Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 25 mars 2008 à 10h00
Questions orales — Situation dans les établissements pénitentiaires pour mineurs

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Madame la ministre, notre pays compte cinq établissements pénitentiaires pour mineurs, ou EPM, dans lesquels se trouvent 170 des quelque 800 mineurs actuellement incarcérés. Avec la nouvelle loi pénitentiaire, trois nouveaux établissements pénitentiaires pour mineurs devraient voir le jour, dont celui de Porcheville qui ouvrira ses portes le 20 avril prochain.

Or, un événement dramatique est survenu voilà quelques semaines : un jeune homme âgé de seize ans, incarcéré à l'EPM de Meyzieu, dans le Rhône, a mis fin à ses jours ; il avait déjà tenté de se suicider quelque temps auparavant.

Face à ce drame, vous avez déclaré ceci, madame la ministre : « Cela ne remet pas en cause ces établissements. » Parlant ainsi, vous vous placez dans la droite ligne de vos prédécesseurs qui, tout comme vous, ont vanté la création de ces établissements.

Aux dires de votre majorité, les EPM, dotés d'un nombre important de personnels éducatifs et pénitentiaires, offrant des activités permanentes et obligatoires, disposant de locaux modernes et d'une organisation de vie collective calquée sur celle qui se mène dans les foyers éducatifs, devaient quasiment faire oublier aux jeunes la réalité de leur incarcération. Or, il n'en est rien.

Différentes alertes vous ont été adressées par les personnels de ces établissements. Elles concernent, d'abord, les manques d'effectifs en personnels, tant en personnel pénitentiaire qu'en personnel de la protection judiciaire de la jeunesse, ensuite, l'écart constaté entre, d'une part, vos discours et ceux de vos prédécesseurs et, d'autre part, la réalité à laquelle les personnels sont confrontés au quotidien, enfin, les ambiguïtés ou les paradoxes qu'il serait temps de prendre en compte.

Contrairement aux dires de votre prédécesseur, M. Pascal Clément, les EPM ne sont pas des lycées entourés de murs. Non, les EPM ne sont ni des foyers ni de simples classes de lycées entourés de murs ! Loin d'être des lieux adaptés aux nouvelles formes de délinquance, ce sont des lieux d'enfermement, des prisons pour mineurs, avec tout ce que cela peut produire ou amplifier dans le comportement de ces derniers.

Ainsi, comment ne pas évoquer la déjà trop longue liste d'incidents qui vont des insultes aux actes de violence, en passant par les tentatives d'incendie et les évasions ?

Cette réalité, dégradée par des moyens et des effectifs notoirement insuffisants, a découragé nombre de personnels. Certains ont déjà démissionné, d'autres souhaitent être mutés.

Bien évidemment, nous sommes convaincus que chaque acte de délinquance doit recevoir une réponse adaptée et proportionnée, qui ne peut être la systématisation de l'enfermement. La prison - c'est bien ainsi qu'il convient d'appeler les EPM - ne saurait constituer la seule réponse éducative à donner à des adolescents qui, lorsqu'ils commettent des actes de délinquance, se mettent eux-mêmes en danger, comme ils peuvent mettre en danger chacun d'entre nous.

La prison, nous le savons tous, est une réponse tragiquement inadaptée pour les mineurs. Elle ne permet pas à elle seule la mise en oeuvre de mesures éducatives. De plus, l'enfermement peut accentuer de manière dramatique les troubles du comportement et ne constitue en aucun cas un remède efficace contre la récidive.

Forte de ce constat et considérant que tout détenu est voué à retrouver la société des femmes et des hommes libres, je vous demande quelles dispositions vous comptez prendre pour qu'une véritable réflexion sur les EPM, leur finalité, leur fonctionnement et leur devenir soit rapidement menée.

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