Intervention de Jacques Legendre

Réunion du 25 mars 2008 à 10h00
Questions orales — Classes préparatoires aux grandes écoles

Photo de Jacques LegendreJacques Legendre :

Madame la ministre, M. le ministre de l'éducation nationale a annoncé à la fin du mois de janvier dernier la parution d'une circulaire invitant les chefs d'établissement, notamment ceux des lycées situés en zones sensibles, à présenter de manière systématique en classes préparatoires 5 % de leurs élèves les plus méritants des filières générales et technologiques et 8 % de ces élèves des seules filières générales. Toute demande formulée par eux sera automatiquement acceptée. Ceux qui sont issus des milieux défavorisés bénéficieront de mesures d'accompagnement personnalisé, notamment d'une priorité d'accès aux internats et logements étudiants.

Ces mesures s'inscrivent d'ailleurs également dans le cadre du plan « Espoir banlieues », présenté par Mme Fadela Amara.

Dans le même temps, vous avez déclaré, madame la ministre, vouloir généraliser les partenariats entre grandes écoles et classes préparatoires de banlieues.

Je me réjouis de la volonté ainsi exprimée par le Gouvernement d'élargir la base sociale de recrutement des étudiants dans ces filières sélectives. Cela va dans le sens des conclusions formulées par la mission d'information sénatoriale portant sur la diversité sociale et l'égalité des chances dans la composition des classes préparatoires aux grandes écoles, que j'ai présidée et dont notre collègue Yannick Bodin était le rapporteur. Nous étions d'ailleurs venus tous les deux en septembre dernier les présenter à M. Darcos et à vous-même.

Nous avons formulé un certain nombre de propositions dans ce rapport, afin de mettre un terme à une forme de « délit d'initié » qui conduit à une autoreproduction des élites de notre pays.

Lever l'autocensure, en remettant à plat notre dispositif d'information et d'orientation, développer le tutorat, renforcer l'offre d'internat et les bourses pour les élèves qui se destinent à ces filières d'excellence sont quelques-unes des principales mesures que nous appelons de nos voeux pour lutter contre cet état de fait.

En effet, en dépit des progrès remarquables de la démocratisation de l'enseignement supérieur au cours des dernières décennies, nous constatons encore une surreprésentation des élèves issus des milieux favorisés dans les classes prépas ; ainsi, un enfant d'enseignant ou de cadre supérieur a toujours vingt fois plus de chances d'entrer dans une grande école qu'un enfant d'ouvrier. Cette situation n'est satisfaisante ni pour les jeunes concernés, ni pour les grandes écoles, ni pour les entreprises, ni pour les pouvoirs publics : chacun en prend peu à peu conscience et de nombreuses initiatives ont vu le jour ces dernières années.

Si je partage donc l'ambition clairement affirmée par le Gouvernement, il me semble toutefois que d'autres mesures, complémentaires à celles qui sont annoncées ou déjà mises en oeuvre, s'imposent.

J'insiste en particulier sur l'urgence de revoir l'implantation de l'offre de classes prépas, notamment en faveur des zones rurales et des banlieues, afin de restaurer l'équité territoriale. Madame la ministre, je vous ai récemment alertée, ainsi que M. Darcos, à propos des inquiétudes suscitées sur le terrain par les annonces tendant à limiter les effectifs dans certaines classes « de proximité » ou à supprimer des sections. Or ce maillage participe également à l'objectif de diversification sociale des classes prépas : il serait dommageable que les décisions prises par les recteurs aillent à l'encontre des ambitions fixées au niveau national.

Pouvez-vous donc nous éclairer sur les perspectives concernant l'évolution de la cartographie des classes prépas ?

Qu'en est-il, par ailleurs, du développement de l'offre d'internats ou de logements étudiants dédiés à ces élèves ? Des améliorations sont-elles en cours ou des réflexions sont-elles engagées afin de résorber la pénurie constatée dans ce domaine et qui constitue un frein à la poursuite d'études dans ce type de classes.

Enfin, où en est l'évaluation globale des initiatives et expérimentations de tutorat mises en oeuvre ces dernières années par un nombre important de grandes écoles ? Quels en sont les principaux enseignements ? Le cas échéant, quels éléments serait-il souhaitable d'élargir à un plus grand nombre d'élèves, voire de généraliser ?

Telles sont, madame la ministre, les questions qui nous importent, en particulier à M. Bodin et à moi-même, et sur lesquelles je vous remercie de nous apporter des précisions.

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