Intervention de Gérard Delfau

Réunion du 12 avril 2006 à 15h00
Crise de la filière viticole française — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Gérard DelfauGérard Delfau :

... et, malgré les promesses qui m'avaient été faites, les conditions d'accès sont tellement restrictives que le nombre de dossiers éligibles risque de rester inférieur à ce qui est souhaitable.

Autre question : l'argent sera-t-il mobilisé en temps et en heure pour financer toutes les mesures de court terme d'aides à la trésorerie et aux exploitations en difficulté, par exemple ?

Nous avons vécu l'incompréhensible retard des versements concernant la reconversion qualitative différée, la RQD, jusqu'à l'avance faite récemment sur le budget de l'État. Il faut, monsieur le ministre, éviter à tout prix que ne se reproduisent ces errements, quels qu'en soient les responsables ! Car, au final, que penseraient les vignerons et les élus s'il s'avérait, au début de 2007, que les financements annoncés aujourd'hui n'ont pas été mis en oeuvre malgré l'urgence des situations individuelles et collectives ?

Pour ce qui concerne le moyen terme, nous sommes dans une plus grande incertitude encore. Qu'allez-vous retenir du rapport Pomel, base de travail intéressante, même si certaines orientations sont contestables, et du rapport transmis par le préfet de région du Languedoc-Roussillon, au terme d'une longue écoute des acteurs professionnels et des élus ? L'idée d'une interprofession unique, dans les régions qui n'en possèdent pas, chemine, et c'est tant mieux ! Comment pensez-vous encourager cette évolution ?

S'agissant de l'entité « comité de bassin de production », désormais unanimement admise, quels seront ses compétences et son pouvoir d'autodiscipline ? Aura-t-elle une base juridique ?

Au niveau national, à quand la mise en place effective du conseil de modération et de prévention ? Comment allez-vous composer le conseil national de la viticulture ? Sera-t-il représentatif ? Sera-t-il pluraliste ? La filière viticole a besoin de toutes ses composantes, y compris de la plus anciennement organisée et qui reste la plus puissante : la coopération.

Au coeur de ces débats, une inconnue demeure : où seront assurés les arbitrages parfois douloureux qu'impose, à tout moment, l'évolution d'une viticulture insérée sur le marché mondial ? Quelles orientations, de surcroît, seront retenues par l'Europe ? La France y aura-t-elle toute sa place, la première encore ?

À ce propos, une question encore secondaire, mais importante et qu'il faudra traiter, se pose : comment réaffecter le foncier vendu rendu vacant par l'arrachage définitif ? Je constate que le plan « biocarburants » fait l'objet d'une mise en cause par le lobby pétrolier qui, malgré des profits considérables, cherche à retarder encore cette réorientation nécessaire et si conforme à l'intérêt général.

Le Languedoc-Roussillon aura-t-il accès aux crédits européens qui conditionnent la viabilité économique de ces productions qui, sur la base du volontariat, donneraient une nouvelle chance à des terres vouées à la jachère ou, pire, à l'urbanisation mal contrôlée ?

Pour conclure, je tiens à vous redire, monsieur le ministre, à quel point m'inquiète le découragement des acteurs de la filière viticole en Languedoc-Roussillon. Vous devez en prendre acte aujourd'hui, car la réussite économique, c'est d'abord une question de psychologie. Comment rebondir si le ressort est cassé ? Comment reconquérir le marché mondial si la volonté collective - et pas seulement dans notre région - fait défaut ?

Il vous appartient, à vous qui représentez le gouvernement de la France, d'effacer les incertitudes, de répondre aux interrogations et d'annoncer une initiative forte, spectaculaire même, pour rassembler la profession. Vous avez fait un premier pas dont nous vous donnons acte volontiers mais, dans le même temps, des vignerons meurent en silence, des collectivités locales sont frappées au coeur, une structuration ancienne de la profession est en voie d'effondrement.

Rassemblons nos efforts et redonnons une chance à la viticulture française, comme nous l'avions souhaité lors de la présentation du rapport devant le Sénat.

Pour cela, il faut un engagement plus net, plus volontariste du Gouvernement. Nous espérons, monsieur le ministre, que vous-même et, au-delà, M. le Premier ministre, saurez très vite donner ce signal.

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