Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 1er décembre 2006 à 15h30
Loi de finances pour 2007 — Article 62

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la ministre, j'interviens en étroite relation avec mes collègues Roger Karoutchi et Philippe Dallier.

À l'évidence, chacun est attentif à la situation financière du FNAL. Mais tous ceux qui participent à des commissions d'aide sociale sur le plan local sont frappés par certains dévoiements des procédures.

En effet, les ressources des foyers les plus modestes sont absorbées par le crédit à la consommation, à la suite d'une sorte d'arbitrage consistant à ne pas prendre en compte les dettes de loyers au motif que c'est le FNAL qui en supportera le coût. Sans doute sera-t-il nécessaire de remettre un peu d'ordre dans le traitement des dettes des foyers.

C'est trop commode pour les prêteurs, qui ont quelquefois un comportement compulsif. Je suis frappé par leur promptitude à octroyer des crédits à la consommation ! Sans vérifier les capacités de remboursement, ils accordent du crédit revolving. C'est ainsi que des particuliers en viennent à consacrer l'intégralité de leurs maigres ressources à rembourser un crédit à la consommation, souvent très onéreux.

Ces facilités conduisent probablement à des arbitrages en matière de consommation, par exemple en faveur du téléphone mobile.

Peut-être faut-il veiller à freiner un peu la consommation ! Il n'est pas certain que la consommation participe à la croissance ; elle concourt bien souvent à un supplément d'importations.

Pour en revenir au FNAL, à la lecture de l'excellent rapport conjoint de Philippe Dallier et Roger Karoutchi, je suis frappé par la complexité des cotisations, dont une partie est plafonnée, l'autre pas, alors que l'on parle constamment de simplifier et de réduire les formalités. Nous sommes là en présence d'un cas caricatural de complexité tout à fait inutile, à laquelle il serait souhaitable de remédier, par voie de décret sans doute.

S'agissant du financement proprement dit, la disposition proposée ne me paraît pas judicieuse pour les collectivités territoriales, que représente le Sénat. Combien de maires sont-ils conscients que, par notre vote, nous risquons d'accroître les frais de personnel de 0, 2 % ?

On demande aux collectivités territoriales d'abonder le FNAL. Bien souvent, d'ailleurs, les conseils généraux participent au financement du fonds départemental d'aide au logement, en complément de ce que peut verser le FNAL. Mais, en l'occurrence, c'est la double peine : les collectivités devront à la fois verser une cotisation sur les salaires et suppléer aux insuffisances du fonds départemental. Je le vis dans mon propre département !

Enfin, permettez-moi de rappeler un principe général. Selon une doctrine définie par la commission des finances, on peut distinguer deux types de financement en matière sociale : des actions relèvent de la solidarité nationale et d'autres d'un régime assurantiel, par exemple les accidents du travail et les cotisations de retraite. Or le financement qui nous est proposé met en cause la solidarité.

Ce n'est pas une bonne manière d'agir, car nous érodons un peu plus la compétitivité du travail. Je pense à tous ceux qui, demain, iront créer des emplois hors du territoire national, notamment les sous-traitants du secteur de l'automobile. C'est ce type de cotisations qui fait que l'emploi marchand s'étiole progressivement.

Pour autant, je conçois qu'il y ait un problème budgétaire. Si le Sénat votait un texte différent de celui qui a été adopté par l'Assemblée nationale, cela nous laisserait le temps, d'ici à la réunion de la commission paritaire, en relation étroite avec le Gouvernement, notamment le ministre délégué au budget, de tenter de trouver les bonnes réponses et d'apaiser les craintes de la direction du budget.

Nous sommes au Sénat et je ne crois pas que nos mandants aient conscience que, si nous votons ce soir cette mesure, ils auront à inscrire demain une dépense sociale correspondant à 0, 2 % des salaires qu'ils versent.

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