Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce n’est pas la première fois que nous abordons le sujet dramatique des violences au sein des couples, en particulier celles qui sont faites aux femmes. De nombreux textes ayant pour objet la prévention et la lutte contre ce fléau social existent déjà dans le droit français.
Pourtant, force est de constater que de grands progrès restent à faire dans notre pays en matière de prévention. Les études menées ne laissent pas franchement place à l’optimisme. Voilà dix ans, déjà, selon l’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France, 10 % des femmes étaient victimes de violences physiques, sexuelles ou psychologiques au sein de leur couple, soit près de 1, 3 million de femmes de tous âges et de toutes situations matrimoniales.
En 2008, 157 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint dans notre pays, ce qui représente un décès tous les deux ou trois jours. Ces chiffres, qui sont insoutenables, ne dévoilent malheureusement que la partie visible de l’iceberg des violences subies par les femmes du fait de leur sexe.
L’acquisition de données précises relève d’un exercice très complexe. Ces violences ont en effet lieu à huis clos, au cœur du foyer familial. Le plus souvent, elles ne font malheureusement pas l’objet de plaintes auprès des services de police ou de gendarmerie. Elles sont protéiformes et touchent les femmes dans leur intégrité physique et dans leur liberté, y compris financière.
Moins de 9 % des femmes victimes de violences conjugales porteraient plainte, ce qui représente un quart de l’ensemble des faits de violences volontaires. Ces actes restent donc un sujet tabou et indigne, d’une ampleur considérable.
L’Observatoire national de la délinquance a mené, en 2007 et en 2008, deux enquêtes sur les victimes, qui nous donnent davantage de précisions : 4, 9 % des femmes et 4, 7 % des hommes de dix-huit à soixante ans déclarent avoir subi au moins un acte de violence physique sur cette période de deux ans. Mais la nature et la répercussion de ces actes sont différentes. Parmi les 870 000 femmes victimes de violences physiques, 60 % les subissent dans le cadre de leur foyer, tandis que 66 % des hommes victimes de telles violences les ont subies en dehors de leur foyer. Il y a donc bien une spécificité de la violence au sein des couples ; elle est transversale, repose sur les rapports de pouvoir et sur les rapports sociaux relatifs au genre.
Pour autant, nous ne devons pas passer sous silence d’autres formes de violences à l’égard des femmes : les violences dans l’espace public, les violences au travail et les violences coutumières. Je pense notamment au mariage forcé et aux mutilations sexuelles.
Notre devoir d’élus de la République est d’aider et de protéger ces femmes, ainsi que leurs enfants, qui sont à la fois les premiers témoins et les victimes, directes ou indirectes, de ces violences.
Nous avons la responsabilité d’améliorer, encore et toujours, l’arsenal juridique existant afin d’accroître la réactivité et de renforcer l’efficacité non seulement des dispositifs d’accueil, de soin, d’hébergement et de réinsertion sociale destinés aux victimes, mais aussi des systèmes de prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique des auteurs de violences. L’un ne va pas sans l’autre : il faut garantir à la fois l’éviction du conjoint violent et la protection de la victime, l’accès de cette dernière à la justice, son droit à une aide financière immédiate ou encore à un logement. Il y va du respect de notre pacte républicain, qui repose notamment sur le principe de l’égalité des droits entre tous les citoyens, quel que soit leur sexe. La société tout entière en ressortira grandie.
La proposition de loi soumise à notre examen va dans ce sens. Son auteur, notre collègue Roland Courteau, est à l’origine de l’adoption, en 2006, de la loi renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. Je tiens à saluer ici son engagement, efficace et persévérant, au service de la défense du droit des femmes.