique pour l'emploi et politique culturelle demeure totale.
En matière de santé et de sécurité sociale, nous abordons successivement la question des urgences et celle des soins palliatifs. Je ne rentrerai pas dans le détail, mais je soulignerai simplement que, dans les deux cas, le problème est moins un problème de moyens qu'un problème de comportements et d'organisation, notamment, pour les urgences, d'organisation de l'offre de soins en amont de l'hôpital.
L'insertion sur les aides personnelles au logement permet de revenir sur une observation récurrente de la Cour : dans un contexte budgétaire très contraint, il est indispensable de mieux cibler les aides.
Nous consacrons également des développements aux centres de rétention administrative, aux organismes paritaires collecteurs agréés et aux établissements d'enseignement du second degré. Vous retrouverez également plusieurs insertions consacrées à la gestion locale réalisées avec l'aide des chambres régionales.
Ainsi, pour m'en tenir à cet exemple, sous le chapeau commun des aménagements à vocation culturelle ou de loisirs ont été regroupés les résultats de trois contrôles portant sur l'aménagement du site du pont du Gard, la gestion du parc du Futuroscope et l'opération Cap'découverte, opération de reconversion, comme vous le savez, du site minier de Carmaux.
Ces trois projets font, chacun à leur manière, peser de très lourdes charges sur les collectivités impliquées pour des retombées économiques très incertaines. Il faut dire qu'aujourd'hui les sites de loisirs se font concurrence et que les promoteurs surestiment trop souvent la fréquentation. Au final, ce sont évidemment les contribuables qui payent.
Toutefois, ce n'est pas tout.
Nous consacrons cette année un second tome, presque aussi important que le premier, à l'examen des suites données à nos précédents contrôles, d'une part, pour « tordre le cou » à un préjugé coriace qui voudrait que la Cour prêche la bonne parole dans le vide, d'autre part, pour sortir de la trop vieille habitude de la juridiction de ne parler que de ce qui va mal.
À ce titre, le rapport montre que la Cour a été incontestablement suivie dans nombre de ses recommandations portant sur la régularité et l'efficience de la gestion des organismes qu'elle contrôle.
Il apparaît très clairement que c'est lorsque nous revenons régulièrement dans un organisme ou sur une politique donnée, lorsque nous faisons état précisément et régulièrement des suites données à nos observations, que nous obtenons les résultats les plus probants.
Je ne veux pas me lancer ici dans un recensement exhaustif de nos travaux de suivi, mais j'appelle votre attention sur quelques exemples très encourageants.
Par exemple, lors d'un nouveau contrôle de la Banque de France, dont nous avions sévèrement critiqué la gestion en 2005, dans certains de ses aspects, nous avons constaté des avancées majeures : le réseau a été drastiquement réduit, les effectifs diminués et des gains de productivité importants ont été réalisés. Certes, nos recommandations sur la nécessaire refonte de la gestion des ressources humaines et de l'action sociale gardent toute leur actualité, mais l'établissement s'est incontestablement engagé sur la bonne voie.
Permettez-moi de citer un autre exemple, celui de Météo France, dont le dossier est bien connu de votre commission des finances : suite à nos recommandations, la gestion interne a été nettement améliorée.
Les résultats de notre contrôle de suivi sur EDF, contrôle qui, comme le précédent, avait été demandé par votre assemblée, sont également encourageants : comme nous le recommandions, l'électricien a recentré son activité internationale sur des participations stratégiques.
Je pourrais multiplier les exemples. Vous en trouverez de nombreux dans le corps de ce rapport.
Cependant, je mentirais par omission si je me contentais de dresser un tableau exclusivement positif.
Il est des domaines où les progrès sont lents. C'est le cas, notamment, de la gestion des ressources humaines et des rémunérations. Dans nombre des établissements que nous avons à nouveau contrôlés, nous avons retrouvé inchangées des pratiques critiquables.
Concernant plus particulièrement les pensions des fonctionnaires, par exemple, si la loi de 2003 a consacré des avancées majeures, force est de constater néanmoins que certains dispositifs très coûteux et très contestables d'indemnités servies aux pensionnés résidant outre-mer ou de bonifications de dépaysement accordées aux fonctionnaires ayant exercé à l'étranger ou dans les DOM-TOM n'ont pas été remis en cause ou, à tout le moins, adaptés à la réalité des situations.
Vous verrez également que nous revenons sur un certain nombre de travaux d'évaluation de politiques publiques : politique pour les personnes handicapées, politique de lutte contre l'alcoolisme, avec des constats très décevants, ou évaluation des aides à l'emploi.
Dans ces domaines, souvent gérés par une multiplicité d'intervenants - ce que nous déplorons - et cruellement dépourvus de moyens de suivi statistique et de pilotage, les résultats obtenus sont moins évidents.
C'est à plus long terme que nous pouvons espérer des changements plus convaincants.
La Cour revient, enfin, sur la politique d'accueil des immigrants, qu'elle avait examinée dans un rapport thématique de novembre 2004. Conformément à ses recommandations, il apparaît que les fondements juridiques du contrat d'accueil et d'intégration ont été consolidés, son contenu précisé et que la signature d'un tel contrat a été rendue obligatoire.
La Cour relève néanmoins l'absence de suivi des engagements pris par le signataire, notamment en matière de formation linguistique. Sur le plan institutionnel, après la création en 2005 de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrants, l'ANAEM, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances a été créée en 2006. La cohérence des actions de ces deux agences avec celles de la délégation interministérielle à la ville, de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle et de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme reste à construire, si vous voulez bien m'autoriser cet euphémisme.
Voilà donc un aperçu du rapport annuel 2007.
Ce rapport annuel est accompagné, comme l'était celui de l'an dernier, du rapport d'activité de la Cour de discipline budgétaire et financière, la CDBF. C'est désormais, d'ailleurs, bien plus qu'un simple rapport d'activité. Nous avons voulu en faire un vecteur privilégié de communication pour mieux faire connaître la Cour de discipline budgétaire et financière, son rôle et sa jurisprudence. Ce rapport a également pour objet de constituer un outil de référence pour les praticiens et les autorités habilitées à saisir la CDBF, dont, monsieur le président, je n'oublie pas que vous faites partie.
En 2005, les moyens d'instruction et de jugement de la Cour ont été renforcés, le fonctionnement interne amélioré et les délais de traitement des affaires réduits. La CDBF traite un nombre croissant de saisines et peut en traiter plus encore. Il ne faut donc pas hésiter à la saisir.
Vous le savez, nous souhaiterions voir le rôle de la CDBF encore renforcé par une réforme législative d'ampleur. Je suis convaincu que tout le monde aurait à y gagner, car nous pourrions ainsi contribuer à limiter le risque de pénalisation de l'action publique.
Nous travaillons en tout cas dans ce sens et nous espérons que nos efforts pourront porter leurs fruits.
Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments que je souhaitais mettre en exergue.
Nous avons cherché à vous présenter une sélection de ce que nos contrôles ont dégagé de plus intéressant et de plus instructif sur la gestion publique et sur les moyens envisageables pour la rendre plus efficace et plus efficiente.
J'espère que ce travail et cette sélection vous apporteront des analyses et une expertise utiles et éclaireront vos débats.
C'est en tout cas dans cet esprit que nous avons travaillé et que nous continuerons à travailler pour vous.
Applaudissements
Monsieur le Premier président, le Sénat apprécie la qualité de vos rapports et, surtout, votre persévérance dans l'exercice des responsabilités qui vous incombent, s'agissant du contrôle et de l'utilisation des fonds publics. La commission des finances notamment y est très sensible.
Monsieur le Premier président, le Sénat vous donne acte du dépôt du rapport de la Cour des comptes.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
C'est avec beaucoup de plaisir et d'attention, comme il se doit, que nous venons d'entendre M. le Premier président nous présenter le rapport public annuel de la Cour des comptes.
Je ne reviendrai pas sur le contenu de ce rapport, que nous ne manquerons pas, spécialement à la commission des finances, d'analyser comme toujours avec le plus grand soin.
C'est avec satisfaction que je souhaite en premier lieu souligner l'excellence des relations qui se sont établies entre la Cour des comptes et le Sénat, relations dont je considère qu'elles ont atteint désormais leur rythme de croisière.
Ainsi, cinq enquêtes que nous lui avons demandées en 2006, en application du deuxième alinéa de l'article 58 de la LOLF, nous ont été présentées ou vont l'être dans les prochaines semaines. Elles donneront lieu, comme l'usage s'en est établi, à des auditions pour suite à donner réunissant, autour des commissaires de la commission des finances, les magistrats de la Cour des comptes ayant conduit les enquêtes ainsi que les représentants des organismes contrôlés et, le cas échéant, le ou les ministères de tutelle.
Ces auditions, nous les avons souhaitées ouvertes à la presse et à tous nos collègues des commissions intéressées, afin de donner le plus de résonance possible aux travaux de la Cour des comptes qui sont effectués sur notre demande.
Ainsi, hier, nous avons entendu, avec la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques, les représentants des services du ministère de l'économie et des finances, du ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, du ministère de l'industrie, et, enfin, du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche à propos de l'enquête de la Cour sur l'Agence nationale de valorisation de la recherche et sa transformation en OSEO-ANVAR. Je crois me faire l'interprète de l'ensemble de mes collègues pour dire que ce fut un grand moment, compte tenu des observations de la Cour et des enseignements qu'il convient d'en tirer.
C'est pourquoi nous continuerons, cette année encore, à valoriser ces travaux par une attention particulière portée au suivi des enquêtes, notamment à travers l'organisation de débats en séance publique lors des séances mensuelles réservées à l'initiative parlementaire, afin d'interroger le ministre compétent sur les suites qui sont données à ces enquêtes.
Il m'arrive de penser, mes chers collègues, que ces travaux d'interpellation et de suivi sont peut-être aussi importants que le temps que nous consacrons parfois à examiner des textes de loi quelque peu inspirés par la « tyrannie » du moment et du court terme.
Pour l'année 2007, monsieur le Premier président, la commission des finances vous a ainsi saisi de cinq enquêtes issues des demandes des rapporteurs spéciaux compétents, portant sur les sujets suivants : l'évolution des retraites militaires depuis la professionnalisation ; la gestion des crédits d'intervention de la politique de la ville ; l'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels ; le service des pensions de l'État ; la gestion des remboursements et dégrèvements d'impôts d'État et d'impôts locaux.
Nous souhaitons aussi recourir de nouveau à la faculté, ouverte par le 1° de l'article 58 de la LOLF, de demander l'assistance d'un magistrat de la Cour sur le sujet délicat des ressources financières des chambres de métiers.
Merci encore, monsieur le Premier président, de contribuer ainsi à nous assister, grâce à ces procédures, mais aussi grâce à la qualité des contacts informels que nous établissons tout au long de l'année, dans le développement de la mission de contrôle, qui est, chaque jour davantage, la « seconde nature » du Parlement, ainsi que M. le président Christian Poncelet l'a rappelé.
Au cours de l'année 2007, et nonobstant le contexte politique très particulier, le Parlement et la Cour des comptes devront également faire vivre la LOLF et poursuivre sur la voie ouverte l'an dernier lors de l'examen de la loi de règlement.
Compte tenu du calendrier prévisible des travaux du Parlement, nous devrons sans doute modifier notre manière de procéder par rapport à l'année passée. Toutefois, grâce à la collaboration de la Cour des comptes et à l'esprit d'initiative des rapporteurs spéciaux, je ne doute pas que l'examen du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2006, le premier texte de ce genre totalement « lolfien », démontrera que la logique de performance et de résultat, induite par la LOLF, est le principe qui nous guide dans l'appréciation portée sur la conduite des politiques publiques.
À l'image des entreprises du secteur privé, nous devons attacher une importance toute particulière à la reddition des comptes - bilan et compte de résultats -, et ce plus qu'à la présentation des comptes prévisionnels. À ce titre, je le répète, le Parlement doit faire évoluer le temps fort de la discussion budgétaire de la loi de finances initiale vers la loi de règlement, laquelle est la loi de « vérité budgétaire ».
Monsieur le Premier président, l'année à venir sera également marquée, vous l'avez souligné, par l'échéance du 31 mai 2007, date fixée par la LOLF pour une première certification des comptes de l'État, établie sur la base du bilan d'ouverture au 1er janvier 2006, premier « vrai bilan » selon les nouvelles normes comptables.
Je me félicite, à cet égard, que la Cour des comptes ait usé d'une démarche à la fois audacieuse et pragmatique. Audacieuse par nécessité, compte tenu de l'ampleur de la tâche et des délais qui lui étaient impartis. Pragmatique aussi, si je m'en réfère notamment au processus d'ajustements et d'échanges que la Cour des comptes a su établir avec la direction générale de la comptabilité publique en vue de préciser les concepts et les enjeux de cette opération majeure et sans précédent.
Ce travail constructif nous renvoie à la question fondamentale des normes comptables, sujet auquel, vous le savez, la commission des finances est très attentive.
Je suis bien conscient que le Parlement, comme la Cour des comptes, doit lui aussi se préparer à l'épreuve du bilan d'ouverture et qu'il nous revient sur ce sujet d'engager, dès à présent, une campagne d'information et de sensibilisation de nos concitoyens. Une telle « préparation des esprits » n'est en effet aucunement à négliger.
De ce point de vue, je me permets d'insister de nouveau pour que cette première « photographie » du patrimoine de l'État, qui doit être aussi fidèle que possible, ne sous-estime en aucune façon les dettes et les provisions pour charges constituant le « passif » de l'État au 1er janvier 2006.
Il s'agit bien sûr d'assurer le respect de l'exigence de « sincérité » des comptes publics. C'est, au surplus, le meilleur moyen d'offrir aux Français l'image tant attendue de l'équilibre des comptes publics, dès que les conditions s'y prêteront. Si telle dette ou telle provision n'est pas constatée au 1er janvier 2006, les premiers résultats d'équilibre et, peut-être, d'excédent budgétaire seront instantanément « mangés » par ces oublis.
Je suis également convaincu que la révolution lolfienne engagée par l'État doit entrer dans une seconde étape et que les principes et les normes de la LOLF devront rapidement être appliqués aux comptes de la sécurité sociale et des collectivités territoriales. Il importe que toutes les institutions soient soumises aux mêmes principes, aux mêmes nomenclatures, au même vocabulaire comptable, bref, oserais-je dire, à la même grammaire !
Je voudrais, enfin, évoquer le débat, qui n'est pas clos, concernant le cadre général de l'évolution des pratiques budgétaires et comptables ainsi que ses conséquences sur le statut de la Cour des comptes, notamment la distinction opérée entre ses fonctions de certification, d'une part, et juridictionnelles, d'autre part.
À mon sens, si des évolutions doivent avoir lieu pour tenir compte de ces différentes fonctions, il est indispensable en cette matière de prendre son temps et de préserver avant tout l'indépendance de la Cour des comptes, dont nous connaissons, par ailleurs, la capacité à évoluer et à s'adapter à ses nouvelles responsabilités.
Je conclurai, monsieur le Premier président, en évoquant les pistes d'approfondissement des relations entre la Cour des comptes et le Parlement. Tracées lors de la séance solennelle de rentrée de la Cour, elles m'ont semblé très prometteuses.
Il s'agit non seulement de l'exploitation plus systématique des nombreux référés transmis par la Cour au Sénat, mais aussi de l'amélioration des procédures de coordination entre, d'une part, les initiatives de contrôle engagées par la commission des finances et, d'autre part, le programme de travail de la Cour des comptes. Sur ces deux points, je suis persuadé que nous saurons encore nous montrer plus performants. J'ai bien noté les propositions que vous venez de faire à cette même tribune et je ne doute pas de la réactivité de la Cour des comptes en ce domaine.
L'année 2007 sera non seulement celle de la célébration du deux centième anniversaire de l'institution dont vous avez la charge, mais aussi celle de la pleine application de la LOLF.
À cette occasion, je voudrais exprimer un souhait : le programme de manifestations que vous avez prévu pour célébrer comme il se doit cet anniversaire doit permettre de populariser les travaux de contrôle. Ce faisant, nos concitoyens pourront exercer pleinement leurs prérogatives. Je ne doute pas que les parlementaires que nous sommes considéreront qu'il est plus gratifiant de se livrer à des travaux de contrôle.
Au fond, ce sera une bonne manière de consacrer, dans la République, l'obligation fondamentale qui nous est faite de rendre compte de notre gestion et de l'utilisation des comptes publics.
Applaudissements.
Huissiers, veuillez reconduire M. le Premier président de la Cour des comptes.
M. le Premier président de la Cour des comptes est reconduit selon le même cérémonial qu'à son entrée dans l'hémicycle.
Monsieur le garde des sceaux, au moment où nous attaquons la dernière ligne droite de cette session et où nous achevons en particulier un ensemble de textes constitutionnels et judiciaires, je voudrais vous rendre un hommage particulier et je ne doute pas que l'ensemble de mes collègues partage ce sentiment.
En effet, nous connaissons tous les contraintes qui ont été les vôtres pendant cette période, durant laquelle nous avons pu observer que le Gouvernement ne vous a pas beaucoup ménagé ! Vous étiez souvent à l'ouvrage, comme d'ailleurs la commission des lois du Sénat. C'est pourquoi nous tenons à vous remercier de la patience et de la courtoisie dont vous avez fait preuve à l'égard de la Haute Assemblée.
