Intervention de Roland Courteau

Réunion du 23 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Article 13, amendements 170 1 7

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Monsieur le ministre, nous avons eu depuis le début de l'examen du projet de loi de nombreuses discussions de fond sur la question des tarifs et des prix. Nous avons exprimé nos inquiétudes quant à la possible disparition, à terme, des tarifs réglementés.

Nous savons que les convergences recherchées entre tarifs réglementés et prix créeront des tensions sur les tarifs réglementés, tensions dont feront les frais les consommateurs, surtout les ménages, qui ne sont pas forcément bien informés. Vous le savez bien, monsieur le ministre, vous qui avez signé le contrat de service public entre Gaz de France et l'État qui permet précisément une telle convergence. Je n'y reviens pas davantage.

Voilà deux semaines que, jusqu'à des heures avancées de la nuit, nous défendons dans cet hémicycle le service public de l'énergie en insistant sur les dangers que représente pour les consommateurs la privatisation de Gaz de France.

Nous savons que le nouveau groupe privé cherchera à accélérer cette convergence pour assouvir l'appétit des actionnaires. Car vous ne pouvez nier qu'aujourd'hui les dividendes réclamés par les actionnaires privés atteignent des niveaux records, niveaux qui, soit dit en passant, selon quelques économistes patentés, remettent en cause le fonctionnement même du capitalisme. Cette ponction est donc, en soi, problématique.

L'une de ses conséquences sera la hausse des tarifs régulés appliqués aux petits consommateurs, laquelle, indirectement, entraînera la baisse du pouvoir d'achat des ménages par le gonflement de leur facture énergétique. Cela n'est pas bon non plus, monsieur le ministre, pour la croissance économique !

Nous avons formulé des propositions alternatives, comme celle tendant à créer un pôle public de l'énergie autour d'EDF et de Gaz de France. Une telle solution serait à l'évidence plus protectrice pour les consommateurs que la privatisation de Gaz de France, car la priorité de l'entreprise sera alors la recherche de la plus grande rentabilité possible.

Après le sommet de Barcelone, vous avez décidé d'ouvrir le marché de l'électricité et du gaz, y compris pour les particuliers, alors que cette ouverture allait à l'évidence être désastreuse pour l'ensemble des ménages. Aujourd'hui, sous couvert de patriotisme économique, vous voulez privatiser Gaz de France. C'est encore sous couvert de patriotisme économique que vous créez un tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché, compensé presque intégralement par les surplus de la CSPE, la contribution au service public de l'électricité, et par la contribution de l'opérateur historique ! Autant reconnaître que l'article 13, qui est censé protéger le consommateur, est quasiment dérisoire compte tenu de l'avenir que vos mesures préparent aux consommateurs.

Monsieur le rapporteur, vous faites référence dans votre rapport au cinquième point de l'article 3 de la directive 2003/54/CE, relatif au service universel destiné à protéger les consommateurs les plus vulnérables. Si ceux-ci risquent d'être les premiers à souffrir de la libéralisation de ce secteur, dont l'ensemble de l'actuelle majorité porte l'entière responsabilité, je crois que l'ensemble des classes moyennes en pâtira également.

Or le troisième point de ce même article 3 de la directive précise : « Les États membres veillent à ce que tous les clients résidentiels et, lorsqu'ils le jugent approprié, les petites entreprises [...] bénéficient du service universel, c'est-à-dire du droit d'être approvisionnés, sur leur territoire, en électricité d'une qualité bien définie, et ce à des prix raisonnables, aisément et clairement comparables et transparents. » Eu égard aux éléments que je viens de rappeler, je ne crois pas que l'article 13 du projet de loi remplisse ces conditions ni qu'il soit suffisamment protecteur.

Par exemple, et nous aurons l'occasion d'y revenir lorsque nous défendrons l'amendement n° 170, les évolutions tarifaires prévisionnelles, c'est-à-dire celles que le fournisseur a l'intention de pratiquer à l'avenir, devraient être précisées dans le contrat. En ce qui concerne l'électricité, le contrat de service public les prévoit bien, monsieur le ministre, puisque l'évolution est calée sur l'inflation, soit 1, 7 % ; quant au gaz, la convergence entre tarif régulé et prix est programmée !

Tels sont les éléments que, d'entrée de jeu, je voulais livrer sur l'article 13, dont le contenu est bien décevant, à nos yeux, en regard des risques qui menacent les consommateurs.

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