Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 1er décembre 2006 à 9h30
Loi de finances pour 2007 — Travail et emploi

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Les articles 57 et 57 bis du projet de loi tendent à prolonger et à augmenter l'aide aux hôtels, cafés et restaurants par décret, ce qui représenterait une dépense supplémentaire de 130 millions d'euros.

En tout, sur quatre ans, ce sont plus de 3 milliards d'euros qui auront été accordés à ce secteur. Cette promesse présidentielle dont tout le monde savait, depuis le départ, qu'elle ne pourrait être tenue aura coûté bien cher.

Quant aux engagements en termes d'emplois dans ce secteur, on peut s'interroger sur leur réalisation à la lecture des chiffres. Les effectifs concernés par l'aide forfaitaire passent de 460 000 emplois en équivalents temps plein en 2006 à 375 000 emplois en équivalents temps plein en 2007.

Est-ce à dire que l'État est en train de financer la réduction et la transformation d'emplois à temps plein en emplois à temps partiel ? C'est, une fois de plus, de précarisation des salariés qu'il est ici question.

Cette mission fait la part belle aux contrats aidés. Vous les critiquiez naguère par dogmatisme idéologique, vous en usez abondamment aujourd'hui. Contrat d'avenir, contrat d'accompagnement vers l'emploi, contrats d'insertion dans la vie active, contrats jeunes en entreprise, contrats initiatives emplois : c'est un empilement de procédures à la postérité incertaine.

Les perspectives d'accès ou de retour durable à l'emploi des publics concernés ne font l'objet d'aucune évaluation.

Or, étant donné le nombre de personnes qui ne figurent plus dans les statistiques du chômage et ont basculé vers le RMI ou l'ASS à la suite de la réforme Fillon de 2005, la question de l'insertion durable dans la vie active de ce public n'est pas accessoire.

Quand ce n'est pas à la fragilisation des salariés que s'attelle la mission « Travail et emploi », c'est à la marchandisation de la difficulté sociale qu'elle s'attaque.

L'abandon du monopole de placement de l'ANPE visait à la mettre en concurrence, pour des publics dits « faciles », avec des cabinets privés rémunérés sur les fonds de l'UNEDIC.

Dans le secteur privé, le coût d'un placement se situe en moyenne entre 2 300 euros et 4 000 euros. Or les dernières évaluations montrent que, pour le même type de public, l'ANPE est plus efficace, avec un coût nettement moindre : de 690 euros à 760 euros par demandeur d'emploi.

Examinons votre bilan : aujourd'hui, plus de 50 % des chômeurs ne sont plus indemnisés. Le nombre des contrats aidés explose. La création d'emploi n'est pas à la hauteur des besoins et la nature des emplois créés participe à la multiplication des salariés pauvres. L'écart entre les salariés les plus riches et les plus pauvres ne cesse de croître. Le taux d'endettement des ménages atteint des records et 30 % des Français gagnent moins de 1, 3 fois le SMIC, soit moins de 1 300 euros nets par mois, et les charges - loyer, transport, santé ou dépenses courantes - ne cessent d'augmenter.

Tandis que vous précarisez le travail et fragilisez les salariés, vous n'offrez aucune garantie pour la sécurisation des parcours professionnels, pas plus que vous ne faites de propositions sur la revalorisation des salaires et des carrières.

Jean-Michel Dumay, dans Le Monde du 25 novembre 2006, rapprochait cette situation de la célèbre chanson de Charles Trenet et de Jean Sablon : Vous qui passez sans me voir.

Devant votre déni des difficultés qui plombent le quotidien d'une majeure partie des Français, la conclusion ironique qu'il donnait à sa chronique en référence aux prochaines élections électorales a valeur d'oracle :

« Vous qui passez sans me voir

« Sans me donner d'espoir

« Adieu... Bonsoir. »

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