Intervention de Gilles de Robien

Réunion du 10 décembre 2004 à 15h15
Loi de finances pour 2005 — Iii. - transports et sécurité routière

Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer :

Monsieur Miquel, la décentralisation consiste à rapprocher les décisions locales des usagers.

Le Gouvernement a engagé la phase de consultation des départements sur la consistance du futur réseau routier national ; à l'issue du délai de trois mois prévu par la loi, les avis seront émis, avis que le Gouvernement prendra ensuite en compte pour définir le réseau national par décret ; enfin, s'engagera la phase du transfert proprement dit, qui devrait prendre effet au 1er janvier 2006.

Quant au principe des financements, il n'est pas moins simple : l'Etat ne finance plus les routes départementales et les départements ne financent plus les routes nationales ; c'est ce qu'on appelle le décroisement. Les simulations que nous avons effectuées montrent qu'avec cette méthode, en prenant en compte la TVA, la situation des départements est globalement équilibrée. S'il y a lieu, nous procéderons, en toute équité, à des ajustements.

Alain Lambert a posé une question très importante sur l'AFITF.

Cette agence est la réponse au problème le plus grave auquel j'ai été confronté lorsque j'ai pris mes fonctions : 15 milliards d'infrastructures annoncées, mais non financées. Comment y faire face dans une situation budgétaire en très grande difficulté ?

Nous avons eu des débats très riches au cours de l'année 2003, qui ont donné l'occasion de formuler une série d'hypothèses, toutes plus intéressantes les unes que les autres. Le Parlement s'est exprimé, notamment le Sénat, en faveur d'une politique d'équipement toujours ambitieuse, dans une Europe qui s'élargit, même si certains pouvaient avoir des avis différents.

En tout cas, ces débats ont largement inspiré la décision du Gouvernement qui a été prise lors du CIADT du 18 décembre 2003 : la création de l'AFITF.

Celle-ci bénéficiera de ressources affectées, directement issues des autoroutes. Cela signifie le transport finance le transport ; on peut même dire que le transport routier finance l'ensemble des transports.

La mission de l'AFITF consiste à apporter la part de l'Etat dans le financement des grands projets d'infrastructures de transport.

L'Agence est maintenant créée et sera opérationnelle dès le début de l'année 2005, le décret d'application ayant été publié le 1er décembre dernier.

Il s'agit d'un établissement public, placé sous la tutelle de mon ministère. Toutefois, l'AFITF reste conçue comme un outil collectif de la politique des transports.

Elle sera dotée d'un conseil d'administration paritaire, composé pour moitié de représentants de l'Etat et pour moitié d'élus nationaux et locaux ainsi que de personnalités qualifiées, dont la nomination aura lieu d'ici à la fin du mois de décembre.

L'importance de la contribution de cette agence au développement de notre infrastructure de transport dépendra en partie des décisions du Parlement. En effet, le Gouvernement a tenu à ce que le plafond des emprunts à mobiliser par l'AFITF soit fixé en loi de finances. Ayant la haute main sur le dimensionnement de la dette de l'AFITF, vous tiendrez, mesdames, messieurs les sénateurs, avec les députés, le levier essentiel permettant d'accélérer ou de freiner son rythme d'engagement, c'est-à-dire la cadence de mise en oeuvre de nos projets.

Je répondrai maintenant à trois questions plus précises d'Alain Lambert.

Premièrement, les emprunts de trésorerie obéissent à des règles de gouvernance adaptées, la capacité d'emprunt étant proportionnée à des prévisions de ressources réalistes, qu'il faut évidemment surveiller de manière continue, le trafic pouvant évoluer d'une année sur l'autre.

L'action de l'AFITF par la nature même des opérations à financer s'inscrira nécessairement dans une vision pluriannuelle.

Ainsi que je le disais à l'instant, il reviendra au Parlement, dès l'examen du projet de loi de finances pour 2006, de fixer un plafond d'emprunt. Pour 2005, une dotation exceptionnelle en capital - de 200 millions d'euros, me semble-t-il - permettra à l'agence d'oeuvrer sans recours à l'emprunt.

D'ici à la fin 2005, monsieur le rapporteur spécial, je suis prêt à discuter avec vous de cette question de la gouvernance de l'AFITF et de ses modalités.

Deuxièmement, s'agissant de la nature de la dette, elle est bien « maastrichtienne » et sera comptabilisée comme dette publique.

Troisièmement, l'article 6 du décret portant statut de l'AFITF confie à l'Agence France Trésor la réalisation et le suivi des opérations d'emprunt de l'établissement.

En 2005, l'AFITF bénéficiera de 635 millions d'euros, dont 435 millions d'euros issus des ressources autoroutières, complétés par une dotation en capital de 200 millions d'euros. Ainsi, l'agence n'aura pas besoin d'emprunter la première année.

