Intervention de Claude Bérit-Débat

Réunion du 17 juin 2010 à 9h30
Débat sur l'optimisation des moyens des collectivités territoriales

Photo de Claude Bérit-DébatClaude Bérit-Débat :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne peux commencer mon intervention sur l’optimisation des moyens des collectivités territoriales sans rappeler les contraintes qui pèsent sur ces collectivités, plus particulièrement sur les intercommunalités, auxquelles je consacrerai l’essentiel de mon propos.

Je rappelle tout d’abord avec force, après un certain nombre d’orateurs, que la suppression de la taxe professionnelle, et donc de la TPU, va se traduire par une diminution des recettes fiscales, notamment pour les communautés d’agglomération – j’en préside une depuis plusieurs années – puisque c’était notre seule recette.

Le dispositif qui la remplace, outre qu’il est moins dynamique, nous éloigne des entreprises et ne nous incite pas à mettre en œuvre des politiques pouvant les attirer.

Par ailleurs, le nouveau dispositif intègre une ligne « fiscalité des ménages », ce qui signifie que ces derniers financeront désormais les opérations menées par les communautés d’agglomération, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent.

Je souhaite également insister sur les contraintes qui affectent l’exercice des compétences des collectivités territoriales. En raison de ces contraintes, les collectivités sont incitées à mutualiser ou à optimiser, deux termes qui n’ont pas la même signification sur le terrain.

Je veux dire un mot du désengagement très fort de l’État. La révision générale des politiques publiques, la RGPP, et la mise en place de mesures telles que le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite conduisent les services, désormais réorganisés, à ne plus disposer de personnel pour accompagner les politiques menées par les collectivités.

Je pense aux services de l’État auxquels nous faisions appel en matière d’urbanisme, notamment pour l’instruction des permis de construire, comme cela a été rappelé tout à l’heure, ou en matière de maîtrise d’ouvrage pour l’assainissement et l’eau. Aujourd’hui, soit ces services n’existent plus, soit les délais d’attente sont tels qu’un certain nombre de communes sont incitées à reprendre ces structures à leur compte.

On nous dit qu’il faut mutualiser. Certes, mais nous le ferons sous la contrainte. De plus, la mise en place d’une nouvelle logistique se traduira obligatoirement par des surcoûts dans la mesure où les services mutualisés étaient auparavant assurés par des fonctionnaires de l’État. Le rapport d’information le souligne : mutualisation ne signifie pas forcément moindre coût ! Les exemples qui l’attestent sont nombreux.

La communauté d’agglomération que je préside, comme beaucoup d’autres intercommunalités, a mutualisé le service des déchets ménagers, auparavant assuré par les communes, et a réengagé le personnel municipal. Cette transformation et la création d’un vrai service de déchets ménagers ont néanmoins pris un certain temps, le personnel ayant d’abord été mis à disposition.

De surcroît, nous avons dû procéder à des mises à niveau de matériels, car un certain nombre de communes, sachant que la compétence allait être mutualisée, n’avaient pas réalisé les investissements nécessaires.

Ensuite, les citoyens ont demandé la mise en place de services supplémentaires. Nous sommes ainsi passés d’une collecte simple de déchets ménagers à une collecte sélective des déchets recyclables, puis à une collecte sélective des déchets verts, puis à la mise en place de déchetteries. La prise de compétence, qui constitue, comme l’a fort bien indiqué M. Mézard, l’aboutissement ultime de la mutualisation, ne s’est absolument pas traduite par des économies d’échelle ; elle a au contraire entraîné des surcoûts, même si aujourd’hui nous avons réussi à les lisser.

Il faut donc le dire haut et fort : d’une part, le contexte est extrêmement contraint, en grande partie en raison de la politique menée par le Gouvernement aujourd’hui ; d’autre part, la mutualisation n’engendre pas forcément une réduction des coûts.

Je remercie les rapporteurs – Alain Lambert, Yves Détraigne, Jacques Mézard, Bruno Sido – de leur travail, ainsi qu’Edmond Hervé, qui a enrichi cette réflexion par sa parfaite connaissance de l’intercommunalité et des systèmes de péréquation et de mutualisation, même s’il n’est pas cosignataire du rapport d’information. Un certain nombre de propositions qui figurent dans le rapport sont intéressantes. Pourront-elles être mises en œuvre au regard des contraintes que j’ai précédemment signalées ?

Ainsi que l’a demandé M. Lambert, il faut mettre l’accent sur la sécurisation juridique, particulièrement en ce qui concerne la mutualisation ascendante. Prenons le cas de ma communauté d’agglomération : compétente pour l’aménagement des bords d’une rivière, l’Isle, elle a installé le long des berges des pistes cyclables et des jardins. Bien qu’elle n’ait pas la compétence voirie, elle est chargée de l’entretien des pistes cyclables et piétonnes, ainsi que des jardins. La communauté d’agglomération a confié l’entretien de ces espaces, notamment le balayage de la piste verte et de la voie cyclable, aux communes qui ont leurs propres services d’entretien : toutefois, le procédé n’est pas tout à fait légal.

Monsieur le secrétaire d'État, si je ne devais formuler qu’une seule demande concernant le projet de loi en cours d’examen, c’est qu’il offre une sécurité juridique à la mutualisation ascendante. Nous sommes tous à peu près d’accord sur la mutualisation descendante, pour laquelle nous trouvons des solutions, mais la mutualisation ascendante pose problème.

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