Le moins que l'on puisse dire, à l'examen des dispositions de cet article 62, c'est qu'il participe des différentes « petites astuces » dont ce projet de loi de finances est truffé, en reportant sur d'autres, en l'occurrence les collectivités locales et leurs établissements publics, entre autres, ce qui découle naturellement des obligations budgétaires de l'État.
Il s'agit en effet de faire financer, par relèvement de cotisation, le Fonds national d'aide au logement, qui prend en charge le financement des aides personnelles au logement, par les employeurs de droit public que sont les collectivités territoriales. L'opération budgétaire incriminée s'élève à 131 millions d'euros, si l'on en croit les éléments fournis par les rapports spéciaux.
Dans le même temps, comme nous le savons, l'article 23 dispose qu'une partie du droit de consommation sur le tabac fixé par les articles 575 et 575 A du code général des impôts serait dorénavant affectée au financement du Fonds national d'aide au logement, en lieu et place de la contribution du budget général.
Pour l'État, l'opération est blanche, mais les collectivités territoriales sont sollicitées, ce qui pose une question essentielle : les collectivités territoriales peuvent-elles être tenues pour responsables de la situation de consommation des aides personnelles au logement, dans la mesure où celles-ci ont beaucoup à voir avec l'état des ressources de leurs bénéficiaires, c'est-à-dire la persistance d'un chômage massif, le développement de la précarité du travail et celui du travail insuffisamment rémunéré ?
En vérité, mes chers collègues, si l'on doit accroître quelque peu les moyens du FNAL, on peut aussi trouver la source de ce financement auprès des entreprises du secteur concurrentiel, sans que leur contribution soit spectaculairement relevée. Peut-être pourrait-on en effet, moyennant un taux d'appel de cotisation de 0, 65 % au lieu de 0, 55 %, faire largement le compte pour assurer la fluidité des ressources du fonds.
Mais, évidemment, la question qui nous est posée est aussi l'occasion de revenir sur la réalité de la consommation des crédits des aides personnelles au logement.
Le fonds, comme nul ne l'ignore, est aujourd'hui partagé, quant à son financement, entre les cotisations collectées par les caisses d'allocations familiales et le budget général.
En loi de finances initiale pour 2006, le montant des aides personnelles au logement s'élevait à 5 115 millions d'euros. Le présent budget prévoit une dépense budgétaire directe de 4 911 millions d'euros, soit une révision à la baisse de 200 millions d'euros.
Et ce n'est qu'au travers de « ficelles » diverses que l'on pourra encore tenir l'état de la consommation des crédits.
Entre le gel du barème, la mise en cause de la faculté de reprise des droits, la sollicitation de la trésorerie des sociétés coopératives d'accession à la propriété, l'État se désengage progressivement du financement du Fonds national d'aide au logement.
Pour mémoire, en 2005, c'est-à-dire l'an dernier, l'État a engagé 5 529 millions d'euros dans le financement des aides personnelles au logement. On peut se demander par quel miracle, et en dépit des mesures qui ont été rappelées, les dépenses diminueraient en 2006 et pour quelle raison nous devrions enregistrer la même tendance en 2007.
De fait, plutôt que de nous perdre dans une procédure budgétaire pour le moins discutable, qui participe du grand « bricolage » destiné à masquer la réalité du déficit, nous ferions mieux de nous interroger sur les conditions d'un financement équilibré et pérenne de la nécessaire solidarité en direction des plus modestes de nos compatriotes.