Intervention de Valérie Pécresse

Réunion du 25 mars 2008 à 10h00
Questions orales — Classes préparatoires aux grandes écoles

Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche :

Monsieur Legendre, M. Bodin étant également présent ce matin, permettez-moi tout d'abord de saluer la qualité du rapport que vous m'avez tous les deux remis et qui est consacré à la question décisive de la diversité dans les classes préparatoires aux grandes écoles, les CPGE. Il constitue pour moi une source d'inspiration extrêmement riche pour conduire la politique d'ouverture sociale de nos classes préparatoires telle que l'a souhaitée le Président de la République.

L'action que mène mon ministère en ce domaine, en liaison évidemment très étroite avec le ministre de l'éducation nationale, Xavier Darcos, est guidée par un objectif précis : recruter un plus grand nombre d'étudiants boursiers en classes préparatoires et pourvoir les places disponibles dans nos établissements. Je souhaite faire passer la proportion des étudiants boursiers dans ces classes de 22 % actuellement à 30 %, en accueillant plus d'élèves issus des lycées généraux.

Quels dispositifs mettons-nous en place pour parvenir à un tel objectif ?

Tout d'abord, il faut mieux informer les élèves de tous les lycées et leurs familles sur la richesse et la diversité de notre système d'enseignement supérieur, en s'appuyant sur le mécanisme d'orientation active dans lequel les classes préparatoires sont parfaitement intégrées. Il s'agit de leur apporter une information à la fois claire et « dédramatisée » sur ce que sont les classes préparatoires, conformément à la proposition formulée dans votre rapport.

Il faut aussi dédramatiser la classe préparatoire, qui, méconnue, inquiète parfois les familles les plus modestes, avec la perspective d'études longues et sans débouchés immédiatement visibles.

Pour répondre à ces inquiétudes, nous souhaitons sécuriser les parcours. C'est l'objet de la circulaire d'application du décret du 3 mai 2007 instaurant la grille nationale d'équivalence et l'attestation du diplôme pour les élèves de CPGE. Concrètement, chaque élève ayant suivi deux années de classes préparatoires se verra reconnaître les compétences acquises pendant ces années et pourra poursuivre un parcours universitaire.

Par ailleurs, dans la circulaire de rentrée que j'adresserai dans quelques jours aux proviseurs des lycées disposant de classes préparatoires, je leur rappelle l'objectif d'ouverture sociale et la règle du maintien des élèves dans les établissements pendant les deux années de classes préparatoires. En effet, vous le savez, nous constatons une « hémorragie » d'environ 20 % des élèves à la fin de la première année. À l'évidence, ces départs sont plutôt le fait d'élèves en situation sociale défavorable.

Il importe que les classes préparatoires apparaissent non pas comme un tunnel trop long pour les non-initiés, mais comme un parcours lisible et sécurisé pour tous les bacheliers de France intéressés par ces filières.

Comme vous pouvez donc le constater, Xavier Darcos et moi-même travaillons activement à la mise en oeuvre des trois premières propositions formulées dans votre rapport, pour mettre fin à l'autocensure d'un certain nombre d'élèves à l'égard des classes préparatoires. Cette autocensure est d'autant moins compréhensible qu'il y a au bout de cette filière plus de places que de candidats.

Il est, à mes yeux, très clair que la politique d'ouverture sociale de ces classes passe par un volontarisme des recteurs et des proviseurs et qu'elle doit s'accompagner de la garantie de logement pour ces élèves boursiers prioritaires dans les internats de l'éducation nationale.

Mais nous devons aussi multiplier, dans le cadre de l'enseignement supérieur, les conventions avec les CROUS, les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires, pour assurer des places réservées aux élèves de classes préparatoires dans les résidences universitaires, lesquels sont effectivement, au regard de la loi, des étudiants à part entière.

Monsieur le sénateur, dans le prolongement de ce qui constitue la quatrième proposition de votre rapport, vous vous interrogez sur la question de l'ouverture de nouvelles classes, pour pallier la pénurie qui affecte certains territoires de banlieues ou ruraux.

Comme vous le savez, 21 départements ne comptent aucune classe préparatoire. Or, dans le même temps, environ 4 000 places de classes préparatoires et près de 8 000 places dans nos écoles post-classes prépas sont vacantes. Les recteurs sont donc soumis à une logique d'offre et de demande qu'ils doivent intégrer dans leur réflexion globale.

Cela étant dit, c'est en effet le ministère de l'enseignement supérieur qui a la maîtrise de l'offre globale de formation et qui doit veiller à ce que l'équité de traitement de nos élèves soit garantie face à l'offre de formation en classes préparatoires.

Pour répondre à votre question, je voudrais souligner qu'aucun lycée des 21 départements concernés ne se situe au-dessous de la barre des 5 % d'élèves rejoignant une classe préparatoire, qui constitue l'objectif que nous a assigné le Président de la République. Par conséquent, l'éloignement géographique n'est pas, aujourd'hui, un obstacle au désir d'intégrer une classe préparatoire.

Bien sûr, dans ce domaine, la proximité est « facilitatrice » et mes services sont tout à fait disponibles pour examiner les dossiers d'ouverture sur tout lieu du territoire lorsque celle-ci se justifie. C'est dans cet esprit que je me placerai.

Pour répondre plus précisément encore à la question, je tiens à souligner que, pour les 222 établissements situés dans les 21 départements concernés, le pourcentage d'élèves qui demandent une classe préparatoire est d'environ 10 %, soit le double des 5 % fixés comme seuil de référence. Seuls quatre lycées publics à dominante voie générale sont au-dessous de ce seuil.

En tout état de cause, l'entrée dans la vie adulte doit être un moment d'ouverture sociale et culturelle, qui peut aussi s'appuyer sur un éloignement du quartier d'origine. C'est pourquoi je souhaite multiplier les partenariats entre les établissements.

Ces partenariats associent des lycées de centre-ville ayant une CPGE et des lycées de banlieues, à l'image des démarches mises en place par les lycées Saint-Louis de Paris et Kléber de Strasbourg. Mais ils associent aussi certaines grandes écoles et des lycées ayant des classes prépas, comme c'est le cas pour HEC et le lycée Olympe-de-Gouges de Noisy-le-Sec ou pour l'École supérieure de Troyes avec les lycées Couperin de Fontainebleau et Malraux de Montereau-Fault-Yonne.

La réalisation de ces réseaux de solidarité et de réussite entre lycées et grandes écoles est pour moi le gage d'un accès facilité de tous les élèves vers les classes préparatoires. C'est en resserrant ce lien scolaire que l'on retissera du lien social.

Cela n'exclut évidemment pas un travail fin sur les sites non pourvus de classes prépas. J'ai ainsi demandé à mes services d'être particulièrement attentifs à cette question.

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