Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'actualité du CPE a relégué au second plan le délicat dossier des conséquences de la grippe aviaire sur la filière avicole.
Pour autant, même si les feux de l'actualité se sont éteints, les problèmes demeurent. Ils touchent de nombreuses familles dans l'ensemble de la filière, de l'accouveur au transporteur en passant par les éleveurs, les industries agroalimentaires et leurs salariés. Voilà un mois, j'interrogeais le Gouvernement lors d'une question d'actualité.
Quelques jours auparavant, monsieur le ministre, je vous avais saisi par courrier. Vous le savez, je suis maire de la commune de Châteaulin, dans le Finistère, commune où se trouvent le siège social et le premier site industriel du groupe Doux-Père Dodu, leader européen pour l'exportation de volailles. Je vis donc au quotidien la situation de chômage partiel imposée aux salariés par la crise et les difficultés des agriculteurs et de l'entreprise.
Je souhaite revenir sur les divers problèmes soulevés.
Je traiterai tout d'abord du chômage partiel et de ses conséquences pour les salariés de l'entreprise.
À l'heure actuelle, ces salariés travaillent en 1 x 8 au lieu des 2 x 8 habituels. Certains salariés que j'ai rencontrés la semaine dernière m'ont affirmé que leur salaire de mars avait été amputé de 150 euros. Je rappelle qu'il s'agit, dans la grande majorité des cas, de petits salaires - SMIC ou légèrement au-dessus -, auxquels s'ajoutent des primes.
Or, malgré les affirmations de M. Loos lors de sa réponse à ma question le 9 mars dernier, les salaires ne sont pas entièrement compensés.
Monsieur le ministre, vous avez longuement répondu à mon courrier, et dans des délais brefs, ce dont je vous sais gré. Vous aussi avez affirmé ceci : « par ailleurs, en accord avec les représentants de l'industrie avicole, les mesures d'indemnisation de chômage partiel ont été assouplies et une nouvelle instruction permettra dans les tout prochains jours une indemnisation du coût total de chômage partiel ». Pouvez-vous me rassurer sur ce point ?
J'en viens aux conséquences de la crise pour les sous-traitants.
Je pense, en tout premier lieu, aux transporteurs. À ma connaissance, et selon les informations données par les personnes concernées que j'ai rencontrées récemment, les entreprises de sous-traitance semblent être ignorées de ce dispositif. La perte de salaire pourrait aller jusqu'à 50 %, en tenant compte de la perte des primes ; celles-ci sont en effet significatives pour de nombreux postes de travail, les chauffeurs par exemple. Cela est également le cas pour les ramasseurs de volailles dans les élevages ; la chambre d'agriculture du Finistère, dans la presse d'aujourd'hui, dénonce cet « oubli ».
Le dispositif spécifique dont vous parlez dans votre courrier - enveloppe de 30 millions d'euros, mesures fiscales, indemnisations spécifiques pour les entreprises d'exportation -peut-il s'appliquer aux sous-traitants ? Je pense, en outre, à d'autres sous-traitants concernés, comme les fabricants de cartonnages notamment.
J'en viens à la destruction des stocks, qui est largement entamée. Je trouve choquant, je le rappelle, de détruire des produits sains et tout à fait consommables qui permettraient de nourrir des personnes en situation de désarroi. Pourquoi n'a-t-on pas accordé des aides nationales et européennes plutôt que d'aider à la destruction et à la transformation de ces produits en farines ? Celles-ci ont une valeur marchande et seront probablement commercialisées.
L'État exerce-t-il un contrôle à cet égard, et lequel ? Ces dispositions impliquent-elles des obligations pour l'entreprise concernant notamment les mesures de soutien au revenu des salariés ?
S'agissant des craintes sur l'avenir de la filière avicole à l'export, la crise révèle le caractère structurel des difficultés de la filière. Aujourd'hui, si les marchés du Moyen-Orient se ferment, la filière se trouve en grand danger, voire en situation de cessation d'activité. Vous assurez, monsieur le ministre, que le Gouvernement met tout en oeuvre pour obtenir la levée des embargos.
Je n'ai aucune raison de ne pas vous croire, mais je voudrais savoir où en est le projet de régionalisation des marchés. La Bretagne, comme d'autres régions, est épargnée. Comment le Gouvernement envisage-t-il de soutenir la reprise des exportations au départ de ces régions ? Connaît-on les délais sous lesquels ce principe pourra être mis en oeuvre ?
Monsieur le ministre, vous avez présenté le 20 mars au Conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne un mémorandum français pour autoriser la mise en oeuvre de mesures structurelles de gestion de la crise avicole. Pouvez-vous préciser ce qu'il faut en attendre, pour quand, et qui en seront les bénéficiaires ?
Enfin, fait surprenant et incompréhensible s'il était confirmé, on m'a indiqué que des mesures d'embargo auraient été prises sous couvert de l'administration française pour fermer les marchés des DOM-TOM, de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie notamment, au poulet produit en métropole. Pouvez-vous nous préciser ce qu'il en est réellement ?
S'agissant de la formation et de la qualification des salariés, il faut les favoriser.
Face au caractère structurel de la crise, les inquiétudes des salariés sont grandes. Ces derniers expriment en effet un besoin en formation dans la perspective d'un reclassement à terme dans un autre secteur d'activité ou de l'acquisition d'une qualification nouvelle, et cela en vue d'accompagner l'évolution de l'entreprise.
Les attentes en termes de formation vont du bilan de compétences en passant par le renforcement du niveau de culture générale, à l'acquisition de techniques et de qualifications. Des outils, des centres de formation existent. Des secteurs, l'agriculture par exemple, proposent des emplois et peinent à satisfaire les offres des employeurs. Le conseil régional de Bretagne a affirmé son accord pour soutenir tout effort de formation des salariés dans le contexte actuel.
Puisque les moyens de former existent et que les salariés cherchent à se former, envisage-t-on de faciliter la mise en oeuvre de formations ?
Dans le même esprit, la plus grande vigilance est de mise face à la fragilité de la filière. Il faut donc se donner les moyens d'une veille permanente et d'une recherche prospective de nouvelles filières et de nouveaux métiers à promouvoir.
Comment se positionne l'État dans ce contexte ? Est-il prêt, et comment, à accompagner des initiatives dans ces domaines ?
Une délibération de la chambre d'agriculture du Finistère qui m'est parvenue aujourd'hui dénonce vivement l'inadéquation des moyens débloqués par rapport au sinistre réel subi par la filière. Dans le Finistère, l'enveloppe ne couvrirait que 40 % des pertes économiques réelles !
Monsieur le ministre, seriez-vous prêt à faire un effort supplémentaire et à prendre toute la mesure de la crise structurelle ? En effet, au-delà des effets d'une conjoncture défavorable, la filière avicole française est en grand danger.