Intervention de Catherine Troendle

Réunion du 17 mai 2006 à 15h00
Réforme des successions et des libéralités — Article 21 bis

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle :

L'article 21 bis tend à insérer dans le code civil un nouvel article 515-3-1 ayant pour objet de préciser qu'il sera dorénavant fait mention, le cas échéant, de la déclaration d'un PACS en marge de l'acte de naissance de tout partenaire d'un tel pacte.

Si nous comprenons parfaitement les raisons pratiques qui ont présidé à la rédaction de cet article, nous n'en partageons pas pour autant les conclusions.

En effet, quelles que soient les raisons de cette proposition d'inscription, il n'en demeure pas moins qu'elle s'oppose à la volonté à la fois du législateur de 1999 et du juge constitutionnel. Lors de l'examen du projet de loi relatif au PACS, en 1998 et 1999, Gouvernement, Assemblée nationale et Sénat s'étaient systématiquement prononcés contre la reconnaissance du PACS en tant qu'acte d'état civil. La déclaration de PACS devait se faire devant le greffe du tribunal d'instance. La partition était simple : le mariage devant le maire, le PACS devant le juge.

À ce titre, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 9 novembre 1999, est d'une limpidité absolue : « La conclusion d'un pacte civil de solidarité ne donne lieu à l'établissement d'aucun acte d'état civil, l'état civil des personnes qui le concluent ne subissant aucune modification. »

Malgré le sage équilibre qui avait été trouvé jusqu'ici, l'Assemblée nationale a souhaité déplacer le curseur en faveur d'un rapprochement ostensible entre le mariage et le PACS, en proposant la disposition susmentionnée.

Certes, l'intention des députés, non plus que celle de notre rapporteur, n'est pas de faire du PACS un « presque-mariage » par un glissement progressif du tribunal vers la mairie. Cette proposition n'a d'autre objet que de répondre à la grande difficulté dans laquelle se trouve l'ensemble des greffes des tribunaux d'instance, qui doivent supporter une charge de travail accrue par la demande annuelle de plus d'un million de documents relatifs à l'existence d'un PACS.

Pourtant, à ce stade, je souhaiterais faire une première observation sur la réticence que nous, élus locaux et représentants constitutionnels des collectivités territoriales, pourrions avoir en la matière. Est-il fondé de déshabiller Paul pour habiller Jacques ? La charge de travail dont on souhaite délester la justice se reportera, à l'once près, sur les mairies. Celles-ci sont-elles vraiment prêtes à supporter cette nouvelle charge, et ce alors même que nombre d'entre nous, dont notre collègue Mme Esther Sittler, luttent pour alléger et simplifier les actes des communes, notamment en matière de déclaration domiciliaire.

Cet argument, associé aux précédents, suffirait à s'opposer à l'adoption d'une telle disposition.

Toutefois, les auteurs de cet amendement entendent les raisons objectives et pratiques qui plaident en faveur de ce glissement vers l'état civil de la mention relative à l'existence d'un PACS.

Pour autant, il n'est pas concevable de rester au milieu du gué.

Soit le PACS figure intégralement sur l'état civil, soit il n'y figure pas. Il n'est pas admissible qu'il puisse être décidé « à la carte » que tel aspect de l'acte de mariage est valorisant et doit donc être étendu au PACS et que, parallèlement, tel autre, est stigmatisant et ne doit donc pas l'être.

Le PACS est un contrat, il n'est pas un mariage « à la carte ». Le partenaire d'un PACS dispose d'un grand nombre d'avantages que la société lui a accordés, et nous nous en félicitons, mais il ne peut s'exonérer de fournir certaines informations.

En somme, soit la mention du PACS n'a rien à faire sur un registre d'état civil - ce que nous serions tentés de penser -, soit il y a sa place. Mais, dans ce cas, rien ne justifie que les informations concernant le partenaire n'y apparaissent pas.

Nous entendons les arguments de la CNIL et de notre rapporteur sur les conséquences que pourrait avoir une telle mention en termes d'homophobie. Nous comprenons qu'il s'agit là de protéger la confidentialité du choix de vie des intéressés. Mais nous ne souscrivons pas à cette analyse.

Nous avons voté des lois pour renforcer la lutte contre les discriminations. Nous avons renforcé les peines encourues pour propos et actes homophobes. Nous avons créé la Haute autorité de lutte contre les discriminations et, récemment, en avons renforcé les pouvoirs. Tout l'arsenal législatif et répressif existe pour éviter, puis sanctionner, le cas échéant, de telles dérives.

En conséquence, il ne nous apparaît pas opportun de déroger au principe de l'article 34 du code civil, selon lequel l'identité de toute personne mentionnée sur l'état civil doit être relevée.

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