La durée des mandats des futurs élus régionaux et départementaux est du domaine de la loi et le législateur fait ce qu’il veut sans aucune contrainte en la matière : c’est l’unique objet de ce projet de loi.
Reste à savoir quel est le motif de la loi, car c’est un élément essentiel. Je rappelle que, lors de la révision constitutionnelle de 2008, il a été beaucoup insisté sur les motivations de la loi, et en particulier sur ce que l’on a appelé les études d’impact, leur nécessité et désormais leur obligation. Or, ici, le motif de la loi, ce sont des textes à venir, dont on ignore ce qu’ils seront puisqu’ils ne sont pas encore votés.
Mes chers collègues, peut-on régler la durée d’un futur mandat en fonction de textes qui ne sont pas encore votés ? Cela peut être une question constitutionnelle, notamment au regard du statut d’autonomie des collectivités territoriales dans la Constitution et de l’élection de leurs assemblées au suffrage universel direct. Je ne suis pas certain que l’instabilité soit considérée comme une notion parfaitement conforme à la Constitution en ce qui concerne l’avenir des collectivités territoriales : la continuité de l’État, principe constitutionnel, s’applique à l’évidence aux collectivités locales, qui agissent dans de nombreux cas au nom de l’État.
Monsieur le secrétaire d’État, cher Alain Marleix, cher compatriote auvergnat – et j’éprouve une certaine tendresse de ce point de vue –, je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes embarqué dans cette affaire. Il vaudrait mieux laisser les choses en l’état, quitte à tirer plus tard les conséquences des futures lois, en se fondant sur le motif d’intérêt général constitué par le vote d’un nouveau statut des collectivités territoriales et des élus départementaux et régionaux. Le Conseil constitutionnel n’y trouverait alors rien à redire, puisque le motif d’intérêt général serait évident : à partir du moment où le législateur a réformé le régime électoral des assemblées locales, il faut bien en tirer les conséquences sur les mandats et raccourcir s’il le faut les mandats en cours pour installer les nouvelles assemblées.
Mes chers collègues, nous sommes quand même dans une situation absolument incroyable. Je ne sais pas – monsieur le président, vous qui êtes un orfèvre en la matière, peut-être le savez-vous – s’il y a des précédents depuis 1870-1871, c'est-à-dire depuis que la République est la République, mais ce débat m’évoque la formule latine : Ave Caesar, morituri te salutant.