Intervention de Thierry Repentin

Réunion du 20 octobre 2008 à 15h00
Logement et lutte contre l'exclusion — Article 10

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin :

Pour ne rien vous cacher, madame la ministre, la lecture de l’article 10 a beaucoup surpris les élus locaux que nous sommes : au regard du droit de l’urbanisme, il apparaît comme une incongruité ou, pour reprendre un adjectif présidentiel, comme quelque peu « abracadabrantesque ».

Si cet article était voté en l’état, il permettrait en effet à tout propriétaire d’un logement ou d’un immeuble de s’affranchir des dispositions d’urbanisme dans les PLU pendant les deux ans suivant la parution de la loi que nous examinons aujourd'hui !

Le I ouvre ainsi aux propriétaires la possibilité d’agrandir leurs logements dans la limite de 20 % de plus que les limites fixées par le PLU, ce qui revient à leur permettre de faire fi des règles d’urbanisme en matière tant de gabarit que de hauteur, d’emprise au sol et de coefficient d’occupation au sol, tous points clairement évoqués dans le texte.

Je vous laisse le soin d’imaginer, madame la ministre, les difficultés auxquelles seront de ce fait confrontés les maires, notamment ceux qui ont introduit dans leurs documents d’urbanisme des dispositions pour laisser, à l’issue de leur mandat, des communes à l’urbanisme harmonieux.

Cette dérogation aux règlements locaux d’urbanisme serait ouverte pendant trois ans.

Les communes pourront délibérer pour exclure certaines zones de cette disposition, apparemment automatique, au seul motif de la protection du patrimoine, notamment, si j’ai bonne mémoire, quand existera une ZPPAUP, ou zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager.

Ce texte concerne tous les propriétaires.

Les propriétaires de maisons individuelles pourront, par exemple, ajouter une pièce à leur logement ou rehausser leur maison, ce qui ne résoudra pas le manque quantitatif de logements.

Les propriétaires d’immeubles, eux, pourront éventuellement rajouter un étage à leurs constructions : 20% de cinq étages, cela fait bien un étage ! C’est peut-être le retour de la fameuse idée de l’étage supplémentaire évoquée au lendemain du congrès HLM de septembre 2007…

Cette proposition, madame la ministre, pourrait en outre poser divers problèmes.

Comment gérer les insatisfaits parmi ceux qui se seront récemment vu opposer un refus récent de permis de construire du fait du COS ?

En cas de conflits potentiels de voisinage, qui sera en première ligne si ce n’est le maire ?

L’article 10 récuse les principes de la décentralisation et je ne suis pas même certain qu’il soit très constitutionnel. En tout état de cause, si cet article était rédigé de la sorte, le Conseil constitutionnel aurait à vérifier que l’article 72 de la Constitution, qui garantit la libre administration des collectivités locales, n’est pas enfreint.

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