Notre ordre du jour a pu, à l'évidence, être géré au mieux, et ce malgré les adjonctions, fort légitimes, qui lui ont été faites. Je pense en particulier au très important projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
Par conséquent, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je suis heureux de vous dire qu'il n'y aura pas de débordements la semaine prochaine et que nous pouvons raisonnablement espérer arriver sans dommage aux dates des 22 et 23 février, qui nous ont été indiquées par M. le ministre délégué aux relations avec le Parlement, avec les réserves d'usage, comme étant la fin provisoire de nos travaux en séance publique.
Grâce à la compréhension des uns, à la patience des autres, à la compétence de tous, nous réussissons à épuiser un ordre du jour particulièrement chargé, et ce, je l'espère, à la satisfaction générale. C'est cela, la démocratie, même quand elle est quelque peu « bousculée » !
Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale (nos 133, 177).
Nous en sommes parvenus à la discussion des articles.
CHAPITRE IER A
Dispositions instaurant la collégialité de l'instruction
Le premier alinéa de l'article 83 du code de procédure pénale est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le président du tribunal ou, en cas d'empêchement, le magistrat qui le remplace, désigne, pour chaque information, une formation collégiale de trois juges d'instruction, dont un magistrat du premier grade exerçant les fonctions de juge coordonnateur. Il peut établir, à cette fin, un tableau de roulement.
« Ce collège de l'instruction exerce les prérogatives confiées au juge d'instruction par le présent code. Les ordonnances de mise en examen, d'octroi du statut de témoin assisté à une personne mise en examen, de placement sous contrôle judiciaire, de saisine du juge des libertés et de la détention et de mise en liberté d'office, ainsi que les avis de fin d'information, les ordonnances de règlement et de non-lieu doivent être pris de manière collégiale. Les autres actes relevant de la compétence du juge d'instruction peuvent être délégués à l'un des juges d'instruction composant le collège. »
L'amendement n° 1, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au début de la deuxième phrase du troisième alinéa de cet article remplacer les mots :
Les ordonnances
par les mots :
Les décisions
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 2, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant la dernière phrase du dernier alinéa de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Le juge d'instruction peut toutefois statuer seul avec le consentement de la personne recueilli en présence de son avocat.
La parole est à M. le rapporteur.
Tout en approuvant le choix de la collégialité en matière de juge d'instruction, il paraît nécessaire de se montrer pragmatique. Ainsi, l'obligation d'une décision collégiale ne s'impose pas systématiquement, dans le cas, par exemple, où la personne reconnaît les faits.
Par conséquent, le juge d'instruction devrait pouvoir statuer seul, à condition d'avoir recueilli le consentement de la personne en présence de son avocat.
Sur le fond, je suis favorable à cet amendement, mais je me demande s'il n'est pas quelque peu redondant, car il est tout à fait dans l'esprit du projet de loi, qui n'a pas pour objet de rendre la collégialité obligatoire !
Cet amendement n'est absolument pas redondant ! Il est évident que ce projet de loi tend à instaurer la collégialité de l'instruction, qui doit même entrer en vigueur dans les cinq ans, voire dans les trois ans, suivant la publication de la loi. D'ici là, il peut se passer bien des choses !
En attendant, nous ne voyons pas pour quelle raison le juge d'instruction pourrait statuer seul, même avec le consentement de la personne recueilli en présence de son avocat. Ce serait faire une trop grande confiance aux avocats !
M. le président de la commission des lois s'exclame.
L'amendement est adopté.
L'article 1 er A est adopté.
I. - Dans les articles 80-1, 80-1-1, 113-8, 116, 137-1, 137-2, 138, 139, 140, 141-1, 142, 144-1, 145, 146, 147, 148, 148-1-1, 175, 175-1, 175-2, 176, 177, 179, 180, 181, 182, 184, 188, 197, 469, 495-15 et 571 et dans le second alinéa de l'article 202 du code de procédure pénale, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
II. - Au début de la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 141-2 du même code, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le collège de l'instruction ».
III. - Dans le deuxième alinéa de l'article 175, dans le premier alinéa de l'article 178, et dans le premier alinéa de l'article 179 du même code, les mots : « le juge » sont remplacés par les mots : « le collège de l'instruction ». -
Adopté.
I. - L'article 50 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « Le juge d'instruction, choisi » sont remplacés par les mots : « Les juges d'instruction, choisis », et les mots : « est nommé » sont remplacés par les mots : « sont nommés » ;
2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « le magistrat désigné » sont remplacés par les mots : « les magistrats désignés » ;
3° Dans le dernier alinéa, les mots : « le juge » sont remplacés par les mots : « l'un des juges ».
II. - Dans l'article 52 du même code, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l'instruction ».
III. - L'article 84 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « du juge » sont remplacés par les mots : « d'un ou plusieurs juges » ;
2° Dans le troisième alinéa, les mots : « du juge chargé » sont remplacés par les mots : « de l'un des juges chargés », et les mots : « désigne le juge » sont remplacés par les mots : « peut désigner un juge » ;
3° Le dernier alinéa est supprimé.
IV. - Dans l'article 85 du même code, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l'instruction ».
V. - Dans le dernier alinéa de l'article 206 du même code, les mots : « au même juge d'instruction ou à tel autre » sont remplacés par les mots : « aux mêmes juges d'instruction ou à d'autres ».
VI. - L'article 207 du même code est ainsi modifié :
1° Dans les premier et dernier alinéas, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction » ;
2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « au juge d'instruction ou à tel autre » sont remplacés par les mots : « aux mêmes juges d'instruction ou à d'autres ».
VII. - L'article 207-1 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « au même juge d'instruction ou à tel autre » sont remplacés par les mots : « aux mêmes juges d'instruction ou à d'autres » ;
2° Dans le dernier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
VIII. - Le 6° du II de l'article 221-3 du même code est ainsi rédigé :
« 6° Désigner un ou plusieurs juges d'instruction pour suivre la procédure avec les juges d'instruction déjà saisis ; ».
IX. - Dans le premier alinéa de l'article 397-2 du même code, les mots : « l'un de ses membres ou l'un des juges d'instruction de la juridiction désigné » sont remplacés par les mots : « certains de ses membres ou certains des juges d'instruction de la juridiction désignés ».
X. - Dans les articles 804 et 905-1 du même code, les références : «, 83-1 et 83-2 » sont remplacées par le mot et la référence : « et 83 ».
XI. - Dans l'article 877 du même code, les références : « 83-1, 83-2 » sont remplacées par la référence : « 83 ».
L'amendement n° 3, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa (1°) du III du présent article par les mots :
, et les mots : « d'un autre juge » sont remplacés par les mots : « d'un ou plusieurs autres juges »
La parole est à M. le rapporteur.
La commission a déposé plusieurs amendements de ce genre. La discussion ira donc très vite et nous n'expliquerons pas notre vote à chaque fois, étant donné que nous ne voyons pas d'inconvénient à ces modifications.
L'amendement est adopté.
L'article 1 er C est adopté.
I. - L'article 657 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, les mots : « juges d'instruction, appartenant à un même tribunal ou à des tribunaux différents, » sont remplacés par les mots : « pôles de l'instruction », et les mots : « des juges » sont remplacés par les mots : « des pôles » ;
2° Dans la deuxième phrase, le mot : « juges » est remplacé par les mots : « collèges de l'instruction saisis ».
II. - Dans l'article 663 du même code, les mots : « juges d'instruction » sont remplacés par les mots : « collèges de l'instruction », et le mot : « juges » est remplacé par le mot : « collèges ».
III. - Dans le second alinéa de l'article 698 du même code, les mots : « le juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « la juridiction d'instruction ».
IV. - L'article 701 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le deuxième alinéa, les mots : « le juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « la juridiction d'instruction » ;
2° Dans le dernier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
L'amendement n° 4, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le deuxième alinéa (1°) de cet article :
1° Dans la première phrase, les mots : « juges d'instruction » sont remplacés par les mots : « collèges de l'instruction », et les mots : « des juges » sont remplacés par les mots : « des collèges ».
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'article 1 er D est adopté.
I. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article 704 du code de procédure pénale, les mots : « un ou plusieurs juges d'instruction » sont remplacés par les mots : « les juges d'instruction ».
II. - Dans les articles 705-1, 706-2, 706-18, 706-25, 706-45, 706-77, 706-107 et 706-110 du même code, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
III. - L'article 705-2 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « le juge d'instruction chargé » sont remplacés par les mots : « la juridiction chargée » ;
2° Dans la dernière phrase du premier alinéa et dans le deuxième alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
IV. - L'article 706-17 du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l'instruction » ;
2° Dans le dernier alinéa, les mots : « un magistrat » sont remplacés par les mots : « des magistrats », le mot : « affecté » est remplacé par le mot : « affectés », et les mots : «, le cas échéant dans les conditions prévues à l'article 83-1, » sont supprimés.
V. - L'article 706-19 du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction » ;
2° Dans la première phrase du premier alinéa, le mot : « magistrat » est remplacé par le mot : « collège ».
VI. - L'article 706-22 du même code est ainsi modifié :
1° Aux première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième occurrences, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction » ;
2° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : « le juge d'instruction chargé » sont remplacés par les mots : « la juridiction chargée ».
VII. - L'article 706-76 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l'instruction » ;
2° Dans le dernier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
VIII. - L'article 706-78 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « le juge d'instruction chargé » sont remplacés par les mots : « la juridiction chargée » ;
2° Dans la dernière phrase du premier alinéa et dans le deuxième alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
IX. - L'article 706-109 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « pôle de l'instruction » ;
2° Dans le dernier alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ».
X. - L'article 706-111 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la deuxième phrase du premier alinéa, les mots : « le juge d'instruction chargé » sont remplacés par les mots : « la juridiction chargée » ;
2° Dans la dernière phrase du premier alinéa et dans le deuxième alinéa, les mots : « juge d'instruction » sont remplacés par les mots : « collège de l'instruction ». -
Adopté.
CHAPITRE IER
Dispositions relatives aux pôles de l'instruction et à la cosaisine des juges d'instruction
I. - Le chapitre III du titre Ier du livre Ier du code de procédure pénale est complété par un article 52-1 ainsi rédigé :
« Art. 52-1. - Dans certains tribunaux de grande instance, les juges d'instruction sont regroupés au sein d'un pôle de l'instruction.
« Les juges d'instruction composant un pôle de l'instruction sont seuls compétents pour connaître des informations en matière de crime. Ils demeurent compétents en cas de requalification des faits en cours d'information ou lors du règlement de celle-ci.
« Ils sont également seuls compétents pour connaître des informations donnant lieu à une cosaisine conformément aux articles 83-1 et 83-2.
« La liste des tribunaux dans lesquels existe un pôle de l'instruction et la compétence territoriale des juges d'instruction qui le composent sont déterminées par décret. Cette compétence peut recouvrir le ressort de plusieurs tribunaux de grande instance. Un ou plusieurs juges d'instruction peuvent être chargés, en tenant compte s'il y a lieu des spécialisations prévues par les articles 704, 706-2, 706-17, 706-75-1 et 706-19, d'organiser l'activité des juges d'instruction au sein du pôle, dans des conditions fixées par décret. »
II. - L'article 80 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est précédé de la mention : « I » ;
2° Sont ajoutés un II et un III ainsi rédigés :
« II. - En matière criminelle, ainsi que lorsqu'il requiert une cosaisine, le procureur de la République près le tribunal de grande instance au sein duquel il n'y a pas de pôle de l'instruction est compétent pour requérir l'ouverture d'une information devant les magistrats du pôle territorialement compétents pour les infractions relevant de sa compétence en application de l'article 43, y compris en faisant déférer devant eux les personnes concernées.
« Dans les cas prévus au premier alinéa, le réquisitoire introductif peut également être pris par le procureur de la République près le tribunal de grande instance au sein duquel se trouve le pôle, qui est à cette fin territorialement compétent sur l'ensemble du ressort de compétence de ce pôle, y compris pour diriger et contrôler les enquêtes de police judiciaire.
« Le procureur de la République près ce tribunal de grande instance est seul compétent pour suivre le déroulement des informations visées aux alinéas précédents jusqu'à leur règlement.
« En cas de renvoi devant la juridiction de jugement, l'affaire est renvoyée, selon le cas, devant la juridiction de proximité, le tribunal de police, le tribunal correctionnel, le tribunal pour enfants ou la cour d'assises initialement compétents.
« III. - Si le procureur de la République près le tribunal de grande instance dans lequel il y a un pôle de l'instruction constate qu'une personne est déférée devant lui en vue de l'ouverture d'une information en application du deuxième alinéa du II et qu'il estime qu'aucune information relevant de la compétence du pôle ne doit être ouverte, il peut, avant de transmettre le dossier de la procédure au procureur de la République territorialement compétent, requérir le placement sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire de la personne selon les modalités prévues par le troisième alinéa de l'article 394 et l'article 396. Si la personne est placée en détention provisoire, elle doit comparaître devant le procureur de la République près le tribunal de grande instance au sein duquel il n'y a pas de pôle de l'instruction au plus tard le troisième jour ouvrable suivant. À défaut, elle est mise d'office en liberté. »
II bis. - Dans l'article 85 du même code, après la référence : « 52 », il est inséré la référence : «, 52-1 ».
III. - L'article 118 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si l'information a été ouverte au sein d'une juridiction dépourvue de pôle de l'instruction, le juge d'instruction, aussitôt après avoir procédé aux formalités prévues par le présent article, se dessaisit au profit d'un juge du pôle de l'instruction compétent, désigné par le président du tribunal de grande instance dans lequel se trouve ce pôle. »
IV. - Le troisième alinéa de l'article 397-2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, si les faits relèvent de la compétence d'un pôle de l'instruction et qu'il n'existe pas de pôle au sein du tribunal de grande instance, cette comparution doit intervenir devant le juge d'instruction territorialement compétent dans un délai de trois jours ouvrables, à défaut de quoi le prévenu est remis en liberté d'office. »
V. - Le paragraphe 3 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du même code est complété par un article 397-7 ainsi rédigé :
« Art. 397-7. - Si le procureur de la République estime que les faits pour lesquels la personne est déférée devant lui en application de l'article 393 doivent faire l'objet d'une information relevant de la compétence d'un pôle de l'instruction alors qu'il n'existe pas de tel pôle au sein du tribunal de grande instance et que les éléments de l'espèce lui paraissent exiger une mesure de détention provisoire, il peut requérir le placement sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire de cette personne jusqu'à sa comparution devant le juge d'instruction compétent en faisant application du troisième alinéa de l'article 394 ou de l'article 396. Si la personne est placée en détention provisoire, elle doit comparaître devant le juge d'instruction du pôle de l'instruction au plus tard le troisième jour ouvrable suivant. À défaut, elle est mise d'office en liberté. »
L'amendement n° 54 rectifié sexies, présenté par MM. Guené, Murat, Mouly, Mortemousque, Doublet, Huré, Puech, Jarlier, Billard, Vial, Gouteyron et Fournier, Mme Bout, MM. Sido et Braye, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 52-1 du code de procédure pénale, insérer une phrase ainsi rédigée :
Il existe au moins un pôle de l'instruction par département.
La parole est à M. Dominique Braye.
Cet amendement a pour objet de prévoir au moins un pôle de l'instruction pour chacun de nos départements.
Il s'agit d'oeuvrer, dans le cadre de l'aménagement du territoire, afin de conserver les services publics dans nos départements, notamment les plus ruraux, en maintenant toute la substance humaine et sociale provenant des magistrats, de leurs équipes, ainsi que des avocats.
Le projet de loi prévoit que les futurs pôles de l'instruction seront fixés par voie réglementaire. Or il y a tout lieu de penser que ce sont les départements ruraux à faible population qui risquent, dans le cadre d'une réorganisation, d'en être privés.
La Chancellerie tente d'apaiser nos craintes en indiquant qu'il y aura 125 pôles et que « la plupart » des départements en seront dotés, ce qui n'est pas de nature à rassurer les départements qui en seraient privés et qui pourraient, selon certaines informations, être au nombre d'une dizaine.
Il est important de préciser que cet amendement n'a pas pour objet de s'opposer aux nécessaires réformes de la justice, tout particulièrement de la carte judiciaire, qui date d'un autre âge. Nous aurions pu, à cet égard, envisager un amendement de repli afin que, dans le cadre de cette réorganisation, les trente départements les moins peuplés de France soient dotés d'un pôle de l'instruction.
Ce qui nous interpelle, c'est que les départements souffrant particulièrement de la diversification et de l'évasion des services publics soient, une nouvelle fois, frappés par une réorganisation. Or, s'il est bien un domaine, régalien de surcroît, où l'aménagement du territoire pourrait être préservé dans sa proximité, c'est celui de la justice, tout particulièrement, au siècle de l'Internet, dans le choix de la localisation des pôles de l'instruction.
Est-il besoin de rappeler que le cadre et la quiétude de la ruralité sont, eux aussi, propices à la sérénité qui doit présider à toute instruction ?
Nous sommes bien conscients du sort qui sera réservé à notre amendement en raison de la composition de notre hémicycle, même ici, au Sénat, mais il me semble important d'attirer l'attention du Gouvernement sur l'impact économique d'une telle mesure dans un département rural et sur le besoin de proximité dans l'instruction de la justice, qui fait également l'objet de voeux de la part de nos concitoyens, à la ville comme à la campagne.
