Intervention de Nicolas Alfonsi

Réunion du 17 mai 2006 à 15h00
Réforme des successions et des libéralités — Article 26 bis, amendement 123

Photo de Nicolas AlfonsiNicolas Alfonsi :

Mes chers collègues, j'ai constaté ce matin en commission, lors de l'examen de l'amendement n° 123 rectifié présenté par le Gouvernement et visant à créer une agence foncière en Corse, la méconnaissance des règles qui ont présidé au dépôt de cet amendement.

Je remercie le Gouvernement d'avoir pris une telle initiative, qui va dans le bon sens.

Cette initiative s'inscrit dans le droit fil de la loi Jospin de 2002, qui a marqué une évolution législative tout à fait positive, et de la mission qui a été confié l'an dernier à M. Valat, conseiller à la Cour des comptes, à l'action duquel je dois rendre hommage.

En 1983, la commission Badinter s'était attachée à organiser la reconstitution des titres de propriétés. Depuis cette date, 3 500 titres ont été reconstitués.

La raison profonde qui a conduit le Gouvernement à déposer cet amendement tient au régime fiscal extravagant que nous avons connu pendant de très longues années.

L'effort d'aménagement de ce régime, qui a été engagé en 2002, va dans le bon sens. Dans quelques années, la Corse connaîtra enfin une situation de droit commun.

Il faut tordre le coup à quelques idées reçues, ce qui ne signifie pas qu'il faut être hostile à l'amendement n° 123 rectifié et à la création de l'agence foncière.

Ainsi, il ne faut pas croire que toute la Corse est en indivision. En fait, 90 % des biens immobiliers, en raison de leur valeur vénale liée à l'expansion démographique, au développement touristique ou au fait qu'ils sont situés sur la côte, ne sont pas en indivision. Seuls 10 % le sont. Il s'agit des biens situés en Corse profonde, qui n'ont jamais donné lieu à des titres de propriété du fait du défaut de déclaration de succession. Aucune sanction ne frappant ce défaut de déclaration, cette dernière n'était pas considérée comme obligatoire. Il en résulte que, dans la Corse profonde, notamment dans le monde rural, on ne déclarait pas des biens qui avaient en général peu de valeur.

La création de l'agence foncière va permettre de reconstituer petit à petit les titres de propriété et de disposer des moyens matériels pour le faire. En revanche, l'agence ne pourra en aucun cas dire qui est propriétaire de quoi. Dans ces conditions, nous allons bien évidemment dans la bonne direction.

Avant 2002, et je sais que cela peut paraître surréaliste, les Corses ne payaient pas de droits de succession sur leurs biens immobiliers, même s'ils étaient millionnaires. Cela valait également pour les successions en ligne collatérale.

Avec le vote de la loi Jospin, pour les biens acquis avant 2002, les Corses commenceront, au moment du changement des titres de propriété, à payer des droits de succession à partir de 2010 avec la disparition « en sifflet » des exonérations jusqu'en 2015. Ceux qui ont acquis des biens depuis 2002 paient aujourd'hui des droits de succession comme tout le monde. Il faut le répéter, parce que nous vivons dans une grande confusion.

Je conçois bien que nous nous éloignons du droit civil pour nous rapprocher du droit fiscal, mais c'est nécessaire pour comprendre les raisons qui ont conduit le Gouvernement à proposer la création d'une agence foncière en Corse.

Enfin, il est bien évident que les Corses paient des droits de succession sur les biens mobiliers, encore qu'il y aurait beaucoup à dire sur ce sujet, mais je ne m'y attarderai pas.

Je conclurai par deux observations complémentaires.

Sur la forme, il conviendrait, dans le 1° du II de l'amendement n° 123 rectifié, de supprimer les mots « qui est ». La rédaction serait ainsi plus satisfaisante.

Par ailleurs, l'Assemblée de Corse a déclaré qu'elle ne souhaitait en aucun cas que la nouvelle agence foncière soit financée avec les crédits du programme exceptionnel d'investissement, dont ce n'est pas l'objet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion