Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du ministère de l'écologie et du développement durable s'élèvent à 825, 25 millions d'euros en 2005, en baisse de 3, 2 % par rapport à 2004 si l'on neutralise les transferts entre sections budgétaires.
Il est éclairant de mettre en perspective ces crédits, en les rapprochant de l'effort global des ministères en faveur de l'environnement. Celui-ci baissera en 2005 par rapport à 2004 puisqu'il passera de 3, 48 milliards d'euros à 2, 96 milliards d'euros.
Notre collègue Fabienne Keller, rapporteur spécial - que je supplée ce matin puisque, avec nos collègues du Bas-Rhin, elle a pris momentanément congé du Sénat -, souhaitait en particulier souligner la diminution des crédits consacrés à l'environnement par le ministère de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer. Cette diminution résulte notamment de la très forte baisse des subventions d'investissement aux transports urbains et interurbains : 145, 77 millions d'euros en 2005 contre 516, 37 millions d'euros en 2004.
Cet éclairage permet de mettre en évidence la dimension interministérielle de l'environnement, qui a fait l'objet de nombreux débats devant la commission des finances.
Toutefois, la simple présentation des crédits inscrits au « bleu » pour 2005 rend mal compte de la réalité budgétaire du ministère, et l'on peut dire, monsieur le ministre, que votre projet de budget soulève un problème de sincérité budgétaire. Mais je veux bien reconnaître que votre tâche n'est pas aisée.
Le budget pour 2004 du ministère de l'écologie et du développement durable ne peut en effet être appréhendé sans le fonds de concours de 210 millions d'euros versé par quatre agences de l'eau, sur lesquels 135 millions d'euros sont venus abonder les crédits de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME.
En outre, alors qu'il avait été annoncé l'an dernier que ce fonds de concours serait constitué uniquement de crédits de paiement, je remarque que 20 millions d'euros ont été inscrits en autorisations de programmes et crédits de paiement afin de contribuer au financement des travaux de lutte contre les inondations dans le Rhône. Je voudrais, monsieur le ministre, obtenir une explication sur ce point.
Si ce prélèvement de 210 millions d'euros sur les agences de l'eau pouvait se justifier, dans la mesure où certaines agences disposaient d'une abondante trésorerie, le mécanisme avait été critiqué par notre collègue Philippe Adnot, alors rapporteur spécial, qui remarquait en particulier qu'il s'agissait d'une réponse conjoncturelle au problème de financement de l'ADEME.
Ce constat amène à s'interroger sur la manière de comparer les crédits du ministère de l'écologie et du développement durable entre 2004 et 2005.
En effet, si les crédits baissent de 3, 6 % en apparence si l'on s'en tient au seul « bleu », ils baissent de 22, 6 % par rapport aux moyens résultant en 2004 des ouvertures en loi de finances initiale et des moyens provenant du fonds de concours versé par les agences de l'eau.
Cette vision est toutefois faussée dans la mesure où vous aviez annoncé, monsieur le ministre, que 141 millions d'euros seraient inscrits dans le projet de loi de finances rectificative pour 2004, afin de compléter les moyens dont disposera votre ministère en 2005 pour mener ses politiques. En particulier, vous indiquiez que 130 millions d'euros viendraient ainsi abonder les crédits de l'ADEME, qui s'établissent à 63 millions d'euros.
D'après les précisions qui avaient été communiquées à la commission des finances, une partie importante de cette « rallonge » correspondrait à des crédits reportés de 2003 vers 2004, mais qui ont ensuite été gelés.
Le texte du collectif budgétaire nous est depuis lors parvenu, et les données qu'il comporte sont légèrement différentes.
Ainsi, il apparaît que 131, 8 millions d'euros seront ouverts en crédits de paiement, tandis que les annulations atteindront 111, 8 millions d'euros, ce qui signifie que les ouvertures nettes de crédits au titre de l'écologie et du développement durable s'établiront à 20 millions d'euros. II nous a par ailleurs été indiqué que certains crédits jusqu'à présent gelés seraient également dégelés.
Compte tenu de ces données, si l'on prend en compte les 131, 8 millions d'euros d'ouvertures inscrits en collectif, le budget du ministère pour 2005 pourrait être analysé de deux manières : d'une part, une augmentation significative des crédits par rapport au seul « bleu », puisque les crédits augmenteraient ainsi de 16 %, pour s'élever à environ 957 millions d'euros ; d'autre part, une diminution atténuée mais réelle des crédits, d'environ 10, 2 %, par rapport aux moyens dont a bénéficié le ministère en 2004 grâce au concours exceptionnel des agences de l'eau.