Je crains qu'une telle mesure ne vienne ajouter à la crise du service public, qui continue à « couver » actuellement dans nos campagnes. Il me semble qu'il est l'heure de se poser la question d'un aménagement cohérent de notre territoire.
À défaut de donner un avis favorable sur cet amendement, je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, de bien vouloir rassurer toute une partie de nos concitoyens sur ce problème important.
M. Braye vient d'évoquer une question importante. De nombreux barreaux de province craignent, en effet, de voir disparaître le tribunal de grande instance dans leur département.
Je rappelle qu'il existe 180 tribunaux de grande instance en France, dont 66 ne comportent qu'un seul juge d'instruction et ne traitent que 4, 88 % des affaires soumises à instruction. Leur activité est donc très restreinte. Je suis moi-même issu d'un département rural, qui ne compte qu'un seul tribunal de grande instance, et je connais bien cette question.
Il existe en France quelques cas particuliers pour des raisons de difficultés de communications, de distance ; ils seront examinés. Mais, en tout état de cause, la solution de ce problème relève du règlement, et non de la loi, ce qui ne nous empêche pas d'ailleurs de l'évoquer ici.
Le garde des sceaux nous avait indiqué, lors de son audition devant la commission des lois, comme il l'a fait également devant l'Assemblée nationale, que chaque tribunal de grande instance conserverait, au moins, un juge d'instruction. Cet engagement devrait être de nature à rassurer les avocats et les élus concernés.
Par ailleurs, il est très clair, dans le projet de loi, que les affaires instruites par un pôle de l'instruction qui ne dépendrait pas du tribunal de grande instance du département où sont survenues ces affaires seront renvoyées à la juridiction territorialement compétente, comme le prévoient les règles en vigueur aujourd'hui.
Je souhaite à mon tour rassurer les auteurs de cet amendement.
Leur crainte dépasse d'ailleurs l'objet de cet amendement, puisqu'elle concerne la suppression des tribunaux de grande instance ne comportant qu'une chambre de l'instruction.
Vous nous faisiez part, monsieur le rapporteur, de votre expérience en Mayenne. Moi, je suis l'élu d'un département qui compte trois tribunaux de grande instance, dont deux TGI avec une chambre de l'instruction. Je peux comprendre ce problème, sur lequel je souhaite apporter quelques précisions.
Aujourd'hui, nous devons être capables de répondre aux attentes du justiciable de 2007 et de traiter des affaires très spécialisées, relevant notamment du terrorisme, de la grande criminalité, du blanchiment d'argent. Or un tribunal de grande instance comportant une chambre de l'instruction ne pourra pas statuer sur des questions très techniques.
Mais nous avons aussi besoin des juridictions de proximité que sont les TGI comprenant une chambre de l'instruction à condition qu'elles délibèrent sur le fondement du « bon droit », ce qu'elles savent faire, et non sur celui du droit très spécialisé.
Lorsque mon prédécesseur a créé les JIRS, les juridictions interrégionales spécialisées, il n'en a pas mis en place une par cour d'appel. Or, à l'époque, aucun amendement tendant à la création d'une JIRS par cour d'appel n'avait été déposé ! Nous en sommes d'ailleurs bien loin puisqu'il y a huit JIRS dans notre pays.
Par ailleurs, il existe, en France, un seul pôle antiterroriste, installé à Paris. Je n'ai pas entendu dire, jusqu'ici, qu'il en fallait également un à Aurillac, dans le Cantal !
Sourires
Il s'agit de spécialiser la justice et, demain, les pôles de l'instruction seront composés de juges plus expérimentés - un juge du premier grade et un juge du second grade -, que l'on trouve en général dans les petits tribunaux.
Rappelez-vous le problème qui s'était posé au TGI de Boulogne-sur-Mer, lors de l'affaire d'Outreau. Le juge d'instruction chargé de cette affaire très complexe, qui n'avait qu'une année d'ancienneté et en était à son premier poste, n'avait pas d'expérience. Ce type d'affaire sera désormais renvoyé au pôle de l'instruction.
Les départements comme le Nord ou le Pas-de-Calais, qui comptent plus de 1, 5 million d'habitants, seront dotés de plusieurs pôles de l'instruction.
À la question de savoir s'il faut mettre en place, dans chaque petit département, un pôle de l'instruction, je réponds non. Ainsi, à Aurillac, dans le département de M. Murat, où le TGI compte un seul juge d'instruction, vous comprenez qu'il ne peut y avoir un pôle de l'instruction.
Considérer qu'il faut un pôle par département, cela reviendrait à dire qu'il y a, en France, un nombre suffisant de magistrats et que, dès lors, il est possible de nommer des juges à des postes qui ne les occuperont pas à plein temps. Nous n'allons pas nommer deux juges d'instruction dans chaque TGI, alors que ces juridictions ont à connaître, pour reprendre le chiffre cité par M. le rapporteur, moins de 5 % de la totalité des affaires soumises à instruction dans notre pays. Ce ne serait pas raisonnable !
Chacun doit être rassuré en la matière. La carte judiciaire sera d'autant plus protégée que la magistrature se spécialisera davantage, ce qui peut se faire au niveau des JIRS ou dans les juridictions situées dans les très grandes villes françaises, comme Paris. Il existe ainsi deux juridictions spécialisées dans les affaires maritimes, à Brest et à Toulon, ce qui ne serait pas utile à Clermont-Ferrand !
Cette spécialisation conforte, également, les juridictions du premier degré, très largement réparties dans la province française, puisqu'il existe 180 TGI. Pour sauver les TGI, le meilleur moyen est donc de ne pas mettre en place un pôle de l'instruction par département. Demander le contraire, c'est ne pas comprendre cet enjeu.
Au bénéfice de ces explications, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez bien compris qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Il était important pour nos collègues élus de départements ruraux d'entendre cette explication.
Dans le domaine de la justice, la spécialisation et la proximité sont deux concepts qui s'affrontent, mais en même temps ce sont deux exigences que l'on doit prendre en compte.
Dans une société aussi complexe que la nôtre, dans tous les domaines, nous nous dirigeons vers une spécialisation accrue, rendue nécessaire par la qualité de service attendue par nos concitoyens.
Je retire donc cet amendement.
L'amendement n° 54 rectifié sexies est retiré.
L'amendement n° 5, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 52-1 du code de procédure pénale, remplacer la référence :
par la référence :
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 6, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 52-1 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
d'organiser l'activité
par les mots :
de coordonner l'activité
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel. La rédaction proposée nous paraît, en effet, plus appropriée au rôle qui sera confié, au sein des pôles, à un ou plusieurs juges d'instruction.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 91, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le III du texte proposé par le 2° du II de cet article pour compléter l'article 80 du code de procédure pénale.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si vous le permettez, madame la présidente, je formulerai d'abord une observation.
J'ai écouté, avec beaucoup d'intérêt, notre collègue M. Braye présenter voilà quelques instants un amendement. J'avais alors sous les yeux le dérouleur des amendements, qui a été établi - selon l'indication portée en première page - ce matin à huit heures, et il faisait état d'un amendement n° 54 rectifié quinquies, qui nous avait été distribué, mais parmi les signataires duquel n'apparaissait pas M Dominique Braye.
Il se trouve que, lorsque est déposé un amendement rectifié, l'heure de son dépôt n'apparaît pas. Or je pense qu'il serait bon qu'elle y figure. En effet, quand j'ai demandé à quelle heure avait été déposé l'amendement qu'était en train de défendre M. Braye, on m'a répondu qu'il l'avait été tout de suite avant. C'était peut-être tout de suite après, je n'en sais rien... En tout cas, ce que je sais, c'est que nous, dans l'hémicycle, à ce moment-là, nous n'avions pas cette nouvelle version.
Je suggère donc au service de la séance de faire également figurer sur les amendements rectifiés l'heure à laquelle ils sont déposés. C'est une suggestion que je reformulerai au cas où elle ne recevrait pas d'écho.
Je vous remercie de cette suggestion, mon cher collègue, et elle sera certainement retenue.
Je pensais que l'amendement n° 54 rectifié sexies avait été distribué dans l'hémicycle. Vous voudrez bien nous pardonner cette erreur.
J'ai fait cette remarque précisément parce qu'il venait juste de nous être distribué.
Nous tiendrons compte de votre observation pour les amendements à venir.
Merci, madame la présidente.
L'amendement n° 91 vise à supprimer la possibilité pour le procureur de la République, en cas de désaccord entre le procureur de la République du lieu d'origine et celui du pôle de l'instruction, de placer la personne déférée devant lui en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire pendant une durée qui peut aller jusqu'à trois jours.
Il est en effet pour le moins étonnant, dans le contexte de l'après-Outreau, que le mis en cause « fasse les frais » des désaccords entre les magistrats !
De plus, cette disposition donne au procureur de la République un pouvoir juridictionnel qui n'appartient qu'aux magistrats du siège.
Supposons que deux procureurs soient en désaccord. Que fait-on en attendant ? Eh bien, on peut - et la décision serait de droit ! - placer la personne en détention provisoire, éventuellement pendant trois jours ! Ce n'est évidemment pas admissible ! Qu'une telle décision soit prise, soit, mais elle ne saurait l'être par un procureur de la République.
Je voudrais souligner la contradiction entre la proximité nécessaire de la justice et les spécialisations.
Si M. le garde des sceaux assume tout ce qui a été fait, nous avons, pour notre part, autant de suite dans les idées que lui, mais ce ne sont pas les mêmes idées ! C'est ainsi que nous avions déjà protesté lors de la création d'une cour d'assises spéciale anti-terroriste à Paris. Nous n'étions pas d'accord, d'abord parce qu'il n'y a pas de raison de choisir une juridiction plutôt qu'une autre, ensuite parce qu'il n'y a pas de raison non plus pour qu'il y ait des juridictions d'exception et enfin parce qu'il n'y a davantage de raison de contraindre les témoins, les avocats, les familles, les parties civiles à des déplacements longs et onéreux, alors que la tradition de notre pays voulait précisément que la justice soit rendue « à proximité ».
Qu'il faille supprimer certains tribunaux, c'est évident, et l'on se demande quand un gouvernement aura le courage de le faire ! En tout cas, nous constatons que ce n'est pas celui-là, et c'est dommage parce que nous connaissons tous des tribunaux de grande instance où il n'y a pas beaucoup d'affaires à traiter, c'est le moins que l'on puisse dire ! Là est le véritable problème.
Cela dit, il n'est pas normal que, de plus en plus, on oblige tout le monde à faire des kilomètres à n'en plus finir. Les TGV ne vont pas partout et, de toute façon, ces voyages coûtent cher.
L'amendement n° 7, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans l'avant-dernière phrase du texte proposé par le 2° du II de cet article pour le III de l'article 80 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
près le tribunal de grande instance au sein duquel il n'y a pas de pôle de l'instruction
par les mots :
territorialement compétent
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 91.
La commission est défavorable à l'amendement n° 91, car la disposition qu'il tend à supprimer est purement technique et ne change rien au fond. Le procureur ne fait que requérir le placement. Contrairement à ce que vous avez laissé entendre tout à l'heure, monsieur Dreyfus-Schmidt, ce n'est bien évidemment pas lui qui va le décider. Il s'agit simplement de régler d'éventuels problèmes de compétences, et ce sera le juge de la détention et des libertés qui décidera de la détention de la personne. Tout cela est encadré par le code de procédure pénale.
Quant à l'amendement n° 7, il est rédactionnel.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 8, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du IV de cet article, après les mots :
juge d'instruction
insérer les mots :
du pôle
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 92, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus - Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene - Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer le V de cet article.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
L'article 1 er est adopté.
I. - Les deuxième et troisième alinéas de l'article 83 du code de procédure pénale sont supprimés.
II. - L'article 83-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 83-1. - Lorsque la gravité ou la complexité de l'affaire le justifie, l'information peut faire l'objet d'une cosaisine selon les modalités prévues par le présent article.
« Le président du tribunal de grande instance dans lequel il existe un pôle de l'instruction ou, en cas d'empêchement, le magistrat qui le remplace, désigne, dès l'ouverture de l'information, d'office ou si le procureur de la République le requiert dans son réquisitoire introductif, un ou plusieurs juges d'instruction pour être adjoints au juge d'instruction chargé de l'information.
« À tout moment de la procédure, le président du tribunal de grande instance peut désigner un ou plusieurs juges d'instruction cosaisis, soit à la demande du juge chargé de l'information, soit, si ce juge donne son accord, d'office ou sur réquisition du ministère public ou sur requête des parties. Le président statue dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande, qui est déposée conformément aux dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 81 si elle émane d'une partie. Lorsque l'information a été ouverte dans un tribunal où il n'y a pas de pôle de l'instruction, la cosaisine est ordonnée, sur réquisition du procureur de la République, après que le juge d'instruction initialement saisi s'est dessaisi au profit d'un juge d'instruction du pôle, désigné par le président du tribunal dans lequel se trouve ce pôle.
« Lorsqu'elle n'est pas ordonnée selon les modalités prévues par l'alinéa qui précède, notamment en l'absence d'accord du juge chargé de l'information, la cosaisine peut être ordonnée par le président de la chambre de l'instruction agissant d'office, à la demande du président du tribunal, sur réquisition du ministère public ou sur requête des parties. Le président statue dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande, qui est déposée conformément aux dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 81 si elle émane d'une partie. Lorsque l'information a été ouverte dans un tribunal où il n'y a pas de pôle de l'instruction, le président de la chambre de l'instruction saisit la chambre de l'instruction aux fins de cosaisine. La chambre décide alors soit, s'il n'y a pas lieu à cosaisine, de renvoyer le dossier au magistrat instructeur, soit, si cette décision est indispensable à la manifestation de la vérité et à la bonne administration de la justice, de procéder au dessaisissement du juge d'instruction et à la désignation, aux fins de poursuite de la procédure, de plusieurs juges d'instruction.
« Les décisions du président du tribunal de grande instance, du président de la chambre de l'instruction et de cette dernière prévues par le présent article sont des mesures d'administration judiciaire non susceptibles de recours. »
III. - Après l'article 83-1 du même code, il est inséré un article 83-2 ainsi rédigé :
« Art. 83-2. - En cas de cosaisine, le juge d'instruction chargé de l'information coordonne le déroulement de celle-ci. Il a seul qualité pour saisir le juge des libertés et de la détention, pour ordonner une mise en liberté d'office et pour rendre l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 et l'ordonnance de règlement. Toutefois, cet avis et cette ordonnance peuvent être cosignés par le ou les juges d'instruction cosaisis. »
IV. - Dans le dernier alinéa de l'article 84 du même code, les mots : « le deuxième alinéa de l'article 83 et » sont supprimés.
V. - Dans le dernier alinéa de l'article 706-17 du même code, la référence : « au deuxième alinéa de l'article 83 » est remplacée par la référence : « à l'article 83-1 »
L'amendement n° 9, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale par les mots :
qui doit être déposée conformément aux dispositions de l'article 81
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 10, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après la première phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les parties ne peuvent pas renouveler leur demande avant six mois.
La parole est à M. le rapporteur.
La cosaisine des juges d'instruction pourra être décidée à tout moment de la procédure par le président du tribunal de grande instance où se trouve un pôle de l'instruction, à la demande des parties, à condition que le juge d'instruction donne son accord.
Cependant, il ne faudrait pas que ce nouveau droit ouvert aux parties les conduise à mettre en cause à tout instant la compétence du juge d'instruction. Il apparaît donc souhaitable qu'une demande ne puisse pas être renouvelée avant six mois.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 11, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la deuxième phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale :
Dans un délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le président désigne un ou plusieurs juges d'instruction pour être adjoints au juge chargé de l'information.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise l'hypothèse où la cosaisine est demandée avec l'accord du juge d'instruction ou sur son initiative. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale prévoit que le président du tribunal de grande instance statue dans un délai d'un mois sur cette demande. Dès lors que le juge d'instruction a donné son accord, il paraît conforme à l'esprit de la réforme proposée, comme à la pratique actuelle, que le président du tribunal de grande instance ait une compétence liée pour ordonner la cosaisine.
Il semble donc logique d'indiquer, non pas comme le fait la rédaction actuelle de l'article, que le président « statue sur cette demande », mais, de manière plus explicite, que le président « désigne les juges cosaisis ».
Il est bien difficile de suivre ce débat ! Chaque article contient tellement d'alinéas et de paragraphes qu'on a bien du mal à s'y retrouver. De ce fait, nombre d'articles se trouvent adoptés sans que personne dans l'hémicycle ait pu prendre la mesure exacte de ce dont il retourne !
En tout cas, en l'espèce, on ne voit véritablement pas pourquoi les droits des parties se trouveraient limités et pourquoi les demandes ne pourraient pas être renouvelées aussi souvent que nécessaire.