Ces moyens nouveaux vont nous permettre de poursuivre sans attendre la mise en oeuvre des projets annoncés lors du CIADT du 18 décembre 2003, sachant que nous avons bien évidemment veillé au bon avancement de ces projets en 2004.

Ainsi, pour la première fois, nous sortons de la logique où l'Etat ne pouvait financer, par exemple, qu'une ligne à grande vitesse à la fois. En un an, le Gouvernement a traduit concrètement la décision du CIADT du 18 décembre 2003.

Avec une agence opérationnelle dès 2005, les plus grandes espérances sont permises pour les dix ou vingt prochaines années pour ce qui est de l'équipement de notre pays, nonobstant une gestion rigoureuse.

En ce qui concerne les contrats de plan Etat-région, les CPER, le taux d'avancement à la fin 2003 était d'un peu plus de 45 % pour l'ensemble des ministères, proche de 44 % pour les routes, un peu moins pour le ferroviaire : 27 %. Ce retard s'explique en particulier par un démarrage très lent en 2000 et 2001 - 4, 4 %, puis 5, 6 % -, et la conjoncture n'a pas permis de rattraper ce retard.

A la fin de l'année 2003, les crédits délégués par l'ensemble des ministères portent le taux de mise en oeuvre des crédits d'Etat à 45, 70 %, à comparer avec un taux théorique de 57, 14 %. Fin 2004, selon la programmation projetée par les ministères, le taux de mise en oeuvre des crédits d'Etat devrait atteindre 55 %.

La question de l'avancement des contrats de plan n'est bien évidemment pas une question partisane. En effet, à la fin de l'année 2002, le niveau d'engagement ne s'élevait qu'à 35 % pour un avancement théorique de 42 %, soit déjà la moitié du retard.

Après la mise en place de l'agence, les contrats de plan constituent pour Frédéric de Saint-Sernin et moi-même un sujet majeur, d'autant que ce ministère recouvre, depuis quelques mois, le champ de l'aménagement du territoire.

La première réponse, vous la connaissez : c'est le plan de relance qui vient d'être décidé par M. le Premier ministre sur le volet routier, avec 300 millions d'euros d'autorisations de programme et 150 millions d'euros de crédits de paiement supplémentaires pour 2005. Ces crédits sont inscrits au projet de loi de finances rectificative pour 2004.

Merci, monsieur Miquel, d'avoir évoqué la sécurité routière.

Vous avez évoqué la réduction des crédits, mais je rappelle que la formation à la conduite et à la sécurité routière se traduira par de nouveaux recrutements d'inspecteurs du permis de conduire, avec la création de 65 postes en 2005, en liaison avec le déploiement sur l'ensemble du territoire des nouvelles modalités de l'examen. Cet objectif sera également accompagné d'investissements pour l'installation de centres d'examen dignes de ce nom.

En ce qui concerne la communication, l'augmentation des moyens de la sécurité routière permettra des actions spécifiques en direction des catégories jusqu'alors moins touchées par les campagnes de sensibilisation.

S'agissant du déploiement des radars automatiques, il se poursuivra pour atteindre l'objectif de 1 000 appareils d'ici à la fin de l'année prochaine. A ce jour, plus de 300 radars automatiques sont installés et nous allons nous efforcer de porter ce nombre à 400 à la fin de l'année.

J'ajoute que le premier rapport annuel sur le produit des amendes, notamment celles qui sont liées aux radars automatiques, vous sera remis dans les prochains jours. De cette façon, vous pourrez savoir quelle utilisation sera faite du produit des amendes lorsque ce dernier aura dépassé le coût d'installation des radars automatiques.

Je compléterai mon propos par quelques réponses à des points très précis soulevés par Alain Lambert, qui maîtrise évidemment parfaitement les chiffres, concernant les grands équilibres budgétaires et la LOLF.

D'abord, l'écart entre le taux de la dette de RFF et le taux supporté par l'Etat est évalué à 10 points de base environ, soit 0, 1 %. C'est ce que M. Mariton, député, avait indiqué dans un récent rapport, et je confirme ces chiffres. Dans le cas de la dette de la SNCF, cet écart est de l'ordre de 15 points de base, soit 0, 15 %.

Ensuite, les indicateurs de performance des programmes ne sont pas figés. Ils doivent être consolidés d'ici au projet de loi de finances pour 2006, et il nous faudra encore les améliorer. Vos remarques, monsieur Lambert, nous rappellent les bonnes questions que nous devons nous poser.

Enfin, en ce qui concerne le SAAD, le service annexe d'amortissement de la dette, qui représente 8, 1 milliards d'euros, l'année 2005 sera consacrée à l'analyse de son traitement, qui est fort complexe. J'ai noté votre intérêt pour le sujet et je puis vous assurer que, avec le ministère des finances, nous vous tiendrons régulièrement informé de nos travaux sur ce sujet majeur.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les remarques que je tenais à faire à ce stade du débat. Je laisse le soin à M. Goulard de répondre aux autres questions.

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