Je voudrais rappeler, monsieur le ministre, que le Parlement se prononce sur les crédits présentés dans le projet de loi de finances pour l'année à venir, et l'on ne peut que constater qu'ils ne reflètent pas la situation réelle du ministère de l'écologie et du développement durable en 2005. Même si vous aviez auparavant annoncé l'opération qui serait proposée au Parlement, la commission des finances regrette cette situation.
En outre, la question d'un mode de financement pérenne de l'ADEME reste posée. Par deux fois, celle-ci aura été financée par des moyens de court terme. Il paraît essentiel que les dotations du ministère de l'écologie et du développement durable soient à l'avenir « rebasées », pour que le Parlement ait enfin une vision complète de ce budget.
Sous réserve de ces remarques, les priorités définies, dans le cadre d'un budget contraint, sont satisfaisantes.
La volonté de rénover la politique de l'eau, grâce à un décroisement des financements entre l'Etat et les agences de l'eau est en effet souhaitable et avait été approuvée par la commission des finances. Le projet de loi sur l'eau, qui devrait être présenté en conseil des ministres d'ici à la fin de l'année, devrait permettre de clarifier encore le système de financement de la politique de l'eau et son système d'acteurs.
Par ailleurs, l'effort mené en matière de prévention des dommages liés aux inondations, notamment la création de 10 postes dans les services de prévision des crues, va dans le bon sens, de même que l'effort mené en faveur de l'inspection des installations classées.
Même si le nombre total des effectifs du ministère croît de nouveau en 2005, pour s'établir à 3 650 personnes, on note un effort de maîtrise des dépenses de personnel et des moyens de fonctionnement du ministère. En outre, l'essentiel de l'augmentation des effectifs s'explique par la transformation de l'Institut français de l'environnement, l'IFEN, en service de compétence nationale.
Je voudrais toutefois obtenir des précisions sur les modifications qui ont été apportées par le Gouvernement, en seconde délibération, lors de l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale.
Cinq millions d'euros ont été transférés de la politique de la nature vers la politique de l'eau. Monsieur le ministre, quelles en sont les justifications et quelles en seront les conséquences sur les politiques menées ?
Par ailleurs, un poste de secrétaire général du ministère a été créé, mais aucun crédit supplémentaire n'a été accordé à ce titre, ce qui suppose des redéploiements. Quelle est l'utilité de ce secrétaire général ?
Alors que votre commission avait souvent observé que le ministère de l'écologie et du développement durable ne consommait pas ses crédits, elle constate aujourd'hui que le taux de consommation s'améliore. Le ministère prévoit de dépenser l'an prochain 990 millions d'euros, ce qui est bien supérieur aux crédits inscrits dans son projet de budget et nous renvoie au problème de sincérité que j'ai déjà évoqué.
Je voudrais maintenant faire le point sur la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.
Je vous renvoie au rapport spécial pour la présentation de la structure budgétaire retenue pour l'écologie et le développement durable, afin de me concentrer sur quelques observations.
Les deux programmes thématiques figurant au sein de la mission « écologie et développement durable » sont censés représenter les deux grands domaines d'action du ministère : la prévention des risques et la lutte contre les pollutions, d'une part ; la gestion des milieux, d'autre part.
Cette distinction paraît assez cohérente et a été défendue par le ministère. Celui-ci nous a indiqué que cette structure prenait en compte le caractère transversal des politiques menées, sans s'arrêter aux limites administratives actuelles, ce que l'on doit saluer.
La principale difficulté qui pourrait en résulter concerne la politique de l'eau, qui se trouve « à cheval » sur les deux programmes.
Il semble, monsieur le ministre, que vous réfléchissiez actuellement à une évolution de cette structure budgétaire et, en particulier, à la création d'un programme dédié à la politique de l'eau.
La commission des finances a noté que le directeur de l'eau est, actuellement, le seul directeur du ministère à ne pas être responsable de programme, ce qui peut susciter quelque crainte de voir les crédits de l'eau être considérés comme « moins prioritaires », alors que la LOLF permet la fongibilité des crédits au sein des programmes.
Au-delà des questions strictement administratives, d'organisation interne du ministère, est également avancée l'idée selon laquelle la direction de l'eau serait moins à même de s'imposer face aux agences de l'eau si elle ne disposait pas d'un programme clairement identifié.
Toutefois, je voudrais souligner ici que la maquette actuelle, qui est le fruit des réflexions du ministère et qui a fait l'objet de nombreux arbitrages, n'a pas encore été testée. Il me semble que sa remise en cause éventuelle ne saurait être envisagée dans la précipitation, ni en fonction de critères uniquement fondés sur la structure administrative actuelle du ministère de l'écologie et du développement durable.