Voilà la raison pour laquelle nous ne voterons pas cet amendement.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 12, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la dernière phrase du troisième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale :
Pour l'application du présent alinéa, lorsque l'information a été ouverte dans un tribunal où il n'y a pas de pôle de l'instruction, le président du tribunal de grande instance où se trouve le pôle territorialement compétent, désigne le juge d'instruction chargé de l'information ainsi que le ou les juges d'instruction cosaisis après que le juge d'instruction initialement saisi s'est dessaisi au profit du pôle ; ce dessaisissement prend effet à la date de désignation des juges du pôle.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise l'hypothèse où la cosaisine est demandée avec l'accord du juge d'instruction lorsque l'information a été ouverte dans un tribunal de grande instance dépourvu de pôle de l'instruction. Il clarifie la rédaction du texte et précise en particulier que le dessaisissement du juge d'instruction prend effet à la date de désignation des juges d'instruction du pôle.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui clarifie très opportunément le mécanisme de la cosaisine lorsqu'elle concerne une information menée dans un tribunal dépourvu de pôle de l'instruction et qu'elle implique le transfert de la procédure pénale dans un tribunal pourvu d'un tel pôle.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 13, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
notamment en l'absence d'accord du juge chargé de l'information
par les mots :
en l'absence d'accord du juge chargé de l'information ou à défaut de désignation par le président du tribunal de grande instance dans le délai d'un mois
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 14, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au début de la dernière phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 83-1 du code de procédure pénale, ajouter les mots :
Dans un délai d'un mois à compter de sa saisine,
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit de préciser que le délai imparti à la chambre de l'instruction pour statuer à compter de cette saisine est d'un mois.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 55, présenté par Mmes Borvo Cohen - Seat, Assassi, Mathon - Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la dernière phrase du texte proposé par le III de cet article pour l'article 83-2 dans le code de procédure pénale, remplacer le mot :
peuvent
par le mot :
doivent
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Il nous semble indispensable de repenser la procédure d'instruction afin qu'elle puisse être menée à charge et à décharge, de façon à écarter toute dérive, qu'elle soit individuelle ou purement subjective.
À cet égard, l'article 2 apporte une avancée puisqu'il élargit le recours de la cosaisine des juges d'instruction, auxquels elle pourrait être imposée à tout moment de la procédure, contrairement à ce que prévoit le droit en vigueur.
La rédaction proposée pour l'article 83-1 du code de procédure pénale prévoit d'ailleurs que, dès l'ouverture de l'information, le président du tribunal de grande instance dans lequel il existe un pôle de l'instruction désigne d'office ou sur réquisition du procureur de la République un ou plusieurs juges d'instruction pour être adjoints au magistrat chargé de l'information.
Cela représente certes une amélioration s'agissant de la procédure d'instruction applicable dans le cas des affaires complexes, mais nous voulons renforcer les conditions de fonctionnement de la cosaisine afin de la faire évoluer vers une véritable collégialité. Dans cette optique, les actes les plus importants de l'instruction doivent obligatoirement être cosignés.
Cet amendement a été adopté à l'unanimité ou à la quasi-unanimité par la commission. Je m'en suis d'ailleurs voulu de ne pas l'avoir présenté moi-même.
Il paraît en effet parfaitement logique que, dès lors que deux juges sont cosaisis, tous deux signent, à la fin de l'instruction, l'avis de fin d'information et l'ordonnance de règlement.
Je sais que M. le garde des sceaux ne partage pas notre approche, mais je ne vois pas à quoi servirait la cosaisine si, au moins à la fin de l'instruction, les deux juges cosaisis ne s'engageaient pas par leur signature.
En vérité, ce point n'est pas simple...
Je suis justement en train de réfléchir devant vous, monsieur le sénateur, mais vous ne voulez pas m'écouter !
La difficulté tient à ce qu'au départ un seul juge d'instruction est saisi ; s'il y a cosaisine, elle n'intervient qu'après. C'est déjà ce qui se produit dans les pôles qui, sans porter le nom de « pôles de l'instruction », regroupent plusieurs juges d'instruction : deux juges peuvent être saisis, mais, chronologiquement, l'un d'eux l'est avant l'autre, et c'est celui qui a été saisi en premier qui, au bout du compte, signe, l'emportant ainsi sur le second juge cosaisi. Je brûle de citer ici une affaire récente, mais j'en suis empêché précisément parce qu'elle est en cours.
S'il fallait la signature des deux juges cosaisis, en cas de désaccord entre eux, la procédure serait totalement bloquée : le premier des juges cosaisis ne peut obliger son collègue à signer alors que celui-ci ne partage pas son avis ! Et si l'instruction est bloquée, nous courons vers le déni de justice, ce qui n'est évidemment pas envisageable !
Autrement dit, même s'il relève apparemment du bon sens, le système qu'approuve la commission des lois peut fort bien conduire à un blocage total. On ne peut pas imposer la cosignature même en cas de cosaisine, car il peut y avoir différend entre les juges ; dans ce dernier cas, il faut s'en tenir à la règle qui s'applique à ce jour et qui veut que le premier des juges cosaisis l'emporte sur l'autre.
C'est la situation juridique actuelle, et des exemples contemporains, que je me garderai de citer, démontrent qu'elle est justifiée.
Je dois avouer, monsieur le garde des sceaux, que vos explications me troublent quant au sens de la cosaisine !
Si cosaisine il y a, il paraît naturel que les deux juges cosaisis parviennent à un accord à la fin de l'information. Sinon, pourquoi la cosaisine ?
Franchement, la cosaisine n'a aucun intérêt si les juges cosaisis ne sont pas capables de se mettre d'accord au terme de la procédure !
La cosignature nous semblait constituer une quasi-formalité, mais, puisqu'il apparaît qu'il n'est pas si naturel que les juges cosaisis parviennent à s'entendre, cet amendement est encore plus nécessaire, un des objectifs étant justement d'habituer les juges d'instruction à travailler en équipe.
Preuve que c'est compliqué, nous ne nous comprenons pas !
Une affaire dans laquelle deux célèbres juges d'instruction ont été saisis, et dont l'actualité nous donne quelques éléments, fournit justement l'exemple d'un profond désaccord entre les deux juges cosaisis. Eh bien, cette affaire, qui a occupé une place centrale dans les médias pendant des semaines - ce qui nous ramène à l'argument utilisé hier par M. Badinter -, n'aurait jamais existé si la cosignature avait été obligatoire.
Je vous rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous sommes en train de préparer la transition vers la collégialité, laquelle ne peut vraiment fonctionner qu'à trois magistrats : il y en aura toujours au moins deux qui seront du même avis et l'emporteront donc sur le troisième.
Je l'ai dit de nombreuses fois devant le Sénat, nous devons passer par cette phase de transition, car il nous est impossible de former d'un seul coup 240 magistrats. Pour cela, cinq années, selon nous, quatre, selon la commission, sont nécessaires, et il est clair que, dans l'intervalle, nous serons dans une situation qui n'est pas idéale, car, avec deux juges, il peut y avoir blocage. Or, ce blocage, la commission des lois accepte qu'on l'organise sans appel possible en soutenant le principe de la cosignature. En somme, si les juges ne sont pas d'accord, il ne se passera plus rien et l'affaire sera enterrée !
Je vous déconseille donc, mesdames, messieurs les sénateurs, de suivre l'avis de la commission des lois. Il faut conserver le système actuel, dans lequel le premier des juges cosaisis l'emporte sur l'autre. Sans cette règle, combien d'affaires n'auraient jamais vu le jour ? L'affaire que j'ai évoquée, sans citer de noms - mais vous les avez devinés -, me paraît fournir un exemple convaincant.
Monsieur le garde des sceaux, je comprends votre embarras, mais, si vous voulez instituer la collégialité, même sous une forme atténuée parce que, dans un premier temps, les moyens font défaut pour mettre en place une collégialité à trois magistrats, il ne faut pas craindre de prendre quelques risques, sauf à ce que nous fassions aujourd'hui ne signifie rigoureusement rien !
On sait bien que la cinquantaine ou soixantaine de magistrats qui ont jeté un regard sur l'affaire d'Outreau n'ont pas permis d'éviter les ennuis.
Si l'on veut que la cosaisine ait un sens, il faut donc que les juges cosaisis puissent donner leur avis sur les actes essentiels de la procédure. Cette option a certes des inconvénients, mais qu'un seul juge soit saisi ou qu'un juge l'emporte sur l'autre en cas de cosaisine n'est pas non plus sans inconvénients, et ce sont précisément ces inconvénients que le présent projet de loi vise à pallier.
Nous avons compris la difficulté. Évidemment, il ne faudrait pas de cosaisine à deux magistrats. Cependant, si l'un de ces deux magistrats doit l'emporter, il convient que le projet de loi le précise et précise aussi lequel des deux l'emporte.
Il faut renoncer, monsieur le garde des sceaux, à prévoir que l'avis et l'ordonnance « peuvent » être cosignés par les juges cosaisis, car cela ne rime strictement à rien.
Il serait, en revanche, intéressant de savoir pourquoi le juge qui ne l'emporte pas ne souhaite pas cosigner et il serait judicieux de proposer qu'il explique sa propre position. En tout état de cause, il nous est impossible de voter le texte en l'état, car il ne sert strictement à rien !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut sortir de cette difficulté, car l'amendement proposé, qui recueille l'assentiment de la commission des lois et de son président, est un amendement de sagesse : il est évident que la cosaisine doit s'accompagner de la cosignature des deux magistrats.
Vous nous dites à juste titre, monsieur le ministre, que, dans certains cas, il se peut qu'il y ait ou insuffisance de réflexion de l'un ou différence d'appréciation entre les deux magistrats, mais il faut que la loi permette de résoudre les difficultés de ce type.
À cet égard, prévoir que le juge premier saisi signe et que l'autre fait savoir qu'il ne signe pas me paraît une solution intéressante : cela surprendra peut-être, mais permettra à chacun d'en tirer argument.
Je suggère que l'on tente de dégager d'ici à la commission mixte paritaire une solution qui règle ce problème, problème nécessairement temporaire puisque, lorsque la collégialité sera assurée par des équipes de trois magistrats instructeurs, il ne se posera plus.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous progressons ensemble ! Ce que dit M. Badinter est en effet tout à fait recevable. Actuellement, on ne sait pas pourquoi un juge cosaisi n'est pas d'accord, ou on l'apprend par des bruits divers...
... et plus ou moins fondés. S'il s'explique, on saura avec certitude pourquoi il refuse de signer.
Un autre système, qui est contenu dans votre suggestion, monsieur Badinter, pourrait être mis au point : il s'agirait de trouver une voie de recours en cas de désaccord. Ce qui pose problème dans l'amendement, c'est qu'il ne prévoit aucune voie de recours, d'où le risque de blocage qui me conduit à recommander au Sénat de ne pas le voter. En revanche, s'il était, par exemple, possible d'aller devant la chambre de l'instruction pour départager les juges, l'amendement ne provoquerait plus le blocage contre lequel j'ai mis en garde votre assemblée.
Le Sénat prendra, dans sa sagesse, la décision qui lui paraît appropriée, mais, en tout état de cause, je crois que nous avons tous bien compris le fond du débat : on ne peut pas s'en tenir à l'amendement en l'état, car il faut au minimum prévoir un recours ou permettre au juge cosaisi dont l'avis ne l'emporte pas d'exprimer publiquement les raisons de son désaccord.
La commission tient à cet amendement, même si ce n'est pas son rapporteur qui l'a proposé à l'origine, car il donne toute sa signification à la cosaisine, signification sur laquelle on peut s'interroger si les juges cosaisis ne cosignent pas au moins les actes qui marquent la fin de la procédure.
La navette est réduite puisque l'urgence est déclarée, mais le processus législatif n'est pas clos. La suite nous permettra de prévoir soit un dispositif d'appel devant la chambre de l'instruction s'il y a un désaccord entre les deux juges, soit un mécanisme comme celui qu'a évoqué M. Badinter.
J'invite donc le Sénat à adopter cet amendement.
Ce débat a été très intéressant.
La cosaisine n'aurait pas de sens s'il n'y avait pas accord entre les juges cosaisis à la fin - je dis bien à la fin - de la procédure d'information. Le problème est lié, comme M. le garde des sceaux l'a bien dit, au fait que nous sommes dans une phase de transition, avant l'institution d'une vraie collégialité, mais je pense que nous devrions aisément trouver en commission mixte paritaire un dispositif temporaire, nécessairement un peu hybride, pour éviter d'une manière ou d'une autre les situations de blocage.
Nous sommes là au coeur d'un sujet important : la collégialité et la responsabilité collective. Force est de constater que, compte tenu de leur charge de travail, les magistrats, s'ils ne sont pas associés à la décision, ont tendance à faire confiance à celui d'entre eux qui est chargé de la prendre au terme de la procédure et, dans ce cas, à ne suivre le dossier que d'une manière purement formelle. C'est humain, et nous agissons d'ailleurs de même : lorsqu'un membre d'un groupe est chargé de suivre une affaire, les autres membres du groupe lui font confiance !
Aussi, pour assurer une réelle dualité, en attendant mieux, l'amendement de nos collègues communistes se justifie effectivement, mais il est vrai qu'il crée par ailleurs un risque de blocage.
Plutôt que de renvoyer à la commission mixte paritaire le soin de parer à ce risque, ne pourrait-on pas dès maintenant, afin de donner une base aux discussions futures, compléter le dispositif en prévoyant, par exemple, que, en cas de désaccord, il est fait état de l'avis du second juge ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission de la commission des lois. Ne nous livrons pas, dans l'hémicycle, à un travail de commission. Nous avons établi le principe et perçu la difficulté ; nous réfléchirons d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire au moyen de résoudre cette dernière et, bien entendu, monsieur le garde des sceaux, vous serez comme d'habitude étroitement associé aux travaux de la commission des lois.
M. le garde des sceaux s'en réjouit.
L'amendement est adopté.
L'article 2 est adopté.
L'amendement n° 56, présenté par Mmes Borvo Cohen- Seat, Assassi, Mathon- Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 18 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art - Des officiers et agents de police judiciaire sont détachés auprès de l'autorité judiciaire dans chaque tribunal de grande instance, afin d'y travailler sous la direction des magistrats du parquet et des juges d'instruction. D'autres fonctionnaires habilités à la recherche et à la constatation des infractions peuvent être détachés dans les mêmes conditions. Les modalités d'affectation de ces fonctionnaires sont fixées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat
Il s'agit de rattacher aux juridictions quelques officiers de police judiciaire. Un tel rattachement pourrait présenter au moins deux avantages : d'une part, permettre à l'autorité judiciaire d'exercer une direction et un contrôle effectif sur la police judiciaire, et, d'autre part, garantir une réelle efficacité de l'enquête pénale.
En aucun cas, il n'est pour nous question de remettre en cause la distinction entre police administrative et police judiciaire. Si nous avons déposé cet amendement, c'est uniquement par souci d'efficacité.
Ce dernier tend simplement à organiser une possibilité pour les parquets et les juges d'instruction de travailler avec quelques officiers de police judiciaire qui seraient ainsi détachés de leur administration d'origine.
Une telle proposition avait été présentée, sans succès, lors de l'examen du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.
Son intérêt n'apparaît pas clairement, tant il est vrai que les officiers de police judiciaire sont déjà placés sous la direction du procureur général. Au surplus, la constitution des pôles de l'instruction permettra de renforcer le contrôle des magistrats sur les services d'enquête.
À partir du moment où nous sommes favorables à ce que les magistrats dirigent la police judiciaire, cet amendement n'apporterait rien de plus. C'est la raison pour laquelle j'émets à son sujet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Deux ans après l'entrée en vigueur du présent chapitre, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la préparation de la mise en oeuvre de la collégialité de l'instruction, faisant le bilan du fonctionnement des pôles de l'instruction, indiquant la proportion d'informations ayant fait l'objet d'une cosaisine et faisant part des perspectives d'évolution de la carte judiciaire.
Cet article 2 bis est merveilleux ! Ainsi, dans trois, quatre ou cinq ans, on discutera des « perspectives d'évolution de la carte judiciaire » ! Vraiment, c'est repousser les choses un peu loin et nous ne pouvons nous satisfaire d'un renvoi à la Saint-Glinglin de la modification de la carte judiciaire.
C'est pourquoi nous voterons contre cet article.
L'article 2 bis est adopté.
Chapitre II
Dispositions tendant à assurer le caractère exceptionnel de la détention provisoire
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 57 est présenté par Mmes Borvo Cohen- Seat, Assassi, Mathon- Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 94 est présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus- Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene- Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article 137- 4 du code de procédure pénale est supprimé.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 57.
Nous abordons ici le sujet très important de la détention provisoire.
La commission d'enquête sur l'affaire d'Outreau a relevé que, parmi les personnes qu'elle avait entendues, nombreuses étaient celles qui avaient souligné que, sans la détention provisoire, il n'y aurait pas eu d'affaire d'Outreau.
S'il est sans doute excessif de ramener tous les dysfonctionnements dans cette affaire au problème de la détention provisoire, force est de reconnaître que ce qui a d'abord frappé les esprits dans l'affaire d'Outreau, c'est la proportion de placements en détention provisoire par rapport aux autres solutions possibles, au premier rang desquelles le contrôle judiciaire.
Ensuite, ces détentions ont choqué par leur durée, extrêmement longue : 39 mois, 37 mois, deux ans et demi, deux ans, 23 mois, etc. J'ajoute qu'une des personnes incarcérées dont l'état de santé s'était beaucoup dégradé en prison est décédée au bout de quatorze mois de détention provisoire.
Le Gouvernement et la majorité se sont soudain émus que l'on puisse rester plus de trois ans en détention provisoire. Mais qui a fait adopter ces lois ?
La loi Perben II recèle un bon exemple de disposition permettant de faciliter le recours à la détention provisoire. L'article 137-4 du code de procédure pénale prévoit en effet la possibilité, pour le parquet, de saisir directement le juge des libertés et de la détention pour demander ce placement, dans l'hypothèse où le juge d'instruction estime que cette détention provisoire n'est pas justifiée.
