Intervention de Pascal Clément

Réunion du 17 mai 2006 à 15h00
Réforme des successions et des libéralités — Article 2, amendement 157

Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice :

L'amendement n° 157 tend à instaurer à l'échelon national une nouvelle règle de majorité pour l'adoption des mesures d'administration opérées dans le domaine de l'indivision.

Actuellement - et tout le monde le sait parce que cela bloque un certain nombre de patrimoines - tout acte d'administration en la matière requiert l'unanimité. Le projet de loi prévoit une majorité qualifiée des deux tiers, ce qui constitue déjà un progrès considérable et une réelle évolution par rapport à la règle actuelle, qui date de près de deux siècles. Monsieur Larcher, vous proposez de retenir la majorité simple, pensant que cette mesure pourrait permettre de régler plus facilement un certain nombre de situations, en particulier dans les départements d'outre-mer.

Avec la modification prévue dans le projet de loi, dans une famille de huit enfants, il faudra que six enfants sur huit soient d'accord pour qu'un acte d'administration puisse être effectué. Dans une famille de six enfants, le consentement de quatre d'entre eux sur les six sera nécessaire. Si on allait au-delà, on risquerait d'aboutir à une spoliation. Ce serait finalement le droit de propriété qui serait en cause.

Il me semble sage, dans un premier temps, de retenir la majorité des deux tiers pour, dans un second temps, tirer les conséquences de cette mesure.

Les auteurs de l'amendement n° 118 rectifié, quant à eux, ne voudraient régler le problème que pour l'île de beauté.

À l'appui de sa démonstration, M. Alfonsi a évoqué une décision du Conseil constitutionnel relative au principe d'égalité. S'il est vrai qu'à l'échelon régional l'application de ce principe peut conduire à certains tempéraments, je serais étonné qu'un tel traitement puisse concerner le droit de propriété.

En revanche, je ne méconnais pas la difficulté de l'indivision en Corse, qui est le droit commun de la propriété. Ce problème est aussi ancien que spécifiquement corse. C'est pourquoi je m'étais engagé dans cette enceinte à ce que le Gouvernement mette en place un GIP ayant pour mission de reconstituer les titres de propriété. Cet engagement a été tenu puisque ce GIP est actuellement mis en place, et je pense, qu'ultérieurement, monsieur le sénateur, vous pourrez constater à quel point la majorité des deux tiers que tend à instaurer le projet de loi est opportune.

Aujourd'hui, il ne s'agit pas de cumuler les problèmes. Si la majorité simple était retenue, imaginez quelles en seraient les conséquences dans les familles corses ! Vous ne rendriez pas service à l'île de beauté en adoptant une telle disposition.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 157 et 118 rectifié.

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