Monsieur le ministre, la France compte aujourd'hui 2 525 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre - communautés urbaines, communautés d'agglomération et communautés de communes - regroupant ainsi 88 % de nos communes et 82 % de la population. Cette construction intercommunale s'est effectuée sur la base du volontariat et a été aidée par de fortes incitations financières de l'État, ce qui explique pour une bonne part le succès quantitatif du processus.
Un récent sondage réalisé par l'IFOP à la demande de l'Assemblée des communautés de France révèle une réelle adhésion des Français à l'intercommunalité. En effet, 88 % de nos concitoyens pensent que l'intercommunalité permet de mieux mutualiser les investissements et 64 % d'entre eux estiment qu'elle renforce la solidarité financière entre les communes.
Néanmoins, la pratique de l'intercommunalité a récemment fait l'objet, et à plusieurs reprises, d'une évaluation assez préoccupante de la part de la Cour des comptes ou lors des récentes Assises des petites villes de France.
Si l'intercommunalité répond bien à un besoin réel des collectivités territoriales, force est de constater une grande diversité dans sa mise en oeuvre. Certains regroupements ont en effet des compétences et des moyens plus ou moins limités alors que d'autres ont des capacités d'intervention très étendues.
Cela conduit à une forte hétérogénéité de situations qui se retrouve également à l'échelle des périmètres : si le territoire de la majorité des communautés tend à se rapprocher des territoires vécus par les habitants en termes de bassin de vie ou de bassin d'emploi, des considérations politiques ou d'opportunité ont parfois pu conduire à des regroupements de faible taille qui ne sont pas toujours cohérents.
D'autres dérives ont pu être constatées. Comme vous l'avez à juste titre souligné, monsieur le ministre, il nous faut aujourd'hui tirer la leçon des succès et des lacunes de l'intercommunalité.
Permettez-moi donc de relayer auprès de vous l'inquiétude d'un certain nombre de mes collègues maires et présidents de communautés de communes ou d'agglomération à la lecture des récents rapports qui démontrent à quel point la pratique intercommunale connaît des dysfonctionnements auxquels il nous faut remédier. Je n'en citerai pour exemple que trois.
Tout d'abord, je pense aux périmètres incohérents ou parfois, comme je l'ai vécu dans mon département du Val-de-Marne, aux périmètres imposés, ce qui crée de nombreux dysfonctionnements pendant plusieurs années au sein même de l'intercommunalité.
Ensuite, il existe des économies d'échelle insuffisantes dues à l'absence de rationalisation des effectifs. De nombreuses intercommunalités emploient, en effet, d'importants effectifs sans que ceux-ci aient pu être réduits dans les communes d'origine.
Enfin, il y a l'absence de transparence démocratique. On constate également dans ce domaine des transferts de compétences très importants des communes vers les communautés sans que les procédures démocratiques et l'expression démocratique de l'opposition aient toujours pu y trouver leur compte.
On le voit, le système comporte des failles. C'est pourquoi il doit pouvoir être perfectionné. L'expérience et le succès de nombreuses communautés de communes et d'agglomération doivent permettre d'y parvenir.
En s'appuyant sur le patrimoine que représentent nos communes françaises, l'intercommunalité a permis d'apporter une valeur ajoutée importante à l'action municipale tant pour les communes rurales, qui ont pu y trouver une aide précieuse au développement de leur service public, que pour les communes urbaines, qui ont pu rationaliser leurs investissements.
Comme le propose le Conseil économique et social, peut-être faut-il maintenant donner une légitimité renouvelée à cette dynamique. Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer quelles sont vos priorités afin de remédier aux dérives constatées et, surtout, de rassurer les élus déjà engagés dans l'intercommunalité ?