Intervention de Nicolas About

Réunion du 13 janvier 2010 à 14h30
Accompagnement d'une personne en fin de vie — Discussion d'une proposition de loi

Photo de Nicolas AboutNicolas About :

C’est vrai, la présente proposition de loi fait consensus. Cela a été rappelé, elle a été adoptée à l'unanimité à l’Assemblée nationale après avoir été déposée par quatre députés représentant chacun des groupes politiques la composant. Un tel œcuménisme parlementaire est assez rare et nous ne saurions le remettre en question. Notre commission l’a également adoptée à la quasi-unanimité de ses membres.

Les deux objets du texte justifient cet assentiment. Contrairement à l’impression donnée de prime abord par son intitulé, le texte vise non seulement à créer une allocation journalière d'accompagnement - c'est bien l’objet principal -, mais également à améliorer le cadre juridique du congé d'accompagnement. Créé par la loi du 9 juin 1999, ce dispositif constituait déjà, en théorie, un progrès notable vers la mise en place d’un droit de l’accompagnement digne de ce nom. Encore fallait-il qu’il fût utilisé, ce qui n’est aujourd’hui pas le cas. Comment l’expliquer ?

Deux raisons ont pu être invoquées. D’une part, le régime juridique du congé d'accompagnement était très perfectible. D’autre part, il n’était pas rémunéré. Or, la proposition de loi intervient opportunément à ces deux niveaux. Mais si elle améliore de manière très satisfaisante le régime du congé d'accompagnement, elle ne crée l'allocation correspondante qu'a minima.

Effectivement, ce texte apporte des améliorations notables au congé d’accompagnement, en en élargissant le bénéfice aux frères et sœurs, en unifiant sa dénomination et en permettant son fractionnement.

À partir de ces améliorations, déjà importantes, notre commission des affaires sociales, sous la houlette de son rapporteur, Gilbert Barbier, a effectué un excellent travail pour aller encore bien plus loin. En effet, l’une des principales incohérences du dispositif mis en place était qu’il maintenait des différences de traitement injustifiées entre les salariés et les fonctionnaires, au détriment de ces derniers. Notre commission a donc considérablement perfectionné ce texte en harmonisant les deux régimes, plus précisément en étendant aux fonctionnaires le bénéfice du régime, plus protecteur, des salariés.

D’abord, la commission a adopté une définition identique du fait générateur du congé, l’état de santé du proche à accompagner, élargissant ainsi celle qui était prise en compte dans la fonction publique jusque-là. Ensuite, elle a également octroyé aux fonctionnaires le droit de renouveler une fois ce congé. Enfin, elle leur a conféré la possibilité de le fractionner.

Le second apport de la commission n’est pas moins remarquable. À ses yeux, l’une des raisons de la méconnaissance du congé d’accompagnement résidait dans le flou de la couverture sociale de ses bénéficiaires. La commission l’a sécurisée pour remédier à cette difficulté.

Une fois résolue la question du toilettage du cadre juridique du congé d'accompagnement, l’objet principal du présent texte est évidemment la création de l’allocation correspondante. Celle-ci répond à la principale critique émise à l’encontre du dispositif jusqu’ici en vigueur. L’absence de rémunération du congé d’accompagnement explique, on le comprend aisément, que nombre de ses bénéficiaires potentiels ne pouvaient se permettre d’en invoquer le bénéfice, ou étaient contraints de recourir à un contournement regrettable. Ce n’est un secret pour personne, il arrive très souvent que, pour accompagner une personne en fin de vie, ses proches demandent à leur médecin un arrêt maladie. Ce dernier peut difficilement être refusé à ces personnes, non seulement pour des raisons morales, mais aussi parce que la peine engendrée par ces situations peut parfaitement le justifier.

Dans ces conditions, l’instauration d’une allocation d’accompagnement s’imposait. Sa création est donc incontestablement un immense progrès, d’autant plus qu’elle sera, dans une certaine mesure, découplée du congé d'accompagnement. En effet, au-delà de ses seuls bénéficiaires, elle pourra également être versée aux personnes, ni salariés ni fonctionnaires, justifiant avoir suspendu toute activité professionnelle.

En revanche, il s’agit là de la seule largesse dans la définition du champ des bénéficiaires de l’allocation prévu.

En effet, et c'est là que le bât blesse, ce champ est très étroitement circonscrit. Évidemment, en raison de l’article 40 de la Constitution, notre commission n’a pas eu la même latitude d’intervention que pour le volet « congé » : elle n’a tout simplement rien pu faire ! Au final, le champ des bénéficiaires de la nouvelle allocation est très strictement borné. Seules des raisons comptables justifient ces limitations.

Ainsi, cette allocation sera seulement accordée pour des accompagnements à domicile. L’Assemblée nationale a heureusement atténué cette restriction majeure en permettant le maintien du versement de l’allocation durant les jours éventuels d’hospitalisation d’une personne accompagnée à domicile.

Mais, sur le plan des principes, en quoi les personnes hospitalisées auraient-elles moins besoin d'un accompagnement que les autres ? Quelle absurdité ce serait de le croire ! Une nouvelle fois, seul le coût de la mesure peut justifier le refus de versement de l’allocation dans cette hypothèse.

Il existe une autre limitation de taille, temporelle cette fois, puisque le versement de l’allocation ne pourra pas dépasser trois semaines. Or, quiconque a été confronté à ces situations le sait bien, le temps d’accompagnement peut être largement supérieur. Une fois encore, seules des raisons comptables expliquent cette limite.

Compte tenu de ces paramètres, le coût prévisionnel de la mesure apparaît évidemment raisonnable. In fine, il s’agit d’une bonne réforme, mais encore a minima.

Elle représente toutefois un important progrès, et nous ne pouvons que la soutenir tout en la considérant, je le répète, comme un jalon.

Permettez-moi une dernière question, madame la ministre. Disposez-vous d’une simulation du coût d'une allocation universelle d'accompagnement ? Une telle information sera naturellement primordiale pour achever le travail aujourd'hui amorcé.

En conclusion, il me reste à féliciter notre commission des affaires sociales, en particulier son rapporteur, Gilbert Barbier, et notre présidente, Muguette Dini, pour l’excellence de leur travail..)

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