La loi Perben II a ainsi supprimé l'une des garanties du justiciable face à une demande de placement en détention provisoire qui constitue pourtant l'une des mesures les plus importantes au regard de la présomption d'innocence.
Après l'obligation faite au juge d'instruction de motiver le maintien en liberté, après l'institution du référé-détention au profit du ministère public par la loi Perben I, la loi Perben II a organisé l'éviction pure et simple par le procureur de la République d'un juge d'instruction, toujours suspect, et que l'on voudrait aux ordres du parquet.
Lorsque nous avons examiné ce texte en 2004, le rapporteur n'avait d'ailleurs pas hésité à affirmer qu'il s'agissait, par cette disposition, de permettre « au procureur de la République de surmonter un éventuel refus du juge d'instruction ».
La loi de juin 2000 s'était pourtant donné pour objectif de limiter le recours à une procédure attentatoire à la liberté individuelle s'agissant de personnes encore non condamnées, et ce dans la foulée des travaux de la commission d'enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, qui estimait que certaines personnes n'avaient rien à faire en prison. Nous aimerions que ce temps ne soit pas totalement révolu.
Aujourd'hui, environ un tiers de la population carcérale est constitué de prévenus, c'est-à-dire de présumés innocents jusqu'à leur jugement, et la durée moyenne de cette détention avant jugement s'allonge d'année en année.
Compte tenu de ce constat à la fois édifiant et alarmant, et si l'on estime que le débat qui a lieu aujourd'hui a pour objectif de faire reculer le recours à la détention provisoire, il convient de mettre fin aux dispositions qui facilitent un tel recours.
C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l'article 137- 4 du code de procédure pénale.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 94.
Le code de procédure pénale permet au procureur de la République de saisir directement le juge des libertés et de la détention pour solliciter la mise en détention. Cependant, il faut savoir que cette faculté est strictement encadrée par la loi et qu'elle n'est applicable qu'en matière criminelle ou pour les délits passibles de dix ans d'emprisonnement.
Je ne pense donc pas qu'il soit judicieux de revenir sur cette disposition, alors que je m'apprête à défendre toute une série d'amendements de nature à répondre aux préoccupations qui viennent d'être exprimées en matière de détention provisoire.
Ces amendements reviennent sur un autre texte voté voilà déjà quelques années et n'ont aucun lien avec le projet de loi actuellement en discussion.
Pour cette raison, le Gouvernement y est défavorable.
La position de M. le rapporteur nous déçoit. En effet, nous ne sommes plus dans le même contexte : si ce projet de loi est adopté, les pouvoirs confiés au juge d'instruction seront désormais confiés à plusieurs juges d'instruction. C'est une raison de plus pour s'en rapporter aux trois juges d'instruction ou aux juges cosaisis afin qu'ils statuent en matière de mise en détention, et ce - j'insiste sur ce point - quels que soient les cas !
Je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de bien vouloir me répondre sur ce point.
Je pensais vous avoir répondu par avance, mon cher collègue, en m'adressant à Mme Josiane Mathon-Poinat, puisque votre amendement est identique au sien.
Soit, monsieur le rapporteur, mais j'ai ajouté un argument auquel j'aurais aimé que vous répondiez !
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 103 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 58, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le troisième alinéa (2°) de l'article L. 143- 1 du code de procédure pénale, le chiffre : « trois » est remplacé par le chiffre : « cinq ».
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Cet amendement a pour objet de ne permettre le placement en détention provisoire en matière correctionnelle que si la personne poursuivie encourt une peine de cinq ans d'emprisonnement, et non de trois ans comme c'est le cas aujourd'hui.
Avant la loi de juin 2000 relative à la présomption d'innocence et aux droits des victimes, une personne pouvait se voir placée en détention provisoire si elle encourait une peine d'un an de prison, en cas de délit flagrant, ou de deux ans, dans les autres hypothèses, mais ce texte a limité en matière correctionnelle le recours à la détention provisoire, qui n'est désormais possible que si la peine encourue est de trois ans, un quantum qui nous semble néanmoins encore trop bas.
Mes chers collègues, nous connaissons les effets de la détention provisoire sur les personnes qui la subissent, et je croyais d'ailleurs que la philosophie de ce projet de loi était précisément de réduire la durée de cette détention !
Présumées innocentes, les personnes placées en détention provisoire sont incarcérées dans des conditions souvent éprouvantes, qui ressemblent à celles réservées aux condamnés. Elles attendent leurs procès dans des maisons d'arrêt surpeuplées, occupées à 125 % en moyenne. D'ailleurs, M. le ministre connaît très bien le cas de la maison d'arrêt de la Talaudière, située dans son cher fief électoral du département de la Loire.
Malgré les dispositions contraires du code pénal, ces personnes se trouvent contraintes de cohabiter à deux ou à trois dans une même cellule, qu'elles partagent parfois avec des personnes condamnées. Par ailleurs, leur brusque privation de liberté les plonge dans un état de grande vulnérabilité psychique.
Selon les spécialistes du milieu carcéral, ce problème ne se limite pas aux conditions de détention : il est très difficile de faire accepter leur enfermement à des personnes qui ignorent combien de temps celui-ci va durer. En effet, contrairement aux condamnés qui comptent les jours et calculent leur réduction de peine, les prévenus sont dans une totale incapacité de se projeter dans l'avenir. Dès lors, est-ce un hasard si les prévenus constituent 47 % des suicidés en prison, alors qu'ils ne représentent qu'un tiers de la population carcérale ?
L'affaire d'Outreau a provoqué un électrochoc, qui doit susciter, me semble-t-il, une réponse beaucoup plus ambitieuse que celle qu'offre le présent projet de loi.
L'amendement n° 93, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus - Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene - Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3ème alinéa de l'article 143-1 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si la peine encourue est supérieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement, s'il est reproché à la personne mise en examen un délit prévu par le livre III du code pénal et que cette personne n'a pas déjà été condamnée à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an. »
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
Mes chers collègues, nous sommes à la croisée des chemins. Comme je me suis efforcé de le montrer lorsque j'ai présenté la motion tendant à opposer la question préalable, le problème est de savoir si nous voulons que le doute profite à un éventuel innocent ou si, par précaution, nous préférons incarcérer quelqu'un qui pourrait se révéler dangereux.
Le projet de loi dans son ensemble est ambigu. On tente de ménager la chèvre et le chou ! Il faudrait plutôt adresser un signal très clair aux juges en affirmant que la présomption d'innocence n'est pas seulement un principe à afficher au mur, que c'est une règle de conduite qui doit s'appliquer concrètement.
D'où notre proposition de revenir aux dispositions de la loi Guigou, afin que la détention provisoire ne puisse être ordonnée et prolongée qu'à de strictes conditions. En l'occurrence, le prévenu devrait encourir une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, se voir reprocher un délit prévu par le livre III du code pénal et n'avoir pas été déjà condamné à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à un an.
Certes, cette disposition va à l'encontre de tous les textes que nous avons votés depuis 2002. Toutefois, si ce projet de loi a un sens, c'est précisément de mettre fin à cette dérive !
Je partage le point de vue de nos collègues s'agissant de la durée de la détention provisoire qui, je le rappelle, est en moyenne de deux ans en matière criminelle et de 6, 4 mois en matière délictuelle, selon les chiffres de 2004, les derniers dont nous disposions. Nous devons avoir le souci de limiter au maximum ces détentions provisoires. Tel est le sens, d'ailleurs, d'un certain nombre de dispositions du projet de loi et d'amendements que je défendrai.
Ces deux amendements ont pour objet d'augmenter la durée d'emprisonnement encourue qui est nécessaire pour que puisse être prononcée la détention provisoire, en la fixant à cinq ans. Cette proposition semble séduisante au premier abord, mais à la réflexion, je ne suis pas certain qu'il s'agisse d'une bonne idée : compte tenu de l'état d'esprit du législateur, je me demande si elle ne constituerait pas un appel à relever rapidement le quantum des peines.
Nous nous plaignons régulièrement qu'à l'Assemblée nationale surgissent çà et là, au gré des textes qui sont examinés, des augmentations du quantum des peines.
Or je suis presque certain que, si ces amendements étaient votés, certains délits seraient très rapidement susceptibles d'être punis d'une peine d'emprisonnement de cinq ans.
La commission émet donc un avis défavorable. D'ailleurs, en l'état actuel des peines prévues par le code, si ces amendements étaient adoptés, ils interdiraient, par exemple, de placer en détention provisoire les auteurs de violences contre des mineurs ou des personnes vulnérables, qui sont passibles d'une peine de trois ans d'emprisonnement.
Pour ma part, je préfère un quantum plus bas et plus conforme à la peine qui sera prononcée par les juges, afin que l'opinion publique puisse s'y retrouver.
M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame.
Mes chers collègues, encore une fois, il faut savoir ce que l'on veut !
Je comprends parfaitement les préoccupations et les craintes de M. le rapporteur. Toutefois, si l'on doit adopter un tel état d'esprit, si l'on considère que, finalement, il n'y a aucune solution au problème qui nous est posé, je ne vois pas ce que nous faisons ici !
Si toutes les mesures que nous pourrions prendre sont neutralisées parce que l'opinion publique et aussi certaines voix politiques, d'ailleurs, exercent une forte pression dans le sens de l'incarcération et de l'augmentation de la durée des peines, honnêtement, je ne vois pas à quoi sert le travail que nous accomplissons aujourd'hui !
Sur le fond, je suis tout à fait d'accord avec les propos de M. le rapporteur. Plutôt que d'augmenter sans cesse, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, la durée des condamnations possibles, il serait préférable de la réduire, et nous aurions très bien pu laisser le droit en l'état.
Toutefois, monsieur le rapporteur, je ne sache pas que vous ayez proposé en commission la moindre diminution du plafond des peines, comme vous auriez dû le faire pour être logique avec vous-même !
Vous ne pouvez affirmer qu'il faut réduire les maximums des peines et, en même temps, ne proposer aucune réduction ! Je déplore d'ailleurs votre abstention, et c'est même une des raisons pour lesquelles nous voterons contre ce projet de loi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
I. - L'article 144 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 144. - La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs suivants, et que, notamment, ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire :
« 1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ;
« 2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes, qui mettent en cause la personne mise en examen, ainsi que sur leur famille ;
« 3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices dont les déclarations diffèrent ou qui n'ont pu encore être entendus ;
« 4° Protéger la personne mise en examen ;
« 5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;
« 6° Mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement ;
« 7° Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire. En matière correctionnelle, le présent 7° n'est pas applicable aux décisions de prolongation de la détention provisoire ou de maintien en détention. »
II. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 137-4 du même code, les références : « 2° et 3° » sont remplacées par les références : « 4° à 7° ».
III. - Les deux dernières phrases du troisième alinéa de l'article 179 du même code sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« L'ordonnance de maintien en détention provisoire est motivée par référence aux 2°, 4°, 5° et 6° de l'article 144. »
IV. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article 396 du même code, les références : «, 2° et 3° » sont remplacées par le mot et la référence : « à 7° ».
V. - Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 397-3 du même code, les références : «, 2° et 3° » sont remplacées par le mot et la référence : « à 7° ».
Je suis saisie de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 59, présenté par Mmes Borvo Cohen - Seat, Assassi, Mathon - Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale :
« Art. 144 - La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que sur décision explicitement motivée et que si elle constitue l'unique moyen :
« 1° De conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes et leur famille, soit une concertation frauduleuse entre les personnes mises en examen et complices ;
« 2° De protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement. L'absence de garantie du maintien à la disposition de la justice ne peut toutefois être déduite du refus de reconnaître les faits. ».
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Par cet amendement, nous proposons une nouvelle rédaction de l'article 144 du code de procédure pénale.
Aujourd'hui, la détention provisoire ne peut être ordonnée que pour trois motifs : conserver les preuves nécessaires à l'enquête, garantir que la personne mise en examen restera à la disposition de la justice et ne renouvellera pas son geste ou mettre fin à un trouble à l'ordre public.
Or il n'a pas fallu attendre le drame d'Outreau pour constater que cette dernière motivation, à la définition floue, se trouvait très fréquemment utilisée afin de justifier un placement en détention provisoire. En outre, dans les faits, c'est souvent la nature de l'accusation qui entraîne le placement en détention provisoire, davantage que la réalité des charges pesant sur les personnes mises en examen, comme nous l'avons vu dans le cas des affaires de pédophilie.
Que les personnes concernées répondent aux conditions d'un simple placement sous contrôle judiciaire ne pèse généralement pas bien lourd dans la balance, et l'option de la détention provisoire est malheureusement souvent retenue.
En effet, le critère du trouble à l'ordre public est avant tout utilisé pour calmer l'opinion, qui réclame des mesures immédiates. La détention provisoire répond parfaitement à ce souci d'instantanéité, quel que soit le prix à payer en matière de présomption d'innocence et de conséquences psychiques pour les personnes mises en cause.
C'est pourquoi nous proposons tout simplement de supprimer ce critère parmi les motifs justifiant un placement en détention provisoire.
Certes, avec ce projet de loi, le critère du trouble à l'ordre public ne pourra plus être invoqué en matière correctionnelle afin de justifier un renouvellement ou un maintien en détention provisoire. Toutefois, il continuera de jouer pour le placement.
Ces dispositions vont à l'encontre de la volonté du Gouvernement de rendre à la détention provisoire un caractère exceptionnel, si toutefois nous avons bien compris le sens de ce texte, ce qui semble de moins en moins évident à mesure que nous avançons dans son examen !
Conserver ce critère en matière correctionnelle à l'article 3 du projet de loi est tout de même difficilement compréhensible !
Dans la nouvelle rédaction que nous proposons, il est donc prévu que cette détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que sur une décision explicitement motivée, comme le préconisait d'ailleurs la commission d'enquête parlementaire sur l'affaire d'Outreau. Cette mention a tout simplement pour objet de protéger les droits de la personne mise en examen.
Enfin, dans la même logique de protection des droits de la défense, il nous semble nécessaire de préciser que l'absence de garantie du maintien à la disposition de la justice ne peut être déduite du refus de reconnaître les faits.
L'amendement n° 15, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale, supprimer le mot :
, notamment,
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de nature rédactionnelle. Le Sénat a pris l'habitude de supprimer dans les textes l'adverbe « notamment », qui est généralement inutile ou source de confusion.
L'amendement n° 16, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale, supprimer les mots :
, qui mettent en cause la personne mise en examen,
La parole est à M. le rapporteur.
Si vous le permettez, madame la présidente, je présenterai à la fois les amendements n° 16 et 17, qui visent à laisser inchangé l'article 144 du code de procédure pénale pour ce qui concerne les critères autorisant la détention provisoire.
Ceux-ci, je le rappelle, sont aujourd'hui au nombre de sept. La détention provisoire peut être prononcée, premièrement, pour conserver les preuves ou les indices matériels nécessaires à la manifestation de la vérité ; deuxièmement, pour empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ; troisièmement, pour éviter une concertation frauduleuse entre les personnes mises en examen et leurs complices ; quatrièmement, pour protéger la personne mise en examen ; cinquièmement, pour garantir le maintien à la disposition de la justice de la personne mise en examen ; sixièmement, pour mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement ; septièmement - nous aurons l'occasion de revenir sur ce critère -, pour mettre un terme à un trouble à l'ordre public.
La rédaction actuelle des six premiers critères est satisfaisante et facile à comprendre, me semble-t-il. La commission préfère donc que nous la conservions.
L'amendement n° 17, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
À la fin du quatrième alinéa (3°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale, supprimer les mots :
dont les déclarations diffèrent ou qui n'ont pu encore être entendus
Cet amendement vient d'être défendu.
L'amendement n° 60, présenté par Mmes Borvo Cohen - Seat, Assassi, Mathon - Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le sixième alinéa (5°) du texte proposé par cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale par une phrase ainsi rédigée :
L'absence de garantie du maintien à la disposition de la justice ne peut toutefois être déduite du refus de reconnaître les faits ;
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Il s'agit d'un amendement de repli, qui apporte toutefois une précision au texte du projet de loi, en s'appuyant notamment sur une proposition formulée par la commission d'enquête parlementaire.
L'amendement n° 61, présenté par Mmes Borvo Cohen - Seat, Assassi, Mathon - Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le huitième alinéa (7°) du texte proposé par cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Il s'agit de supprimer le critère du trouble à l'ordre public. Je m'en suis déjà expliquée, madame la présidente.
L'amendement n° 95, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus - Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene - Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la dernière phrase du 7° du texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale :
En toute matière, le présent 7° n'est pas applicable aux décisions de prolongation de la détention provisoire ou de maintien en détention provisoire.
La parole est à M. Robert Badinter.
Nous le savons, lorsqu'il s'agit de justifier le placement en détention provisoire, et surtout sa prolongation, le critère du trouble à l'ordre public se trouve critiqué depuis fort longtemps, et à juste titre.
Nous proposons donc que ce septième critère cesse de s'appliquer aussi bien en matière correctionnelle qu'en matière criminelle. En effet, il doit être écarté dans tous les domaines : il s'agit d'un principe général, et il n'y a pas lieu de différencier la matière correctionnelle et la matière criminelle.
Je le rappelle, certaines affaires correctionnelles sont extrêmement importantes, autant que les criminelles, parce qu'elles ont un fort retentissement. Les nécessités éventuelles de la détention, mais aussi et surtout du placement s'apprécient de la même façon. De surcroît, un changement de qualification peut intervenir au cours de l'instruction.
Dans une matière aussi sensible, le trouble à l'ordre public ne constitue donc pas un bon critère, me semble-t-il.
L'amendement n° 18, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi la dernière phrase du dernier alinéa (7°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article 144 du code de procédure pénale :
Toutefois, le présent alinéa n'est pas applicable en matière correctionnelle.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements qui n'émanent pas d'elle.
L'amendement n° 18 répond, en grande partie, aux préoccupations exprimées par les auteurs des amendements précédents.
En grande partie.
J'ai rappelé tout à l'heure les sept critères qui permettent de placer en détention provisoire une personne mise en cause. C'est le septième, celui du trouble à l'ordre public, qui pose de nombreux problèmes. Et il en pose d'abord aux magistrats eux-mêmes, qui préfèrent se déterminer désormais sur la base des six premiers critères, plus objectifs. D'ailleurs, lorsque le placement en détention provisoire est contesté, c'est le plus souvent ce critère du trouble à l'ordre public qui a servi de fondement à la détention.
Je pense sincèrement que le moment est venu, en matière correctionnelle - je ne parle pas de la matière criminelle, pour laquelle on peut imaginer que ce critère soit susceptible de jouer -, de dire que les six premiers critères permettent au juge de se prononcer de façon claire, objective et non contestable sur la question de la détention provisoire.
En premier lieu, la suppression de ce critère permettra à la personne placée en détention provisoire de mieux comprendre les raisons de ce placement, et donc de mieux accepter sa détention. Cela ne manquera pas, d'ailleurs, d'avoir une influence sur son comportement en détention.
En second lieu, la suppression de ce critère en matière correctionnelle est rendue possible par la création de nombreuses procédures accélérées de jugement, qui permettent de juger les personnes plus rapidement. Pour mémoire, je vous rappelle, mes chers collègues, qu'il s'agit de la comparution immédiate, désormais étendue aux mineurs, de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité et de la composition pénale. Il y a quelques mois, la commission des lois a rendu un rapport faisant état d'une utilisation croissante de ces procédures, et cela à la satisfaction des usagers de la justice.
Vous le savez, en matière de détention, il existe deux situations radicalement différentes.
Première hypothèse : vous êtes en détention provisoire. Vous ne connaissez alors pas, le plus souvent, les raisons pour lesquelles vous êtes détenu, a fortiori si vous estimez que vous êtes innocent. Et vous ne connaissez pas non plus l'échéance de votre détention. Il faut bien admettre que, dans un certain nombre de cas, cette incertitude confine à la torture.
Seconde hypothèse : vous êtes détenu à l'issue d'un jugement. Dans ce cas, non seulement vous êtes censé comprendre la raison pour laquelle vous êtes détenu, mais vous avez également la possibilité de contester votre détention, en utilisant les voies de recours traditionnelles. Vous connaissez également, de même que vos proches, l'échéance de votre détention, sauf dans les cas, extrêmement rares, de réclusion criminelle à perpétuité.
Nous avons donc tout intérêt à ce qu'une majorité de personnes détenues le soit en vertu d'un jugement.
Dans ces conditions, dans le prolongement de l'ouverture faite par le Gouvernement, qui propose déjà de supprimer le critère du trouble à l'ordre public en matière correctionnelle pour les renouvellements de détention, la commission, unanime ou quasiment unanime, vous propose de supprimer purement et simplement ce critère en matière correctionnelle.
J'en viens à l'avis de la commission sur les autres amendements.
Considérant que les quatre amendements qu'elle propose modifient de façon cohérente l'article 3, elle émet un avis défavorable sur les amendements n° 59, 60, 61 et 95.
Ces amendements tendent, de manière générale, à clarifier ou à réduire les critères de placement en détention provisoire.
Le débat porte en fait essentiellement sur le critère du trouble à l'ordre public. Si le texte soumis au Sénat prévoit de le conserver, il fait en sorte qu'il ne puisse plus être invoqué pour le maintien en détention, c'est-à-dire au-delà de la première mise en détention.
La suppression pure et simple de ce critère poserait de sérieux problèmes, notamment dans les affaires de violences urbaines, mais aussi, par exemple, dans le cas, malheureusement trop fréquent le samedi soir, des chauffards passablement ivres qui tuent des jeunes sur la route. Ceux-là, mesdames, messieurs les sénateurs, on ne pourra plus les mettre en détention si vous supprimez le critère du trouble à l'ordre public, car tous les autres critères sont alors inopérants. Je vous laisse imaginer la réaction de l'opinion publique si vous laissez de tels individus en liberté ! Comment pourrait-elle comprendre un tel laxisme ?
Nous avons donc opté pour une solution de compromis, qui m'apparaît équilibrée. D'un côté, nous supprimons le critère du trouble à l'ordre public pour le maintien en détention ; de l'autre, nous le conservons pour le placement en détention. En aucun cas la détention ne pourra donc être renouvelée sur la base de ce critère, au-delà de la période initiale prévue par la loi.
Je comprends que ce sujet donne lieu à débat, car le recours à la détention provisoire, lorsqu'il est trop systématique, peut apparaître comme choquant. Toutefois, je crois voir dans la volonté de le réduire sensiblement le reflet d'une position un peu idéologique. Cela étant, je tiens à rappeler que, dès mon arrivée à la Chancellerie, j'ai affirmé que la détention provisoire était excessive en France.
Depuis l'affaire d'Outreau, on constate l'apparition d'un nouveau mouvement, d'ordre culturel, très critique à l'égard de la détention provisoire. À l'heure où je vous parle, le nombre de personnes en détention provisoire a baissé de 10 % en un an. C'est un chiffre sans précédent, qui prouve qu'au-delà des critères de placement en détention l'aspect culturel joue également un rôle important. Quoi qu'il en soit, je me flatte d'être le garde qui aura vu la détention provisoire diminuer pendant sa présence place Vendôme.
Autrement dit, je ne suis pas fondamentalement hostile aux objectifs affichés par plusieurs des amendements en discussion, mais je pense qu'il convient de conserver un équilibre, et c'est ce que permet le dispositif qui vous est soumis par le Gouvernement.
Dans ces conditions, je ne peux souscrire à l'amendement qui tend à interdire, en matière criminelle, la prolongation de la détention sur le fondement du trouble à l'ordre public. Autant on peut en débattre en matière correctionnelle, autant je refuse de le faire en matière criminelle ! Je suis donc franchement opposé à l'amendement n° 95.
Pour résumer, le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements n° 15, 16 et 17, et défavorable sur les amendements n° 59, 60, 61, 95 et 18.
La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote sur l'amendement n° 59.
J'ai été, mes chers collègues, très attentif et très sensible à la démonstration que vient de faire M. le garde des sceaux.
Il me semble qu'on ne devrait pas, au motif que certaines erreurs peuvent être commises dans le placement en détention provisoire, aussi tragiques que soient parfois ces erreurs, réduire excessivement le champ de celle-ci.
M. le garde des sceaux a fort justement rappelé qu'il existait certaines circonstances où, même en matière correctionnelle, et au moins pour la première mise en détention, elle restait absolument nécessaire, normale même.
M'étant, dans ma jeunesse, beaucoup occupé d'affaires pénales, je puis vous dire que les détenus qui, au fond d'eux-mêmes, savent bien qu'ils sont coupables - c'est quand même le cas d'une majorité d'entre eux, car la contestation de culpabilité n'est bien souvent qu'un moyen de défense - préfèrent effectuer de la détention provisoire plutôt que de purger une peine six mois, un an, voire trois ans après la commission de leur délit, alors qu'ils l'ont oublié et ont repris une vie normale. Cela mérite aussi d'être pris en considération.
Cela ne signifie pas que je suis insensible à un certain nombre de drames. Il est évidemment terrible de mettre un innocent en détention provisoire. Mais ce n'est pas en réduisant sans cesse les hypothèses de détention provisoire, y compris dans les cas où elle est justifiée, qu'on résoudra le problème. C'est plutôt du côté de la collégialité qu'il convient de se tourner pour résoudre le problème, essentiel s'il en est, de la faculté de discernement des magistrats. Ce n'est pas parce que le discernement est difficile à obtenir qu'il faut pour autant renoncer à cette chose normale dans la politique pénale qu'est la détention provisoire.
Permettez-moi, mes chers collègues, de faire une fois encore appel à mon expérience. Ceux qui, comme moi, ont pratiqué le métier d'avocat le savent : certains délinquants préfèrent aller en détention provisoire, notamment parce que, souvent, cela leur permet d'être détenus dans un endroit proche du lieu où réside leur famille. J'en ai entendu me dire : « Je préfère faire de la préventive à la Santé, parce que ma famille habite à Paris, plutôt que d'être condamné et expédié en centrale à l'autre bout de la France, où personne ne pourra venir me voir ! » Ce sont des choses que j'ai réellement vécues !
Pour toutes ces raisons, il me semble tout à fait possible d'admettre, en matière correctionnelle, la détention provisoire pour la première détention. Je partage sur ce point l'avis du garde des sceaux, et je ne voterai donc pas cet amendement.
Monsieur le garde des sceaux, tout à l'heure, vous avez évoqué des chiffres relatifs à la détention provisoire. Je souhaite apporter quelques précisions sur ces chiffres.
Nous avons effectivement assisté, dans la dernière année, à une baisse de la proportion du nombre de prévenus, celle-ci passant, entre le 1er octobre 2005 et le 1er octobre 2006, de 36 % à 32, 75 % du total des détenus.
Cela tient à l'utilisation des procédures que vous évoquiez à l'instant, monsieur le rapporteur, et qui tendent à accélérer le prononcé des décisions.
Mais, puisque nous sommes à l'heure du bilan, ne regardons pas seulement la dernière année, monsieur le garde des sceaux : on ne juge pas une politique sur quelques mois ! Interrogeons-nous aussi sur les résultats de la législature.
Au 1er octobre 2001, c'est-à-dire après l'entrée en vigueur de la loi Guigou - celle-ci, je vous le rappelle, avait été adoptée à l'unanimité -, la France comptait 46 968 détenus. Cinq ans après, au 1er octobre 2006, elle en comptait 56 311. Dans le même temps, le nombre des prévenus passait de 15 698 à 18 444. C'est là, sans doute, le résultat de la lutte contre la détention provisoire que vous évoquiez tout à l'heure...
Tout au long de ma carrière au barreau, j'ai regretté que les juges d'instruction ne placent pas les personnes en détention pour vingt-quatre heures. En effet, mes confrères et moi l'avons tous constaté, pendant cette période, les gens qui se retrouvent en détention sont complètement affolés. Très vite, dès le lendemain, ils reprennent leurs esprits, ne serait-ce que parce que les autres détenus les ont rassurés, et la détention préventive n'a plus le même poids. En revanche, celui qui ressort de prison au bout de vingt-quatre heures en garde un tel souvenir qu'il fera tout pour ne pas avoir à y retourner, et l'on aura de bonnes chances de ne pas le revoir.
Malheureusement, lorsque les juges d'instruction prennent une ordonnance, ce n'est pas pour la rapporter vingt-quatre heures après.
Par ailleurs, nous avons toujours dénoncé l'utilisation du critère du trouble à l'ordre public. Il est vrai que, avec la prudence qui le caractérise, le rapporteur propose de rendre ce motif inopérant uniquement en matière correctionnelle, arguant que cela constitue déjà une évolution, que l'on ne peut pas tout avoir tout de suite, etc.
Or rien ne justifie, en quelque matière que ce soit, que l'ordre public soit le seul motif invoqué pour maintenir quelqu'un en détention provisoire. Le rapporteur l'a lui-même souligné : l'ordre public est une notion subjective !
M. le ministre a donné un peu rapidement son avis sur notre amendement 95, dont l'objet est que, « en toute matière, le présent 7° n'est pas applicable aux décisions de prolongation de la détention provisoire ou de maintien en détention provisoire ». Autrement dit, il n'y est pas question de placement.
Il ne faut donc pas confondre cet amendement avec ceux qui visent à empêcher d'invoquer le critère d'ordre public également pour le placement en détention provisoire. Nous proposons une position subsidiaire qui mérite que la commission et le Gouvernement s'y arrêtent et apportent réponse.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous avez suggéré de placer les prévenus en détention pendant vingt-quatre heures. Voici une anecdote, qui, je l'espère, vous contentera.
Depuis quelques années, le procureur de Douai prononce des réquisitions pour placer les maris violents en détention pendant le week-end : ces derniers rentrent en maison d'arrêt le vendredi soir et en ressortent le lundi matin, à six heures, pour aller travailler. Il paraît qu'ils sont de moins en moins violents... C'est donc une excellente punition et une idée fort judicieuse.
M. le garde des sceaux a posé le problème de fond tout à l'heure.
L'objectif premier de la justice est-il de répondre à l'attente de l'opinion publique, ou bien, comme son nom l'indique et comme le croient encore un certain nombre d'« archaïques », de rendre la justice, c'est-à-dire de distinguer l'innocent du coupable et de proportionner les peines aux délits et aux crimes ? Tout est là !
S'il s'agit de donner satisfaction à l'opinion publique, ce n'est pas la peine de voter une loi supplémentaire. Il n'est qu'à continuer comme on le fait depuis au moins cinq ans !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 95.
Je rappelle à nos collègues que cet amendement tend à supprimer la référence à l'ordre public « en toute matière », mais uniquement lorsqu'il s'agit de renouveler ou de prolonger la détention provisoire.
Je rappelle à mon tour à nos collègues que la disposition visée par cet amendement s'appliquerait également en matière criminelle. C'est pourquoi la commission y est défavorable.
Comme le rappelait excellemment Michel Dreyfus-Schmidt, cette disposition concerne uniquement le renouvellement et la prolongation de la détention provisoire : elle ne vise en aucun cas le placement.
Ainsi, pour décider du renouvellement ou de la prolongation de la détention, les magistrats instructeurs ne doivent pouvoir invoquer qu'une raison objective.
Si une nouvelle affaire crée un trouble formidable, un bouillonnement dans le public, suscite de l'agitation, le magistrat, qui n'a pas encore commencé à oeuvrer, peut invoquer le maintien de l'ordre public pour répondre à l'inquiétude générale. En revanche, lorsqu'il s'agit de renouveler la détention provisoire, des mois se sont écoulés, le magistrat doit donc justifier sa décision par d'autres motifs que l'ordre public : les recherches à conduire, les confrontations à organiser, la nécessité de rassembler des éléments sur la personnalité, etc. Voilà des raisons objectives ! L'ordre public, c'est trop vague ! Quelle que soit la matière, ce motif ne peut être soulevé pour renouveler ou prolonger la détention provisoire.
Il faut, une fois pour toutes, faire passer dans la réalité judiciaire le principe selon lequel la détention provisoire constitue l'exception ! Je ne me lasserai pas de le répéter, le magistrat instructeur doit avoir des raisons objectives pour décider le renouvellement ou la prolongation de la détention provisoire.
Sur ce sujet, tous nos collègues sont maintenant éclairés. Je vous rappelle que, en matière correctionnelle uniquement, la commission propose de supprimer le critère d'ordre public.
La distinction n'est pas bonne ! Il faut tenir compte des investigations à mener !
Il existe de nombreux autres critères ! Là, vous enfumez le débat !
Monsieur Badinter, pour vous dire le fond de ma pensée, je considère que le critère de l'ordre public ne devrait pas exister.
MM. Robert Badinter et Michel Dreyfus-Schmidt applaudissent.
Mais personne n'en a proposé la suppression parce qu'il s'impose dans certains cas !
La notion d'ordre public est désormais plus circonscrite : beaucoup textes sont venus en affiner la définition. Ainsi, ce projet de loi prévoit que le trouble à l'ordre public ne peut résulter du retentissement médiatique. Aujourd'hui, une telle précision est nécessaire.
Pour autant, le critère de l'ordre public demeure pertinent, sauf en matière correctionnelle, grâce aux nouvelles procédures, monsieur le garde des sceaux. Sur le fondement de ce motif, une personne a été placée quinze mois en détention provisoire : apparemment, elle avait été oubliée ! Certes, elle était impliquée dans une affaire financière grave, mais le critère de l'ordre public ne se justifiait certainement pas. Elle a fini par sortir de prison, mais n'est toujours pas jugée. Cela donne à réfléchir.
Il ne faut pas oublier tous les autres critères !
L'amendement n° 18 apporte un progrès modeste par rapport à la grande avancée que constitue l'article 3 pour limiter la détention provisoire. Il nous paraît toutefois indispensable pour donner une orientation.
Si l'on souhaite vraiment que la détention provisoire soit exceptionnelle, il faut qu'elle soit exigée uniquement pour des raisons objectives, c'est-à-dire sur le fondement de critères précis, comme l'a précisé Robert Badinter, surtout lorsqu'il s'agit d'en demander le renouvellement. Ce ne sont donc ni la lourdeur de la peine encourue ni la qualification qui importent. La seule question est de savoir si, objectivement, il faut maintenir la personne en détention. C'est cela qui compte, et rien d'autre !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'article 3 est adopté.
