Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 19 décembre 2008 à 15h10
Loi de finances rectificative pour 2008 — Vote sur l'ensemble

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, nous avons tous été mis à rude épreuve en cette fin d’année : ce projet de loi de finances rectificative a été une sorte de fourre-tout, d’inventaire à la Prévert, dont l’examen n’a pu être conduit dans les meilleures conditions d’efficacité, comme on a encore pu le voir tout à l’heure.

S’il fallait trouver quelques bonnes raisons de ne pas voter en faveur de l’adoption de ce projet de loi de finances rectificative pour 2008, il suffirait évidemment de se pencher sur la situation désastreuse des comptes publics que recouvre ce texte.

Le désastre s’amplifiera encore en 2009, eu égard à ce qui a été décidé, à la dernière minute, lors de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2009.

Ce matin, le conseil des ministres s’est réuni pour débattre du contenu du premier collectif budgétaire portant sur la loi de finances initiale de 2009. C’est à bon droit que je dis qu’il s’agit du premier texte de cet ordre, puisque nous avons appris par voie de presse, cet après-midi même, que Mme Lagarde, dont nous avons regretté l’absence durant nos travaux, avait affirmé, à la sortie du conseil des ministres, que « s’il faut faire plus, il faudra faire plus » !

Il faudra faire plus, en effet, puisque, pour le moment, ce sont les « moins » qui s’accumulent !

Ainsi, l’INSEE vient d’annoncer que le produit intérieur brut devrait enregistrer une régression de 0, 8 % au dernier trimestre de 2008 et que le mouvement de récession, confirmé d’ailleurs par le ralentissement de la progression des prix, devrait se prolonger au cours du premier semestre de 2009, avec un taux de croissance négatif de 0, 4 %.

Lorsque nous avons proposé, tout à l’heure, d’agir plus rapidement pour soutenir le pouvoir d’achat, vous ne nous avez pas écoutés, vous en tenant à ce que vous aviez décidé, comme si vous n’aviez pas connaissance des chiffres que je viens de citer.

Le plan de relance ne réussirait donc, pour l’heure, qu’à atténuer l’ampleur de la récession qui frappe l’ensemble de l’activité économique.

Malgré la loi TEPA, malgré les multiples dispositions favorables aux entreprises que vous avez prises depuis le printemps 2007, le processus de liquidation d’emplois continue d’être à l’œuvre dans notre pays, affectant tous les domaines d’activité, depuis les secteurs industriels, qui emploient toujours moins de personnes, aux activités de services.

L’emploi intérimaire a été le premier touché, et nous avons assisté partout à de véritables plans sociaux silencieux.

L’année 2008 est celle de la crise pour le secteur automobile, celle de la chute des mises en chantier dans le secteur du bâtiment, celle où Salomon a fermé sa dernière usine de fabrication de skis en France, celle où Amora a annoncé son départ de Dijon, celle où le groupe Mittal Steel s’est libéré de ses engagements envers l’État en mettant en place un vaste plan de restructuration !

Comment le projet de loi de finances rectificative a-t-il pris en compte cette dégradation de la situation sur les fronts de l’emploi et du pouvoir d’achat, afin d’y porter remède ?

Le présent collectif budgétaire comprend de très nombreuses dispositions de soutien aux entreprises, mais aucune exigence en matière de contreparties, et donc de retour vers l’emploi.

Au hasard des articles, on accorde ainsi généreusement aux entreprises 3, 8 milliards de créances en crédit d’impôt recherche, 1, 8 milliard d’euros d’allégements de taxe professionnelle, 5 milliards d’euros de dégrèvements de TVA, tandis que de nombreuses factures sont subitement soldées à leur profit.

Aucune contrepartie n’est exigée quant à l’usage qui pourra être fait de ces fonds, dont nous craignons qu’ils ne servent à provisionner les plans sociaux qui s’accumulent ou à engraisser les banques, qui continuent de toucher leur rente sur le dos des entreprises de production.

J’ai cité tout à l’heure quelques grandes entreprises mettant en place des plans de licenciements. J’ajouterai à cette liste STMicroelectronics, Hewlett-Packard, FM Logistic, le réseau des Caisses d’épargne, Natixis, Dexia, parmi beaucoup d’autres : ce sont des milliers d’emplois qui sont directement menacés.

La suite ne s’annonce pas réjouissante : la récession qui s’avance met l’emploi en péril dans une multitude de petites et de moyennes entreprises, victimes des choix stratégiques des grands groupes.

Pourtant, c’est le patron de Citroën, M. Gilles Michel, celui-là même qui vient d’organiser un plan social pour l’usine Gomma de Rennes, qui est appelé à exercer les fonctions de directeur général du Fonds stratégique d’investissement.

Cela n’est pas de nature à nous rassurer sur la portée du projet de plan de relance que nous examinerons en janvier, puisque c’est précisément le Fonds stratégique d’investissement qui sera en principe chargé de le préparer !

En l’état, le projet de loi de finances rectificative pour 2008 n’apporte donc pas de réponses aux questions que se posent les Français.

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