Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le CIADT, le Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, du 18 décembre 2003 a décidé l'inscription d'une ligne à grande vitesse, ou LGV, entre Bordeaux et Toulouse sur la carte des infrastructures à long terme, ainsi que le lancement d'un débat public sur ce projet.
Ce débat public, qui s'achèvera après-demain, le 18 novembre, a permis à chacun de réaffirmer son attachement au développement du rail. Il s'agit d'un mode de déplacement moins consommateur d'énergie, moins polluant et plus sûr que la route.
Mais, surtout, au cours de ces débats, la pertinence du projet ferroviaire a d'abord été mise en perspective avec la diminution de la circulation routière, notamment des poids lourds, qu'il permettra.
Or, en Gironde et, plus largement, en Aquitaine, le principal enjeu réside dans les considérables flux de marchandises qui transitent sur la façade atlantique, puisque 19 000 poids lourds y ont été dénombrés en 2002 et que 28 500 devraient y circuler en 2010.
La ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse n'apporte aucune solution à ce problème. Elle a juste pour ambition de réduire le temps de déplacement ferroviaire entre Paris et Toulouse à trois heures, au lieu de cinq heures actuellement, et ce alors même que l'achèvement de la ligne à grande vitesse Bordeaux-Paris reste toujours à réaliser, avec deux phases prévues en continuité : Bordeaux-Tours, puis Angoulême-Tours.
Par ailleurs, en avril 2004, la Commission européenne a inscrit une ligne à grande vitesse Sud-Europe-Atlantique dans les trente grands projets prioritaires de réseaux transeuropéens de transport.
L'axe retenu, Bordeaux-Dax-Vitoria-Madrid, permettrait de libérer un corridor atlantique de fret ferroviaire.
Une programmation précise est d'ores et déjà envisagée : Tours-Bordeaux à l'horizon 2015, Vitoria-Dax pour 2010 et Dax-Bordeaux pour 2020. Un tunnel de ferroutage de grande capacité serait percé sous les Pyrénées à l'horizon 2020.
Le projet d'une ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse ne s'inscrit pas dans cette perspective de schémas nationaux et européens de transports ; il ne présente aucun lien avec les efforts d'infrastructures ferroviaires en cours de réalisation en Espagne.
Les considérations financières sont également à prendre en compte puisqu'il semblerait que l'Europe s'apprête à apporter son concours financier aux sections transfrontalières des projets, à hauteur de 50 % des investissements.
Par ailleurs, l'État français ne pourra pas financer tous les projets.
La chambre d'agriculture de la Gironde, le conseil économique et social d'Aquitaine, le parc naturel régional des landes de Gascogne, l'Association régionale de défense des forêts contre l'incendie d'Aquitaine, le syndicat des sylviculteurs, la SEPANSO, la fédération des Sociétés pour l'étude, la protection et l'aménagement de la nature dans le Sud-Ouest, la Fédération départementale de chasse et de nombreuses associations locales de citoyens sont opposés à ce projet.
De même, l'Association des maires du département de la Gironde et le conseil général, présidé par M. Philippe Madrelle, qui siège à côté de moi, ont adopté, à l'unanimité, une motion contre ce projet. Les élus aquitains et le conseil régional également ont adopté à la majorité une motion allant dans le même sens.
Monsieur le ministre, la priorité qui s'affirme à tous les niveaux est celle de l'axe atlantique vers l'Espagne.
Allez-vous tenir compte de ces éléments et accorder la programmation ferroviaire française à la priorité atlantique européenne ?
Allez-vous saisir l'opportunité d'un transfert partiel vers le rail du trafic des poids lourds entre la péninsule ibérique et l'Europe du Nord et apporter ainsi une réponse indispensable à l'insécurité routière en Aquitaine, ainsi qu'à la congestion de l'agglomération bordelaise et de la RN10 vers la région Poitou-Charentes ?