L'article 145 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :
« Si cette personne n'est pas déjà assistée d'un avocat, le juge l'avise qu'elle sera défendue lors du débat par un avocat de son choix ou, si elle ne choisit pas d'avocat, par un avocat commis d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une commission d'office, le bâtonnier de l'ordre des avocats en est avisé par tout moyen et sans délai. Si l'avocat choisi ne peut se déplacer, il est remplacé par un avocat commis d'office. Mention de ces formalités est faite au procès-verbal. » ;
2° Le sixième alinéa est ainsi modifié :
a) Dans la première phrase, les mots : « en audience de cabinet, » sont supprimés ;
b) Les deux dernières phrases sont remplacées par quatre phrases ainsi rédigées :
« Si la personne mise en examen est majeure, le débat contradictoire a lieu et le juge statue en audience publique. Toutefois, le ministère public, la personne mise en examen ou son avocat peuvent s'opposer à cette publicité si l'enquête porte sur des faits visés à l'article 706-73 ou si celle-ci est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction, à porter atteinte à la sérénité des débats ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le juge statue sur cette opposition en audience de cabinet par ordonnance motivée, après avoir recueilli les observations du ministère public, de la personne mise en examen et de son avocat. S'il fait droit à cette opposition ou si la personne mise en examen est mineure, le débat a lieu et le juge statue en audience de cabinet. » ;
3° Après l'avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour permettre au juge d'instruction de procéder à des vérifications relatives à la situation personnelle du mis en examen ou aux faits qui lui sont reprochés, lorsque ces vérifications sont susceptibles de permettre le placement de l'intéressé sous contrôle judiciaire, le juge des libertés et de la détention peut également décider d'office de prescrire par ordonnance motivée l'incarcération provisoire du mis en examen pendant une durée déterminée qui ne saurait excéder quatre jours ouvrables. Cette ordonnance peut faire l'objet du recours prévu à l'article 187-1. »
L'amendement n° 19, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
I. - Le dernier alinéa de l'article 137-1 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le juge des libertés et de la détention doit statuer à l'issue d'un débat contradictoire, le juge d'instruction peut indiquer dans son ordonnance si la publicité de ce débat lui paraît devoir être écartée au regard d'une ou plusieurs des raisons mentionnées au sixième alinéa de l'article 145. »
II.- En conséquence, faire précéder le premier alinéa de cet article de la mention :
II.
La parole est à M. le rapporteur.
L'avis du juge d'instruction sur la publicité ou non du débat de la mise en détention pourra figurer dans la procédure, afin que le juge des libertés et de la détention en soit informé avant de prendre sa décision.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 20, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du second alinéa du b du 2° de cet article, après les mots :
porter atteinte
insérer les mots :
à la présomption d'innocence ou
La parole est à M. le rapporteur.
Lorsque le juge d'instruction a sollicité auprès du juge des libertés et de la détention la mise en détention d'une personne mise en cause, un débat contradictoire a lieu. La question est de savoir si ce débat doit être public ou non.
Le texte du Gouvernement prévoit que la règle sera désormais la publicité de l'audience, pour plus de transparence. Toutefois, il est des cas où cette publicité n'est pas souhaitable, par exemple lorsqu'il s'agit de préserver des preuves. Le juge d'instruction pourra donc demander que le débat se déroule en chambre du conseil.
La personne mise en cause doit aussi pouvoir demander que ce débat se déroule en chambre du conseil, même si sa requête ne sera pas nécessairement acceptée. On imagine, en effet, quelles peuvent être les éventuelles conséquences, au regard de la présomption d'innocence, d'une audience publique de mise en détention.
Le Gouvernement émet un avis favorable.
En effet, il est légitime de prévoir, parmi les cas permettant d'écarter la publicité du débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention, l'hypothèse dans laquelle le mis en examen estime que cette publicité porterait atteinte à sa présomption d'innocence.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 21, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
quatre jours ouvrables
rédiger ainsi la fin du second alinéa du 3° de cet article :
jusqu'à la tenue du débat contradictoire. À défaut de débat dans ce délai, la personne est mise en liberté d'office. L'ordonnance mentionnée au présent alinéa peut faire l'objet du recours prévu à l'article 187-1.
La parole est à M. le rapporteur.
Le présent amendement vise à préciser que si le juge des libertés et de la détention n'ordonne pas le placement en détention provisoire à l'issue de l'incarcération provisoire, l'intéressé est mis en liberté d'office.
L'amendement est adopté.
L'article 4 est adopté.
L'amendement n° 63, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 145-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 145-1. - En matière correctionnelle, la détention provisoire ne peut excéder deux mois si la personne mise en examen n'a pas déjà été condamnée pour crime ou délit de droit commun soit à une peine criminelle, soit à une peine d'emprisonnement sans sursis d'une durée supérieure à un an et lorsqu'elle encourt une peine inférieure ou égale à cinq ans.
« Dans les autres cas, à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut décider de prolonger la détention provisoire pour une durée qui ne peut excéder deux mois par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145, l'avocat ayant été convoqué selon les dispositions du deuxième alinéa de l'article 114. Cette décision peut être renouvelée selon la même procédure, sous réserve des dispositions de l'article 145-3, la durée totale de la détention ne pouvant excéder six mois. Toutefois, cette durée est portée à un an lorsqu'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis hors du territoire national ou lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée et qu'elle encourt une peine égale à dix ans d'emprisonnement. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Je défendrai en même temps, madame la présidente, l'amendement n° 64.
Il est proposé, dans ces deux amendements, une nouvelle rédaction des articles 145-1 et 145-2 du code de procédure pénale afin de réduire les délais butoirs de détention provisoire en matière correctionnelle et en matière criminelle.
La durée de la détention provisoire augmente en France. C'est ce qu'indiquait, en 2005, le rapport de la Commission nationale de suivi de la détention provisoire, dont M. Badinter a cité tout à l'heure quelques chiffres.
Ce rapport, qui porte sur l'année 2003, révèle que « l'ensemble des poursuites pouvant donner lieu à une détention provisoire est en hausse sensible depuis 2001. »
Après une baisse au cours de la période 2000-2002, la durée moyenne globale de la détention provisoire a de nouveau progressé en 2003, pour s'établir à 7, 1 mois, « ce qui représente une augmentation sensible par rapport à 2002 - 6, 4 mois -, alors que cette durée moyenne était plutôt décroissante auparavant - 6, 6 mois en 1999 ».
La loi du 17 juillet 1970 tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens et la vingtaine de lois importantes qui se sont succédé dans le domaine de la procédure pénale avaient pour objectif de réduire le nombre de recours à la détention provisoire ainsi que la durée de celle-ci. Le Gouvernement s'est, depuis lors, résolument engagé sur le chemin inverse.
La loi du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a imposé au juge d'instruction de motiver son refus de placer en détention la personne mise en examen, a élargi les conditions de fond de la mesure et en a allongé la durée maximale dans certains cas.
Quant à la loi du 9 mars 2004, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite loi « Perben II », elle s'inscrit dans ce mouvement en banalisant la décision de mise en détention.
Le présent projet de loi a prétendument pour objectif de redonner toute sa valeur au caractère exceptionnel de la détention provisoire, tel qu'il est prévu théoriquement à l'article 137 du code de procédure pénale.
Il apparaît néanmoins nécessaire d'engager une réelle réflexion sur la durée de cette détention provisoire. À cette fin, et pour combler une lacune, nous vous proposons d'inscrire de nouveaux délais par une nouvelle rédaction des articles 145-1 et 145-2 du code de procédure pénale.
La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Si les détentions provisoires ont une durée certainement excessive, il n'en demeure pas moins que nous observons actuellement une tendance favorable. Comme l'a dit tout à l'heure M. le garde des sceaux, le nombre des mises en détention provisoire a diminué de 10 % en un an. Ce mouvement n'est pas conjoncturel et sera confirmé à l'avenir. Il répond à une volonté exprimée tant par le garde des sceaux que par une majorité d'entre nous.
Libre à vous de vouloir remettre à plat tous les critères de placement en détention provisoire ; vous vous y employez, d'ailleurs, régulièrement. Mais votre méthode n'est pas la bonne. En outre, aucune nécessité ne se fait sentir aujourd'hui. Ce ne sont pas les règles de la détention provisoire qui doivent changer, c'est la pratique qui doit évoluer.
Je voudrais, pour ma part, attirer l'attention de M. le garde des sceaux sur un autre problème, qui influe directement sur la durée des détentions, à savoir les délais d'audiencement, c'est-à-dire la période qui s'écoule entre le moment où l'instruction est terminée, où l'affaire est prête à être jugée, et celui où se tient le procès.
Il ressort des auditions à laquelle a procédé la commission que ces délais sont anormalement longs. Ainsi, en matière criminelle, leur moyenne est de douze mois. À la cour d'assises de Paris, elle atteint même quatorze mois. Aussi, des efforts doivent être faits dans ce domaine.
Ces deux amendements, présentés par le groupe CRC, ont pour objet de revenir sur la question des délais butoirs fixés par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.
Je tire de mon expérience ministérielle le constat que l'essentiel n'est pas là. Si l'on fixe de manière rigoureuse des délais butoirs, on risque un jour d'être confronté à un drame, celui de la libération inopportune d'un prévenu. Imaginez alors l'émotion du public !
Aussi, la solution que vous proposez n'est pas la bonne. La bonne solution consiste à ce que les parties à une instance et la chambre de l'instruction, après avoir mis complètement à plat l'affaire qui les concernent, s'interrogent sur les raisons qui pourraient conduire au placement en détention provisoire de l'accusé. C'est l'objet du présent texte. Ainsi, aux termes de l'article 4, le président de la chambre de l'instruction peut décider de saisir cette juridiction afin que celle-ci examine l'ensemble de la procédure lorsqu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis le placement en détention provisoire de la personne mise en examen - dans le texte initial présenté par le Gouvernement, ce délai était de six mois.
On découvrira alors, dans un faible nombre de cas, du moins je l'espère, que certaines personnes qui auront passé plusieurs mois en détention provisoire n'avaient aucune raison d'y être placées. Ce dispositif, s'il avait existé au moment de l'affaire d'Outreau, aurait empêché que certains demeurent plus de trois ans en détention provisoire.
Je le répète : le délai butoir n'est pas une bonne idée. Il importe avant tout d'examiner la raison pour laquelle un suspect a été incarcéré et de vérifier régulièrement que son maintien en détention est justifié. C'est ce à quoi vise la possibilité de faire appel devant la chambre de l'instruction, qui vous est proposée ici, par un examen au fond de l'ensemble de la procédure. Cela vaudra bien mieux que le copier-coller des demandes de mise en liberté formulées tous les huit jours par les avocats.
S'agissant de la question de l'audiencement, je veux dire à M. le rapporteur que nous passons des contrats d'objectifs avec les tribunaux. Ce travail avec les chefs de cour et de juridiction est un aspect peu connu des missions de l'inspection générale des services judiciaires, dont le rôle ne consiste pas seulement à inspecter les magistrats. Ainsi, la cour d'assises de Versailles, par exemple, a reçu des moyens nouveaux pour réduire ses délais d'audiencement. Elle y a, d'ailleurs, réussi.
Je ne disconviens pas, monsieur le rapporteur, que les efforts doivent être poursuivis. Mais sachez que la Chancellerie est totalement consciente de la nécessité d'attribuer aux cours d'assises des moyens supplémentaires afin de leur permettre de réduire leurs délais d'audiencement.
On peut parfaitement concilier et conjuguer le délai butoir, qui est présent dans l'esprit du magistrat, et les améliorations qui ont été évoquées tout à l'heure. C'est une question de dosage.
Néanmoins, il faut prendre la mesure des phénomènes dont on parle.
J'ai évoqué, avec d'autres, la question du stock. Il s'agit de mesurer, année après année, à un moment précis et constant, quel est le stock - ce terme, bien qu'il soit malheureux, est celui qui est usité en matière carcérale - de prévenus et de détenus.
Il faut aussi mesurer les flux, à savoir le nombre de personnes qui entrent en détention et le nombre de personnes qui en sortent. Ce chiffre a une importance particulière dans la mesure où il permet de savoir combien de personnes sont placées en détention.
S'agissant du nombre des entrées, je dispose ici de donnée indiscutables, à savoir celles de la Chancellerie : en 2003, 81 900 personnes ont été incarcérées ; 84 700 l'ont été en 2004 ; 85 536 l'ont été en 2005 ; 85 540 l'ont été en 2006. Force est de constater que le flux des entrées ne cesse de croître.
L'annuaire statistique de la justice pour 2006 indique, par ailleurs, que sur les 85 536 incarcérations qui ont été ordonnées en 2005, 60 948 concernaient des personnes prévenues, soit 71, 2 % du total. C'est considérable. Il s'agit donc d'une donnée structurelle.
Le Conseil de l'Europe a diligenté une enquête pour l'année 2004. Il en ressort que la France se trouvait, à cet égard, dans une situation particulièrement affligeante, dont je me permets de livrer les détails à la réflexion de nos collègues, tant cette question essentielle pour notre justice pénale intéresse chacun d'entre nous. Ainsi, la proportion de détenus non jugés dans les prisons était alors de 32, 2 % en France, contre une moyenne européenne de 22, 2 %. Seuls le Luxembourg, la Slovaquie, la Turquie et l'Irlande du nord, parmi les membres du Conseil de l'Europe, faisaient moins bien que nous, l'Azerbaïdjan atteignant quant à lui le taux record de 93, 2 %.
Il s'agit là d'un phénomène culturel très ancré contre lequel nous devons continuer de lutter. C'est pourquoi il convient d'utiliser aussi bien le délai butoir, certes avec circonspection et avec des exceptions pour les cas extrêmes, que les modalités que nous introduisons aujourd'hui.
Si les flux augmentent alors que le stock est stable, cela signifie que la situation s'améliore, que la durée moyenne de détention n'augmente pas et que les personnes sont jugées plus rapidement. C'est une tendance nouvelle, qui est apparue voilà deux ou trois ans et dont il convient de se féliciter.
Les dispositions que nous sommes invités à voter sont susceptibles d'améliorer la situation, monsieur Badinter. En revanche, la fixation d'un délai butoir n'y changerait rien.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 64, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 145-2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 145 -2. - En matière criminelle, la personne mise en examen ne peut être maintenue en détention au-delà de six mois. Toutefois, sous réserve des dispositions de l'article 145-3, le juge des libertés et de la détention peut, à l'expiration de ce délai, prolonger la détention pour une durée qui ne peut être supérieure à trois mois par une ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 137-3 et rendue après un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions du sixième alinéa de l'article 145, l'avocat ayant été convoqué conformément aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 114. Cette décision peut être renouvelée selon la même procédure.
« La personne mise en examen ne peut être maintenue en détention provisoire au-delà d'un an lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et au-delà de deux ans dans les autres cas. »
Cet amendement a déjà été défendu. La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 64.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 65, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article 145-3 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Lorsque la durée de la détention provisoire excède six mois en matière criminelle ou quatre mois en matière délictuelle, les décisions ordonnant sa prolongation ou rejetant les demandes de mise en liberté doivent aussi comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Cet amendement est cohérent avec les deux précédents et, le présentant, je défendrai en même temps l'amendement n° 66.
En 2002, la Commission nationale consultative des droits de l'homme avait émis un avis très défavorable sur la procédure de référé-détention. Elle observait que l'obligation faite au juge d'instruction de motiver son refus d'incarcération n'était guère conciliable avec le principe de la liberté de la personne présumée innocente et soulevait même un problème de compatibilité avec les exigences de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relative à l'intervention nécessaire en la matière d'un magistrat du siège.
Aussi, par souci de cohérence, et si tant est qu'il maintienne les déclarations qu'il a faites à la suite du procès d'Outreau et devant la commission d'enquête parlementaire, le Gouvernement devrait accepter que soit abrogé le référé-détention.
L'amendement n° 65 est sans objet. En effet, l'article 137-3 du code de procédure pénale prévoit déjà que les mesures de placement en détention provisoire et de prolongation doivent comporter « l'énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire et le motif de la détention par référence aux seules dispositions des articles 143-1 et 144 du code de procédure pénale. »
Cette motivation est encore complétée, en cas de prolongation de la détention provisoire, par l'article 145-3 du code de procédure pénale.
Madame Mathon-Poinat, vous pourriez donc retirer cet amendement.
Quant au référé-détention, qui est visé dans l'amendement n° 66, c'est le pendant du référé-liberté, qui permet au mis en examen de demander au président de la chambre de l'instruction l'examen immédiat de la décision de placement en détention.
Nous sommes ici pour discuter de l'équilibre de la procédure pénale, mais « équilibre » ne veut pas dire déséquilibre dans le sens des droits du mis en cause. Ces droits doivent être protégés, certes, mais ceux du ministère public sont aussi importants.
Par conséquent, la commission est défavorable à l'amendement n° 66.
Je dis par avance qu'il en sera de même en ce qui concerne l'amendement n° 67, pour les raisons que j'ai exposées à l'occasion de l'examen de l'amendement n° 63.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 66, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 148-1-1 et 187-3 du code de procédure pénale sont abrogés.
Cet amendement a déjà été défendu. La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 66.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 67, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 4, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le neuvième alinéa de l'article 181 du code de procédure pénale est supprimé.
Cet amendement a déjà été défendu. La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Je mets aux voix l'amendement n° 67.
Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article 135-2 du code de procédure pénale, le mot : « huitième » est remplacé par le mot : « neuvième ». -
Adopté.
