Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, depuis plusieurs années, les crédits de la mission « Ville et logement » connaissent un certain nombre d'évolutions pour le moins contrastées, d'autant que le champ des interventions qu'elle recouvre est lui-même soumis à des mouvements tout aussi sensibles.
Si nous prenons ce projet de budget à la lettre et que nous nous en tenons donc au montant des crédits engagés sur l'ensemble de la mission, le paradoxe est flagrant : les autorisations d'engagement et les crédits de paiement diminuent en effet respectivement de 1, 03 % et de 7, 32 %.
Une lecture programme par programme permet de constater que cette baisse globale trouve son origine dans la réduction des crédits dévolus au financement des aides personnelles au logement, pour à peu près 200 millions d'euros, et des crédits du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », pour environ 150 millions d'euros. Un redéploiement de crédits est mis en oeuvre en faveur du programme « Rénovation urbaine », qui voit sa dotation augmenter de 150 millions d'euros.
Une conclusion rapide semble donc s'imposer : hors du PNRU, point de salut ! Il semble en tout cas très difficile de développer réellement l'offre de logement en dehors des quartiers considérés comme prioritaires au titre de la politique de la ville.
On pourrait se féliciter de l'effort particulier que l'État semble accomplir, s'il ne s'agissait, en réalité, que de respecter la norme même du programme national de rénovation urbaine, dont les financements sont, pour une bonne part, gagés sur des ressources extrabudgétaires. En effet, comment ne pas pointer qu'une grande part des moyens de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine procèdent du prélèvement autoritaire de ressources sur les collecteurs du 1 % logement, sur les fonds de la Caisse des dépôts et consignations, ou même, comme une discussion récente l'a encore montré, sur les sociétés coopératives d'accession sociale à la propriété ?
En outre, au sein même du présent projet de loi de finances, le Gouvernement ajuste à la baisse les conditions d'attribution des aides personnelles au logement et met l'État en situation de se débarrasser d'une partie du financement du Fonds national d'aide au logement. Il n'est qu'à lire les articles 23 et 62 pour le constater, et c'est au travers des « économies » ainsi réalisées qu'il dégage les moyens pour financer la rénovation urbaine.
Loin de nous l'idée de ne pas considérer positivement l'importance de la politique de rénovation urbaine, mais force est de constater que le « bricolage » budgétaire et fiscal qui préside à son financement ne peut qu'inquiéter tous ceux qui, notamment au niveau local, sont attachés à la réussite de la politique de la ville et qui sont désireux de répondre aux graves problèmes de logement de nos concitoyens.
D'autant que, dans la documentation, à côté de la dépense budgétaire directe que retracent les crédits de la mission « Ville et logement », figure aussi la dépense fiscale associée aux différents programmes, dont le coût budgétaire est de plus en plus important. Pour 2007, l'ensemble de la dépense fiscale de la mission s'élèvera, en effet, à environ 11 249 millions d'euros, à la suite, entre autres, de la réduction des taux de TVA sur les travaux et du coût grandissant des dispositifs incitatifs à l'investissement immobilier, qu'il s'agisse du « Robien » ou du « Borloo populaire ».
Il faut cependant noter, alors même que ce caractère incitatif n'est pas retracé dans le cas qui nous intéresse, que le bleu budgétaire ne précise ni les conséquences financières du dispositif dit des « foncières » ni la globalité des ajustements de fiscalité découlant de l'application du régime des plus-values de cessions de logements.
La simple approche systémique de l'ensemble de la dépense fiscale liée au logement devrait donc intégrer, de notre point de vue, l'ensemble des conséquences du traitement fiscal de l'immobilier d'habitation, puisque tout cela participe de la constitution de l'offre de logement et des tensions qui peuvent apparaître dans ce secteur.
Qu'il s'agisse des modalités d'imposition des plus-values, de l'allégement des droits de mutation ou encore du mode de traitement des revenus fonciers, notamment l'imputation des déficits, bien des dispositions conduisent en réalité à majorer par principe la dépense publique pour le logement. Pour ne donner qu'un seul exemple, la réforme de l'impôt sur le revenu permettra aux contribuables qui se partagent les 17, 3 milliards d'euros de revenus fonciers nets de bénéficier, comme pour tous les autres revenus, de la disparition de l'abattement de 20 % et de son intégration dans le barème de l'impôt sur le revenu. La même observation vaut pour les personnes qui perçoivent les 7 milliards d'euros de revenus imposés sous le régime du micro-foncier.
De fait, la dépense fiscale pour le logement est singulièrement plus importante que la dépense budgétaire directe et présente la caractéristique de s'appuyer, entre autres, sur le relèvement constant du niveau des loyers et sur le développement de la spéculation immobilière, dont les effets sur l'offre de logement sont désastreux.
Nous avons certes vu sortir de terre plus de logements ces derniers temps que lors des exercices budgétaires précédents.