I. - Après le premier alinéa de l'article 199 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En matière de détention provisoire, et par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la personne mise en examen est majeure, les débats se déroulent et l'arrêt est rendu en audience publique. Toutefois, le ministère public, la personne mise en examen ou la partie civile ou leurs avocats peuvent, avant l'ouverture des débats, s'opposer à cette publicité si celle-ci est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction, à porter atteinte à la sérénité des débats ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. La chambre statue en chambre du conseil sur cette opposition après avoir recueilli les observations du ministère public et des parties. Si la chambre fait droit à cette opposition ou si la personne mise en examen est mineure, les débats ont lieu et l'arrêt est rendu en chambre du conseil. Il en est de même si la partie civile s'oppose à la publicité, dans les seuls cas où celle-ci est en droit de demander le huis clos lors de l'audience de jugement. »
I bis. - Après le mot : « parties », la fin du deuxième alinéa du même article 199 est ainsi rédigée : « sont entendus. »
II. - Après l'article 221-2 du même code, il est inséré un article 221-3 ainsi rédigé :
« Art. 221-3. - I. - Lorsqu'un délai de trois mois s'est écoulé depuis le placement en détention provisoire de la personne mise en examen, que cette détention ou celle d'une autre personne mise en examen est toujours en cours et que l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 n'a pas été délivré, le président de la chambre de l'instruction peut d'office, ou à la demande du ministère public ou d'une partie, décider de saisir cette juridiction afin que celle-ci examine l'ensemble de la procédure. En cas de demande du ministère public ou d'une partie, il statue dans les huit jours de la réception de cette demande. Cette décision n'est pas susceptible de recours.
« La chambre de l'instruction statue après une audience à laquelle les avocats de l'ensemble des parties et des témoins assistés sont convoqués. La chambre de l'instruction ou son président peut ordonner la comparution des personnes mises en examen et des témoins assistés, d'office ou à la demande des parties. Si un mis en examen placé en détention provisoire demande à comparaître, le président ne peut refuser sa comparution que par une décision motivée. La comparution peut être réalisée selon les modalités prévues à l'article 706-71.
« Si la personne mise en examen est majeure, les débats se déroulent et l'arrêt est rendu en audience publique. Toutefois, le ministère public, la personne mise en examen ou la partie civile ou leurs avocats peuvent, avant l'ouverture des débats, s'opposer à cette publicité si celle-ci est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction, à porter atteinte à la sérénité des débats ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. La chambre statue sur cette opposition, après avoir recueilli les observations du ministère public et des parties, par arrêt rendu en chambre du conseil qui n'est susceptible d'un pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt portant sur la demande principale. Si la chambre fait droit à cette opposition ou si la personne mise en examen est mineure, les débats ont lieu et l'arrêt est rendu en chambre du conseil. Il en est de même si la partie civile s'oppose à la publicité, dans les seuls cas où celle-ci est en droit de demander le huis clos lors de l'audience de jugement.
« Le président de la chambre de l'instruction peut également ordonner, d'office, après avoir recueilli les observations du ministère public et des parties, que les débats se déroulent en chambre du conseil si la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Le président de la chambre de l'instruction statue par une ordonnance rendue en chambre du conseil qui n'est susceptible de pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt rendu à l'issue des débats.
« Deux jours ouvrables au moins avant la date prévue pour l'audience, les parties peuvent déposer des conclusions consistant notamment soit en des demandes de mise en liberté, soit en des demandes d'actes, y compris s'il s'agit d'une demande ayant été précédemment rejetée en application de l'article 186-1, soit en des requêtes en annulation, sous réserve des articles 173-1 et 174.
« II. - La chambre de l'instruction, après avoir le cas échéant statué sur ces demandes, peut :
« 1° Ordonner la mise en liberté, assortie ou non du contrôle judiciaire, d'une ou plusieurs des personnes mises en examen, même en l'absence de demande en ce sens ;
« 2° Prononcer la nullité d'un ou plusieurs actes dans les conditions prévues par l'article 206 ;
« 3° Évoquer et procéder dans les conditions prévues par les articles 201, 202, 204 et 205 ;
« 4° Procéder à une évocation partielle du dossier en ne procédant qu'à certains actes avant de renvoyer le dossier au juge d'instruction ;
« 5° Renvoyer le dossier au juge d'instruction afin de poursuivre l'information, en lui prescrivant le cas échéant de procéder à un ou plusieurs actes, autres que ceux relatifs à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire, dans un délai qu'elle détermine ;
« 6° Désigner un ou plusieurs autres juges d'instruction pour suivre la procédure avec le juge ou les juges d'instruction déjà saisis, conformément à l'article 83-1 ;
« 7° Lorsque cette décision est indispensable à la manifestation de la vérité et à la bonne administration de la justice, et qu'il n'est pas possible de procéder aux désignations prévues au 6°, procéder au dessaisissement du juge d'instruction et à la désignation, aux fins de poursuite de la procédure, d'un ou plusieurs juges d'instruction de la juridiction d'origine ou d'une autre juridiction du ressort ;
« 8° Ordonner le règlement, y compris partiel, de la procédure, notamment en prononçant un ou plusieurs non-lieux à l'égard d'une ou plusieurs personnes.
« L'arrêt de la chambre de l'instruction doit être rendu au plus tard trois mois après la saisine par le président, à défaut de quoi les personnes placées en détention sont remises en liberté.
« Six mois après que l'arrêt est devenu définitif, si une détention provisoire est toujours en cours, et sauf si l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 a été délivré, le président de la chambre de l'instruction peut à nouveau saisir cette juridiction dans les conditions prévues par le présent article. »
L'amendement n° 22, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du second alinéa du I de cet article, après les mots :
porter atteinte
insérer les mots :
à la présomption d'innocence ou
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 23, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter la deuxième phrase du second alinéa du I de cet article par les mots :
ou si l'enquête porte sur des faits visés à l'article 706-73
Cet amendement a déjà été défendu et le Gouvernement s'est exprimé.
Je mets aux voix l'amendement n° 23.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 24, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter la troisième phrase du second alinéa du I de cet article par les mots :
par un arrêt rendu en chambre du Conseil qui n'est susceptible de pourvoi en cassation qu'en même temps que l'arrêt portant sur la demande principale
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 25, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, supprimer les mots :
ou celle d'une autre personne mise en examen
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement de précision, destiné à mieux encadrer le dispositif, vise à permettre un examen de l'ensemble de la procédure par la chambre de l'instruction trois mois après le placement en détention provisoire, et tous les six mois par la suite.
C'est l'un des grands ajouts de ce texte, qui donne l'assurance, du moins peut-on l'espérer, que les dossiers ne seront pas oubliés sous une pile ou au bas d'un placard !
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 26, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
d'une partie
par les mots :
de la personne mise en examen
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit également d'un amendement de précision concernant ce réexamen du dossier par la chambre de l'instruction.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 27, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, après les mots :
porter atteinte
insérer les mots :
à la présomption d'innocence ou
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 28, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter la deuxième phrase du troisième alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale par les mots :
ou si l'enquête porte sur des faits visés à l'article 706-73
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 30, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, remplacer le mot :
conclusions
par le mot :
mémoires
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 29, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, supprimer le mot :
notamment
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 31, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale par les mots :
, soit en des demandes tendant à constater la prescription de l'action publique
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 96, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Au dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 221-3 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
peut à nouveau saisir
par le mot :
saisit
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Le dernier alinéa du texte proposé par le II de l'article 5 pour l'article 221-3 du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « Six mois après que l'arrêt est devenu définitif, si une détention provisoire est toujours en cours, et sauf si l'avis de fin d'information prévu par l'article 175 a été délivré, le président de la chambre de l'instruction peut à nouveau saisir cette juridiction dans les conditions prévues par le présent article. »
Nous préférerions que, dans un cas comme celui-là, où la détention préventive se poursuit, le président de la chambre de l'instruction « doive » et non pas « puisse » saisir cette juridiction.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, car il ne faut pas introduire dans ce texte un dispositif que je qualifierais de technocratique.
Ce que vous proposez, c'est de rendre l'examen obligatoire au bout de trois mois, puis tous les six mois. Or cela ne s'impose pas pour un certain nombre de dossiers. Par ailleurs, ce n'est pas réaliste eu égard aux moyens dont disposent les chambres de l'instruction.
La mesure que vous proposez risquerait de conduire à un examen superficiel : pour vous faire plaisir, la chambre de l'instruction ressortirait le dossier, l'examinerait en trois minutes, et ce serait terminé !
C'est précisément ce que nous voulons éviter. Nous souhaitons que, sur les dossiers qui en valent la peine, il y ait un véritable examen au fond, demandé soit par les parties, soit par le ministère public ou le président de la chambre de l'instruction lui-même.
Prenons un exemple qui devrait faire réfléchir M. Michel Dreyfus-Schmidt : celui du détenu qui reconnaît tous les faits. Vous allez obliger la chambre de l'instruction à examiner son dossier. Ce n'est pas raisonnable ! Vous voyez bien qu'il ne faut jamais systématiser.
Par conséquent, monsieur Michel Dreyfus-Schmidt, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. En effet, votre proposition risquerait d'aboutir à la thrombose du système. Or, dans la plupart des cas, l'affaire est plus simple qu'on ne le pense, puisque la personne reconnaît les faits. Le problème est donc réglé.
Je remercie M. le garde des sceaux d'avoir répété les propos qu'il avait tenus tout à l'heure et que j'avais oublié de relever.
Ce texte n'a-t-il pas été élaboré précisément à l'intention de toutes les personnes innocentes qui ont reconnu des faits dans lesquels elles n'étaient aucunement impliquées ? Ce n'est vraiment pas un argument de me dire que, à partir du moment où l'intéressé a reconnu sa culpabilité, le problème est réglé !
Alors, vous ne mettez jamais en prison !
Si la détention provisoire se poursuit, est-ce un luxe que la chambre de l'instruction soit saisie de la situation pour savoir s'il est normal que les choses traînent aussi longtemps ? Nous ne le pensons pas. C'est pourquoi nous maintenons fermement notre amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 32, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
III. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 174 du même code, après les mots : « l'article 173 », sont insérés les mots : « ou de l'article 221-3 ».
La parole est à M. le rapporteur.
L'examen de cet amendement est l'occasion de rappeler à M. Michel Dreyfus-Schmidt que le projet de loi améliore la situation. À vous entendre, mon cher collègue, on pourrait croire qu'il rend plus difficile l'exercice des droits de la défense. Or, c'est l'inverse. Avec ce nouvel examen devant les chambres de l'instruction, nous réalisons une avancée considérable en matière de droits de la défense.
Nous proposons, par cet amendement n° 32, que, lorsque la chambre de l'instruction procédera à l'examen d'ensemble de la procédure, ce soit l'occasion de purger cette dernière de tout vice éventuel. En effet, l'ensemble des personnes qui interviennent dans la procédure, que ce soit le ministère public, le juge d'instruction, la chambre de l'instruction et les avocats, doivent examiner le dossier au fur et à mesure, tous les six mois au minimum, et cela dans l'intérêt du mis en cause.
Je ne peux pas laisser dire cela ! M. le rapporteur nous explique que la purge des nullités est réalisée dans l'intérêt des justiciables...
Si, vous avez prétendu que cette opération était effectuée dans l'intérêt de tous ! C'est, évidemment, le contraire qui se passe !
Cette mesure a été introduite voilà peu et a des effets tout à fait contraires, puisque certaines nullités peuvent être repérées non à ce stade, mais beaucoup plus tard, vous devriez bien le savoir !
Je me permets de redire que l'intérêt du mis en cause, c'est que son avocat suive le dossier régulièrement, en particulier qu'il s'occupe de la purge des nullités.
L'amendement est adopté.
L'article 5 est adopté.
L'amendement n° 68, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La dernière phrase du premier alinéa de l'article 33 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est supprimée.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Comme vous le savez, l'article 33 de l'ordonnance du 2 février 1945 prévoit que les mineurs peuvent être placés en centres éducatifs fermés, en application d'un contrôle judiciaire, d'un sursis avec mise à l'épreuve ou à la suite d'une libération conditionnelle.
Cependant, la dernière phrase du premier alinéa de cet article dispose que « la violation des obligations auxquelles le mineur est astreint en vertu des mesures qui ont entraîné son placement dans le centre peut entraîner, selon le cas, le placement en détention provisoire ou l'emprisonnement du mineur ».
Notre objectif de limiter le recours à la détention provisoire est constant, d'autant plus lorsqu'il s'agit de mineurs. Tout le monde s'accorde à reconnaître les effets dévastateurs de cette mesure sur les personnes qui la subisse. Alors, pourquoi la proposer comme solution à une violation d'une obligation à laquelle le mineur est astreint ou, comme a osé le dire le rapporteur à l'Assemblée nationale, comme « principe éducatif » ?
Tout au long de l'examen de ce texte, nous n'avons cessé d'affirmer que le placement en détention provisoire doit être évité. Tel est l'esprit de notre amendement.
Dans l'objet de cet amendement, vous dites que vous respectez l'esprit du projet de loi. J'estime, pour ma part, que cette disposition en est assez éloignée et qu'elle est même à la limite du « cavalier ».
Si un mineur ne respecte pas les obligations qui sont les siennes dans le cadre d'un placement en centre éducatif fermé, il ne paraît tout de même pas illogique qu'il fasse l'objet d'une sanction graduée. Nous avons passé beaucoup de temps à réfléchir sur ces questions ; ce n'est pas le moment d'y revenir.
J'ajouterai que cette mesure ne me choque absolument pas.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Avec cet amendement, les centres éducatifs fermés sont réduits à peu de chose ! En effet, en prévoyant que le mineur qui s'en échapperait ne serait pas conduit en prison, il supprime totalement la raison d'être de ces centres, dont les pensionnaires pourraient sortir à leur guise. C'est une manière habile de les détruire !
J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises au groupe communiste républicain et citoyen l'intérêt des centres éducatifs fermés, mais en vain : tous les observateurs ont aujourd'hui changé d'avis, sauf lui !
Au demeurant, cet amendement n'a rien à faire dans ce débat.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Le troisième alinéa de l'article 41 du code de procédure pénale est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Il adresse au procureur général un rapport concernant les mesures de garde à vue et l'état des locaux de garde à vue de son ressort ; ce rapport est transmis au garde des sceaux. Le garde des sceaux rend compte de l'ensemble des informations ainsi recueillies dans un rapport annuel qui est rendu public. » - (Adopté.)
CHAPITRE III
Dispositions renforçant le caractère contradictoire de la procédure pénale
L'amendement n° 69 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les deux premiers alinéas de l'article 63 du code de procédure pénale sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« L'officier de police judiciaire peut, pour les nécessités de l'enquête, placer en garde à vue toute personne à l'encontre de laquelle il existe des indices graves et concordants faisant présumer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il en informe dès le début de la garde à vue le procureur de la République.
« La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt-quatre heures. Toutefois, lorsque l'infraction est de nature criminelle, la garde à vue peut être prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite du procureur de la République. Ce magistrat peut subordonner cette autorisation à la présentation préalable de la personne gardée à vue.
« Sur instructions du procureur de la République, les personnes à l'encontre desquelles les éléments recueillis sont de nature à motiver l'exercice de poursuites sont, à l'issue de la garde à vue, soit remises en liberté, soit déférées devant ce magistrat.
« Pour l'application du présent article, les ressorts des tribunaux de grande instance de Paris, Nanterre, Bobigny et Créteil constituent un seul et même ressort. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Par cohérence avec les positions que nous avons adoptées précédemment, cet amendement vise à remplacer, dans le cas d'une enquête de flagrance, la notion de « raison plausible de soupçonner » par celle d' « indices graves et concordants ».
En effet, nous voulons revenir aux dispositions qui étaient en vigueur antérieurement à la loi Perben, qui nous paraissent bien meilleures.
Cet amendement fait partie de toute une série d'amendements, que nous ne découvrons pas, d'ailleurs. Aussi respectables soient-ils, je vous réponds chaque fois que la commission estime qu'il n'est pas souhaitable de revenir sur l'équilibre actuel des textes
Nous nous sommes prononcés sur ce cas particulier de la notion d' « indices graves et concordants » par rapport à celle de « raison plausible de soupçonner » pour justifier le placement en garde à vue. Ce sujet ayant été débattu de longues heures, y compris en commission, je ne m'étendrai pas davantage.
La commission émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 98 rectifié, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article 63-1 du code de procédure pénale, après les mots : « de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête » sont insérés les mots : « ainsi que sur les faits qui lui sont imputés. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous demandons que soit inséré un article additionnel avant l'article 6, qui prévoie que l'officier de police judiciaire - ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire - informe la personne gardée à vue non seulement de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête - ce qui peut être extrêmement difficile à comprendre pour un non-juriste -, mais aussi des faits qui lui sont imputés.
Ce n'est tout de même pas une demande excessive ! J'espère donc que le Sénat tout entier votera cet amendement.
La commission ne partage absolument pas votre point de vue, monsieur Dreyfus-Schmidt.
En effet, votre amendement recèle un paradoxe complet : si vous informez la personne gardée à vue sur les faits qui lui sont reprochés, à la limite, vous pouvez vous demander à quoi sert la garde à vue !
Je rappelle que la personne est informée sur la nature de l'infraction, mais non sur les faits.
La commission émet un avis complètement défavorable.
Même avis. Je préfère ne pas m'expliquer...
L'amendement n'est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.